644 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 février 1790.] goutte de leur sang pour la défense de la nation de la loi et du Roi. Adresse des religieuses du couvent royal des Filles-Dieu de Paris, ordre de Fontevrault ; elles expriment avec énergie leur vive reconnaissance sur le sage décret que l’Assemblée vient de rendre en leur faveur. Adresse des volontaires de la ville de Montau-ban. Adresse de la garde nationale de la ville d’An-duse en Languedoc, qui fait le don patriotique d’une somme de 976 livres ; ces braves militaires annoncent qu'ils livrent au mépris public tous les ennemis de l’ordre et de la constitution du royaume qu’ils jurent de maintenir de tout leur pouvoir ; iis jurent d’être lidèles à la nation, à la loi et au Roi ; ils jurent enfin, sur le fer dont leurs mains sont armées, de ne l’employer jamais que pour réprimer la licence et pour la défense de la patrie et de la liberté. Adresse des volontaires du Quercy qui ont réprimé les excès qui se commettaient dans cette province et en ont chassé les brigands. L’Assemblée demande la lecture entière de cette adresse et en témoigne sa satisfaction. M. Roussillon. Je propose à l’Assemblée de témoigner qu’elle trouve répréhensible la conduite ou l’inaction de la municipalité de Gahors. M. Charles de Lameth. On a excité une foule d’hommes à détruire des propriétés que M. d’Ai-guillon et moi possédons dans l’Agenois ; ils ont porté la flamme dans nos maisons qu’on décorait du nom de châteaux avant la destruction du régime féodal. Le mien a été incendié, et celui de M. d’ Aiguillon doit l’être aussi en ce moment. La plainte est si loin de moi, que j’en aime le peuple un peu plus qu’auparavant. M. Gaultier de Riauzat. Les attroupements du Quercy ont fait quelques cruelles incursions près des frontières d’Auvergne, notamment à Maurs, mais lorsqu’ils ont appris qu’un détachement de la garde nationale de Clermont venait, malgré 34 lieues de distance, au secours de ces contrées, ils ont été détrompés contre les écrits qui les avaient excités contre la Révolution et se sont dissipés. Dom Ver guet. Dans la Rretagne, le peuple des campagnes a été égaré par des insinuations perfides ; ce n’est point par des lois comme celle qui nous a été proposée hier par le comité de constitution qu’on ramènera le calme, mais bien par la persuasion et la sagesse. Il est probable, en effet, que les décrets qui vont être rendus pour distinguer les droits féodaux rachetables de ceux qui sont abolis sans indemnité, produiront un meilleur effet que toute les lois martiales. Cigongne. L’omission faite dans les lettres-patentes données le mois dernier de l’article 3 du décret du 29 décembre 1789, relatif aux municipalités a pu contribuer à occasionner des désordres. Je demande que cette omission soit réparée. M. de Lacliêze. Je propose que l’Assemblée donne un témoignage public de satisfaction pour la conduite patriotique des volontaires du Quercy. M. de Robespierre. Je propose d’autoriser M. le Président à écrire aux volontaires pour les remercier au nom de l’Assemblée d’avoir arrêté les troubles de la province. M. Renaud, (d'Agen), appuie vivement cette motion. Cette proposition est unanimement adoptée. Les représentants de l’université de Paris offrent un don patriotique, et l’un d’eux prononce le discours suivant : * Nosseigneurs, e Vous voyez les représentants des jeunes élèves de l’université de Paris ; ils viennent mêler leurs offrandes aux dons libres et désintéressés de tous les citoyens. Vous être les pères de la Patrie ; nous en sommes les enfants. Nous espérons que nos dons, offerts par le respect et l’amour, seront accueillis avec une indulgence et une bonté paternelle. Déjà nous avons prononcé le serment qui lie tous les bons citoyens ; déjà nous avons juré à la nation ; à la loi et au Roi, une fidélité inviolable. Mais il est un autre serment non moins sacré pour nous, et que nous venons prêter entre vos mains : c’est celui d’une éternelle reconnaissance. Oui, Nosseigueurs, nous vous jurons à tous un entier dévouement ; nous vous le jurons au nom de tous nos frères ; et cet hommage est à leurs yeux leur plus précieuse offrande. Signé, Bresson, Nouvel, du collège de la Marche ; Farges, Jaccaz, de Lisieux ; Aubé, d’Arcis, de Mazarin ; Lemée, Doulcet, de Navarre ; Mimault, Lafite, des Grassins ; Laurendeau, Leclerc, du Cardinal-le-Moine ; Broché, Jullien, de Montaigu. Madame Mouret, descendante de Lafontaine, lit une adresse dans laquelle elle expose en précis le plan d’éducation qu’elle a offert en don patriotique dans une des précédentes séances. Une députation des représentants de la commune de Paris est introduite. Elle annonce la mort de M. l’abbé de l’Epée et supplie l’Assemblée de prendre en considération l’établissement que ce généreux citoyen avait élevé et soutenu à ses frais pour l’institution des sourds et muets. M. Goudard, orateur de la députation, dit : Messieurs, les sourds et [ muets avaient à Paris un instituteur, et cet instituteur était leur père adoptif. M. l’abbé de l’Epée, dont le nom sera immortel, avait trouvé dans son génie l’art de suppléer la nature ; de remplacer l’un des sens les plus nécessaires par le concours des autres ; de faire en un mot que des individus qui ne pouvaient ni entendre, ni parler, entendaient cependant avec leurs yeux, nous transmettaient la parole par l’écriture, s’élevaient aux idées les plus abstraites de la métaphysique, et exprimaient leurs pensées avec toute la plénitude et l’élégance même dont elles étaient susceptibles ; l’univers entier a admiré cette découverte, qui doit être mise au rang des plus beaux et des plus hardis efforts de l’esprit humain. Mais ce qui était digne aussi d’une grande admiration, c’était la charité active, la bienfaisance intarissable de M. l’abbé de l’Epée, qui consacrait non seulement tous ses soins, mais ses moments, ceux-mêmes de sa vieillesse, à l’éducation de ses élèves ; qui les plaçait isolément, ou réunis, dans des pensions particulières où il payait leur nourriture et leurs vêtements ; il leur donnait des guides à ses frais ; enfin il avait séparé les individus des deux sexes en deux espèces de familles, dont il était en même temps le chef, l’instituteur,