212 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE N° 8 Pièces de la municipalité Ces déclarations sont très importantes et justifient les précautions qu’avoit prises la société populaire pour empêcher que les passions individuelles n’exercent ici leur empire. Nous, maire, officiers municipaux et agent national de la commune de Thionville, soussignés Déclarons, que, d’après la réception faite par le représentant du peuple Hentz aux deux députés de la société populaire à lui envoyé à Landeau, il a fait précéder son arrivé dans nos murs par la terreur. La réception qu’il nous a fait n’a pas démentie cette idée. Il nous a parlé avec beaucoup de dureté et d’un ton de despote. Nous ne ferons pas les détailles des injustes reproches dont il nous a accablés. Nos cœurs en sont navrés de douleur. Mais certes nous n’ou-blirons jamais ceux qui nous irritent à de si juste titre, en nous disant que nous étions des contre-révolutionnaires, ainsy que la société populaire, et que notre ville étaient la moins à la hauteur de la révolution. Que si Brunsvick et Cobourg se présentaient devant nos murs, nous nous empresserions de leur ouvrir nos portes. Si nous sommes dignes de pareilles reproches, la Convention nationnal doit nous juger, et nous ne méritons plus alors d’être dignes de porter le nom de républicain; mais, fort de nos consciences, nous attendons la justice de pareilles affronts et d’aussi sensible injures. Thionville, le 20 thermidor l’an II de la République françoise une et indivisible. Loriot, J. Mougin, Claude (off. mun.), C. Stein, M. Henriou, M. Quarante (maire), Gay (off. mun.), Geroux (agent nat.), H. Guesviller. La municipalité ajoutte de plus qu’un de ses membres chargé de lever la souscription pour la construction d’un vaisseau, en exécution d’un arrêté du département de la Mozelle, communiquât son registre au représentant Hentz et lui proposa de se joindre aux citoyens de Thionville. Il répondit qu’il avoit sa maison à Paris, que la République était assez riche et que c’était par ces souscriptions que les aristocrates se montroient libérales, qu’il ne s’opposoit pas à cette souscription. La souscription se monte à présent à 4 744 livres 10 sous, indépendament de ce que le civisme des citoïens produira encore. Il n’y a jusqu’à présent que cent-vingt-cinq ménages qui ont souscrits. Claude, J. Mougin, Loriot. Je déclare que les représentants du peuple Hentz et Bourbotte ayant mandé chez eux le maire, l’agent national et les officiers municipaux de cette commune, le représentant Hentz pris la parolle et dit qu’il était bien étonnant que les membres de la société populaire ne se soit pas occupés à demander l’élargissement du citoyen Charron, bon patriote détenu dans la maison d’arrest. A quoi j’ai répondu qu’en ma qualité d’agent national de la commune, j’avois donné mes conclusions conformément à la loi. Le représentant Hentz a dit qu’il n’y avoit point de loi pour les patriotes en ajoutant : Sort d’icy, tu n’est qu’un contre-révolutionnaire; qu’il enverrait la procédure du citoyen Charron à Paris, que ceux qui l’on condamné à être incarséré le seront à leur tour et que moi, agent national, avant de donner mes conclusions, j’aurais dû donner ma démission. Thionville, le 22 thermidor l’an 2 e de la République une et indivisible. Geroux (agent nat.). Nous, maire et officiers municipaux de la commune de Thionville, attestons la déclaration cy-dessus mentionnée sincère et véritable. Thionville, 22 thermidor, l’an II de la République françoise, une, indivisible et démocratique. Gay, M. Quarante (maire), H. Guesviller, J. Mougin, M. Henriou, Loriot, Claude, C. Stein. N° 9 Déclaration de plusieurs citoyens sur la manière dure dont ils ont été traités par les représentans. (1). Evrard déclare au comité révolutionnaire qu’il a entendu le représentant du peuple Bourbotte dire aux citoyens Cuveillier et Albert, membres du comité de section qui alloit pour affaires en ce comité, qu’il les ferait mettre à la guillotine, ainsi que tout le comité, en leur tenant des propos très durs, ledit Evrard observant qu’il était d’ordonnance chez les représentans. Thionville, le 23 thermidor 2e année républicaine. Evrard. Kernel, sergent de la garde nationale citoyenne, déclare qu’étant d’ordonnance chez les représentans, il n’a pu obtenir de passer la nuit dans une chambre et qu’il a été obligé de la passer dans la cour, ce représentant défendant même à la sentinelle de ne laisser monter personne dans sa voiture. Il n’a pas même pu obtenir la permission d’aller jusque chez lui chercher un morceau de pain dont il avait besoin. Thionville, le 23 thermidor 2 e année républicaine. S. Kemel. Autant pour moi, en ajoutant que nous couchions sur le pavé de la cour. Jean Maquer. Le citoyen Valentin Simminger, armurier au Ier régiment de chasseurs à cheval, déclare qu’ayant travaillé par ordre des représentans du peuple pour les dragons d’ordonnance qui les accompagnaient, il s’est présenté chez eux à plusieurs reprises pour leur demander la manière dont il fallait qu’il se pourvut pour recevoir son payement; que le traitement dur et rebutant qu’il a reçu d’eux l’a forcé de renoncer à réclamer son salaire dont il fait le sacrifice. Il ajoute que le procédé du représentant Hentz l’a d’autant plus affligé qu’il s’était persuadé (1) D’une autre main, en note : Ces déclarations ne peuvent servir qu’au concours de celles qui les aggravent. SÉANCE DU 30 THERMIDOR AN II (17 AOÛT 1794) - N° 8 213 qu’il en devait être accueilli avec d’autant plus de fraternité que, lors des assemblées primaire, ce représentant n’a pas dédaigné de solliciter son suffrage et celui de tous ceux avec lesquels il avait des rapports en sa qualité de capitaine de la garde nationale du canton de Sierck. Thionville, le 23 thermidor 2 e année républicaine. SlMMINGER. N° 10 Procès-verbaux des séances extraordinaires de la société des 21 et 22 thermidor , qui contiennent beaucoup de déclarations qui démontrent avec évidence la conduite des représentons du peuple. Séance extraordinaire du 21 thermidor, 2 e année de la République française une, indivisible et démocratique. Guerre aux tirans et aux intriguans. Liberté, fraternité, égalité ou la mort ! Présidence de Carbonat. L’himne sacrée et le couplet à l’Etre suprême chantés, lecture du procès-verbal a été faitte et sa rédaction a été adoptée. Le secrétaire donne lecture de la correspondance. Dechaux est présenté par un membre. Il prend la parole pour témoigner à la société toute sa reconnoissance des démarches qu’elle a faite lors de son incarcération et pendant sa détention dans la maison d’arrêt de Metz. La société l’entend avec plaisir et l’invitte à lui donner lecture de l’ordre qui porte son élargissement. On demande que la société persiste dans l’objet essentiel de son arrêté pris dans la séance des 6 et 7 messidor, qui est de faire connoître les viles calomniateurs de Dechaux et Rolly. Cette motion est motivée sur ce que rien n’importe plus à l’ordre social que de démasquer certains hommes dont le nom seul suffisoit souvent à faire tomber toute espèce de dénonciation, et qui cependant, lorsqu’ils sq cachent dans l’ombre, parviennent à désoler les familles et à désunir les citoyens. L’opinant conclut à ce qu’il soit fait une adresse au représentant Hentz afin qu’il les désigne. La première partie de cette proposition est vivement applaudie et appuyée à l’unanimité. On discute la seconde. Plusieurs membres rappellent le mépris que le représentant Hentz a fait de la société et de ses arrêtés et observent qu’il est inutile de s’adresser à luy, qu’il convient de se pourvoir auprès du comité de sûreté générale pour l’inviter à ne pas laisser les calomniateurs des bons citoïens impunis. La société arrête qu’il ne sera pas fait d’adresse au représentant Hentz, mais que s’il y a lieu on se pourvoira au comité de sûreté générale. Plusieurs membres saisissent cette occasion pour se plaindre amèrement du despotisme et de la calomnie pour lesquels gémissent depuis longtems la ville et la société populaire de Thionville. Ils se succèdent à la tribune et y énoncent des faits qui tous se rapportent à prouver leurs assertions. Quelques-uns s’attachent particulièrement à prouver que la conduite du représentant Hentz à l’égard de la ville et de la société n’a tendu jusqu’à ce moment qu’à consolider cette oppression et à fortifier ces calomnies. Un membre s’exprime ainsi : « Je demande à vous entretenir de la conduitte qu’a tenu dans nos murs un de nos délégués pour le maintient de nos droits. C’est du représentant du peuple Hentz que j’entends parler. Il me semble qu’il y a une loi qui interdit aux représentans du peuple d’exercer aucuns pouvoirs civils dans les départements où ils ont été élus. Il a cependant agit d’une manière contraire aux dispositions de cette loi puisqu’il a ordonné des arrestations, des destitutions, a manifesté une opinion très défavorable sur les authorités constituées, le comité révolutionnaire de section, dont il a traité plusieurs membres avec tous les signes qui caractérisent la passion, le mépris et le despotisme, quoiqu’ils ayent tous été nommés par le représentant du peuple Malarmé (qui remplissait alors sa mission) et en présence de tout le peuple qui a donné à cette nomination les plus grandes marques d’approbation par la joye qu’il a manifesté. Il n’a pas daigné venir à la société populaire, qu’il a déclaré n’être pas épurée puisqu’il dit qu’elle a donné des certificats en faveur d’un Dechaux et d’un Rolly, dont il a déjà fait sortir l’un d’eux. Je dis donc que si Hentz avoit des pouvoirs sur le civil et y reconnoissoit des agens impurs, incapables et arristocrates ou contre-révolutio-naires, il devoit les destituer et les rétablir; il devoit, en homme aimant la chose publique, se transporter à la société populaire et lui faire remarquer si elle étoit dans l’erreur et la ramener dans le bon sentier. La Convention nationale n’a jamais admis les principes sur lesquels Hentz a dirigé sa conduitte. Je demande en conséquence que la société se montre, se manifeste, qu’elle envoyé mes observations à son comité de surveillance qui s’adjoindra celui de correspondance pour prendre des renseignemens et faire son rapport en forme d’adresse qui sera envoyé au comité de salut public. Il y va de la réputation et de l’honneur de notre cité qui n’a jamais attiré sur elle le moindre reproche puisqu’elle a toujours eu pour base de sa conduitte la justice, la plus parfaite soumission aux sages mesures de la sainte Montagne et le bien de la République ». La société témoigne à l’unanimité son assentiment aux reproches ci-dessus énoncés mais la question s’envelope de plus en plus et le président rétablit l’ordre de la discussion en ramenant aux faits qui ont été cités et il propose de les aprofondir. La société adopte cet avis. Un membre monte à la tribune et propose à la société de s’intéresser en faveur des détenus inocens en la maison d’arrêt de cette ville, et notament pour les citoiens Riscle, juge de paix et Nicolas, son greffier commis (le premier membre de cette société) qui lui paroissent n’avoir pas mérités le cruel traitement qu’ils reçoivent; après une longue discussion qui est toute en faveur des prévenus, la société arrête cependant qu’elle ne se prononcera qu’après qu’elle aura eu communication des motifs de leur arrestation. Un membre du comité de surveillance des sections fait lecture de l’arrêté des représen-