647 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Art. 5. Que personne ne puisse être eirmrisonné et détenu pour aucun motif, qu’en vertu des lois du royaume. Art." 6. Que les capitaineries soient supprimées, comme destructives du produit des terres. > Art. 7. Qu’il ne puisse être pris aucune propriété soit pour des chemins, soit pour tout autre objet d'intérêt public, sans les payer comptant, sur le pied de la plus haute valeur." Art. 8. Que les degrés de juridiction soient réduits à deux seulement, de manière que toutes les affaires soient portées, dans le cas d’appel du premier jugement, ou au présidial, si l’objet n’excède pas sa compétence, ou au parlement. Art. 9. Que les procédures soient simplifiées et les frais modérées, tant en matière civile qu’en matière criminelle. Ar. 10. Qu’il soit pris des précautions par l’établissement de magasins nécessaires, pour que les sujets du Roi ne soient point exposés à manquer de blé, ou à acheter le pain à des prix excessifs dans les années moins fertiles que d’autres, de sorte que le public soit toujours approvisionné pour deux ans et qu’il ne puisse être fait aucune exportation de grains, que lesdits magasins ne soient totalement remplis. Art. 11. Que les milices soient supprimées comme extrêmement nuisibles au public et à l’agriculture. Art. 12. Que tous ceux qui n’ont aucune possession ne soient assujettis à aucune imposition. Art. 13. Qu’il soit fait des règlements au sujet des pigeons, de sorte qu’ils ne causent aucun préjudice. Signé Lecouflet; Paysan; Tournois; Bondis, Hannequin ; Manteau ; Démanchés ; Cuchaud ; Courtois; Chatelin ; Chaletias; Proteau; Petit; En-gevin; Galoy; Chaîeteux; Igly; P. Recollant; Amellant; Rouchele, et Huilbert, greffier commis. CAHIER Des plaintes et doléances des habitants de la paroisse de Limours (1). Art. 1er. Que la dette nationale soit acquittée, et que le moyen de le faire soit trouvé par l’assemblée des Etats généraux. Art. 2. Qu’il soit fait une répartition la plus ; juste des impôts, que cette imposition soit supportée généralement par tous les citoyens de l’Etat, sans distinction d’ordre ni de qualité, en raison de ce qu’ils feront valoir, et sur les commerçants, en raison de leur commerce; que l’imposition se fasse parle moyen des assemblées provinciales, et la perception simplifiée de manière que les fonds soient versés directement au trésor roval. Art. 3.” Demander la suppression entière des gabelles et des aides, et 1 abolition entière de l’impôt sur les cuirs, en ce que ces impôts sont de perception difficile, et nécessitent quantité d’employés, à charge à l’Etat, et dont les vexations sont très-ruineuses pour les citoyens qui sont assujettis à ces sortes d’impôts. Art. 4. La suppression des jurés-priseurs vendeurs de meubles, comme contraires à la liberté des citoyens, par le danger où se trouvent les fortunes entre les mains de ces sortes de personnes, qui souvent les enlèvent à de pauvres mineurs par de fréquentes banqueroutes ; qu’il est, (1) Nous pubPons ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. [Paris hors les murs.] d’ailleurs, ridicule de forcer le public de se servir d’un homme auquel ils n’ont, souvent, pas la moindre confiance. Art. 5. La suppression des justices seigneuriales ; qu’il en soit établi de royales; qu’il soit, à cet effet, formé di s arrondissements, le plus à la portée des justiciables que faire se pourra, et, autant qu’il sera possible, dans les villes et bourgs où il y a des marchés d’établis ; qu'il ne puisse y avoir plus de deux degrés de juridiction, pour avoir un jugement en dernier ressort; que les audiences des juges en première instance soient tenues régulièrement, toutes les huitaines, afin que la justice soit rendue plus promptement; que les droits de sceau soient supprimés, on tout au moins les 8 sous pour livre , attendu les frais excessifs que ces sortes de droits occasionnent; que, dans le cas où il y aurait trop de difficultés de dépouiller les seigneurs de leur droit de justice, qu’alors toutes celles qui relèvent, par appel, à une justice seigneuriale, y viennent en première instance, et que les seigneurs qui auront un droit de justice soient tenus de faire résider dans le principal lieu le juge, le procureur fiscal et le greffier. Art. 6. Qu’il soit fait un tarif pour les honoraires des officiers de justice, duquel, ils ne pourront s’écarter, sous aucun prétexte, sous peine d’être poursuivis comme concussionnaires, et que la multiplicité des formes de la procédure soit simplifiée. Art. 7. Qu’il soit aussi fait un tarif constant et immuable, pour la perception des droits de contrôle sur les actes des notaires et de justice, et assez clair, pour que chaque particulier puisse connaître les droits qu’il doit ; en raison de ce, que les 10 sous pour livre soient supprimés, et les actes des notaires au châtelet, résidantà Paris, soient sujets au contrôle comme tous les autres, ce qui fera une indemnité plus que suffisante de la suppression des 10 sous pour livre; qu’il soit fait défense aux contrôleurs de donner aucunes interprétations au tarif, ni de percevoir les droits autrement qu’ilsy seront fixés, à peine de concussion. Art. 8. Que les règlements concernant les banqueroutes frauduleuses, soient remis en vigueur; qu’il soit sévi très-rigoureusement contre ces sortes de banqueroutiers, en les punissant d’une manière déshonorante et visible, afin qu’ils puissent être connus du public; qu’il ne leur soit, à l’avenir, donné aucune retraite ni sauvegarde, où ils puissent se soustraire aux poursuites de leurs créanciers. Art. 9. Observer que les tailles et autres impôts, qui se sont perçus jusqu’à présent sur la paroisse de Limours, ont mis les cultivateurs presque hors d’état de continuer leur culture, et d’avoir pour les engrais de leurs terres les bestiaux qui leur sont nécessaires, la plupart ne pouvant pas même parvenir à avoir de troupeau, par les grandes charges qu’on leur a fait supporter et les impôts excessifs de tous genres, cette paroisse ayant toujours été imposée à l’instar de celles qui avoisinent la capitale, qui ontun double avantage par les denrées que les habitants de ces paroisses, voisines de Paris, y mènent journellement, et les fumiers qu’ils en retirent, avantage dont ne peuvent jouir les habitants de Limours, qui se trouvent placés à l’extrémité de la généralité, et à plus de sept lieues de Paris. L’assemblée des Etats généraux étant très-humblement suppliée de chercher tous les moyens. possibles d’encourager les cultivateurs, qui gémis- (548 {États gén. 1789. Cahiers.] sent, depuis longtemps, par les vexations sans nombre qu’on leur a fait souffrir dans tous les genres, ce qui les a contraints de laisser languir l’agriculture, qu’il est très-essentiel de faire refleurir, pour le bien de l’Etat et de la nation en général. Art. 10. Que les formalités rigoureuses, qui résultent des arrêts dérèglement des 21 juillet 1778 et 15 mai 1779, soient entièrement supprimées et anéanties, comme fermant aucultivateur le droit, pour ainsi dire, de se plaindre ; que le cultivateur puisse, au contraire, obtenir la réparation des délits qui lui seront causés par le gibier de toute espèce, d’après une simple visite qui sera faite en la forme ordinaire, et en quelque temps que ce soit ; il serait nécessaire que les petites volières et colombiers soient supprimés, excepté le principal colombier du seigneur suzerain, haut usticier ; que les pigeons soient renfermés dans es temps précieux de semence et de récolte; il serait même intéressant de détruire les remises, qui servent de refuge au gibier destructeur des grains. Art. 11. La suppression entière des capitaineries, comme contraires au bien public, par le dé-vastement des récoltes occasionné par le gibier. Art. 12. L’abolition des privilèges des bourgeois de Paris. Art. 13. La suppression de toutes juridictions, d’attributions et de commissions, maîtrises et élections ; leurs fonctions réunies aux bailliages royaux. Art. 14. Qu’aucuns récipiendaires aux offices de judicature ne soient reçus, sans avoir été reconnus capables dans un examen qu’on leur fera subir, en présence de tous les corps de la justice. Art. 15. Qu’aucunes personnes ne puissent exercer l’art de chirurgie et accouchement, sans avoir été reçues par la Faculté de médecine. Art. 16. Défendre très-expressémenl l’exporta-tation des grains hors le royaume, ce qui a causé, toutes les fois qu’elle a été permise, des maux sans nombre, au point d’occasionner des révoltes considérables, par la cherté qui s’en est suivie ; prévenir, autant qu’il sera possible, la cherté des grains, par rétablissement de greniers publics ou autrement qu’ilsera décidéen l’assemblée desEtats généraux, qui serasuppliée d’avoir laplus sérieuse attention à cet objet, comme un des plus importants. Art. 17. Qu’il soit fait défense, sous de grandes peines, à tous les laboureurs de faire aucun commerce sur les grains ; qu’il leur soit aussi faitdéfense d’exploiter plusieurs fermes, lorsqu’ils se trouveront avoir l’occupation de. deux charrues de labour ; pareillement défense aux seigneurs et propriétaires de démembrer aucuns corps de ferme. Art. 18. Permettre, dans l’intérieur du royaume, la liberté entière de tous genres de commerce, même avec les nations étrangères, excepté sur les grains; les douanes, à cet effet, transportées aux extrémités du royaume. Art. 19. L’universalité des coutumes, poids et mesures, dans toute l’étendue du royaume, avec distinction néanmoins, quant aux coutumes, des usages locaux. Art. 20. Qu’il soit formé des lois fixes et stables, tant pour l’administration de la justice que pour le gouvernement ; qu’il ne puisse être fait aucuns changements à ces lois, ni établi aucun impôt, sans le consentement unauime de la nation assemblée. [Paris hors les murs.] Art. 21. Le retour périodique des Etats généraux à des époques peu reculées, devant lesquels les ministres du Roi seront comptables de leurs actions envers la nation. Art. 22. La suppression de toutes prisons d’Etat; qu’aucuns citoyens domiciliés ne puissent être détenus prisonniers plus de deux fois vingt-quatre heures, sans imputation de crime, et dont l’instruction du procès soit commencée; que, cependant, les vagabonds et gens sans aveu soient exceptés de celte règle. Observant, les habitants de Limours, que, quant à eux personnellement, ils n’ont jamais éprouvé aucunes disgrâces de la part de leur seigneur, relativement au gibier; qu’il a toujours eu le plus grand soin de donner des ordres très-exprès, pour le faire détruire, toutes les fois que les vassaux ont été lui en porter des plaintes; que l’auguste princesse de Lorraine, qu’ils ont l’honneur d’avoir pour dame, fait leur bonheur universel et la consolation de chacun d’eux en particulier; que l’âmé sensible et généreuse de cette vertueuse princesse est, dans tous les temps, venue à leur secours tant par les immenses charités que sa main libérale a versées dans le sein des pauvres, que par les services de tous genres qu’elle n’a cessé de leur rendre, et dont ils en conservent l’éternel ressouvenir. Observen t, lesdits habitants, que le présent cahier ayant été dressé par eux, ils ont, depuis, reçu une lettre de S. A. madame la comtesse de Brionne, en date du 13 présent mois, par laquelle elle leur permet d’ajouter audit cahier, à elle communiqué, tout ce que lesdits habitants jugeront de plus convenable et nécessaire. Pourquoi les habitants demandent encore, que le prieuré commendalaire de Limours fût absolument réuni à la cure; que c’est d’un modique revenu, tant pour faciliter des honoraires et un logement au maître d’école, que pour ceux d’un vicaire qui devient de plus en plus nécessaire dans le lieu; la réunion de ce prieuré, d’un revenu de 800 livres, procurerait ces deux avantages essentiels à la paroisse de Limours. Que dans les villes et villages, il soit établi des écoles où le pauvre soit admis gratuitement, et instruit dans tout ce qui lui est nécessaire pour les mœurs et l’éducation. Enfin observent lesdits habitants, qu’il est intéressant que les ormes, plantés sur les terres qui bordent les chemins, soient supprimés, comme gênant totalement la production des grains, sauf à les remplacer par des arbres à fruits qui procureront un bénéfice annuel. Fait ce 15 avril 1789. Signé David; Michel David; Dehais, syndic; de Montmort; Bénard; Genty; Charpentier; Brossard; Laureau; Dequin; J. FaVre; Jean-Charles Girard; Gaucher; Moucheron ; F. Moulin; Couffet; Souillard; L.-D. Laro-que; G. Moreau; Marc Gai ; Sauvin ; Briant; Delanoue. Arrêté et paraphé nevarietur , pour nous, Jean-Louis Delanoue, lieutenant général du bailliage, ville et comté dudit Limours et dépendances, présidant l’assemblée des habitants dudit lieu, ce-jourd’hui 15 avril 1789. Signé Delanoue. ARCHIVES PARLEMENTAIRES.