242 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Réponse du Président (85) Citoyens, La Convention a décrété la République, le peuple français la veut, et elle existera malgré tous ses ennemis. Les sociétés populaires sont les colonnes de la révolution, elles ne seront point ébranlées ; la Convention périra plutôt que de permettre qu’il leur soit porté aucune atteinte (86). BARÈRE : Je demande que cette adresse et la réponse du président soient insérées au Bulletin. Je tiens le Moniteur, et chacun de nous y lira ces paroles qui montrent la coïncidence des manœuvres de l’aristocratie avec les complots de la perfide Angleterre. Il y a six semaines, dit Sheridan, [dans la chambre des communes] (87) que les ministres sont ouvertement convenus que leur but dans la guerre actuelle, était l’extermination du présent gouvernement à Paris. La nouvelle coalition, ajoute-t-il, est un nouveau signal de guerre pour ne point poser les armes avant que le présent gouvernement français fut détruit, quand même l’Angleterre devrait périr dans la tentative. Le ministre [Pitt] (88) a répondu qu’il était effectivement échappé à M. Jenkinson d’employer l’expression de marcher à Paris; mais que jamais les ministres n’avaient songé à conquérir la France (on rit) ; leur véritable et unique but était la destruction du système jacobin en France. Citoyens, [Le système des Jacobins, continue Barère, c’est la République] (89), les sociétés populaires sont les avant-gardes de la liberté, et le jour où l’on voudrait les dissoudre serait aussi le jour où l’on voudrait dissoudre la Convention nationale (90). [Applaudi] (91). BENTABOLE dit que tous les membres de l’Assemblée sont jaloux de prouver qu’ils veulent soutenir les sociétés populaires : que ceux qui coïncident avec l’étranger, [avec la perfide Angleterre] (92) que les complices de l’étranger sont ceux qui veulent enlever à la Convention la confiance qui lui est due, qui ne veulent point reconnoître la majorité de l’Assemblée. Où en serions-nous, dit-il, si on ne reconnois-soit point cette majorité? (Il est interrompu.) La majorité est excellente, s’écrie -t-on. BENTABOLE propose de déclarer que ceux qui essaieroient de porter atteinte à la Convention nationale... (Il est encore interrompu.) On s’écrie que la déclaration des droits consacre les sociétés populaires. (85) J. Fr., n° 723. Ann. R. F., n° 289 ; J. Perlet, n° 725. Ces trois gazettes indiquent que Moïse Bayle tenait le fauteuil. (86) Bull., 1er jour s.-c. ; Moniteur, XXI, 784 ; Débats, n° 727, 514-515. (87) Débats, n° 727, 515. (88) Débats, n° 727, 515. (89) Débats, n° 727, 515. (90) Moniteur, XXI, 784. Débats, n° 727, 515. (91) Débats, n° 727, 515. Le J. Mont., n° 141 indique des applaudissements nombreux et unanimes. (92) Moniteur, XXI, 784. Les propositions de Barère sont décrétées. BERNARD (des Sablons) demande en outre le renvoi de la pétition au comité de Sûreté générale, vu qu’il y est parlé d’une faction d’Orléans, sur laquelle il est bon que le comité prenne des renseignemens (93). 41 Sur la proposition d’un membre, la Convention nationale accorde un congé de trois décades au représentant du peuple Dartigoeyte, dont la mission est finie, le congé pour cause de maladie (94). 42 La section des Gravilliers [Paris] témoigne toute son indignation de l’assassinat commis sur le représentant du peuple Tallien; Elle ne reconnoit d’autre centre de l’opinion publique que la Convention, demande la garantie de la liberté de presse, témoigne sa joie de voir la justice succéder à la terreur, et invite la Convention à décréter que les assemblées des sections se tiendront comme auparavant les quintidi et les décadi, attendu que trois assemblées par mois ne suffisent pas pour s’instruire et s’éclairer. Insertion au bulletin, et renvoyé au comité de Salut public (95). La section des Gravilliers à la barre. L’orateur : Citoyens-r eprésentans , La section des Gravilliers s’empresse de vous témoigner l’horreur qu’elle a conçue de l’assassinat commis en la personne d’un de vos collègues ; nous venons assurer la Convention nationale : 1°. Que nous ne reconnoissons d’autre centre d’union que les mandataires du peuple, que nous serons toujours prêts à verser notre sang pour conserver le leur et faire exécuter les lois. 2°. Nous demandons la garantie de la liberté de la presse, comme un fanal qui éclaire, fait éviter les écueils, et un réverbère que les malveillans craignent. 3°. Nous vous témoignons la joie que nous avons éprouvée en voyant la justice remplacer la terreur et la barbarie, sans cesser d’em-(93) Débats, n° 727, 515. Moniteur, XXI, 784 ; J. Mont., n° 141 et 143 ; J. Univ., n° 1758 et 1761 ; J. Fr., n° 723 ; Mess. Soir, n° 760; Ann. R. F., n° 289. M.U., XLIII, 1285. Gazette Fr., n° 991. J. Perlet, n° 725 ; Rép., n° 272 ; F. de la Républ., n° 438 ; Ann. Patr., n° 625 ; C. Eg., n° 760 ; J. Paris, n° 626. (94) P. V., XLV, 310. C 318, pl. 1287, p. 6. Décret n° 10 927 de la main de Borie. Rapporteur anonyme selon C* II 20, p. 302. (95) P.-V., XLV, 310. SÉANCE DU 1er JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (MERCREDI 17 SEPTEMBRE 1794) - N° 43 243 ployer les moyens répressifs et la sévérité nécessaire aux circonstances. 4°. Nous invitons la Convention nationale à prendre en considération la nécessité du peuple de s’instruire, de conférer sur ses intérêts et de les traiter ; que trois assemblées par mois ne suffisent pas à leur zèle patriotique et à leur sollicitude civique, et de décréter que les sections de Paris pourront s’assembler comme ci-devant tous les quintidis et les decadis. Tel est le vœu fortement prononcé des républicains composant la section des Gravil-liers (96). On applaudit à ce discours, et la Convention le renvoie comme le précédent, aux comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation (97). 43 La section de Bon-Conseil [Paris] attire l'attention de la Convention sur les manœuvres de l’aristocratie, et appelle sa surveillance sur les calomnies répandues et sur les attaques dirigées contre les sociétés populaires : elle demande que la Convention les maintienne, qu'elle rende la liberté aux patriotes, qu’elle fasse exécuter la loi du 17 septembre dans toute son intégrité, et donne au gouvernement révolutionnaire assez d’énergie pour comprimer l’aristocratie. Insertion au bulletin, et renvoi au comité de Sûreté générale (98). Extrait des registres de l’assemblée générale de la section Bon-Conseil, du 30 fructidor, l’an deuxième de la République française une et indivisible (99). L’orateur : Citoyens-Représentans, La section du Bon-Conseil, toujours ferme dans les principes qu’elle a si souvent manifestés à votre barre et auxquels vous avez si constamment applaudi, n’a pu voir avec indifférence les évènemens qui se passent sous ses yeux : elle vient d’abord protester de nouveau, au milieu de vous, de son inviolable attache-(96) Bull., 1er jour s.-c. ; Moniteur, XXI, 787 ; Débats, n° 727, 515-516. (97) Moniteur, XXI, 787. Débats, n° 727, 516 ; J. Mont., n° 141 ; J. Fr., n° 723 ; Mess. Soir, n° 760 ; Ann. R. F., n° 289 ; M.U., XLIII, 509-510 ; Gazette Fr., n° 991 ; J. Perlet, n° 725 ; Rép., n° 272 ; F. de la Républ., n° 438 ; Ann. Pair., n° 625 ; C. Eg., n° 760 ; J. Paris, n° 626. (98) P.-V, XLV, 310. (99) Bull., 1er jour s.-c. ; Reproduit dans Moniteur, XXI, 787-788. Résumé dans Débats, n° 727, 516. Le J. Mont., n° 141 indique que l’orateur est Legras. Mess. Soir, n° 760 ; Ann. R. F., n° 289 ; M.U., XLIII, 510 ; Gazette Fr., n° 991 ; J. Perlet, n° 725 ; Rép., n° 272 et 274 ; F. de la Républ., n° 438 ; Ann. Patr., n° 625 ; C. Eg., n° 760 ; J. Univ., n° 1758 et 1760 ; J. Paris, n° 626. ment à la Convention nationale ; elle vient vous déclarer qu’elle est toujours prête à verser tout son sang pour défendre les fidèles re-présentans du peuple. Dans un moment où l’aristocratie, sous le manteau du modérantisme, s’agite dans tous les sens pour anéantir les sociétés populaires de la République, nous venons activer votre sollicitude paternelle sur ces mêmes sociétés que l’Europe entière et les ennemis de l’intérieur attaquent en vain depuis cinq ans, et qu’il n’est au pouvoir d’aucune puissance humaine de détruire. Combien ils sont criminels ces hommes audacieux, ces étemels ennemis du peuple, qui demandent de nouveau, à grand cris, leur dissolution ! Les mêmes calomnies que l’on colporte aujourd’hui dans toutes les rues de Paris, avec tant d’audace, ont été répétées, dans toutes les crises de la révolution, par ces mêmes hommes qui se sont montrés constamment les ennemis du peuple. En attaquant les sociétés populaires qui ont été le berceau de la liberté, et qui depuis leur rétablissement ont rendu de si grands services à la cause du patriotisme ; en attaquant ces sociétés que vous avez constamment couvertes de votre égide tutélaire, ne voyez-vous pas que leur but est de secouer de nouveau les brandons de la discorde, à l’effet de ramener la royauté à travers des flots de sang, et de l’élever sur les cadavres des républicains? Combien nous serions coupables aux yeux de nos frères des départemens, si nous gardions dans ces circonstances un lâche silence ! Placés aux avant-postes de la révolution, témoins des efforts que l’on fait sous vos yeux pour détruire les sociétés populaires, nous devons nous en constituer les intrépides défenseurs. Bientôt un cri général d’indignation va s’élever de tous les points de la République, qui fera rentrer encore une fois dans le néant les étemels ennemis du peuple, qui verront encore une fois avorter leurs projets insensés. Oui, leur audace est à son comble, puisqu’ils osent braver, même sous vos yeux les éternels décrets par lesquels vous avez constitué les sociétés populaires, et notre courage redouble en raison des efforts que l’on fait pour opérer leur anéantissement. Citoyens-représentans, le jour de la sans-culottide approche. Ce jour consacré par vous à perpétuer l’époque où vous proclamâtes la République ; ce jour, également consacré à célébrer le triomphe de la liberté, sera un jour d’alégresse pour tous les sans-culottes français, puisque ce jour est le fruit de leur courage, de leurs glorieux travaux, et qu’il en est la plus douce récompense. Comment pourrions-nous nous livrer à la joie que ce jour nous fera éprouver, si nous étions privés de ceux de nos frères que la calomnie a jetés dans les fers et que nous avons vus combattre à côté de nous pour la défense des droits sacrés du peuple? Comment pourrions-nous nous livrer aux doux épanchemens de la fraternité, si nos regards étoient attristés de la présence de ces hommes que vous aviez rejetés du sein de la société, et que l’intrigue