[Convention nationale.] fable, était un composé monstrueux de l’homme et du taureau; mais, d’après l’histoire, ce mons¬ tre était un roi. « Tels sont nos vœux, législateurs, il vous appartient de les réaliser. Quant à nous, en¬ nemis implacables de la tyrannie, nous avons juré la soumission aux lois, parce qu’elles sont la sauvegarde de la liberté. Et si, enfermés comme Socrate, la maison d’arrêt nous était ouverte, par respect pour elles, nous n’en sor¬ tirions pas. Nos biens, nos vies, nos plus ten¬ dres affections sont à la patrie; nous saurons lui soumettre les mouvements de notre âme les plus impétueux : si un sans-culotte, quand il s’agira de sa gloire et de ses intérêts, se por¬ tait sur nous, le bras levé, nous lui dirions comme le général athénien au Spartiate : « Frappe, mais écoute. » Toujours on nous verra prêts à verser notre sang, à braver tous les dangers pour sa défense, sous les traits enflammés de l’ennemi, et jusque sous la bouche du canon nous nous écrierons en mourant pour elle : Vive la République ! vive la Montagne ! 22 brumaire an II QQ 12 novembre 1793 Laissez donc là l’hypocrisie D’un ridicule engagement, Et que la voix du sentiment Vous rende au monde, à la patrie. La nature et l’hymen sont les premières lois Le cœur, Le cœur nous dit assez nos devoirs et nos droits. Pourquoi par l’ouvrier suprême, Un sexe pour l’autre fut fait. Pourquoi sans un autre lui-même L’homme n’est qu’un être imparfait? (bis) Pourquoi nous naissons tous sensibles? Pourquoi tous ces tendres désirs, Ces involontaires soupirs Et ces penchants irrésistibles? Jurer d’étoulïer la nature, D’éteindre la postérité, Pour le ciel, quelle horrible injure ! Quel crime envers l’humanité! (bis) Oui, de la sagesse éternelle, C’est renverser tous les desseins; C’est fouler tous les dogmes saints De la morale universelle. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « Cabkol, président; IxGÉ, secrétaire; Na-JAC, secrétaire. » Extrait des registres de la Société républicaine de Rodez ( 1 ). Séance du 1er juin de la 2me décade du 2me mois de l’an II de la République française, une et indivisible. Il a été fait lecture d’un extrait des registres de la Société populaire de Saint-Flour, départe¬ ment du Cantal, ainsi conçu : « Le citoyen Fontanier, ex-vicaire épiscopal, demande la parole et dit : « Je vais accomplir un des premiers devoirs de la nature, demain mes destinées seront unies à celles d’une compagne. Les républicains mon¬ tagnards de Saint-Flour, qui se sont montrés constamment à la hauteur de la Révolution, ne verront pas avec indifférence un prêtre sensible et patriote, s’attacher à la société par les nœuds les plus saints de la nature et du sang. Ce serait faire injure à leur civisme et à leurs lumières, que de m’attacher à combattre, au¬ près d’eux, le plus absurde et le plus barbare des préjugés consacrés jusqu’ici par l’igno¬ rance et le fanatisme. Ils ont donné une sanction si authentique et si solennelle à l’écrit philoso¬ phique que j’ai publié, il y a quelque temps, là-dessus ! Je me flatte qu’ils voudront bien aussi agréer l’hommage d’un hymne vraiment répu¬ blicain, que je leur offre, comme la nouvelle expression de mes sentiments et de mes prin¬ cipes. La Société accepte, avec transport, et aux acclamations d’un peuple immense, l’hommage du citoyen Fontanier, et entend la lecture de l’hymne ainsi conçu : Air des Marseillais ; Allons enfants de la patrie, etc. O vous, qu’en ces chaînes fatales, Retiennent des vœux insensés, Prêtres, cénobites, vestales, Les jours de l’erreur sont passés. (bis) (1) Archives nationales, carton C. 280, dossier 769. Comme la nature en silence Punit bien son blasphémateur. Pour lui, désormais, l’existence N’a plus de charme, de douceur. (bis) Le néant dont il s’environne Le livre à mille maux divers; Il rompit avec l’univers, Et l’univers l’abandonne. Dans une âme glacée et flétrie, Quelle peut être la vertu? Que peut attendre la patrie D’un cœur éteint ou corrompu? (bis) Enfin comment faut-il qu’on nomme L’être qui n’a point de lien? Sans famille est-on citoyen? Est-on citoyen sans être homme? Le premier lien politique, C’est d’être père, c’est d’être époux. C’est le premier tribut civique : Ce tribut n’est-il pas bien doux? (bis) O noms saints d’époux et de père, Heureux qui, sentant votre prix, Renaît dans des gages chéris, Dont n’a point à rougir leur mère ! Il est temps que de la licence Se termine le trop long cours, Et qu’à la fausse continence Succèdent de chastes amours... (bis) Français ! ah ! quel heureux augure, Pour la patrie et pour les mœurs, Quand on verra dans tous les cœurs Triompher l’hymen, la nature I La Société, d’après cette lecture, a arrêté la réimpression du discours du citoyen Fontanier et de l’hymne républicain qui est à la suite pour être disséminés dans le département, en* voyés aux Sociétés affiliées et aux armées. Elle a arrêté qu’elle adoptait le premier-né du mariage de ce prêtre citoyen, qu’elle lui écrirait une lettre de félicitations dont copie serait envoyée à l’Assemblée nationale et aux Jacobins de Paris avec extrait du verbal de la séance, et le résultat des offrandes qui ont été déposées sur le bureau de la Société depuis trois jours qu’elle est sortie régénérée du creu¬ set d’un scrutin épuratoire. Ces dons consistent en une boîte de montre d’or, dix cuillères d’argent, neuf fourchettes du même métal et quatre éeus de six livres. 90 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. | M brumaire an H Copie de la lettre écrite au prêtre citoyen F on-tanier. Les Montagnards de Rodes, réunis en Société républicaine, à Fontanier, Montagnard de Saint-Floun « Prêtre citoyen, « Un préjugé détruit est un tyran vaincu. « Les progrès des lumières peuvent seuls assurer ceux de la liberté, et les patriotes doivent applaudir au triomphe de la raison et de la nature sur l’ignorance et le fanatisme, comme aux victoires des braves républicains sur les satellites des despotes. « Nous vous félicitons d’avoir, d’une main ferme et hardie, brisé une chaîne anti -sociale pour former des nœuds qui sont les liens et les bases de la société. « Que dans un gouvernement corrupteur et corrompu par essence on ait pu ériger l’ab¬ négation de son être en vertu et le célibat en profession privilégiée, cela se conçoit. « Les monarques ont intérêt à dégrader l’homme, à pervertir ses penchants, à compri¬ mer sa plus douce affection ; mais la République veut des mœurs. Elle honore la chasteté et flé¬ trit la continence, ses lois secondent les mouve¬ ments de la nature au lieu de les étouffer, elles en règlent, en légitiment la direction et ne la changent pas. « Non seulement ses officiers de morale peu¬ vent être pères de famille, mais dans peu, nous l’espérons, les pères de famille pourront seuls être officiers de morale. « G-râces vous soient rendues pour l’exemple que vous venez de donner à Saint-Flour, il nous est d’autant plus cher que sa proximité de nos foyers nous fait espérer qu’il n’y restera pas longtemps sans imitateurs. « Vos concitoyens ont justement applaudi à votre mariage. Comme eux nous avons entonné avec allégresse l’hymne philosophique qu’il vous a inspiré, avec eux nous adressons des vœux au Dieu de la nature poux que celui qui chante si bien les droits de l’hymen en savoure toutes les douceurs, en remplisse longtemps les de¬ voirs. « Nos concitoyennes se sont associées à ce vœu, elles ont répété et senti avec nous le re¬ frain chéri de tous : La nature et l’hymen sont les premières lois, Le cœur, Le cœur nous dit assez nos devoirs et nos droits. « Et dans le transport d’un enthousiasme gé¬ néral, nous avons arrêté l’adoption du premier fruit de vos amours républicaines. « Ne nous refusez pas cette association à votre paternité, nos sentiments révolutionnaires vous garantissent que votre enfant, au milieu de nous, respirera l’air sain de la Montagne, croîtra dans les principes de son père et se retrouvera tou¬ jours dans sa famille. « Certifié conforme au registre : « A Rodez, le troisième jour de la seconde dé¬ cade du mois de brumaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Cabrol, président ; Itgé, secrétaire. » Le citoyen Legrave, ancien militaire, demandé une pension en considération de ses longs ser¬ vices, de ses blessures et de son bras emporté d’un coup de canon au siège de Philisbourg. Renvoyé au comité de liquidation et admis aux honneurs de la séance (1). Les administrateurs du département d’Ille-et-Vilaine envoient le toisé exact des distances de leur arrondissement, à partir du centre du lieu où chaque poste aux chevaux était établie au centre du lieu voisin. Renvoyé au comité des ponts et chaussées (2). Une députation des sections de Paris est admise à la barre. L’orateur : « Citoyens représentants, vous avez décrété une indemnité pour les membres des comités révolutionnaires, parce que vous avez voulu que les sans-culottes, qui n’ont pour vivre que le fruit de leur industrie, y fussent admis. Ce décret est sage et juste; par là, vous assurez l’exécution de vos lois révolutionnaires; mais les comités civils des sections ont des fonctions qui ne sont pas moins importantes, ils sont chargés d’asseoir les impôts et l’emprunt forcé. Voulez-vous qu’il n’y ait dans ces comités que des riches et des marchands, que le pauvre vertueux en soit exclu? N’accordez pas d’indemnité à ceux qui les composent; mais vous ne pouvez mettre en balance les intérêts de la République et une modique indemnité. Nous demandons, au nom des 26 sections de Paris, que vous décrétiez une indemnité aux membres des comités civils. » Renvoyé au comité des finances (3). Suit la pétition des sections de Paris (4) : Pétition à la Convention nationale, relative aux comités civils des sections de Paris. « Citoyens législateurs, « Vous avez décrété une indemnité pour chacun des membres qui composent les comités révolutionnaires des sections. Votre intention a été de mettre les citoyens peu fortunés à même d’accepter ces commissions importantes. Vous avez pensé que le patriotisme actif et pur était à côté de la modeste pauvreté et que l’homme de la nature sentant le prix de la liberté et de l’égalité, en saurait mieux défendre les droits et en poursuivre les ennemis. L’effet a répondu à votre attente : les comités révolutionnaires des sections ont donné à vos décrets une exé¬ cution vigoureuse; l’armée révolutionnaire est sur pied; l’armée de la première réquisition est organisée; les accapareurs, les rebelles à la loi, les traîtres de toutes nations ennemies et de toute espèce sont pourchassés sans relâche, renfermés dans les lieux de sûreté : ils sont hors d’état de nuire. Mais le riche orgueilleux peut encore exercer une sorte de despotisme dans les comités civils ; leur fonction, quoique moins saillante, est aussi conséquente que celle des (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 180. (2) Ibid. (3) Ibid. (4) Archives nationales, carton G 280, dossier 769.