336 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE En foi de ce, nous avons donné le présent certificat, que nous avons signé et fait contresigner par le secrétaire-greffier de la commune, qui y a apposé le sceau de la municipalité. Fait à Uzès, ce 2 janvier 1792. Suivent les signatures. Nous, administrateurs composant le directoire du district d’Uzès, au département du Gard, certifions et attestons ; 1°. que les signatures ci-derrière sont sincères, et que ceux qui les ont faites sont tels qu’ils se qualifient ; 2°. que les faits constatés par ce certificat sont particulièrement connus du directoire, qui ne peut se refuser à en attester la sincérité, et à déclarer que non seulement la commune d’Uzès, mais tout le district, a ressenti les bons effets du zèle, du courage et de la prudence de M. Voulland dans les occasions difficiles où nous avons été placés ; que le directoire a toujours trouvé dans ce citoyen respectable l’ardeur et le zèle le plus actif pour seconder les mesures nécessitées par les circonstances, et veiller efficacement au maintien de l’ordre et à l’exécution des lois. En foi de quoi, nous avons expédié le présent. Au directoire du district, les jour et an susdits. Suivent les signatures. VOULLAND : Le lendemain du jour de l’émeute dont il est question dans le certificat que je viens de lire, les gardes nationales des communes des environs d’Uzès, qui s’étoient portés en foule à la maison du nommé Trin-quelagues, qu’on regardoit comme l’auteur de tous les troubles, quoique cet homme fût le plus cruel ennemi de mon oncle, ce dernier se porta vers la maison assaillie, et déclara qu’on lui passeroit plutôt sur le corps que d’y pénétrer. Un vieillard de 70 ans, qui est capable de cet acte de vigueur, ne peut pas devenir tout-à-coup un horrible septembriseur. (Il se fait du bruit dans une partie de la salle.) Plusieurs voix : Il ne s’agit pas de cela. Je sais qu’il ne s’agit pas de ce que mon oncle a fait par le passé, ni de ses services révolutionnaires ; je sais que la République et la Convention ne peuvent et ne veulent re-connoître et récompenser que la persévérance finale ; mais, citoyens, je parle pour un père ; encore quelques instans ; au nom de la piété filiale, écoutez-moi et prononcez. Je suis ici pour me soumettre à votre décret, et pour le faire exécuter, s’il le falloit. Ah ! si un moment d’erreur, occasionné par le désir de servir son pays dans une circonstance où il croyait pouvoir lui être utile, peut être imputé à crime; si ce crime doit être poursuivi et puni, qu’il soit constant que mon oncle n’est coupable que d’erreur. (On s’écrie de tous côtés : On ne dit pas qu’il soit coupable. Plusieurs membres se lèvent pour rendre justice au citoyen Voulland, général. ) LE RAPPORTEUR : Les comités n’ont rien entendu prononcer contre le général Voulland. Nos collègues ayant cru devoir le destituer, le général Voulland doit aux termes de la loi du 17 septembre, être mis en arrestation. Le décret est adopté à la presque unanimité. Sur la motion de Barras, la Convention approuve la conduite des représentans du peuple à Marseille. BASSAL : J’ai demandé la parole pour demander un délai d’un jour. Les mesures proposées à la Convention nationale, un décret qui met un citoyen hors de la loi, peuvent être ajournés à un si court intervalle sans aucun danger. (Murmures) On demande d’aller aux voix. BASSAL persiste à conserver la parole. Plusieurs membres s’y opposent. Les murmures empêchent l’opinant d’être entendu. Le président consulte l’Assemblée. Elle décrète que Bassal sera entendu. BASSAL : Je suis étonné que mes collègues, qui ont connu par une longue expérience mes sentimens et mes principes refusent de m’entendre. N’ai-je pas assez prouvé par des missions difficiles mon aversion et mon horreur pour les hommes sanguinaires et cruels. Périssent tous ceux qui veulent faire détester le régime de la liberté ! périssent tous ceux qui sous un masque perfide de popularité, ébranlent la confiance et le respect qui sont dus à la Convention nationale et à ses décrets ! Mais lorsqu’il s’agit de les juger, lorsqu’on ne peut les juger que sur la foi d’une lettre dont l’authenticité ne porte aucun caractère d’évidence, quel danger y a-t-il d’attendre au lendemain? Citoyens, est-ce ici la première conjuration que vous avez eu à punir? est-ce la première révolte que vous ayez été forcés de réprimer? Rappelez-vous ce qui se passa dans la République dans le cours de l’année passée. Plusieurs villes, quelques départemens se montrèrent rebelles aux décrets de la Convention : la révolte s’y montra avec les caractères les plus terribles et les plus menaçans; des bataillons furent armés et organisés ; des administrations perfides dirigèrent leur marche contre Paris ; des représentans du peuple furent arrêtés ; plusieurs furent dévoués à la proscription et à la mort : les décrets de la Convention furent méconnus et même méprisés. Quelle fut alors la conduite de la représentation nationale ? Rien ne fut précipité ; toutes les mesures furent épuisées avant que les coupables fussent punis par la force. Souvenez-vous qu’un seul jour de délai eût épargné tous les regrets qu’a laissés la journée de Nancy. Je demande que les mesures proposées soient renvoyées à la séance du lendemain, et que les représentans du peuple près les départemens des Bouches-du-Rhône, et ceux qui ont été en mission dans ce département, soient entendus dans le comité.