216 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE réponds de même.- et que, comme il allait cacheter une lettre, un facteur d’un bataillon des Vosges lui dit : C’est sans doute pour l’armée du Rhin que tu cachète cette lettre. Le représentant Hentz répondit : Non, c’est pour prévenir le comité de sûreté général, qui est juste, que j’ai été dénoncé hier à la société. Tout en disant cela il me regardât. En ma qualité .de sociétaire ennemi des tirans, je lui répondis : Si les dénonciations sont injustes il faut t’en plaindre et le comité de sûreté général sçaura te rendre justice. Le représentant me répondit : Elles pourraient être justes mais mal fondées. Je lui répondis qu’une dénonciation juste est toujours fondée. A Thionville le 23 thermidor l’an II de la République une, indivisible, démocratique. Raulet. N° 12 Rapport des commissaires députés de la société populaire auprès du représentant Hentz à Landau. Nota : La pièce cy-incluse renferme le recueil des plaintes des commissaires de la société du mauvais traitement qu’ils ont éprouvés. Les comités réunis les ont reçues sans en faire état, principalement par respecte pour la représentation nationale mais aussi par prudence. Ils étoient persuadés que le silence des bons citoyens conspiroit utilement contre les conspirateurs. Heureux pressentiment que la mémorable journée du 9 thermidor a réalizé. Les comités de la société populaire, réunis, rapportent sommairement le récit que leur ont fait les citoyens Lafontaine et Baraniquet, députés de la société auprès du représentant Hentz, alors en commission auprès de l’armée du Rhin. Ces députés ont dit qu’après avoir exposé l’objet de leur mission, qui étoit de faire rendre la liberté aux citoyens Rolly et Dechaux en considération de l’intérêt vif que la commune de Thionville et la société populaire témoignent aux citoyens pour les bons services qu’ils ont rendu à la patrie et pour la conduite constamment pure et vertueuse qu’on leur a vu tenir, dont ils reçoivent les nombreuses attestations, que ces députés ont voulu remettre sous les yeux du représentant Hentz; qu’aussitôt ce représentant s’est écrié que la société populaire était dissoute; qu’en conséquence il avait dédaigné de prendre communication du mémoire de la société populaire, et que ce mépris avait été si marqué que Baraniquet, l’un des commissaires, avait cru devoir le remettre dans sa poche; qu’ensuite, sur quelques observations qu’avait voulu faire le citoyen Lafontaine, le représentant l’avait traité indignement, au point que celui-ci en a versé des larmes; qu’enfin tous deux ont eu lieu de se persuader qu’ils aboient être mis en état d’arrestation, sur ce propos incroyable que leur a tenu Hentz : « Qu’est-ce donc que la société populaire de Thionville qui ose s’intéresser à un Rolly, à un Dechaux, qui se met en insurrection, qui compose des factions dont vous êtes les chefs ? Prétend-on s’opposer à l’exécution de mes ordres ? Si cela fût arrivé, je faisois marcher une armée sur Thionville ! ». Il ajouta d’un ton plus radouci qu’il ne concevoit pas surtout qu’on eût pu témoigner de l’intérêt à un Rolly qu’il avait accusé lui-même de lui avoir tenu, il y a 2 ans, un propos contre-révolutionnaire. Qu’à l’instant le citoyen Baraniquet, qui n’avoit point encore porté la parole, lui répartit ces mots : « Mais, représentant, pourquoi n’as-tu pas dénoncé dans le temps le citoyen Rolly pour ce fait ? ». - C’est qu’alors, dit le représentant, je n’étais qu’un petit juge de paix. Le commissaire répliqua : Mais pourquoi as-tu différé jusqu’à ce jour ? Alors Hentz réfléchit un instant, envisagea le commissaire qui l’interpelloit ainsi et lui dit, et lui répetta plusieurs fois en lui serrant la main : Tu es un bon bougre, un vrai sans-culotte, ne te laisse plus tromper. Hentz ajouta qu’il regardait la commune de Thionville comme étant en contre-révolution. En plus, il a désigné plusieurs citoyens pour être déclaré suspects, les uns pour intrigues, et les autres pour richesses. Que bientôt après il a congédié les commissaires, dont l’un en sortant reçut ses mépris les plus outrageants, et l’autre des caresses affectées; qu’heureux encore du congé, ils précipitèrent leur départ. Baraniquet ( commre député vers Hentz), Alexandre, Chomereau, F. Abel, Petit-Mengin, Lavocat, Pailleux, J. Mougin, Lussere fils, J. Rossert, Jacquin, Carbonnaz fils aîné, Philippy ( secrét .), Collas, Tailleur, Haquardio fils, Giraud, Claude, Lorio [et une signature illisible], N° 13 Déclaration du citoyen Roger, chirurgien-major, qui est très importante. Le chirurgien en chef de l’hôpital déclare qu’au moment où le courrier qui [sic] a apporté la nouvelle que Robespierre étoit guillotiné, j’étois chès le représentant du peuple Hentz, et qu’à l’ouverture du paquet il paru affligé. Ausitôt je fus voire son épouse, lui apprendre cette nouvelle à laquelle elle n’ajouta pas foi. Elle se retira voire son mari qui lui confirma la nouvelle. Elle revint dans l’état le plus affligé. Elle dit que la nouvelle n’étoit que maleureusement que trop vrai et que Paris devoit être en consternation. A Thionville, le 24 thermidor 2e année de la République françoise. Roger. 9 On lit une pièce de vers du citoyen Dauvergne, employé à la trésorerie nationale. La Convention décrète la mention au procès-verbal et le renvoi au comité d’intruc-tion publique (1). [Le cn Dauvergne, employé à la trésorerie nat., au cn présid. de la Conv.; Paris, 30 therm. Il] (2) (1) P.V., XLIII, 270. (2) C 316, pl. 1268, p. 18, 19. SÉANCE DU 30 THERMIDOR AN II (17 AOÛT 1794) - N° 10 217 Citoyen président, Je t’adresse environ 36 vers. La lecture en serait si tôt faite que j’oserais presque prier la Convention de vouloir me l’accorder personnellement ou d’en charger un secrétaire; si je ne puis obtenir aucune de ces faveurs, je te serais très obligé, citoyen président, de faire en sorte que mes vers soient au moins renvoyés au comité d’instruction publique, désirant pour la satisfaction de mon cœur que mes sentimens, les vrais, dans la circonstance touchante qui me les a inspirés, acquièrent quelque publicité, ainsi que mon amour et mon respect pour la Convention. S. et F. ! Dauvergne ( employé à la trésorerie nat.). [P. -S.] Le citoyen, présent, attendra l’événement de sa pétition. Sentimens d’un citoyen témoin de l’élargissement de plusieurs prisonniers depuis le supplice de Robespierre. Un tyran sanguinaire, un despote orgueilleux L’infâme et traître Robespierre A ses projets les plus affreux Sacrifiait la France presqu’entière. Il n’est plus... Quel spectacle a frappé mes regards ? J’ai vu s’ouvrir - ô moment plein de charmes ! Mes yeux à cet aspect se sont mouillés de larmes - J’ai vu s’ouvrir de toutes parts Ces séjours ténébreux où souvent l’innocence Victime de la haine et de l’ambition Gémissait sans espoir dans un morne silence Sous le poids de l’oppression. Ils sont passés ces jours de terreurs et de peines. Partez, volez, qu’attendez-vous Pères chéris, tendres époux ? Allez, dégagés de vos chaînes, D’une aimable moitié ranimer les appas Qu’avaient flétri la langueur, la tristesse. Que dis-je ? Au-devant de vos pas, Versant des pleurs de joye et de tendresse, Je la vois qui s’empresse et qui vous tend les bras. A ses côtés sont ses modestes filles Et de petits marmots joyeux et sautillans; Enfin dans toutes les familles En tous lieux, quels transports, quels doux embrasemens ! La sensible amitié partage cette yvresse. Moi-même, de douleur n’a guères oppressé, Dans le sein d’une ami je me suis élancé. 0 vous à qui l’on doit cet excès d’allégresse, Du peuple souverain dignes représentans, Combien plus que jamais d’épouses et d’en-fans A qui par ce bienfait vous redonnez la vie, Vous nommeront dans leurs ravissemens Les vrais pères de la patrie ! Et quelles voix en ces heureux instans, Aux miens unissant leurs accens, Ne feraient retentir cet auguste portique De ce cri de l’amour : Vive la République ! 10 La société populaire de Fougerolles, département de la Mayenne, félicite la Convention nationale sur ses travaux et sur son énergie, lui témoigne sa reconnoissance et lui annonce qu’en réjouissance de nos victoires signalées, elle a célébré une fête civique dont elle donne les détails. La Convention nationale décrète la mention honorable, l’insertion au bulletin et le renvoi au comité d’instruction publique (1). [La sté popul. de Fougerolles, à la Conv.; Fougerolles, 30 mess. II] (2) Citoyens représentants, La gloire que nos frères d’armes ont acquise dans les campagnes de Fleurus a aussy exalté nos âmes républicaines. Nous avons aussytôt voté une fête civique à la victoire et une adresse à la Convention qui, par sa sagesse et son énergie, l’a enfin naturalisée dans nos climats. Nous ne vous répéterons plus : restez à votre poste. La République entière a parlé, vous avez obéi et la République est sauvée. Grâces immortelles à vos traveaux ! Nous sommes libres, les tirans pâlissent, tous les peuples soupirent et bientôt ils diront avec nous : grâces immortelles à vos traveaux ! Le décadi 30 messidore devoit retracer aux yeux de nos concitoyens tous les genres de victoires que nous devons à la bravour républicain et à l’empire de la raison. L’enceinte du ci-devant château de Goué en étoit le théâtre. On y avoit réuni tous signes de la tyrannie, royalle, fœodale et sacerdotale. Une partie de la force armée ne s’étoit déterminée qu’à regret à en affecter momentanément la deffence. Desjà l’autre marchoit en bon ordre au sons des airs chéris des Français pour enlever aux yeux des spectateurs ces emblèmes qui, en leur rappelant la honte de leur servitude passée, nourrissoit leur amour pour la liberté et leur reconnoissance pour ses fondateurs. On en vint aux mains. Le plan de deffense, aussy bien conçu que celuy d’attaque, ne tint pas à l’exécution. Plusieurs redoutes emportées à l’arme blanche (la poudre, le peu que nous en ayons, nous la réservons pour les Chouans) nous laissèrent bientôt paroître devant la place. Le désespoir livra au courage un combat assez opiniâtre mais enfin les barricades cédèrent aux haches et les deffenseurs au feu des assaillants. Les cris de vive la République, à bas les tirans, vive la Convention, à bas les fœdéraliste ! remplirent l’air et accompagnère notre jeunesse dans l’enceinte où elle se saisit bientôt de tous les emblèmes qu’on lui disputoit encore. L’infâme drapeau blanc traîné dans la poussière fut, avec eux, mis entre les mains des officiers munici-peaux et concoucoururent (sic), avec les vain-(1) P. V, XLIII, 270. Mentionné par Bm, 2 fruct. (suppl1). (2) C 316, pl. 1268, p. 7.