386 [Assemblée nationale.] M. l’abbé Arnaud adresse à l’Assemblée une brochure intitulée : Etablissement qui intéresse l’utilité publique et la décoration de la capitale. M. de Châteaunenf-Randon. On a faussement répandu que le régiment de Toul, artillerie, en garnison à La Fère, s’est refusé à protéger la perception de l’impôt. Je vais déposer sur le bureau le certificat de la municipalité de cette ville, qui fait l’éloge de l’activité, de la discipline de ce régiment, et de l’esprit patriotique qui l’a animé dans les circonstances épineuses survenues depuis la Révolution. C’est avec satisfaction que j’informe l’Assemblée que cette bonne conduite est en partie l’effet du zèle des officiers de ce régiment, et particulièrement de M. Bellegarde, maréchal de camp, commandant de ce corps, officier distingué, connu par les malheurs dont le despotisme ministériel l’a rendu si longtemps victime, à qui on doit l’invention et le secret des boulets inflammables dont il a fait hommage au gouvernement, qui a refusé une somme de 100,000 livres qui lui était offerte, et qui s’est contenté d’une pension de 6,000 livres, dont moitié est réversible sur la tête de sa femme et de son fils. Cette récompense peut être soumise au plus sérieux examen du comité des pensions ; je ne la crois pas susceptible de réduction. M. Régnier, au nom du comité des rapports. M. Quiilard a fait connaître à la municipalité de Monton, en Angoumois, le décret qui porte que les fermiers des biens ecclésiastiques jouiront de leurs baux. La municipalité a refusé l’exécution de ce décret, et a mis aux enchères les biens dont M. Quillard était fermier. Deux lettres à ce sujet ont été successivement écrites à la municipalité, l’une par le comité ecclésiastique, l’autre par ce même comité et par celui des rapports. La municipalité de Monton n’y a eu aucun égard; les enchères ont été continuées : cette municipalité s’est portée à des voies de fait contre M. Quillard ; elle a saisi ses récoltes. Ce citoyen s’est déterminé à venir lui-même solliciter votre justice, et il a appris qu’on menaçait de brûler les bâtiments de sa ferme. Le comité a pensé qu’il était nécessaire de réprimer ces excès; il vous propose en conséquence un projet de décret conçu en ces termes: « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, déclare qu’elle improuve la conduite des officiers municipaux de Monton, comme contraire au respect dû à ses décrets sanctionnés par le roi de donner les ordres nécessaires à l’administration du département de Charente, pour faire assurer au sieur Quillard la aisible jouissance des objets compris en son ail, ainsi que la restitution de ce qui lui a été indûment enlevé ; de donner également ordre au présidial de Poitiers, d’informer contre les auteurs, fauteurs et complices des excès, violences et voies de fait commis contre ledit sieur Quillard et sa famille, et de les punir suivant la rigueur des lois. » (Ce projet de décret est adopté sans discussion.) L’ordre du jour portait un rapport des comités réunis de Constitution et des finances sur le traitement des juges et des membres des assemblées administratives. Ce rapport est ajourné à la séance de lundi prochain 30 du présent mois. Un rapport des comités de judicature et de finances sur la liquidation des offices de judicature est ajourné au mardi 31 août. [28 août 1790.] L'Assemblée reprend la discussion sur la liquidation de la dette publique et sur les moyens proposés par M. de Mirabeau pour en assurer. I acquittement. M. de Rony d’Arsy. Notre position vis-à-vis de nous-mêmes et vis-à-vis des étrangers n’est pas heureuse; mais les embarras qui assiègentle royaume tiennent tous au délabrement de ses finances; il faut en sortir par un généreux effort. Nous devons une somme énorme; la totalité de la dette publique est de 4,800 millions; mais la dette constituée, viagère et perpétuelle, s’élevant à 2,400 millions, et n’étant point exigible, il ne faut pas songer, quant à présent, à la rembourser. Reste donc à payer la dette à terme, qui se monte également à 2,400 milions. Eh bien ! acquittons-nous une bonne fois par une seule opération, grande, simple, magnifique; que la nation puisse enfin dire : je ne dois rien. Elle sera peut-être la seule de l’Europe à qui il soit permis de tenir ce langage. Mais quelque brillant que semble ce dessein, il ne serait pas digne des législateurs de la France, si le système que je vous propose n’était pas juste en lui-même, avantageux à la nation , utile aux créanciers de l’Etat, favorable à ceux à qui l’Etat ne doit rien, exempt de tous inconvénients importants, préférables aux autres plans publiés. Rien de plus juste que de s’acquitter, non seulement des dettes actuellement échues, mais de celles qui sont plus exigibles, de leur nature, à des termes préfixes. Rien de plus avantageux à la nation, car cette dette courte étant un intérêt de 120 millions par année qu’il faut imposer sur les peuples, c’est soulager le pauvre peuple d’un fardeau énorme, que de faire ce remboursement salutaire. Rien de plus utile aux créanciers de l’Etat, car dans l’état actuel on ne leur paye point les capitaux échus, et l’on paye mal les arrérages. C’est donc les ramener au bonheur, les sauver du désespoir, les rendre à l’industrie, au commerce, à l’agriculture, que de les rembourser de ce qui leur est dû, et les mettre enfin à même d’échanger un titre vacillant contre une terre nationale, la plus solide de toutes les possessions. Rien de plus favorable à ceux à qui l’Etat ne doit rien, car, par l’émission de 400 millions d’assignats, et par le décret qui ordonne la vente des biens du clergé, tous les propriétaires de terres sont ruinés. Tel héritage qui valait trois cent mille livres ne se vendrait aujourd’hui que deux cents. Mais lorsque, par une émission considérable de valeurs, vous aurez mis tous les créanciers en état d’acquérir des biens nationaux, il s’établira une concurrence qui rendra à toutes les terres des particuliers leur ancienne et véritable valeur. Ce système est exempt de tous inconvénients capitaux. La plus forte objection qu'on puisse lui opposer est celle du danger qu’il peut y avoir à mettre en circulation deux milliards et demi de numéraire fictif. Il existe déjà pour deux milliards et demi d’effets non circulants, qui entravent le commerce et attirent vers eux des fonds qui seraient si précieux à l’industrie nationale; il serait donc utile de changer ces papiers stagnants contre des feuilles plus légères, qui auraient toute la mobilité et tous les avantages de la monnaie : la circulation n’en peut recevoir d’atteinte; elle n’aspirera pas plus de numéraire qu’elle ne peut en contenir. Plongez une éponge dans un vase ou dans l’Océan, elle ne s’imbibera pas davantage. Ce système paraît pré-ARCHIVES PARLEMENTAIRES.