191 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.J des pièces voisines; et dans le*cas où ce droit de champart aurait fait partie d’une substitution ou appartiendrait à un bénéficier, il en sera fait un emploi représentatif dudit droit, soit en héritage, soit, dans les emprunts publics, et le remboursement autorisé à être déposé jusqu’à l’emploi, après toutefois avoir averti deux mois d’avance. Art. 7. Comme la dîme représente les mêmes inconvénients que l’on vient de reprocher au champart, il est très-intéressant pour le cultivateur que l’on puisse également l’anéantir, et pour en tenir Jieu à ceux qui ont droit delà percevoir, il sera fait une évaluation de son produit annuel, année commune, à raison du produit moyen des dix dernières années ; et le prix moyen formera la redevance représentative de la dîme ; laquelle somme sera payée annuellement et à perpétuité au décimateur. Art. 8. Que les capitaineries soient abolies, et que la destruction du gibier soit faite généralement par tout le royaume, et que, dans le cas de délit, il soit permis à différents particuliers de se joindre ensemble pour former leur demande solidaire en dommages-intérêts, et conséquemment remédier à l’abus qui existe aujourd’hui, qui en ôte la liberté en assujettissant les plaignants à ne faire que des demandes personnelles, ce qui donne des entraves si considérables, que la plupart des personnes fondées à se plaindre aiment mieux sacrifier leurs intérêts que de risquer un procès qu’elles ne se trouvent pas en état de soutenir. Art. 9. Que les journaliers et les plus pauvres habitants soient exempts de toutes sortes d’impôts. Art. 10. Qu’il n’y ait dans les marchés de la province qu’un seul poids, une seule mesure, en tout genre, même sur les terres ; que cette mesure soit comme celle de Roi par tout le royaume, à raison de 22 pieds pour perche, et 100 perches pour arpent. Art. 11. Supprimer les milices qui font un tort considérable aux gens de la campagne ; lesquels se cotisent secrètement en une somme de 24 livres chacun pour faire un sort au milicien : charge tellement conséquente que cela les met dans le cas de faire des emprunts pour y faire face. Art. 12. Que les fautes graves soient personnelles, comme elles le sont en Angleterre ; que les parents des coupables n’en soient pas moins appelés aux charges et places d’honneur, toutes les fois qu’ils les mériteront. Art. 13. Que personne ne pourra posséder un bénéfice, sans être engagé dans les ordres. Art. 14. Que les cures d’un produit modique soient augmentées ; et que tous les curés ainsi augmentés, et ceux dont le revenu est considérable, soient tenus d’administrer les sacrements gratuitement à tout le monde, de même que les enterrements des pauvres, lesquels seront réputés tels lorsqu’ils auront été reconnus par un certificat de la municipalité. Art. 15. Que les vicaires soient aussi augmentés, afin de les mettre dans le cas d’exercer honnêtement leur ministère, et de subvenir à l’entretien honnête qu’exige leur étal. Art. 16. Que la justice soient administrée promptement et gratuitement à tout le monde et particulièrement aux pauvres; et que les petites justices soient abolies. Art. 17. Que, dans toutes les provinces du royaume, il y ait continuellement, et surtout dans les saisons et les années calamiteuses, des travaux publics suffisants, toujours ouverts à tous les pauvres qui seront en état de travailler; et qu’ils reçoivent un salaire proportionné au prix des denrées de première nécessité. Art. 18. Que les banqueroutes frauduleuses soient défendues plus que jamais, sous peine de punition corporelle; et qu’elles soient toutes absolument regardées comme telles, à moins que le banqueroutier ne prouve très-clairement les pertes qu’il a essuyées. Art. 19. Que tout particulier ait le droit, en allant et venant, de se servir des voitures qu’il jugera à propos, sans être assujetti à prendre des voitures publiques, et encourir une amende, ou la cherté de ces voitures qui les mettent dans le cas d’aller à pied, ce qui gêne le public. Art. 20. Que les seigneurs hauts justiciers, à qui la loi accorde le droit de voirie et la faculté de planter des arbres le long des chemins verts, soient tenus de tenir compte au cultivateur du tort considérable que lui font ces arbres, tant par leurs racines qui dessèchent la terre à la distance au moins de 20 pieds de large, que par l’ombrage desdits arbres qui empêchent fa végétation, et sous lesquels il ne vient absolument rien. Art. 21. Que la corvée et les lettres de cachet soient abolies. Art. 22. Que le sel, comme denrée de première nécessité, soit diminué ; et que les bureaux des greniers à sel soient augmentés, afin d’en rendre l’achat plus facile. Art. 23. Que la mendicité soit abolie, et qu’on avise aux moyens, d’y remédier, soit par une imposition sur les biens-fonds de la paroisse, soit par la diminution des riches abbayes ou des autres gros-bénéficiers. Le présent cahier de doléances fait et arrêté par nous, soussignés, après avoir été paraphé et coté par première et dernière pages, par nous, Bénard et Masson, en notredite qualité, au nombre de six pages et 23 articles, lesdits jour et an. Signé André Meunier; Eustache Quertier ; Gouja; Jacques Béhu ; J. Do; Laurent Lequertier; J.-C. Masson ; Garry, greffier ; Bénard. CAH1EB Des doléances et demandes de la communauté des habitants de la paroisse de Villabé ( Saint-Marcel 1), dans le duché de Villeroy , en exécution de la lettre du Roi et règlement y annexé pour la convocation des Etats généraux ; ledit cahier fait en l'assemblée desdits habitants , tenue le mercredi 15 avril 1789 (1). Les habitants de la paroisse de Villabé, sans la confiance qu’ils ont dans leur souverain, craindraient pour l’avenir, étant surchargés d’impôts en tous genres ; lesquels joints à la cherté excessive du pain, les mettraient hors d’état de subsister. Mais ils espèrent de la bonté paternelle de Sa Majesté, que, lors de la tenue des Etats généraux, il sera établi des lois fixes et déterminées, dans toutes les parties de l’administration, pour le bonheur et le soulagement des peuples, et le règne paisible de Sa Majesté; c’est le vœu et le désir de toute la nation. Ils demandent : Art. Ier. Qu’il soit statué à l’égard du commerce des blés ; que le prix de cette denrée soit fixé à un taux au-dessus duquel on ne pourra le ven-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de VEmpire. 192 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] dre, même les années de disette. Userait alors nécessaire qu’il n’y ait, dans tout le royaume, qu’une même mesure et le même poids. Art. 2. Que les monopoleurs et accapareurs des blés, soit pour eux, soit par commission, soient punis corporellement comme gens odieux et infâmes à la nation. Art. 3. Etant indispensable de pourvoir aux besoins de l’Etat par une imposition quelconque, les remontrants demandent que les droits d’aides, ainsi que la taille, et autres impositions accessoires, soient totalement supprimés ; et que, pour en tenir lieu, il soit créé d’autres subsides ou impositions moins onéreuses au peuple, dont la répartition se ferait également et indistinctement sur tous les propriétaires de biens-fonds, sans aucune exception de classe ou d’ordre. Quant aux capitalistes, qui jouissent de leur fortune dans des portefeuilles, et de ceux qui ne possèdent aucuns biens-fonds, mais qui vivent de leur commerce et de leur industrie, l’imposition pourrait être suppléée pour une capitation annuelle qu’ils supporteront en raison de leur état. Art. 4. L’abolition des gabelles, ou au moins une diminution considérable dans le prix du sel, qui est un objet de consommation nécessaire pour rendre le commerce des bestiaux aussi florissant qu’il est à désirer. Art. 5. Que les chemins qui avoisinent le village de Villabé soient réparés , surtout celui depuis la Chaussée-de-Montauger jusqu’à la route de Fontainebleau, au-dessus de Ris. Cette réparation peut être faite sur le produit de l’imposition de la corvée en argent. Art. 6. Que le chemin en terre, depuis le village de Villabé jusqu’à celui de la Ghaussée-de-Montauger, qui contient, en longueur, environ un quart de lieue, soit pavé en blocage : ce chemin leur étant absolument nécessaire pour le transport de leurs vins ainsi que de leurs récoltes. Art. 7. Que les charges dejurés-priseurs, créées par l’édit de 1771, soient supprimées comme étant un nouveau fardeau pour les peuples. Art. 8. Que la milice par la voie du sort soit également supprimée, comme étant très-onéreuse dans les campagnes, en privant les pères de famille et les cultivateurs de bons sujets laborieux et utiles à l’agriculture. Fait et arrêté lesdits jour et an. Après les délibérations ci-dessus, il a été arrêté, représenté et observé, £insi que les huit articles : Premièrement, que toutes les pâtures du territoire de la paroisse soient communes pour tous les paroissiens indistinctement, et que les seigneurs ne puissent point empêcher lesdits paroissiens d’aller faire paître leurs bestiaux dans tout le territoire. Secondement, qu’il soit libre à chaque particulier de détruire tous les gibiers qui gâtent considérablement -, par conséquent, que tout le gibier soit détruit. Troisièmement, que tous les colombiers soient détruits comme étant très-onéreux au peuple. Quatrièmement et dernier article. Que toutes les remises soient détruites, vu que les pauvres habitants, qui sont voisins de ces remises, souffrent considérablement à cause des racines qui mangent leurs terres. Fait et arrêté lesdits jour et an que dessus. Signé Mathieu, curé ; Rouffauneau ; Rigollet ; Pierre Quentin; Nicolas Patanls; Jean-Vincent Gaugris; Spire Gaugris Spire Avril ; Jean-Nicolas Lecomte ; Marcel Quentin ; Jean Desassis ; Jean-Pierre Quentin ; Pierre-Ange Quentin ; Lacaze ; Nicolas Le Gerf ; Denis Hébert ; P. Lecerf ; Briard de Villoison; N. Gauthier; Aubin. CAHIER Du sieur Raffaneau l'aîné , propriétaire de la manufacture royale des cuivres battus , sise fiefs des Copeaux et de la Blotterie, au hameau au Moulin-Galand, paroisse de Villabé (1). D’après la liberté que le Roi a bien voulu accorder à ses sujets de s’expliquer clairement et sans crainte dans les assemblées intermédiaires qu’il a ordonnées à cet effet, et d’y faire part de leurs observations pour le bien général et particulier, le sieur Raffaneau l’aîné , propriétaire, avec ses frères, de la manufacture royale des fers battus, sise fiefs des Copeaux et de la Blotterie, au hameau du Moulin-Galand, expose les demandes précises et suivantes : Art. 1er. L’introduction, dans le royaume, des cuivres en rosettes et en plateaux , venant de l’Angleterre, de la Suède, de la Hongrie, et des autres pays étrangers, attendu que les mines qui existent en France, ne sont pas assez abondantes pour fournir et entretenir exactement les fabriques qui y sont établies. Art. 2. La prohibition des cuivres fabriqués dans les pays mentionnés ci-dessus, ou dumoins l’imposition d’un droit prohibitif, faveur que semblent mériter les manufactures nationales (2). Art. 3. La perception d’un droit unique à établir sur les frontières du royaume, et la circulation libre dans son enceinte. Art. 4. La réforme des péages sur les routes que les receveurs perçoivent indistinctement à leur gré, tant à l’entrée qu’à la sortie, ou au moins celle des abus (3). Art. 5. L’établissement des chemins et ponts depuis la papeterie d’Essonnea jusqu’au Moulin-Galand , et la continuation desdits chemins à Villabé, Villoisin, Ormois et Mennecy. Le sieur Raffaneau observe que, depuis plus de vingt ans, ses prédécesseurs et lui ont établi et entretenu, à leurs frais, deux ponts sur la rivière d’Etampes, dite de Juine, plus pour l’utilité du public que pour la leur, puisqu’ils .n’expédient leurs voitures qu’une fois par semaine, et qu’on peut établir la même compensation pour celles qui arrivent du dehors à la fabrique. Art. 6. La conservation des privilèges que le Roi a accordés aux propriétaires de la manufacture du Moulin-Galand en 1738, 1748, et notamment en 1754, privilèges qu’ils n’ont obtenus qu’en faveur de l’utilité de cet établissement, qui est le plus ancien dans ce genre en France, et des dépenses extraordinaires qu’ils ont faites pour le porter au point où il est. Quant aux fiefs des Copeaux et de la Blotterie, il ne leur connaît d’autre avantage que l’exposition qui est des plus favorables à l’exploitation de la manufacture. (!) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. (2) Cassation du traité de commerce avec l’Angleterre. (3) Les cuivres en matières premières, que la manufacture de Moulin-Galand tire 'de Paris, payent les droits du? au port où ils débarquent. Ils acquittent ensuite les péages, les entrées de Paris et le péage à Essonnes, avant d’arriver à ladite manufacture, dernier péage qu’ils payent de nouveau au sortir de la fabrique, et réacquittent les entrées à Paris.