m [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j Novembre fm Cette dénomination est définitivement consa¬ crée par nn décret. Le désarmement de tons les Bordelais sus¬ pects s’est fait sans aucun obstacle. La quan¬ tité des armes des rebelles sera très utile à nos armées du Midi. Il existe dans Bordeaux un nombre considé¬ rable de vrais patriotes, de sans-culottes ardents. Leur civisme effacera tous les délits politiques de leurs concitoyens. La Convention peut comp¬ ter sur le zèle de nos collègues Tallien et Ysa-beau. La République a fait une acquisition im¬ portante en régénérant cette ville; cette régéné¬ ration est assurée. Baudot descend de la tribune au milieu des applaudissements. CONVENTION NATIONALE Séance du 13 brumaire, l’an II de la République française, une et indivisible. (Dimanche, 3 novembre 1793.) La séance s’ouvre à 10 heures du matin. Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 27 du mois dernier. La Convention nationale en approuve la rédac¬ tion (1). La citoyenne Rapigeon renvoie, pour être annulés, les anciens titres qui établissaient en sa faveur une exception contraire aux principes constitutionnels, et dépose une pièce de 6 livres sur l’autel de la patrie. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (2). La commune de Gonesse, admise à la barre, fait offrande d’une grande croix d’argent des¬ tinée au payement des frais de la guerre. Le Président en accepte l’hommage au nom de la Convention, et l’Assemblée en décrète la men¬ tion honorable et l’insertion au « Bulletin » (3). Compte rendu du Moniteur universel (4). Une députation de la commune de Gronesse apporte et dépose sur l’autel de la patrie, une croix d’argent. Les citoyens Salleron frères, marchands tan¬ neurs au faubourg Saint-Marcel, à Paris, de¬ mandent que la Convention suspende le cours de la procédure dirigée contre eux au tribunal cri-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 283. (2) Ibid. (3) Ibid. (4) Moniteur universel |n° 45 du 15 brumaire an II (mardi 5 novembre 1793), p. 183, col. 3]. minel, comme prévenus de n’avoir pas satisfait à la loi sur les accaparements. La Convention nationale passe à l’ordre du jour (1). Suit la 'pétition des citoyens Salleron (2) : (Pétition des citoyens Salleron frères , tanneurs à Paris, à la Convention nationale : « Législateurs, , « Voulant faire disparaître tous les maux que des spéculations meurtrières faisaient à la so¬ ciété, vous avez soumis les fabricants, par la loi du 26 juillet dernier, sous peine d’être répu¬ tés accapareurs, à déclarer la nature et la quan¬ tité des matières premières qu’ils ont dans leurs ateliers, et d’en justifier l’emploi. « Obéissant à cette disposition de la loi, les frères Salleron ont déclaré au comité révolu¬ tionnaire de leur section, les matières premières qu’ils avaient dans leurs ateliers, et depuis, un commissaire nommé par la section a vérifié l’existence des objets déclarés, et la déclaration s’est trouvée exacte. « Dans leur déclaration, étaient comprises les matières premières qu’ils étaient dans le cas d’employer, pour la manipulation et fabrication de marchandises qui étaient dans les fosses d’une tannerie qu’ils exploitent, appartenant à la veuve Cornisset, et située aux environs de leur propre tannerie. « Les frères Salleron, appliqués à faire fleurir leur fabrique qu’ils ne font valoir que depuis 15 mois environ, ce qui exclut toute idée d’acca¬ parement qu’on pourrait leur supposer, avaient lieu de croire qu’ils avaient pleinement satis¬ fait à la loi qui n’exige pas d’eux, d’autre décla¬ ration que celle qu’ils ont faite. La veuve Cor¬ nisset, qui se trouvait dépositaire des marchan¬ dises qui étaient en fabrication chez elle appar¬ tenant aux frères Salleron, avait cru devoir pareillement en faire la déclaration, quoique la loi n’eût astreint les fabricants à déclarer que la nature et la quantité des matières pre¬ mières. « Un commissaire de la section s’est présenté chez elle, et, malgré la représentation qu’elle fit du double de sa déclaration reçue au comité révolutionnaire, il fut dressé un procès-verbal tendant à constater une prétendue contraven¬ tion, de ce que la déclaration avait été faite après l’expiration du délai accordé par la loi pour la faire. La veuve Cornisset a été traduite devant le directeur du Juré du 5e arrondisse¬ ment; elle subit interrogatoire, et répéta ce qu’elle avait déjà déclaré. « Les frères Salleron furent pareillement tra¬ duits; rendant hommage à la vérité, mais éloi¬ gnés de l’idée du crime qu’on leur imputait, ils ont déclaré, qu’il était vrai que les marchan¬ dises qui étaient chez la veuve Cornisset leur appartenaient ; qu’il ne pouvait y avoir de con¬ travention ; d’abord, parce que, d’après la loi, étant encore en fabrication, elles n’étaient pas susceptibles d’être déclarées, et en second heu, parce que la veuve Cornisset, encore qu’elle n’y (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 283. (2) Archives nationales, carton C 280, dossier 763, 201 [Convention nationale.] fût pas astreinte, les avait 'déclarées, ainsi qu’il résultait du double de la déclaration visée au comité, et que cette déclaration faite avant qu’on fût venu chez elle constater par un procès-verbal une prétendue contravention, elle avait satisfait à la loi. Le directeur du juré a cru néan¬ moins, devoir envoyer les frères Salleron dans une maison d’arrêt où ils sont détenus. « Les frères Salleron, ainsi que leurs con¬ frères, car il est bon d’observer que tous les tanneurs de Paris et ceux des autres départe¬ ments, n’ont point fait autrement, ont exécuté la loi littéralement ; ils ne se sont pas permis de l’interpréter; c’est à vous, législateurs, si elle ne présente pas un sens clair et positif, à éclai¬ rer, par des articles additionnels, les citoyens qu’elle concerne; et pour vous mettre à même de prononcer sur la prétendue contravention reprochée aux tanneurs, veuillez bien écouter les détails qu’ils sont dans le cas de donner sur ce qu’ils ont dû entendre, d’après les termes de la loi qui les astreint à déclarer la nature et la quantité de matières premières qu’ils ont dans leurs ateliers. « La loi est infiniment sage et juste, qui dé¬ clare coupables d’accaparement, ceux qui dé¬ robent à la circulation des marchandises ou denrées de première nécessité, qu’ils achètent et tiennent enfermées dans un lieu quelconque, sans les mettre en vente journellement et publi¬ quement; mais dans cette dénomination géné¬ rale de marchandises de première nécessité, les tanneurs ont-ils jamais pu croire que se trou¬ vaient compris les cuirs qu’ils faisaient fabri¬ quer et qui ne sont pas susceptibles d’être livrés au public et vendus journellement. On sait que les cuirs sont pendant longtemps en manipula¬ tion avant d’être vendus pour être employés; que certaines peaux ont besoin de rester dans les fosses, les unes pendant deux ans, d’autres pendant un an, d’autres enfin pendant six mois, et qu’il n’est pas possible de les exposer en vente au public, avant que ces différents es¬ paces de temps soient révolus, pendant lesquels on leur donne les façons nécessaires. Dès lors, tant que ces peaux sont encore en fabrication, elles ne peuvent être considérées comme ces marchandises de première nécessité, dont la loi a voulu parler, et il n’est pas possible d’en faire aucun emploi. « Les commissaires nommés par les sections, pour l’exécution de la loi sur les accaparements, ont à coup sûr donné à la loi une extension qu’elle n’avait pas; l’inconvénient qui en ré¬ sulte pour les tanneurs est funeste, car tous sont dans la persuasion qu’il ne fallait décla¬ rer que les matières premières, et ils se trou¬ vent, par là, exposés à être inquiétés. C’est donc une interprétation formelle de la loi qu’ils solli¬ citent pour qu’il soit constant que les marchan¬ dises de tannerie ne peuvent être considérées comme marchandises de première nécessité, tant qu’elles sont en cours d’apprêt et de fabri¬ cation; et dans tous les cas, attendu le silence de la loi à cet égard, que les tanneurs qui ont pu le croire ne sont point en contravention. « Les frères Salleron, premières victimes d’une erreur non prévue par la loi, sollicitent de votre bienveillance de leur tendre une main secou-rable : ils y ont des droits par l’estime de leurs concitoyens, le patriotisme dont ils ont tou¬ jours été animés, et la réputation intacte dont ils ont toujours joui. Ils demandent que vous veuilliez bien renvoyer leur pétition à vos co-I 13 brumaire an H 3 novembre 1793 mités de commerce et de législation réunis pour vous être fait un rapport dans le plus bref délai, et vous mettre à la portée de prononcer sur l’objet de leur pétition, en déclarant, d’ail¬ leurs, qu’ils n’ont pu être en contravention à la loi, et qu’en attendant un rapport la procé¬ dure commencée contre eux soit suspendue, et eux rendus à la liberté, aux offres qu’ils font de fournir caution de leurs personnes. Ils sont pères de famille, à la tête de travaux considé¬ rables où plus de soixante ouvriers sont em¬ ployés chaque jour : ce sont des considérations puissantes aux yeux des dignes représentants du peuple. « Le IIe jour du 2e mois de la deuxième année républicaine. » La commune d’Écouen vient déposer sur l’au¬ tel de la patrie tout l’or, l’argent, meubles et ustensiles qui existaient dans l’église de ce lieu. Elle ne peut, dit-elle, en offrir davantage, mais son zèle pour la chose publique est sans bornes. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). Suit l'hommage de la commune d'Ecouen (2) : La commune d'Ecouen. chef -lieu de canton , district de Gonesse, département de Seine-et - Oise, à la Convention nationale. « Législateurs, « Les habitants de la commune d’Écouen vous apportent un faible don, qui est le reste de ce que les voleurs ont laissé dans leur église, qui a été volée en 1788, ainsi que les cravates en or qui souillaient leur drapeau. « Le vœu de nos concitoyens, qui est aussi le nôtre, est de vous engager de rester à votre poste, jusqu’à la paix ; nous vous le répétons pour la seconde fois, refondez les corps administra¬ tifs et judiciaires, le salut de la République en dépend. « Nous respectons tous vos décrets, et nous osons nous flatter d’en faire notre culte, mais nous avons à nous plaindre non de la loi qui fixe un maximum aux prix des grains, mais de son exécution. « La commune d’Écouen a récolté environ 1,034 setiers de blé de moins cette année qu’il ne lui en faut pour sa consommation; sa population est d’environ 1,100 âmes et il faut y en ajouter au moins 200 comprenant les étrangers qui logent dans les auberges, et les militaires qui y logent presque journellement. « Il y a deux fermiers de l’émigré Condé qui, suivant la loi, sont obligés de payer leur fer¬ mage en grains, de sorte que les habitants d’Écouen ne peuvent qu’avec une peine in¬ croyable se procurer du pain, les plus pauvres sont obligés de faire quelquefois cinq et six lieues pour se procurer un pain de six livres, parce que les boulangers ne peuvent s’appro¬ visionner suffisamment aux marchés, et que la loi du 11 septembre ne leur permet pas de s’ap¬ provisionner dans la commune. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 284. (2) Archives nationales, carton G 279, dossier 739. ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j