248 [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 juin 1791.1 fait envers lesdits agents ou préposés sera coupable du crime, etc. » M. de Folleville. Je crois que M. le rapporteur s’écarte des vrais principes, en adoptant la modification de M. de Montlosier, et je déclare que la véritable sécurité d’ua homme libre est dans sa confiance et dans son respect pour la loi (. Applaudissements à grawc/n?.) parce qu’il sait qu’elle le protégera contre les vexations des individus et des corps politiques quelconques. Il ne doit donc faire aucune résistance, et celui qui se révolte doit être puni de 2 ans de prison. M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. D’après ces observations, je tiens à la première rédaction. M. de Montlosier. M. de Folleville a raison, mais la peine de 2 ans est absurde. Je demande qu’elle soit réduite à 6 mois. M. Delavigne. Oh que non ! les gens comme il faut trouveront cela trop doux. M. Barnave. La peine portée contre celui qui résiste à la loi, au moment où elle est prête à s’emparer de sa personne, est tellement établie par l’esprit même de la liberté, que vous l’avez consacrée par la déclaration des droite. Un article porte que celui qui résistera à la loi se rend coupable par sa résistance, et je n’ajoute à cela qu’un fait puisé dans les moeurs d’un pays libre et arrivé à un Français illustre. M. de Rochambeau, commandant l’armée dans l’Amérique septentrionale, combattant pour la cause de la liberté, a été constitué prisonnier, à la tête de son armée par la simple autorité d’un officier de justice qui s’est présenté et auquel il a obéi sur-le-champ. Telle est la conduite d’un homme libre qui sait que la loi est sacrée pour tout citoyen dans toutes ses parties, et par conséquent dans le Gode pénal. (Applaudissements.) (L’Assemblée consultée, rejette l’amendement de M. de Montlosier et décrète l’article 1er sans changement.) M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur, donné lecture de l’article 2 ainsi conçu : « Lorsque la résistance aux agents ou dépositaires de la force publique désignés en l’article précédent sera opposée avec attroupement et que les officiers civils de la municipalité ou du canton auront été contraints de requérir l’action de la force publique contre lesdites personnes attroupées; lorsqu’il leur aura été fait les sommations déterminées par la loi, si l’attroupement continue, les chefs de l’émeute et ceux qui seront arrêtés sur-le-champ les armes à la main, ou en état de résistance, seront punis de la peine de la gêne pendant 6 années. » M. Malouet. Je demande qu’il soit ajouté à cet article : « sans préjudice de la promulgation de la loi martiale ». M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. La loi martiale et le Gode pénal ont deux objets différents : la première prévient les effets des attroupements séditieux; le second les punit. L’article proposé n’abroge d’ailleurs pas la loi martiale. M. Malouet. Je complète mon amendement comme suit : « sans préjudice de la promulgation de la loi martiale dans les cas qui en seront jugés susceptibles ». M. Malès. Je demande que le comité s’explique s’il entend substituer les peines portées par cet article à celles de la loi martiale. M. Le Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. La première partie de la loi martiale propose les formes pour prévenir les attroupements; la seconde s’occupe de les réprimer; mais cette loi ne prévoit pas les cas divers portés par cet article. M. Barnave. Je demande pourquoi un citoyen serait puni plus gravement à la réquisition de la force publique par le département que par la municipalité. (L’assemblée ajourne la suite de la discussion à la prochaine séance.) M. le Président lève la séance à trois heures et demie. ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU MERCREDI 15 JUIN 1791 AU MATIN. Adresse de M. Joseph-Marie Belgodère, officier municipal de la ville de Bastia, chef-lieu du département de Corse, et député extraordinaire de la commune d’icelle près l’Assemblée nationale. Messieurs, Le conseil général de la commune de Bastia, contrarié dans les fonctions qui lui sont déléguées par la loi, pour le maintien de l’ordre et de la police, et témoin impuissant de la tyrannie qui s’exerce sur les citoyens, sous une Constitution qui garantit à tous l’égalité, la propriété et la liberté, a cru devoir, pour remédier à ces maux, employer le seul moyen légal qui fût dans ses mains, la seule ressource accordée par la loi, même contre les atteintes portées à la loi par les corps administratifs, celui de vous les dénoncer. C’est ce que le conseil de la commune a fait par son mémoire du 10 mars dernier. Il me députe aujourd’hui vers vous, Messieurs, pour vous rendre compte des événements qui ont, depuis cette époque, scandalisé et effrayé les bons citoyens. Je vais vous les retracer. Le département de Corse se voyant avec raison, gravement inculpé dans le mémoire du 10 mars, et ne pouvant contredire des faits qui constataient sa conduite inconstitutionnelle, a pensé qu’il se procurerait au moins une justification indirecte s’il parvenait à faire improuver la conduite de la municipalité, par les citoyens mêmes de Bastia. Pour en exécuter le projet, il fallait préparer les esprits. Aussi vit-on bientôt des émissaires répandre partout que le conseil général de la commune s’était permis d’adresser à l’Assemblée nationale un mémoire qui contenait des demandes contraires aux intérêts de la ville. Le mémoire imprimé et affiché a suffi pour détruire ces insinuations. Néanmoins, comme il se trouve à Bastia, un