444 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I ?! brumaire an il I 18 novembre 1793 toyen qui en a besoin ne doit souffrir dans l’é¬ tendue de la République. Les distances sont immenses de la presque totalité des localités jusqu’aux bureaux du ministre; et on ne peut pas commander au besoin l’attente des voyages et des vérifications des rôles. D’ailleurs, la loi déclare les municipalités responsables, comme tout agent qui dispose des intérêts de la Répu¬ blique. La loi a tout prévu; mais elle ordonne que les fonds soient promptement envoyés : cette disposition ne peut être atermoyée. Le soldat remplit son engagement, son devoir envers la patrie; la patrie doit remplir les siens envers lui. Le soldat n’a pas de terme pour exposer sa vie; n’en mettez pas pour secourir la famille qu’il vous a recommandée. Le ministre doit faire son devoir contre les municipalités négligentes ou prévaricatrices, quand il en véri¬ fiera les rôles. Voici cependant, citoyens, un amendement que le comité a cru devoir proposer sur votre décret du 15 septembre. Vous ne voulez pas, sans doute, que les fonds soient arbitrairement mis à la disposi¬ tion des municipalités de canton, s’il est un moyen de les maingarnir assez promptement, en prévenant tous les risques de la dilapidation. Il est même des municipalités qui ne voudraient pas les encourir, surtout dans les campagnes où la malveillance, le vol, pourraient les rendre vic¬ times d’un dépôt d’autant plus considérable que le ministre, ne connaissant pas la latitude des besoins de chaque canton, pourrait, par une prévoyance irréprochable, grossir les envois des fonds. Eh bien ! décrétez que les fonds seront distri¬ bués dans les caisses de chaque receveur de dis¬ trict de la République (car partout il y a des familles qui ont droit aux secours;), et que les municipalités de canton iront les réclamer des receveurs, à mesure et sur l’aperçu des besoins de leur arrondissement. Cette mesure prévient tout inconvénient, et ne porte aucun retard au citoyen qui a droit au secours. Dans tous les cas, il faut bien que les municipalités prélèvent les sommes dans quelque dépôt fixe de leurs localités ; or, la multiplicité des receveurs rend la mesure que le comité vous soumet, bien facile et bien prompte à l’exécution. Projet de décret. « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité des secours publics, décrète : Art. 1er. « Le ministre de l’intérieur distribuera et fera verser, sans délai, dans les caisses des rece¬ veurs de districts de la République, les fonds qui ont été mis à sa disposition pour les familles des militaires et marins qui y ont droit, d’après les lois des 26 novembre, 4 mai et 15 septembre 1793 (vieux style). Art. 2. « Les municipalités de cantons prélèveront sur les fonds, d’après leur délibération, les sommes nécessaires aux secours à répartir auxdites familles, dans leur arrondissement, conformément aux rôles qui en auront été dressés suivant les lois. Art. 3. « Les sommes remises par les receveurs de district leur seront passées en compte, en rap¬ portant les délibérations des municipalités quittancées. Art. 4. « Lesdites municipalités acquitteront, sans délai, les secours que lës lois accordent aux fa¬ milles des militaires et marins, et feront, incontinent après, parvenir au ministre de l’in¬ térieur les rôles et pièces justificatives des paiements qu’ils auront faits. » La Convention nationale a rendu les décrets qui suivent : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de liquidation [Pottier, rapporteur (1)], qui lui a rendu compte des états dressés par le directeur général de la liquidation, en conformité de la loi du 31 juil¬ let 1791, relative aux employés des ci-devant fermes et administrations supprimés, décrète : Art. 1er. « Il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de pensions annuelles et viagères, aux em¬ ployés supprimés, de la première classe, compris dans le premier état annexé à la minute du pré¬ sent décret, la somme de 339,839 liv. 10 s., la¬ quelle sera répartie suivant la proportion établie audit état. Art. 2. « Il sera également payé par la trésorerie na¬ tionale, à titre de pensions annuelles et viagères, aux employés supprimés, de la seconde classe, dénommés au second état annexé à la minute du présent décret, la somme de 33,136 liv. 2 s. 1 d., laquelle sera répartie entre les employés, suivant la proportion établie audit état. Art. 3. « Il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de secours, aux employés supprimés, de la troisième classe, compris dans le troisième état annexé à la minute du présent décret, la somme de 150,930 liv. 12 s. 9 d., laquelle sera répartie entre eux dans la proportion établie audit état. Art. 4. « Les pensions et secours portés au quatrième état également annexé à la minute du présent décret, intitulé : Réclamations Remployés sup¬ primés, seront payés par la trésorerie nationale, conformément aux fixations portées en l’état : les articles qui concernent les employés dans les décrets qui y sont cités, seront rayés sur les mi¬ nutes et les expéditions desdits décrets, et par¬ tout où besoin sera. Art. 5. « Il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de pension, au citoyen Henri-Abraham Bé-(1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 277, dossier 726. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. » brumaire an U 445 1 J M8 novembre 1793 chuat, ancien chef du bureau des bois ecclésias¬ tiques, supprimé par l’effet de la loi du 22 juin 1790, sur décret du 6 du même mois, la somme de 800 livres, conformément à l’article 6 de la loi du 31 juillet 1791. Art. 6. « Les pensionnaires compris au présent décret, et dont les pensions excèdent 3,000 livres, ne jouiront provisoirement, et à compter du 1er juil¬ let 1793, que de ladite somme de 3,000 livres conformément aux décrets des 19 juin et 28 sep¬ tembre derniers. Art. 7. « Les pensions fixées par le présent décret com¬ menceront à courir du 1er juillet 1791, conformé¬ ment à l’article 17 de la loi du 31 juillet de la même année, sauf pour ceux des employés qui ont continué leurs fonctions postérieurement à cette époque, pôur lesquels les pensions ne com¬ menceront à courir que du jour de la cessation de leur traitement. Art. 8. « Il leur sera fait déduction des sommes qu’ils ont reçues à titre de secours provisoire depuis le 1er juillet 1791. Art. 9. « Les pensions et secours accordés par le pré¬ sent décret ne seront payés aux personnes dé¬ nommées dans les différents états, qu’en se con¬ formant, par elles, à toutes les lois précédemment rendues pour les créanciers et pensionnaires de l’État, et notamment aux décrets des 19 et 30 juin, et à l’article 3 de celui du 17 juillet dernier (1). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de liquidation [Pottier, rapporteur (2)] sur les réclamations des citoyens Daniel Mourier et Jacques Porcher, volontaires au 2e bataillon du Gard, et sur celle de la citoyenne veuve de François Gerdet, gen¬ darme de la 33e division, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les pensions de 365 livres accordées à Daniel Mourier par le décret du 10 septembre 1793, et à Jacques Porcher par celui du 29e jour de ven¬ démiaire, seront portées, en conformité de l’ar-tilce 7 du décret du 6 juin et du décret du 8 juil¬ let dernier, à la somme de 600 livres pour chacun d’eux, dont ils jouiront en se conformant aux lois rendues sur les pensions, et notamment à l’article 5 du décret du 16e jour de vendémiaire. Art. 2. « La pension de 150 livres accordée, par décret du 20 de ce mois, à la veuve François Gerdet, sera portée à la somme de 199 liv. 4 s., conformément à l’article 2 du décret du 4 juin. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 305 à 307. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 277, dossier 726. Art. 3. « Les articles qui concernent les réclamants ci-dessus dénommés, dans les différents décrets énoncés, seront rayés sur les minutes et les expé¬ ditions desdits décrets, et partout où besoin sera (1). » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de liquidation [Pottier, rapporteur (2)], décrète : Art. 1er. « Il sera payé par la trésorerie nationale, à titre de pension annuelle et viagère, au citoyen Amand-Saillant, volontaire au 3e bataillon do l’Orne, qui a perdu la vue le 10 juin dernier, à l’affaire de Machecoul, en combattant les rebelles de la Vendée, la somme de 2,400 livres à compter du jour de sa blessure, sous la déduction de ce qu’il a reçu à titre de secours provisoire, et en se conformant aux lois rendues pour tous les créan¬ ciers et pensionnaires de l’État. Art. 2. « Le ministre de la guerre est autorisé à déli¬ vrer au citoyen Saillant le brevet de capitaine honoraire. Art. 3. « Le trait de bravoure du citoyen Saillant sera transmis à la Commission chargée de recueillir les actions d’éclat, et aux armées par la voie du « Bulletin » (3). » Compte rendu du Bulletin delà Convention (A). Charles Pottier, membre du comité de liqui¬ dation, section des pensions, a fait le rapport suivant : Je viens proposer à la Convention nationale de récompenser le courage et l’intrépidité d’un des défenseurs de la patrie. Déjà elle a mani¬ festé à ce soldat -citoyen les sentiments de recon¬ naissance dus à sa bravoure; mais il est de ces traits qu’on ne se lasse pas d’entendre et d’ad¬ mirer. Un jeune volontaire d’un bataillon de l’Orne, armé contre les rebelles de la Vendée, portant dans son cœur l’ardent amour de la liberté et le désir d’exterminer les brigands, Amand Sailland, s’est trouvé dans la malheureuse affaire de Ma¬ checoul le 10 juin. Dans le fort du combat, une balle l’atteint à la tempe gauche et sort par la droite; devenu tout à coup aveugle, ses camarades volent à son secours, ils veulent le soulager du poids de ses armes et le porter à l’hôpital; il se refuse à leurs embrassements : « Non, leur dit-il, je suis encore en état de me défendre; si l'ennemi s'ap¬ proche, je ne pourrai pas le voir, mais je l'enten¬ drai. » Il met un doigt à chaque ouverture de ses plaies, pour empêcher le sang de couler, et il (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 308. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 277, dossier 726. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 308. (4) Supplément au Bulletin de la Convention du 4 frimaire an II (dimanche 24 novembre 1793).