SÉANCE DU 21 THERMIDOR AN II (8 AOÛT 1794) - N° 23 347 et aux préposés à la police de ladite maison d’arrêt, de lui en ouvrir la porte à l’exhibition du présent décret (1). [La cnne Laignier, épouse Delamarre, à la Conv.; s.l.n.d.J (2). Restituée par votre courageuse énergie, à l’exercice des droits du peuple et de vos devoirs, l’humanité souffrante peut aujourd’hui réclamer les siens avec confiance auprès de vous. Le citoyen Delamarre, mon époux, et votre collègue, détenu depuis 10 mois, à succombé aux cruautés inouïes exercées contre lui et ses compagnions d’infortune, par des administrations qui n’avoient de l’humanité que le masque; il est atteint d’une maladie grave, qui exige des secours prompts, et l’assiduité d’une garde qu’on ne sauroit rencontrer dans un donjon, où l’indifférence seule peut garantir de la dureté. L’attestation de l’officier de santé que je joins à ma pétition, vous convaincra de la douloureuse situation. Je vous adjure, citoyens, de me permettre sa translation dans mon domicile, sous la surveillance d’un garde, ou tout au moins d’ordonner l’ouverture de la barrière qui le prive des secours affectueux de sa trop malheureuse épouse, que des ordres inhumains empêchent de parvenir jusqu’à lui. Vive la République, vive la Convention nationale ! Laignier, épouse Delamarre. Je soussigné, officier de santé des prisons de Paris, certifie que, d’après l’autorisation des citoiens administrateurs de police, je me suis transporté à la maison d’arrêt dite les Bénédictins anglais, pour visiter le citoien Antoine Delamarre, député à la Convention nationale qui y est détenu. Après avoir examiné avec attention, j’ai reconnu qu’il est attaqué d’une maladie grave. C’est une fièvre continue depuis 5 jours, accompagnée des symptômes les plus effraye nts. Telle est la situation du citoien Delamarre. En conséquence, il est d’urgence de le transférer dans un endroit convenable pour lui administrer les secours qui conviennent à son état. Fait à Paris le 20 thermidor, l’an 2 de la République une et indivisible. Markoski. [Genissieu : Il est intéressant d’établir un ordre de choses qui puisse annoncer aux conspirateurs que la justice n’est pas interrompue pour eux, et que, si l’on fait sortir des prisons les patriotes vexés, il n’y a point de grâce pour les contre-révolutionnaires. Il faut absolument, pour le salut de la liberté, que ces derniers soient punis; je demande donc qu’on (1) P.-V., XLIII, 117. Décret n° 10 316. Rapporteur: Ser-vonat. Débats, n° 688, 381; F.S.P., n° 400; J. Sablier (du soir), n° 1487; J. Fr., n°683; C. Eg„ n° 720; J. Mont., n° 101. (2) C 312, pl. 1236, p. 4 et 5. s’occupe de la réorganisation du tribunal révolutionnaire. (On applaudit). (1)]. 23 Les patriotes réfugiés du pays de Fran-chimont, Stavelot et Logne (2) sont admis à la barre : ils expriment leur joie sur les nouveaux succès de nos armes, et font observer que le jour où la Convention nationale arrachoit le masque aux Catilina modernes, étoit aussi celui où les vainqueurs de Fleurus purgeoient les rives de la Meuse des hordes barbares des tyrans d’Allemagne, rendoient la liberté à leurs voisins les Liégeois et faisoient luire sur leur montagne l’aurore de leur prompte délivrance. Ils terminent par l’expression de leur reconnois-sance envers le peuple français et ses représentai. Mention honorable, insertion au bulletin (3). L’orateur de la députation : (4). Représentans ! Le jour où, dans cette enceinte, vous arrachiez le masque aux Catilinas modernes, le jour où, secondés du peuple, vous exterminiez ces singes féroces et hypocrites des Césars et des Cromwels; ces jours à jamais mémorables étaient donc aussi ceux où les vainqueurs de Fleurus purgeoient les rives de la Meuse des hordes barbares de l’Allemagne, rendoient la liberté à nos voisins les Liégeois, et fesoient luire sur nos montagnes l’aurore de leur prompte délivrance ! Grâces immortelles en soient rendues au peuple souverain, grâces à ses dignes et vertueux représentans ! Elle est enfin démontrée à tous les yeux, cette vérité si consolante pour l’humanité, si terrible pour la tyrannie Que ces monstres d’orgueil et de perfidie, qui n’ont paru aider à étaier la République que pour placer autour le trône de leur ambition, seront tous successivement précipités dans l’abime, comme un vil échaffaudage, tandis que cet édifice, basé sur la liberté et l’égalité et ceintré par la vertu, reste dans toute sa majesté, éternel et inébranlable. Ces vœux de remercimens que nous vous avons déjà adressés avec le bon peuple de Paris, chacun dans les sections où nous sommes retirés, nous venons vous les répéter au nom de nos frères dispersés dans la République, au nom (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 437; Débats, n° 687, 362; J. Sablier (du soir), n° 1487; J. Fr., n° 683; F.S.P., n° 400 (selon ces 2 dernières gazettes, l’assemblée serait passée à l’ordre du jour sur cette proposition aux applaudissements des députés). (2) Province de Liège. (3) P.-V., XLIII, 117. J. Fr., n° 683. Mentionné par J. Paris, n° 586. (4) C 315, pl. 1263, p. 34. Moniteur (réimpr.), XXI, 436-437; Débats, n°687, 363-364; J. Sablier (du soir), n° 1487. SÉANCE DU 21 THERMIDOR AN II (8 AOÛT 1794) - N° 23 347 et aux préposés à la police de ladite maison d’arrêt, de lui en ouvrir la porte à l’exhibition du présent décret (1). [La cnne Laignier, épouse Delamarre, à la Conv.; s.l.n.d.J (2). Restituée par votre courageuse énergie, à l’exercice des droits du peuple et de vos devoirs, l’humanité souffrante peut aujourd’hui réclamer les siens avec confiance auprès de vous. Le citoyen Delamarre, mon époux, et votre collègue, détenu depuis 10 mois, à succombé aux cruautés inouïes exercées contre lui et ses compagnions d’infortune, par des administrations qui n’avoient de l’humanité que le masque; il est atteint d’une maladie grave, qui exige des secours prompts, et l’assiduité d’une garde qu’on ne sauroit rencontrer dans un donjon, où l’indifférence seule peut garantir de la dureté. L’attestation de l’officier de santé que je joins à ma pétition, vous convaincra de la douloureuse situation. Je vous adjure, citoyens, de me permettre sa translation dans mon domicile, sous la surveillance d’un garde, ou tout au moins d’ordonner l’ouverture de la barrière qui le prive des secours affectueux de sa trop malheureuse épouse, que des ordres inhumains empêchent de parvenir jusqu’à lui. Vive la République, vive la Convention nationale ! Laignier, épouse Delamarre. Je soussigné, officier de santé des prisons de Paris, certifie que, d’après l’autorisation des citoiens administrateurs de police, je me suis transporté à la maison d’arrêt dite les Bénédictins anglais, pour visiter le citoien Antoine Delamarre, député à la Convention nationale qui y est détenu. Après avoir examiné avec attention, j’ai reconnu qu’il est attaqué d’une maladie grave. C’est une fièvre continue depuis 5 jours, accompagnée des symptômes les plus effraye nts. Telle est la situation du citoien Delamarre. En conséquence, il est d’urgence de le transférer dans un endroit convenable pour lui administrer les secours qui conviennent à son état. Fait à Paris le 20 thermidor, l’an 2 de la République une et indivisible. Markoski. [Genissieu : Il est intéressant d’établir un ordre de choses qui puisse annoncer aux conspirateurs que la justice n’est pas interrompue pour eux, et que, si l’on fait sortir des prisons les patriotes vexés, il n’y a point de grâce pour les contre-révolutionnaires. Il faut absolument, pour le salut de la liberté, que ces derniers soient punis; je demande donc qu’on (1) P.-V., XLIII, 117. Décret n° 10 316. Rapporteur: Ser-vonat. Débats, n° 688, 381; F.S.P., n° 400; J. Sablier (du soir), n° 1487; J. Fr., n°683; C. Eg„ n° 720; J. Mont., n° 101. (2) C 312, pl. 1236, p. 4 et 5. s’occupe de la réorganisation du tribunal révolutionnaire. (On applaudit). (1)]. 23 Les patriotes réfugiés du pays de Fran-chimont, Stavelot et Logne (2) sont admis à la barre : ils expriment leur joie sur les nouveaux succès de nos armes, et font observer que le jour où la Convention nationale arrachoit le masque aux Catilina modernes, étoit aussi celui où les vainqueurs de Fleurus purgeoient les rives de la Meuse des hordes barbares des tyrans d’Allemagne, rendoient la liberté à leurs voisins les Liégeois et faisoient luire sur leur montagne l’aurore de leur prompte délivrance. Ils terminent par l’expression de leur reconnois-sance envers le peuple français et ses représentai. Mention honorable, insertion au bulletin (3). L’orateur de la députation : (4). Représentans ! Le jour où, dans cette enceinte, vous arrachiez le masque aux Catilinas modernes, le jour où, secondés du peuple, vous exterminiez ces singes féroces et hypocrites des Césars et des Cromwels; ces jours à jamais mémorables étaient donc aussi ceux où les vainqueurs de Fleurus purgeoient les rives de la Meuse des hordes barbares de l’Allemagne, rendoient la liberté à nos voisins les Liégeois, et fesoient luire sur nos montagnes l’aurore de leur prompte délivrance ! Grâces immortelles en soient rendues au peuple souverain, grâces à ses dignes et vertueux représentans ! Elle est enfin démontrée à tous les yeux, cette vérité si consolante pour l’humanité, si terrible pour la tyrannie Que ces monstres d’orgueil et de perfidie, qui n’ont paru aider à étaier la République que pour placer autour le trône de leur ambition, seront tous successivement précipités dans l’abime, comme un vil échaffaudage, tandis que cet édifice, basé sur la liberté et l’égalité et ceintré par la vertu, reste dans toute sa majesté, éternel et inébranlable. Ces vœux de remercimens que nous vous avons déjà adressés avec le bon peuple de Paris, chacun dans les sections où nous sommes retirés, nous venons vous les répéter au nom de nos frères dispersés dans la République, au nom (1) Moniteur (réimpr.), XXI, 437; Débats, n° 687, 362; J. Sablier (du soir), n° 1487; J. Fr., n° 683; F.S.P., n° 400 (selon ces 2 dernières gazettes, l’assemblée serait passée à l’ordre du jour sur cette proposition aux applaudissements des députés). (2) Province de Liège. (3) P.-V., XLIII, 117. J. Fr., n° 683. Mentionné par J. Paris, n° 586. (4) C 315, pl. 1263, p. 34. Moniteur (réimpr.), XXI, 436-437; Débats, n°687, 363-364; J. Sablier (du soir), n° 1487. 348 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE du grand nombre de ceux qui combattent sous ses drapeaux triomphans, au nom de la masse entière de nos concitoyens, qui, tout récemment encor, osèrent seuls et isolés [s'insurger contre la tyrannie, et qui, au sein de la plus dure oppression, n’ont cessé de risquer la perte de leur fortune, la prison ou la mort, plutôt que d’abjurer le nom sacré de la République qui les a solemnellement adoptés. L’invasion des ennemis dans ce pays y avait suspendu l’exécution du décret du 2 mars 1793; le moment approche où l’on pourra la poursuivre avec avantage, et y consolider sa réunion par le rétablissement du gouvernement républicain et révolutionnaire. Veuillés, représentans, ne point tarder à faire jouir la masse de nos concitoyens de ce bienfait pour lequel ils soupirent ardemment, dont ils sont dignes par leur civisme, leur fermeté et leurs malheurs; et qu’il ne soit point dit que, redevenus libres et français, ils soient privés d’un avantage, qu’ils avaient eu le courage de se procurer lorsqu’ils n’étaient encor français que par souhait. Formez provisoirement dans ce pays une administration commune. Que les intrigans, les ambitieux soient surveillés et écartés avec soin; que les contre-révolutionnaires, les aristocrates et les traîtres soient tous traités et punis comme les ennemis du peuple français; que les malheureux opprimés soient hautement protégés, et satisfaits aux dépens de leurs oppresseurs; que les patriotes dépouillés soient réintégrés dans leurs biens; que la mort de nos frères, impi-toiablement égorgés à Vervier[s] et à Stablo (Stavelot ?), soit promptement vengée; et que le bon peuple, comparant les bienfaits de cette révolution nouvelle, avec les vices de celles qui l’ont précédée, soit soulagé de tous ses maux passés par la vue du bien présent; et qu’il sente que ce n’est pas en vain que vous avez mis partout à l’ordre du jour la probité, la justice et la vertu. Représentans, nous allons, sous vos auspices, retourner dans nos foiers. Puissions-nous, après une séparation longue et déchirante, qui avait succédé d’abord à une autre, plus longue et non moins cruelle, après une nouvelle suite de 17 mois d’oppression et d’infortune, puissions-nous nous y voir bientôt réunis avec nos frères, et faire encor retentir ensemble, des bords de la Meuse jusqu’à ceux de la Moselle et du Rhin, ces cris d’expression fidèle des sentiments toujours gravés dans nos cœurs : guerre à mort aux tyrans et aux esclaves; protection aux opprimés; punition aux traîtres et aux oppresseurs; concorde avec les hommes libres : réunion intime au peuple français; respect à ses représentans; ralliement autour de la Convention nationale; obéissance entière à ses décrets; dévouement sans bornes à la République une et indivisible ! J. Fichon, Jacque françois Jacquet, J.P. He brard, L. Wilkin, L. José Delevaux, N.J. Gar-ray, G. Michel, F.J. Delboin, G. Payot, E.J. Huberty, Joseph Ferdinand Heyman, J.J. Cres-pin, L. Hane, Joseph Wanssard, L.F. Dethier, Mathieu Lejeune, Gaspar Grégoire, Foret, J. Purlot, J.M. Deblon, Alexandre Jacobi, F. Polis. 24 Un secrétaire donne lecture d’une lettre adressée au président de la Convention nationale par Fouquier-Tinville, ci-devant accusateur public au tribunal révolutionnaire, datée de la Conciergerie le 20 thermidor, par laquelle il annonce qu’il a à communiquer à la Convention des faits importans J pour la chose publique, en même temps j qu’ils sont nécessaires à sa justification. Il ! demande d’être admis à la barre (1). I Un membre [LECOINTRE] convertit cette demande en motion; elle est appuyée, et la Convention nationale décrète ce qui suit : Lecture faite d’une lettre adressée au président de la Convention nationale par Fouquier-Tinville, par laquelle il demande à être admis à la barre pur révéler des faits importans à la chose publique; la pétition convertie en motion par un membre, la Convention nationale décrète que Fouquier-Tinville sera traduit sur le champ à la barre (2). LECOINTRE : Je convertis en motion la pétition de Fouquier-Tinville, non pour qu’il échappe au glaive de la loi, mais pour que la Convention puisse apprendre de sa bouche quels étaient les leviers qui le faisaient mouvoir. (On applaudit). La Convention décrète que Fouquier-Tinville sera traduit à la barre pour y être entendu (3). [POCHOLLE demande le rapport du décret. Si Fouquier-Tinville, dit-il, n’a à parler que de lui, c’est le tribunal qui doit l’entendre. [On murmure]. S’il a à parler d’autres personnes, qu’il s’adresse aux comités qui ont notre confiance. Pocholle, s’apercevant que sa proposition n’est pas entendue avec faveur la retire (4)]. Un des secrétaires fait lecture de la rédaction du décret rendu sur Fouquier. LEFIOT : La demande faite par Fouquier-Tinville ne se semblait pas susceptible d’être accueillie; c’est un homme immoral et jugé par l’opinion publique; il est clair qu’il ne peut venir ici que pour jeter le tison de la discorde par une suite du système qu’il avait embrassé dans l’exercice de ses fonctions; il peut venir ici rallumer des haines. (On murmure. Plusieurs voix : il n’y a point de haine parmi les membres de la Convention). Je dis qu’il a existé des partis, je dis qu’il est à craindre que cet individu ne vienne les ranimer. (Nouveaux murmures ). J’entends dire que, s’il était renvoyé aux comités, il serait possible qu’il accusât les comités et que la vérité ne fût pas connue. Eh bien, nommez une commission prise dans votre sein. (1) Le Procès-Verbal reprend les termes mêmes de l’original, signé A.Q. FOUQUIER, ex-accusateur près le tribunal révolutionnaire, et décrété d’arrestation, C 311, pl. 1231, p. 17. (2) P.-V., XLIII, 118. Décret n° 10 314. Rapporteur: Le-cointre de Versailles. (3) Moniteur (réimpr.), XXI, 437. (4) J. Paris, n° 686. 348 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE du grand nombre de ceux qui combattent sous ses drapeaux triomphans, au nom de la masse entière de nos concitoyens, qui, tout récemment encor, osèrent seuls et isolés [s'insurger contre la tyrannie, et qui, au sein de la plus dure oppression, n’ont cessé de risquer la perte de leur fortune, la prison ou la mort, plutôt que d’abjurer le nom sacré de la République qui les a solemnellement adoptés. L’invasion des ennemis dans ce pays y avait suspendu l’exécution du décret du 2 mars 1793; le moment approche où l’on pourra la poursuivre avec avantage, et y consolider sa réunion par le rétablissement du gouvernement républicain et révolutionnaire. Veuillés, représentans, ne point tarder à faire jouir la masse de nos concitoyens de ce bienfait pour lequel ils soupirent ardemment, dont ils sont dignes par leur civisme, leur fermeté et leurs malheurs; et qu’il ne soit point dit que, redevenus libres et français, ils soient privés d’un avantage, qu’ils avaient eu le courage de se procurer lorsqu’ils n’étaient encor français que par souhait. Formez provisoirement dans ce pays une administration commune. Que les intrigans, les ambitieux soient surveillés et écartés avec soin; que les contre-révolutionnaires, les aristocrates et les traîtres soient tous traités et punis comme les ennemis du peuple français; que les malheureux opprimés soient hautement protégés, et satisfaits aux dépens de leurs oppresseurs; que les patriotes dépouillés soient réintégrés dans leurs biens; que la mort de nos frères, impi-toiablement égorgés à Vervier[s] et à Stablo (Stavelot ?), soit promptement vengée; et que le bon peuple, comparant les bienfaits de cette révolution nouvelle, avec les vices de celles qui l’ont précédée, soit soulagé de tous ses maux passés par la vue du bien présent; et qu’il sente que ce n’est pas en vain que vous avez mis partout à l’ordre du jour la probité, la justice et la vertu. Représentans, nous allons, sous vos auspices, retourner dans nos foiers. Puissions-nous, après une séparation longue et déchirante, qui avait succédé d’abord à une autre, plus longue et non moins cruelle, après une nouvelle suite de 17 mois d’oppression et d’infortune, puissions-nous nous y voir bientôt réunis avec nos frères, et faire encor retentir ensemble, des bords de la Meuse jusqu’à ceux de la Moselle et du Rhin, ces cris d’expression fidèle des sentiments toujours gravés dans nos cœurs : guerre à mort aux tyrans et aux esclaves; protection aux opprimés; punition aux traîtres et aux oppresseurs; concorde avec les hommes libres : réunion intime au peuple français; respect à ses représentans; ralliement autour de la Convention nationale; obéissance entière à ses décrets; dévouement sans bornes à la République une et indivisible ! J. Fichon, Jacque françois Jacquet, J.P. He brard, L. Wilkin, L. José Delevaux, N.J. Gar-ray, G. Michel, F.J. Delboin, G. Payot, E.J. Huberty, Joseph Ferdinand Heyman, J.J. Cres-pin, L. Hane, Joseph Wanssard, L.F. Dethier, Mathieu Lejeune, Gaspar Grégoire, Foret, J. Purlot, J.M. Deblon, Alexandre Jacobi, F. Polis. 24 Un secrétaire donne lecture d’une lettre adressée au président de la Convention nationale par Fouquier-Tinville, ci-devant accusateur public au tribunal révolutionnaire, datée de la Conciergerie le 20 thermidor, par laquelle il annonce qu’il a à communiquer à la Convention des faits importans J pour la chose publique, en même temps j qu’ils sont nécessaires à sa justification. Il ! demande d’être admis à la barre (1). I Un membre [LECOINTRE] convertit cette demande en motion; elle est appuyée, et la Convention nationale décrète ce qui suit : Lecture faite d’une lettre adressée au président de la Convention nationale par Fouquier-Tinville, par laquelle il demande à être admis à la barre pur révéler des faits importans à la chose publique; la pétition convertie en motion par un membre, la Convention nationale décrète que Fouquier-Tinville sera traduit sur le champ à la barre (2). LECOINTRE : Je convertis en motion la pétition de Fouquier-Tinville, non pour qu’il échappe au glaive de la loi, mais pour que la Convention puisse apprendre de sa bouche quels étaient les leviers qui le faisaient mouvoir. (On applaudit). La Convention décrète que Fouquier-Tinville sera traduit à la barre pour y être entendu (3). [POCHOLLE demande le rapport du décret. Si Fouquier-Tinville, dit-il, n’a à parler que de lui, c’est le tribunal qui doit l’entendre. [On murmure]. S’il a à parler d’autres personnes, qu’il s’adresse aux comités qui ont notre confiance. Pocholle, s’apercevant que sa proposition n’est pas entendue avec faveur la retire (4)]. Un des secrétaires fait lecture de la rédaction du décret rendu sur Fouquier. LEFIOT : La demande faite par Fouquier-Tinville ne se semblait pas susceptible d’être accueillie; c’est un homme immoral et jugé par l’opinion publique; il est clair qu’il ne peut venir ici que pour jeter le tison de la discorde par une suite du système qu’il avait embrassé dans l’exercice de ses fonctions; il peut venir ici rallumer des haines. (On murmure. Plusieurs voix : il n’y a point de haine parmi les membres de la Convention). Je dis qu’il a existé des partis, je dis qu’il est à craindre que cet individu ne vienne les ranimer. (Nouveaux murmures ). J’entends dire que, s’il était renvoyé aux comités, il serait possible qu’il accusât les comités et que la vérité ne fût pas connue. Eh bien, nommez une commission prise dans votre sein. (1) Le Procès-Verbal reprend les termes mêmes de l’original, signé A.Q. FOUQUIER, ex-accusateur près le tribunal révolutionnaire, et décrété d’arrestation, C 311, pl. 1231, p. 17. (2) P.-V., XLIII, 118. Décret n° 10 314. Rapporteur: Le-cointre de Versailles. (3) Moniteur (réimpr.), XXI, 437. (4) J. Paris, n° 686.