99 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juillet 1790 | fection des toiles de Jouy, et même des fabriques d’Alsace. La manufacture de Jouy n’imprime guère que sur des toiles blanches venues des Iodes. Je n’examinerai pas si, dans un état de prospérité, les marchandises étrangères sont nécessaires : tant que l’inégalité des fortunes amènera l’inégalité des jouissances, l’abus du luxe sera un besoin; jamais nos manufactures ne feront aussi bien que les Indiens. L’Angleterre fait dans l’Inde un commerce de 80 millions; cependant elle est toute vivante de fabriques, ou plutôt elle n’est qu’une grande manufacture. Gomment donc... Plusieurs membres demandent l’ajournement à samedi. 11 est prononcé. La séance est levée à 10 heures et demie. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DÜ 15 JUILLET 1790. SECOND RAPPORT DU COMITÉ DE MENDICITÉ. État actuel de la législation du royaume, relativement aux hôpitaux et à la mendicité (1). C’est dans l'hospitalité des anciens temps que l’on doit rechercher les premières traces des éta-blissemenls connus parmi nous sous le nom d'hôpitaux. Dans ces siècles reculés, où l’exercice de cette vertu était en grand honneur, il y avait dans toutes les contrées civilisées des asiles ouverts pour les étrangers. Tel était surtout l’usage généralement établi en Orient; divers monuments historiques ne laissent aucun lieu de douter que les premiers hôpitaux n’aient été une imitation de ces antiques établissements. Lorsque la religion chrétienne se fut répandue, ces asiles prirent une autre forme. Les pèlerinages furent alors en grande pratique, et le premier fruit de cette religion fut d’apporter parmi ses prosélytes une charité que les persécutions tendaient encore à rendre plus ardente. Touchés des maux auxquels étaient exposés des milliers de fidèles, à peine échappés aux supplices, aux prisons affreuses, aux travaux publics, auxquels ils avaient été condamnés, les empereurs s’empressèrent de leur assurer, dans de spacieux hospices, les secours et les consolations de la religion qu’ils avaient embrassée et défendue. Tel fut l’objet des premiers édits publiés par Constantin, à la piété duquel on dut les premiers asiles de ce genre; cet usage religieux se perpétua dans le Bas-Empire. Les hôpitaux se multiplièrent prodigieusement en Italie, en Espagne, surtout du temps des croisades. Ce fut à ces pieuses expéditions que dut principalement son origine l’hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem. A Malle, il y avait un riche hôpital pour les malades indigents, servi par des chevaliers, en mémoire de l’institution des chevaliers hospitaliers. Enfin, on ne peut douter que les premières com-manderies de Malte n’aient été des hospices ou auberges de pèlerins, allant et revenant des Croisades. (I) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. En France, comme dans toute la chrétienté, les premiers hôpitaux ne furent aussi que des asiles pour les pèlerins. On les trouve existants dès les premiers temps de la monarchie; mais on n’a nulle trace certaine de leur première institution. L’origine des plus anciens hôpitaux du royaume se perd dans l’obscurité des temps; on sait seulement que leurs revenus étaient assignés sur les revenus faits au clergé, car, dans les temps de la primitive Eglise, on n’accordait de biens à ses ministres qu’à la condition d’en consacrer une partie aux hôpitaux. Ce n’est guère que vers le vme siècle que l’on commence parmi nous à suivre leur histoire. On les voit, depuis cette époque, prendre, surtout, différentes formes. Dans les temps antérieurs, on semblait avoir laissé confondre les divers genres de malheureux et de misères : alors on parut sentir la nécessité de soigner plus particulièrement, ou à part, les pauvres malades; on en fit une classe séparée, et ce fut d’abord dans les cloîtres, et même quelquefois dans les églises, qu’on crut à propos de les placer : de là le nom et l’origine de ceux de nos hôpitaux, connus sous la dénomination d 'Hôtels-Dieu, et leur situation près des métropoles. Bientôt après, deux maladies cruelles donnèrent lieu à des fondations, d’où résultèrent deux genres particuliers de ces hôpitaux ou hospices : tel fut le feu Saint-Antoine, le feu sacré ou mal des ardents, qui, vers le Xe siècle, fit de si grands ravages en France. Presque tout le royaume, le Dauphiné surtout, se ressentit de la maladie, ce qui détermina le pape Urbain II à fonder un ordre hospitalier sous le nom de Saint Antoine, dans la vue de secourir ceux qui en étaient atteints, et de choisir, pour le chef-lieu de cet ordre, Vienne en Dauphiné, où, vingt-trois ans auparavant, le corps de ce saint avait été transporté de Constantinople. On sait que c’était le temps de la plus grande ferveur des Croisades. Sur la fin du XIe siècle, elles introduisirent en Europe une nouvelle caJi-lamité; la lèpre se répandit de toutes parts, et le caractère de malignité contagieuse qu’avait cette espèce de maladie, faisant abandonner les malheureux qui en étaient atteints, on fut obligé d’élever des hospices pour les soigner; ces hospices furent connus sous le nom de Léproseries ou Maladre - ries. Le nombre en fut bientôt très considérable. Suivant Mathieu Paris, il passait dix-neuf mille, au xiii0 siècle, dans la chrétienté. Un legs de Louis VIII , en 1225, annonce que, dans ce royaume de France seul, il y en avait plus de deux mille. Ainsi, dès ces premiers siècles, la France fut couverte d’établissements ou asiles pour les pauvres, qui furent de vrais hôpitaux. Ces établissements étaient des hospices pour les pèlerins, des Hôtels-Dieu pour les malades, des établissements d’ordres hospitaliers, des maisons pour le feu Saint-Antoine, et des Léproseries ou Maladreries dont le nombre était surtout le plus considérable. . Le feu Saint-Antoine ayant bientôt disparu, les maisons, qui lui étaient destinées, ont été successivement abandonnées; on vit bientôt aussi la lèpre s’éteindre, et la fureur des croisades s’étant assoupie en même temps que l’habitude et le goût des pèlerinages, les ordres hospitaliers se sont insensiblement anéantis : des débris de ces grands établissements, que des calamités passagères avaient nécessités, se sont agrandis les hôpitaux, si éloignés d’abord de l’usage qu’ils devaient avoir, et de l’étendue qu’ils ont acquise dans des temps postérieurs.