SÉANCE DU 30 THERMIDOR AN II (17 AOÛT 1794) - N08 30-32 235 30 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [R. Ducos, au nom de] son comité des secours publics, sur la pétition du citoyen. Jean-Baptiste Chevalier, gendarme de la lere division de l’armée de la Moselle, lequel, après 8 mois et 8 jours de détention, a été acquitté et mis en liberté par un jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 22 messidor, Décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera audit Chevalier la somme de 280 liv., à titre de secours et indemnité, indépendamment de la solde qu’il a reçue pour le temps de sa détention. Le présent décret ne sera pas imprimé (1). 31 La Convention nationale décrète le renvoi de la pétition de la citoyenne Boyt, épouse du citoyen Chabrol, habitant de Clermont, département du Puy-de-Dôme, au comité de Sûreté générale, pour y statuer dans les vingt-quatre heures (2). 32 Le citoyen Daubin, de la commune de Châ-teauponsac, admis à la barre, réclame contre les vexations commises contre les officiers municipaux, administrateurs et juges, Mathieu (sic), Ventenat et autres citoyens de la commune de Châteauponsac, par certains intrigants, qui gémissent dans les prisons ou qui sont en arrestation chez eux (3). [Le cn Jean-Baptiste Daubin Roussille, à la Conv.; le 30 thermJI ] (4) Citoyens représentans, Voici la 6 e fois que les habitans de Ponsac, district du Dorât, département de la Haute-Vienne, réclament la justice qui est due à 12 malheureuses victimes de la calomnie le plus noire, tous cultivateurs et laboureurs chargés d’une nombreuse famille, ayant des enfans à la défense de la République, les 3/4 dans la plus étroite indigence, qu’un décret terrible rendu sous la présidence de l’infâme Robespierre fait languir depuis un an passé du 27 de ce mois, en partie à la Conciergerie, et autre dans le département de la Haute-Vienne, sans qu’il n’y existe rien, absolument rien, mais bien 80 pièces (1) P.V., XLIII, 276. Rapport de la main de Roger Ducos. Décret n° 10 438. M.U., XLIII, 29. (2) P.V., XLIII, 276. Rapport de la main de Barailon (dans le rapport le nom est orthographié Loyt). Décret n° 10 439. M.U., XLIII, 29. (3) Moniteur (réimpr.), XXI, 524; Débats, n° 696, 516. (4) C 316, pl. 1269, p. 49. au moins contre celui qui a surpris votre religion, qui n’est devenu dénonciateur que dans la crainte d’être dénoncé lui-même. Ce décret fut rendu sur la simple dénonciation d’un nommé Goujeaud actuelement détenu par ordre du comité de sûreté générale, laquelle dénonciation avoit été déclarée calomnieuse par le tribunal criminel de la Haute-Vienne 15 jours avant que ce décret fût rendu. Et, deux jours après, celui de cassation confirma le jugement rendu par le département. Citoyens représentans, 12 réclamations et attestations de 12 communes avoisinantes celles des détenus, une adresse de la société populaire de Ponsac vous attestent leur civisme et vous demandent le rapport de votre décret du 27 août surpris à votre religion et leur réintégration dans leurs fonctions. Plusieurs pièces enlevant tous les soupçons que pourroient laisser la simple dénonciation dudit Goujeaud, et 80 pièces au moins contre cet insigne calomniateur sont déposées au comité de sûreté générale qui devoit, aux termes d’un décret du 20 thermidor (1) vous en faire le rapport sous 3 jours mais que ses occupations ont sans doute empêché. En conséquence je demande que la Convention nationale rapporte son décret du 27 août, renvoyé ces malheureuses victimes à leurs fonctions et dans le sein de leurs familles depuis si longtems éplorées. D’Aubin. Un membre [LANOT] prend la parole à cette occasion : Je dois, dit-il, à ma conscience, je dois à la justice que la Convention a manifestée en tous les tems, une relation succinte et vraie de tout ce qui s’est passé dans cette affaire. Il y a près d’un an, la Convention fut informée qu’il avoit existé des troubles dans quelques communes du département de la Haute-Vienne, des dénonciations furent envoyées au comité de sûreté générale contre des fonctionnaires publics. Les pièces étant parvenues à ce comité, je fus chargé de faire un rapport qui n’étoit fondé, à ce qu’il paroît, que sur les erreurs dans lesquelles ont nous avoit jettés. J’écrivis aussitôt à mon collègue Brival, qui étoit en commission dans la Haute-Vienne, de destituer les administrateurs dénoncés et de les remplacer sans délai. Brival exécuta ce que je lui écrivois et le calme fut rétabli dans le pays. Bientôt un intrigant, animé par des passions individuelles, dénonça de nouveau ces administrateurs et les poursuivit avec l’animosité de la vengeance. Des pièces nombreuses furent envoyées au comité. Je ne voulus pas m’en charger et le comité donna à l’un de mes collègues, dont la religion avoit sans doute été surprise, le soin de présenter un rapport à la Convention et de demander la traduction au tribunal révolutionnaire des administrateurs dénoncés. Alors la Convention rendit le décret du 27 août (v.s.) qui ordonnoit la traduction. Depuis ce moment, neuf à dix cultivateurs sont privés de leur liberté et gémissent dans les cachots. (1) Voir Arch. Pari t. XCIV, séance du 20 therm., n° 40. 236 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Je les regarde comme des victimes de passions criminelles, et je pense que la Convention doit s’empresser de proclamer leur innocence et de leur rendre justice. J’ai examiné les faits sur les lieux mêmes et je puis assurer la Convention que tout prouve que ces malheureux cultivateurs ont été l’objet de la haine d’un intrigant qui mérite d’être puni. Je demande que le décret du 27 août soit rapporté et que la justice soit rendue aux opprimés. BRIVAL : J’appuie la proposition du préopinant et j’ajoute à ses observations que le décret dont il demande le rapport a frappé sur des innocens. Les scellés apposés sur leurs effets et papiers ont été levés et l’on n’a rien trouvé que de patriotique. Pas une seule pièce ne présente un moyen de les inculper. Je vote donc pour le rapport mais je crois que cette décision n’est pas suffisante et que le calomniateur doit être puni de sa perfidie. Je propose le renvoi de toutes les pièces de cette affaire au comité de sûreté générale qui en fera le rapport (1). La Convention nationale décrète qu’elle rapporte son décret du 27 août (2) (vieux style) relatif à la commune de Châteaupon-sac, département de la Haute-Vienne; Ordonne en conséquence que les nommés Mathieu Layorc [pour Lagorce], détenu à la Conciergerie; Alexis Ventenat, Pierre Valette; Ducenieux, Daubuy, Tardy, Guilleb-heaud, Augros, Tardy, huissier; Thetaud, Courcelle, arpenteur; Marsat, huissier, seront mis sur le champ en liberté; Renvoie au comité de sûreté générale pour examiner la conduite de Goujaud et Chalifour, habitans de cette commune qui sont actuellement en arrestation (3). 33 Sur la proposition d’un membre, la Convention nationale décrète que la citoyenne Marie-Madeleine Ferrières, veuve Desrousses, est autorisée à rester à Paris jusqu’à ce qu’elle soit parfaitement rétablie (4). [La cnne Marie Magdelaine Ferrières, à la Conv.; Paris, 30 therm. II] (5) Citoyens Représentants, La citoyenne Marie-Magdelaine Ferrières, veuve Des Rousses, demeurante n° 5 rue du (1) J. Sablier, n° 1505. (2) Voir Arch. Pari. , t. 73, p. 90. (3) P.V., XLIII, 276-277. Rapport de la main de Lanot (1 er et 3e § du P. V. ), de celle de Brival (2e ), attribué à Brival. Décret n° 10 437. Ann. R.F. , n° 259; J. Fr., n° 692; Gazette fr(Se , n° 960; M.U., XLIII, 29; J. Paris, n° 595; Rêp. , n°24l; Audit, nat., n°693; F. de la Républ., n° 410. (4) P.V., XLIII, 277. Rapport attribué à Collombel dans C* II 20, p. 256. Décret n° 10 434. (5) C 311, pl. 1230, p. 18, 19. M.U., XLIII, 30. fauxbourg Honoré, vous expose que, d’après la loi du 28 germinal (1) qui permet aux femmes ex-nobles grosses de 6 mois de rester à Paris, elle y a fait ses couches; que les 2 mois accordés sont expirés et qu’elle se trouve dans l’impossibilité phisique de partir, comme l’attestent les certifficats des médecins et chirurgien cy-joint, à la générosité desquels elle a dû des secours. Son civisme, sa pauvreté et sa situation, qui lui vaudrait son transport mortel, doit intéresser votre humanité. Elle la réclame pour l’obtention d’une permission de rester jusqu’à ce qu’elle soit rétablie. Sa section répond d’elle. S. et F. ! Pour la citoyenne Des Rousses : Le Blanc. Je soussigné officier de santé chirurgien accoucheur, domicilié rue Thyonville, n° 44, section de Marat, atteste que la citoyenne Marie Magdelaine Ferrières Des Rousses, accouchée le 1 er messidor, est aujourd’hui détenue au lit, à raison d’un engorgement inflammatoire du sein, qui s’est abscédé et qui s’abscèdera encore en plusieurs endroits; que cet état l’a déjà forcée de sevrer son enfant; qu’il est accompagné de fièvre et des autres accidents inséparables des longues suppurations qui se forment dans les organes glanduleux; qu’il exige des soins assidus des officiers de santé et qu’il se peut que la citoyenne Ferrières soit obligée de garder la chambre encore pendant un mois à l’occasion de cette maladie. En foi de quoi je lui ai délivré le présent pour lui valoir en ce que de raison et comme l’aviseront dans leur sagesse les autorités auprès desquelles laditte citoyenne pourra s’addresser pour obtenir la permission de se faire soigner et traiter à Paris. Paris, le 22 thermidor an IL Baudelocque l’aîné. Fait auprès du lit de la malade, rue faubourg Honoré n° 5, section de la République. Je soussigné, docteur en médecine demeurant rue et section des Champs-Elisées, certifie que j’ai donné des soins à la citoyenne Ferrières Desrousses depuis son accouchement, conjointement avec le citoyen Baudelocque, et que le contenu du certificat cy-dessus est parfaitement juste et véritable. En foy de quoi je lui ai délivré le présent pour servir et valoir ce que de raison. Fait auprès du lit de la malade, n° 5 rue fauxbourg Honoré, section de la République. Edmond Saint-Leger (médecin). Le 22 thermidor l’an II de la République. Je soussigné, ancien professeur de la ci-devant faculté de médecine de Paris, y demeurant, rue Croix-des-Petits-Champs n° 38, section de la Halle-au-bled, certifie qu’ayant été appellé deux fois ci-devant en consultation auprès de Marie-Madeleine Ferrières, veuve Desrousses, demeurant rue du faubourg Honoré n° 5, section de la République, par Edmond Saint-Léger, son médecin ordinaire, j’ai trouvé la malade (1) Voir Arch. Pari, T. LXXXVIII, séance du 27 germ., n° 56.