406 lÀssembJée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 août 1791.1 M. Guillaume. La liberté de la nation dépend de Ja liberté des opinions. M. le Président. Sur un mot échappé à M. Guillaume, lequel mot avait pour objet d’inculper un grand nombre de membres de ï’Assem-nlée... (Murmures.) A V extrême gauche : Non ! non ! pas du tout ! M. Guillaume. Laissez-moi expliquer mon opinion que tout le monde la connaisse ; si je dois être rappelé à l’ordre, l’Assemblée m’y rappellera. . . (Bruit,) M. le Président. Messieurs, un mot! M. Guillaume. Vous devez, Monsieur le Président, me conserver la parole, c’est votre devoir. M. le Président. Messieurs... M. Guillaume. Laissez-moi, Monsieur le Président, interpréter mon opinion moi-même ; je ne veux pas qu’elle passe par votre organe, parce que vous l'altéreriez... ( Applaudissements à l’extrême gauche.) Plusieurs mèmbres : A l’abbaye ! à l’abbaye ! M. Guillaume. Messieurs... M. Démeunier. Vous n’avez pas la parole, Monsieur. M. Bfirnave insiste pour avoir la parole. M. le Président. Si l’on avait voulu m’accorder du silence, j’aurais prouvé que j’étais exactement à mon devoir, puisque je voulais recourir à l’autorité suprême, à l’Assemblée, pour savoir si je devais accorder la parole pour une motion d’ordre. A l’ extrême gauche : Laissez donc la parole à M. Guillaume! M. Alexandre de Lameth. ( Montrant l'extrême gauche.) Rappelez à l’ordre ces Messieurs ! M. le Président. Je consulte l’Assemblée pour savoir si elle veut accorder la parole à M. Barnave. (Bruit.) M. Rewbell. M. Barnave ne peut pas avoir la parole. (L’épreuve a lieu.) M. le Président (après avoir consulté le bureau). Le Bureau est d’avis que le résultat de l’épreuve est de donner Jai parole à M. Barnave. (Bruit.) A l'extrême gauche : Non ! non 1 M. Rœderer. M. Guillaume n’a sans doute pas eu l’intention d’offenser personne ; aussi il faut lui laisser expliquer sa pensée. M. le Président. Monsieur Barnave, vous avez la parole. (Bruit.) M. Guillaume. J’insiste pour m’expliquer. M. Barnave. Je n’aurais pas insisté sur la parole... (Murmures.) < M. Lanjuinais. Monsieur Barnave, laissez finir la phrase de M. Guillaume. M. Gaultier-Biauzat. Après M. Barnave, il faudra que M. Guillaume parle, et peut-être M. Barnave ne vous expliquera-t-il pas ce que M. Guillaume veut vous expliquer. Commencez donc par entendre M. Guillaume. Plusieurs membres : Il faut que la phrase soit finie. M. le Président. Messieurs, j’ai parfaitement bien entendu la demande formée par M. Biauzat et les motifs sur lesquels il l’a fondée ; mais je n’ai pas de volonté personnelle, je n’accorde la parole qu’à celui à qui l’Assemblée veut l’accorder. (Murmures.) A l'extrême gauche : Eh bien, elle appartient à M. Guillaume. M. le Président. La parole est à M. Barnave par un décret. A l'extrême gauche: M. Guillaume l’avait de droit; c’est vous qui la lui avez reprise. M. Gaultier-Biauzat. Je demande que M. Guillaume soit entendu. M. le Président. C’est ce que je vais proposer à l’Assemblée. M. Barnave. Monsieur le Président, je cède la parole à M. Guillaume pourvu qu’on me l’accorde après lui. Assurez-moi que l’Assemblée me l’accordera après M. Guillaume. (Bruit à l'extrême gauche.) M. le Président. M. Barnave cède son tour de parole ; la parole est à M. Guillaume. (Le calme se rétablit.) M. Guillaume. Je ne puis assez m’étonner du trouble qu’ont excité dans l’Assemblée nationale les premiers termes d’une phrase qu’on ne m’a as permis d’achever. Certes, lorsque j’ai dit que e bons amis de la Constitution.... Plusieurs membres au centre et à gauche : Vous avez dit les vrais amis. M. Guillaume... Lorsque j’ai dit que les vrais amis de la Constitution avaient remarqué dans le projet de l’acte constitutionnel, des omissions importantes, je ne m’attendais pas qu’on en conclurait que ceux qui avaient commis ces omissions, n’étaient pas les vrais amis de la Constitution. (Murmures au centre.) Je n’ai jamais entendu prononcer sur les intentions de qui que ce soit ; mais j’ai cru qu'il était de la liberté, qu’il était du courage d’un représentant de la nation, de relever des faits importants. Je vous ai donc dit que l’agitation qui régnait dans cette Assemblée, depuis le commencement de cette discussion, avait pour cause principale ces omissions dont je viens de parler. Je voulais vous ajouter, Messieurs, que ces omissions étaient presque toutes réparées. Vous avez, en effet, pourvu à ce qu’on ne pût choisir [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 août 1791.J 407 dans toute la France, mais seulement dans les départements respectifs, les députés au Corps législatif. Un membre : 11 ne s’ agitpas de cela. M. Guillaume. Vous avez également adopté, Messieurs, le décret concernant la réélection, sans aucun égard pour la note qui l’accompagnait. Vous avez également rétabli hier quatre articles relatifs aux administrateurs et aux juges ; enfin, Messieurs, vous venez, dans ce moment même, de rendre constitutionnel le décret si honorable pour vous, qui vous exclut, ainsi que vos successeurs, des places dans le ministère, et de toutes grâces de la part du gouvernement. Je voulais donc vous dire, Messieurs, qu’il me semblait que pour hâter vos travaux, ramener le calme et tranquilliser les bons esprits, il ne vous en restait plus qu’un à ajouter : c’est le décret qui déclaré que l’Assemblée nationale, que le Corps législatif pourra dire au roi, quand il le croira convenable, que ses ministres ont perdu la confiance de la nation. ( Applaudissements et murmures.) M. Barnave. Je n’aurais pas insisté sur la parole, si je n’avais eu en vue que de demander que le préopinant fût rappelé à l’ordre ; car la phrase a si peu de convenance, que je ne doutais pas que de le demander fût assez pour l’obtenir. J’avais demandé la parole pour appuyer cette proposition, sur des réflexions très courtes, relatives à ce qui s’est passé ces derniers jours, et aux sentiments qu’ont éprouvés les comités à cet égard. Hier, comme aujourd’hui, il nous a été adressé une phrase dont nous aurions eu peut-être le droit de demander justice à l’Assemblée. Un membre â dit, en s’adressant à une partie de l’Assemblée, qui alors interrompait un opinant : « Je demande le silence ; nous avons conquis notre liberté; nous saurons la conquérir encore en faisant rétablir nos décrets. » (Applaudissements à l extrême gauche. — Murmures âu centre.) M. Goiipüleau. Je demande la parole. M. JBarnave. Nous aurions pu demander §lors que l’opinant fût rappelé à l’ordre. Nous ne l’avons pas fait, parce qu’un premier fai} dp cette nature ne nous a pas para le nécessiter impérieusement. ( Murmures à l’extrême gauche.) M. d'André. Est-ce que ces Messieurs auropt le droit d’interrompre sans cesse les orateurs ! M. Barnave. La rppétitiou du même fait m!a engagé à demander la pernrnsÎPû 4P faprp une motion d’ordre et à metfre briëvprpppt spûs les yeux de l’Assemblée les sentiments dpùt déjà hier les comités étaient pénétrés, à raison dp cp qui s’efait passé. Je dpis vous le dirp ; dans riptre séance d’hier au soir, Iq seule idée qui nqqs q occupés était de savoir si les dispositions où nous avions vu hier une partie de FAssérabléq, et si surtout les décrets qui venaient d’être rendus, et qui paraissaient prêts à l’être, ne devaient pas nous déterminer à donner notre démission. M. Anthoine. Bravo 1 brqvo! A l'extrême gauche : A l’ordrê &u jour! àFordré du jour! ' ' M. Charles de B�ametli. Je demande que le comiié donne sa démission. M. d’André. Je demande acte des applaudissements de M. Anthoine. M. Barnave ( se tournant vers l’extrême gauche). Messieurs, il n'y a qu?un moyen de s’entendre, c’est de s’expliquer. Gomme j’aime â croire que tout le monde ici est de bonne foi... A l extrême gauche : A l’qrdre 1 à l’ordye 1 — Parlez à l'Assemblée. M. Perdry. Je demande, Monsieur le Président, que voùs rappeliez à l’ordre tout ce cqin là. (Il montre V extrême gauche.) M. Barnave. L’Assemblée nationale nous ayg.lt chargés de faire le rassemblement ‘et la classification de ses décrets constitutionnels. Dans cèt important ouvrage, nous n’avons eu qué deux vues. C’est tout d’abord qu’en maintenant la Constitution établie par vous, ipèii résultât, qu’avec toutes vos bases conservées, le gouvernement eût assez d’assiette' de stabilité, dp vi-gqeur pour pouvoir prendre son mouvement, pour avoir un résultat èfféctlf p} duràble, et, par conséquent, pour que la liberté s’établît. Car nous avons cru que, si ira moment où dé-finitivement nous allons établir la Constitution, il se trouvait de tels vices dans cet ouvragé, que le mouvement du gouvernement 'ne pût pas avoir lieu, que la machiné n’eût pas en ede le principe de son action, alors après 2 ans de travaux, de dangers, de courage, nüus ne donnerions a fà France qu’une succession dé troublés, et' nous ne recueillerions pour nous "que la honte qui en serait le juste prix. Tel a dû être. Messieurs, notre sentiment dominant, et non pas celui dé renfermer dans cet acte qui devait vbus êti é présenté quelques décrets qui, poqr a voip porté îe nom de constitutionnels, rVe iiôusen paraissaient pas moins, dans’ l’intimité de notre consciefipei contraires au véritable, au permanent, au prospère établissement dè la Constitution. Notre second point dé vue, en la simplifiant, a été celui-ci : nous pvons crU qu’il fallait qu’elle fût durable, que pour la paix hâÜonale/ if convenait qu’on n’eût pas besoin sqpvënt de rassembler des corps cdnstituantsi et je croîs n’ayoir pas besoin de justifier pâqs cette Assemblée Tjin-portance de cpUé considération. Nous avpns donc pensé qu’en conservant toutes les bases, et pour empêcher qu’elles'nè pussent pas être changées, noüs ne devions pas introduire dans la Constitution différents détails, qui, n’étant pas assez éprouvés par l’éxpérieqpe, ne sont pqs assez évidemment bons pour que nous puissions alsurep’ que dans 2 ou I ans, plus on moins, l’expérience !ne les démontrera pas vicieux, et qu’alors, l’opiniori publique se trouvant contraire â ges n.iêmps decrets, on appéllèra unè Convention natipngîè', Me nous devons tous redouté}*: on qùtqrisera,pq'r uri silence d’approbation, la législature à faire des changements. Or, s’il arrivait que la ‘législatif bp fît dés cbangemehts, qùelquê bons, qui*! i u�uliles qu’ils puissent être, il en résulterait toujours qu’elle aurait brisé son frein, quelle aurait paSsq la barrière constitutionnelle qüe vous lui auriez fixée, et dès (ors, il n’y â pas «ne raison d’espérer qu’elle s’arrêterait' à Ces premiers pas; puis après avoir change quelques détails les jègisia-türes suivantes ppûfrâieut Changer jqsùu’aux premi�iA principes de ïiotrê gouvernements 408 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 août 1791. J Nous avons donc cru que pour conserver au gouvernement la stabilité, il importait d’en maintenir ce qui le constitue essentiellement ; mais que, quant aux détails qui même par leur nature approchaient des décrets constitutionnels, toutes les fois que les modifications amenées par l’expérience, effectuées par des législatures qui feront, comme nous, des représentants du peuple, n’altèrent pas l’essence de la Constitution, il était bon de ranger ces décrets parmi les décrets purement législatifs, pour laisser à l’expérience de nos successeurs la faculté de perfectionner, et surtout pour assurer la durée de la Constitution en Ja simplifiant, et en n’y mettant pas des choses qui, comme j’ai eu l’honneur de vous le dire, étant successivement et nécessairement modifiées par la législature avec l’approbation de l’opinion publique, détruiraient la solidité que vous voulez donner à votre ouvrage. Tel a été le principe de notre conduite, quand nous avons réduit les décrets constitutionnels : et je remarquerai qu’il a été inséré dans l’acte constitutionnel 200 articles; et qu’avant qu’il eût paru, avant qu’il fût publié, la plupart des membres de cette Assemblée croyaient que les articles constitutionnels ne seraient pas au-delà du nombre de 150 ou de 160; que tandis que c’était là l’opinion de beaucoup de personnes, ceux qui connaissent les Constitutions déjà établies, ceux qui ont lu la Constitution américaine, ou cependant le peuple aussi a été jaloux de sa liberté, où le peuple a consacré l’établissement des conventions nationales pour modifier la Constitution; en Amérique, dis-je, les articles constitutionnels sont infiniment moins nombreux que ceux que nous avons recueillis dans notre acte. Les bases y sont beaucoup plus à nu ; les moyens d’exécution, les accessoires, y sont presque toujours entièrement oubliés, tandis que nous avons cru que ceux qui étaient intimement liés à la forme du gouvernement, devaient être conservés dans votre acte constitutionnel. Qu’est-il arrivé lorsque ce travail a paru dans le public et dans cette Assemblée? Je crois qu’il a obtenu dans cette Assemblée quelques marques d’approbation : quant au public, elles ont été à peu près universelles, j’ose le dire. Il n’a existé, à l’inspection de votre travail, que deux sources d’opposition ; ceux qui jusqu’à présent se sont constamment montrés ies ennemis de la Révolution, ont déclamé fortement contre ce travail, parce que, d’une part, ils y voyaient tous les principes de l’égalité immuablement et constitutionnellement consacrés, et que, d’autre part, voyant que, la machine du gouvernement avait une forme stable, un sort durable, ils ont reconnu par ce travail que la Constitution s’établirait, qu’elle aurait un résultat solide et permanent, et qu’ainsi, elle maintiendrait à jamais ces mêmes principes d’égalité contraires à leurs intérêts, et l’abolition de toutes ces usurpations qui sont la source éternelle de leurs regrets. Tel a été dans le public le sentiment des ennemis de la Révolution : une autre classe à la vérité s’est montrée opposée à notre travail : mais quelle était cette classe ? Je la divise en deux espèces très distinctes : l’une est celle des hommes qui, dans l’opinion intime de leur conscience, donnent la préférence à un autre gouvernement, au gouvernement républicain qu’ils déguisent plus ou moins dans leurs opinions, mais qui, lors même qu’ils l’abandonnent, reviennent toujours dans le détail aux principes de ce gouvernement-là et cherchent à enlever à notre Constitution monarchique tout ce qui pourrait éloigner des résultats qu’ils désirent. Je déclare que, quant à ceux-là, je ne les attaque point ; quiconque a une pensée sincère, une opinion politique pure, comme pour la plupart je les en crois parfaitement capables, a le droit de l’énoncer ; chacun a sa façon de voir ; c’est l’opinion de la majorité qui fait la loi. Mais il s’est élevé une autre classe de personnes contre notre travail ; et celle-là, ce n’est pas à raison de ses opinions politiques qu’elle s’est montrée opposante, ce n’est pas parce qu’elle aime mieux la République que la monarchie, la démocratie que l’aristocratie : c’est parce qu’elle n’aime aucune espèce de gouvernement; c’est parce que tout ce qui fixe la machine politique, tout ce qui est l’ordre public, tout ce qui rend chacun à ce qui lui appartient, tout ce qui met à sa place l’homme probe et l’homme honnête, l’homme improbe et le vil calomniateur, lui est odieux et contraire. {On applaudit à plusieurs reprises dans la très grande majorité de la partie gauche.) Voilà, Messieurs, quels sont ceux qui ont combattu le plus activement notre travail, ont cherché de nouvelles ressources de Révolution, parce que hors delà toute autre ressource était perdue pour eux : ce sont des hommes qui, en changeant de nom, en mettant des sentiments en apparence patriotiques à la place des sentiments de l’honneur, de la probité, de la pureté, en s’asseyant même aux places les plus augustes, avec le nouveau masque de nom et de vertu, ont cru qu’ils en imposeraient à l’opinion publique, se sont coalisés avec quelques écrivains aussi méprisables qu’eux. ( Les applaudissements recommencent.) Notre but ici est toujours le même, il doit être celui de tous les amis de la liberté ; il nous doit réunir avec la presque unanimité de l’Assemblée, avec ceux, au moins, qui n’ont cessé de montrer une volonté permanente et pure pour rétablissement de la Révolution. Si vous voulez que votre Constitution ne soit pas changée, si vous voulez qu’elle s’exécute véritablement et solidement ; si vous voulez que la nation, après vous avoir dû l’espérance de la liberté, car ce n’est encore que de l’espérance ( Quelques murmures), vous en doive la réalité; vous doive la prospérité, la paix et le bonheur, attachons-nous à simplifier notre Constitution, autant que la conservation de son essence et de son caractère vous le fera paraître possible; en donnant au gouvernement, je veux dire à tous les pouvoirs établis par cette Constitution, le degré de force, d’action, d'ensemble, qui est nécessaire pour mouvoir la machine sociale ; et pour conserver à la nation l’inappréciable bienfait de la liberté que vou9 lui avez donnée. Vous avez déjà retranché de notre travail des modifications que nous avions jugées indispensables au succès effectif de la Constitution ; si le salut de la patrie vous est cher, prenez garde à ce que vous ferez encore, et pardessus tout bannissons d’entre nous d’injustes méfiances qui ne peuvent être utiles qu’à nos ennemis, qui ne peuvent porter au dedans l’obéissauce aux lois, quand on croira que Ja seule force motrice est divisée ou énervée; au dehors, que l’espérance dans le sein de nos ennemis, quand ils auront le plaisir de croire que ce bel ensemble dans la conduite de l’Assemblée nationale, que cette constante majorité, que cette marche, à la fois sage et hardie, qui leur en a tant imposé depuis le départ du roi, est prête à s’évanouir devant 113 août 1791.J [Assemblée nationale.] des divisions artistement fomentées par des soupçons perfides. ( Murmures à l'extrême gauche. — Vifs applaudissements au centre et à gauche.) N’en doutez pas, Messieurs, vous verriez renaître à l’intérieur les désordres dont vous êtes lassés, et dont le terme de la Révolution doit être aussi le terme; vous verriez renaître à l’extérieur, des espérances, des projets, des tentatives que nous bravons hautement parce que nous connaissons nos forces, quand nous sommes unis ; parce que nous savons que tant que nous serons unis on ne les entreprendra pas, et que si l’extravagance osait les tenter, ce serait toujours à sa honte; mais, des tentatives qui s’effectueraient, et sur le succès desquelles on pourrait compter avec quelque vraisemblance, une fois que, divisés entre nous, ne sachant à qui nous devons croire, nous nous supposons des projets divers, quand nous n’avons que les mêmes projets; des sentiments contraires, quand chacun de nous a dans son cœur le témoignage de la pureté de son voisin ; quand 2 ans de travaux entrepris ensemble, quand des preuves consécutives de courage, quand des sacrifices que rien ne peut payer, si ce n’est la satisfaction de soi-même, vous assurent à tous... (Les applaudissements redoublent.) D’après cela, Monsieur le président, croyant que le comité n’a eu aucune manière besoin que l’Assemblée nationale manifeste d’une manière quelconque les sentiments dont j’espère que l’Assemblée nationale ne s’éloignera jamais, je demande simplement que l’on passe à l’ordre du jour sur la motion qu’avait faite M. Guillaume. (M. Barnave descend de la tribune au milieu des plus vifs applaudissements de la très grande majorité de la partie gauche et des tribunes.) M. le Président. M. Barnave fait la motion de passer à l’ordre du jour. Je consulte l’Assemblée. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. Démeimier, rapporteur (en remplacement de M. Thouret). Nous passons, Messieurs, à l’article 7 du projet de décret qui est ainsi conçu : « Les représentants nommés dans les départements, ne seront pas représentants d’un département particulier, mais de la nation entière; et la liberté de leurs opinions ne pourra être gênée par aucun mandat, soit des assemblées primaires, soit des électeurs. » M. E-aiijiiinais. Je crois que les mots : « ne pourra être gênée par aucun mandat » ne peuvent rester dans l’article. Il est évident que des esprits subtils ne manqueraient pas de tirer des conséquences de cette expression. Je demande qu’il soit dit qu Hls ne recevront aucun mandat. M. Démeunier, rapporteur. On peut rédiger la fin de l’article en ces termes : «... et il ne leur sera donné aucun mandat, soit par les assemblées primaires, soit par les électeurs. » M. Pierre Dedelay (ci-devant Dellay d’A-gier). Il vaut mieux dire tout simplement qu’il ne pourra leur être donné aucun mandat. (Assentiment.) M. Démeunler, rapporteur. Soit, l’article serait donc rédigé comme suit : 409 Art. 9 (art. 7 du projet). « Les représentants nommés dans les départements ne seront pas représentants d’un département, mais de la nation entière; il ne pourra leur être donné aucun mandat. » (Adopté.) M. Démeimier, rapporteur. Nous passons, Messieurs, à la 4m6 sectiou dont voici le 1er article. SECTION IV. Tenue et régime des assemblées primaires et électorales. « Article premier. Les fonctions des assemblées primaires et électorales se bornent à élire; elles se pépareront aussitôt après les élections faites ; et ne pourront se former de nouveau que lorsqu’elles seront convoquées. » Il y a sur cet article un raccordement à faire d’après la proposition qui vous a été présentée par MM. Pétion et Buzot, et relative à la formation des assemblées primaires et électorales au cas où la convocation n’en aurait pas été faite en temps utile. Pour ne rien préjuger sur cette question, on peut décréter l’article sauf les derniers mots, et lorsqu’on aura prononcé sur la question on raccordera cet article premier avec l’article qui vous sera présenté. (Assentiment.) M. Ifiamel-Hogaret. J’ai une simple question à faire à M. le rapporteur. Je vous demande si les assemblées électorales ne pourront pas délibérer sur cette question-ci : Faut-il supprimer le tribunal établi à tel endroit ou faut-il le transporter dans un autre endroit? (Murmures.) Plusieurs membres : Aux voix l’article ! M. Démeunler, rapporteur. Voici, réserve faite de la dernière disposition, la rédaction de l’article premier : Art. 1er. « Les fonctions des assemblées primaires et électorales se bornent à élire; elles se sépareront aussitôt après les élections faites. » (Adopté.) M. Démeunler, rapporteur. Voici l’article 2 : « Nul citoyen actif ne peut entrer ni donner son suffrage dans une assemblée, s’il est armé ou vêtu d’un uniforme, à moins qu’il ne soit de service ; auquel cas, il pourra voter en uniforme, mais sans armes. M. Dupont. Il faut que l’habit d’uniforme soit le plus bel habit des campagnes. Je demande donc qu’il soit dit qu’on pourra toujours voter en habit d’uniforme, mais sans armes. Plusieurs membres : La question préalable sur l’amendement. M. Merlin. Je demande la représentation de l’article du décret sur l’organisation des gardes nationales, par lequel l’Assemblée a formellement révoqué celui qui est cité par M. Démeunier. Je demande que l’Assemblée s’y arrête par la considération deM. Dupont. Vous venez de détruire la noblesse héréditaire ; n’allez pas créer la noblesse des villes, et leur donner, sur les gardes nationales des campagnes, une prééminence aussi impolitique et aussi absurde. ARCHIVES PARLEMENTAIRES.