201 [Convention nationale.] fût pas astreinte, les avait 'déclarées, ainsi qu’il résultait du double de la déclaration visée au comité, et que cette déclaration faite avant qu’on fût venu chez elle constater par un procès-verbal une prétendue contravention, elle avait satisfait à la loi. Le directeur du juré a cru néan¬ moins, devoir envoyer les frères Salleron dans une maison d’arrêt où ils sont détenus. « Les frères Salleron, ainsi que leurs con¬ frères, car il est bon d’observer que tous les tanneurs de Paris et ceux des autres départe¬ ments, n’ont point fait autrement, ont exécuté la loi littéralement ; ils ne se sont pas permis de l’interpréter; c’est à vous, législateurs, si elle ne présente pas un sens clair et positif, à éclai¬ rer, par des articles additionnels, les citoyens qu’elle concerne; et pour vous mettre à même de prononcer sur la prétendue contravention reprochée aux tanneurs, veuillez bien écouter les détails qu’ils sont dans le cas de donner sur ce qu’ils ont dû entendre, d’après les termes de la loi qui les astreint à déclarer la nature et la quantité de matières premières qu’ils ont dans leurs ateliers. « La loi est infiniment sage et juste, qui dé¬ clare coupables d’accaparement, ceux qui dé¬ robent à la circulation des marchandises ou denrées de première nécessité, qu’ils achètent et tiennent enfermées dans un lieu quelconque, sans les mettre en vente journellement et publi¬ quement; mais dans cette dénomination géné¬ rale de marchandises de première nécessité, les tanneurs ont-ils jamais pu croire que se trou¬ vaient compris les cuirs qu’ils faisaient fabri¬ quer et qui ne sont pas susceptibles d’être livrés au public et vendus journellement. On sait que les cuirs sont pendant longtemps en manipula¬ tion avant d’être vendus pour être employés; que certaines peaux ont besoin de rester dans les fosses, les unes pendant deux ans, d’autres pendant un an, d’autres enfin pendant six mois, et qu’il n’est pas possible de les exposer en vente au public, avant que ces différents es¬ paces de temps soient révolus, pendant lesquels on leur donne les façons nécessaires. Dès lors, tant que ces peaux sont encore en fabrication, elles ne peuvent être considérées comme ces marchandises de première nécessité, dont la loi a voulu parler, et il n’est pas possible d’en faire aucun emploi. « Les commissaires nommés par les sections, pour l’exécution de la loi sur les accaparements, ont à coup sûr donné à la loi une extension qu’elle n’avait pas; l’inconvénient qui en ré¬ sulte pour les tanneurs est funeste, car tous sont dans la persuasion qu’il ne fallait décla¬ rer que les matières premières, et ils se trou¬ vent, par là, exposés à être inquiétés. C’est donc une interprétation formelle de la loi qu’ils solli¬ citent pour qu’il soit constant que les marchan¬ dises de tannerie ne peuvent être considérées comme marchandises de première nécessité, tant qu’elles sont en cours d’apprêt et de fabri¬ cation; et dans tous les cas, attendu le silence de la loi à cet égard, que les tanneurs qui ont pu le croire ne sont point en contravention. « Les frères Salleron, premières victimes d’une erreur non prévue par la loi, sollicitent de votre bienveillance de leur tendre une main secou-rable : ils y ont des droits par l’estime de leurs concitoyens, le patriotisme dont ils ont tou¬ jours été animés, et la réputation intacte dont ils ont toujours joui. Ils demandent que vous veuilliez bien renvoyer leur pétition à vos co-I 13 brumaire an H 3 novembre 1793 mités de commerce et de législation réunis pour vous être fait un rapport dans le plus bref délai, et vous mettre à la portée de prononcer sur l’objet de leur pétition, en déclarant, d’ail¬ leurs, qu’ils n’ont pu être en contravention à la loi, et qu’en attendant un rapport la procé¬ dure commencée contre eux soit suspendue, et eux rendus à la liberté, aux offres qu’ils font de fournir caution de leurs personnes. Ils sont pères de famille, à la tête de travaux considé¬ rables où plus de soixante ouvriers sont em¬ ployés chaque jour : ce sont des considérations puissantes aux yeux des dignes représentants du peuple. « Le IIe jour du 2e mois de la deuxième année républicaine. » La commune d’Écouen vient déposer sur l’au¬ tel de la patrie tout l’or, l’argent, meubles et ustensiles qui existaient dans l’église de ce lieu. Elle ne peut, dit-elle, en offrir davantage, mais son zèle pour la chose publique est sans bornes. Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). Suit l'hommage de la commune d'Ecouen (2) : La commune d'Ecouen. chef -lieu de canton , district de Gonesse, département de Seine-et - Oise, à la Convention nationale. « Législateurs, « Les habitants de la commune d’Écouen vous apportent un faible don, qui est le reste de ce que les voleurs ont laissé dans leur église, qui a été volée en 1788, ainsi que les cravates en or qui souillaient leur drapeau. « Le vœu de nos concitoyens, qui est aussi le nôtre, est de vous engager de rester à votre poste, jusqu’à la paix ; nous vous le répétons pour la seconde fois, refondez les corps administra¬ tifs et judiciaires, le salut de la République en dépend. « Nous respectons tous vos décrets, et nous osons nous flatter d’en faire notre culte, mais nous avons à nous plaindre non de la loi qui fixe un maximum aux prix des grains, mais de son exécution. « La commune d’Écouen a récolté environ 1,034 setiers de blé de moins cette année qu’il ne lui en faut pour sa consommation; sa population est d’environ 1,100 âmes et il faut y en ajouter au moins 200 comprenant les étrangers qui logent dans les auberges, et les militaires qui y logent presque journellement. « Il y a deux fermiers de l’émigré Condé qui, suivant la loi, sont obligés de payer leur fer¬ mage en grains, de sorte que les habitants d’Écouen ne peuvent qu’avec une peine in¬ croyable se procurer du pain, les plus pauvres sont obligés de faire quelquefois cinq et six lieues pour se procurer un pain de six livres, parce que les boulangers ne peuvent s’appro¬ visionner suffisamment aux marchés, et que la loi du 11 septembre ne leur permet pas de s’ap¬ provisionner dans la commune. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 284. (2) Archives nationales, carton G 279, dossier 739. ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 202 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ira" « Il y a au moins la moitié des habitants qui ne récoltent pas de blé et qui ne peuvent s’ap¬ provisionner dans la commune, à cause des fré¬ quentes réquisitions. « La commune d’Écouen. a fait conduire au dernier marché de Gonesse vingt et un setiers de blé. Au marché de Gonesse, elle a délivré des bons à une très grande quantité d’habi¬ tants qu’elle connaissait en avoir besoin, et aucun n’a pu en obtenir, les deux boulangers seuls en ont eu chacun deux setiers, ce qui est une très faible ressource. Vous conviendrez, législateurs, qu’il est dur de voir enlever le blé de son territoire, lorsqu’on en a un extrême besoin, sans pouvoir en obtenir. « Le bourg d’Écouen est composé de vrais sans-culottes, il est chef-lieu de canton, qua¬ torze communes le composent, il ne peut se passer d’un marché au blé; dans les quatorze communes, il y en a au moins huit qui récoltent plus que pour leur consommation et qui sont obligées de passer par Écouen pour aller à Go¬ nesse, qui en est distant d’une lieue et demie par des chemins de traverse qui sont imprati¬ cables la moitié de l’année. « Écouen est traversé par la route de Paris à Amiens; la commune de Villiers-le-Bel en est à un quart de lieue, et celle de Sarcelles à une demi-lieue : Écouen, Sarcelles et Villiers-le-Bel forment ensemble une population d’environ cinq mille âmes qui ont tout pavé pour venir à Écouen, et qui pourraient facilement s’y ap¬ provisionner s’il y avait un marché. « Législateurs, accordez-nous ce marché, et vous nous rendrez justice. {Suivent 48 signatures.) « P. -S. Nous sommes au désespoir de ne pou¬ voir vous en offrir davantage; l’or, l’argent et tout ce que nous pourrons trouver dans l’église est à vous; nous sommes à vous; demandez et commandez à la commune d’Écouen, elle sera toujours prête à exécuter ce que vous lui ordon¬ nerez; nous entendons l’or et l’argent qui peuvent se trouver aux ornements, et généra* lement tout ce qui appartient à la République. » ( Suivent 18 signatures.) Compte rendu du Journal de Perlet (1). Les officiers municipaux de la commune d’Écouen, district de Gonesse, département de (1) Journal de Perlet [n° 408 du 14 brumaire an II (lundi 4 novembre 1793), p. 274]. D’autre part, le Mercure universel [14 brumaire an II (lundi 4 no¬ vembre 1793), p. 58, col. 2] et le Bulletin de la Convention du 3e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II (dimanche 3 novembre 1793) rendent compte de l’admission à la barre des citoyens d’Écouen dans les termes suivants : I. Compte rendu du Mercure universel. Des citoyens d’Écouen sont admis à la barre. Ils déposent sur le bureau un bâton d’argent, des croix d’argent et quelques autres objets d’or. Ils invitent les représentants à rester à leur poste; ils demandent le renouvellement des administrations, Seine-et-Oise, font hommage d’un bâton de croix en argent ; c’est tout ce qu’ils ont pu arra¬ cher à leurs prêtres. Ils demandent ensuite, qu’il soit formé un éta¬ blissement national au ci-devant château, ap¬ partenant à Gondé. Mention honorable. On lit une lettre des citoyens Laignelot et Le-quinio, représentants du peuple envoyés dans le département de la Charente-Inférieure, Us annoncent qu’ils viennent de faire arrêter un nommé Larivière, fournisseur infidèle, plusieurs évêques, prêtres et autres contre-révolution¬ naires auxquels le nouveau tribunal va, disent-ils, donner des certificats de civisme (I). Suit la lettre des citoyens Laignelot et Lequi-nio (2) : Laignelot et Lequinio, représentants envoyés dans la Charente-Inférieure, à la Convention nationale. « Bochefort, le 7e du 1er mois {sic) de l’an II « Nous vous envoyons, citoyens nos col¬ lègues, des échantillons d’une friponnerie con¬ sidérable et grossière, autant qu’ audacieuse; ce sont des bougies fournies à la marine pour les vaisseaux et pour les signaux; c’est, comme vous le verrez, un gros noyau de térébenthine et de graisse, recouvert d’une légère couche de cire; une bougie qui devrait durer vingt et quatre heures, dure vingt et une minutes montre en main; il en reste ici, dans le magasin, pour une cinquantaine de mille livres, et la fourniture a peut-être été sextuple. Nous avons appréhendé le fournisseur, nommé Bivière, et un tribunal révolutionnaire va le faire éclairer. Les honnêtes gens de ce pays nous disent que c’est le plus honnête homme de la terre. II en est ainsi de l’état-major de Y Apollon, venu de Toulon, ici, pour livrer le port aux Anglais; il en est ainsi des comtes, évêques et prêtres, arrivés l’autre jour au bagne, qui se sont révoltés en route, et dont plusieurs se sont échappés. Les outils avec lesquels ils coupaient leurs chaînes, ont été trou¬ vés sur les autres; le tribunal révolutionnaire rétablissement d’une maison d’éducation dans le château d’Écouen appartenant au ci-devant Condé. Mention honorable. II. Compte rendu du Bulletin de la Convention. Les officiers municipaux de la commune d’Écouen, district de Gonesse, invitent, au nom de leurs conci¬ toyens, la Convention nationale à rester à son poste et annoncent que, dans cette commune, au milieu des danses et chants patriotiques, les titres féodaux ont été brûlés sur la place où était autrefois le poteau de la tyrannie. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 284. (2) Archives nationales, carton C 279, dossier 735. Bulletin de la Convention du 3e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II (dimanche 3 novembre 1793); Moniteur universel [n° 45 du 15 brumaire an II (mardi 5 novembre 1793), p. 184, col. 1].