rassemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 novembre 1790.] 609 sauce du peuple. Toujours grand, toujours digne quand il connaît sa force, il n’est atroce que que par faiblesse, et sous le joug de l’oppression. Je suis donc d’avis que l’Assemblée nationale déclare comme principe constitutionnel que la garde nationale, étant spécialement destinée au maintien de la liberté publique et à résister à l’oppression, ne peut et ne doit obéir qu’aux décrets émanés du Corps législatif pour le soutien des lois et de la Constitution française. Après avoir établi les principes qui fixent l’emploi de la garde nationale, sa véritable, son unique destination, il sera facile d’apercevoir quelle doit être son organisation, et quelles peuvent être ses fonctions habituelles. Le comité de Constitution a préparé un travail sur cet objet, qui sera incessamment sous les yeux du public; je ne dirai qu’un mot à ce sujet. Les gardiens delà loi, étant la nation entière, ne doivent avoir ni le ton, ni l’esprit militaire, qui ne convient qu’à des corps toujours assemblés; il serait aussi injuste qu’inutile de les fatiguer de service et de les enlever à leurs affaires ; leur uniforme (puisqu’il y en a un de décrété) doit être simple, sans ornement, sans distinction; leurs armes (et je désirerais qu’un homme ne fut reconnu pour citoyen actif qu’autant qu’il s’en serait procuré; c’est le seul moyen d’en imposer promptement à tous nos ennemis) doivent consister dans une giberne garnie de cartouches, un fusil et une baïonnette, déposés chez eux, et non en magasin; car, l’homme libre ne peut être désarmé sans violation du plus sacré de ses droits, et sans un danger évident pour la Constitution : les officiers doivent être peu nombreux, jamais plus d’un an dans le même grade, et toujours choisis par le corps électoral, je dis le corps électoral, parce que la garde nationale ne devant sortir de scs foyers que dans des cas extraordinaires sur la réquisition des corps administratifs, et devant, dans ces cas, exercer ces fonctions sur des territoires qui lui sont étrangers, les officiers doivent être nommés par les représentants du plus grand nombre de citoyens possible. La force armée étant essentiellement obéissante, nul corps d’armée ne peut exercer le droit de délibérer, que pour des objets de discipline intérieure; le pouvoir législatif seul a le droit de donner des ordres; les corps administratifs ont celui de les transmettre; les citoyens n’ont plus qu’à obéir. Il ne faut donc point d'état-major. 11 suffit en général que tous les citoyens actifs soient divisés en escouades par communauté, en compagnies par canton, et en bataillons par district. La nation, pour se maintenir eu état de défense contre les abus de l’autorité, n’a pas besoin de plus grands moyens de rassemblements, et ils seraient dangereux; c’est toujours d’un nombre quelconque de bataillons que se compose une armée. Il est donc au moins inutile qu’il y ait dans l’ordre ordinaire des choses des grades supérieurs à celui de commandant de bataillon, sauf dans les villes dont la population suffit à la composition de plusieurs bataillons, à faire alterner le commandement général tous les huit jours entre les commandants de ces bataillons, à tour de rôle et sans choix. Ces chefs hebdomadaires seraient ce qu'on appelle des officiers de jour, des-linés à recevoir les ordres de la municipalité, pour les transmettre aux différents bataillons, -et en procurer l’exécution. La seule distinction des officiers serait l’épée, lro Séuie. T. XX. la seule distinction du commandant serait un plumet au chapeau, pour être aperçu de sa troupe. Quant au service, nul citoyen actif, excepté les fonctionnaires publics, ne pourrait s’en dispenser, à moins que, du cousentement de sa compagnie, il ne se fît remplacer de gré à gré par un autre citoyen actif de la même compagnie. Le service ordinaire se réduirait à ceci. Dans les villages, il y aurait quatre hommes, tous les dimanches et fêtes, pour la police. Dans les villes, il y aurait toujours un poste à l’hôtel commun, qui le relèverait toutes les vingt-quatre heures. Cependant, lorsque la population de ces villes exigera une surveillance plus étendue, il sera dressé un règlement particulier de service par le conseil général de la commune, et ce règlement visé du directoire du district, et approuvé de celui de département, aura force de loi dans la ville pour laquelle il aura été fait; mais jamais de peine afflictive pour manque de service, des amendes proportionnelles au délit que le conseil général de la commune seule aura droit de prononcer contre les réfractaires. A l’avenir, aucun citoyen actif ne sera admis dans la garde nationale qu’il ne sache faire l’exercice. Pendant quatre mois de l’année, les citoyens actifs de bonne volonté se réuniront le premier dimanche de chaque mois dans le chef-lieu du canton pour tirer à la cible, et il sera donné un prix chaque fois au plus adroit. Enfin, tous les ans, à l’époque du 14 juillet, il y aurait un rassemblement des gardes nationales par cantons, pour la prestation du serment civique, la réception des nouveaux soldats citoyens et des officiers. Rien au delà, à moins que le renversement de l’ordre, l’usurpation des pouvoirs ne légitimassent une sainte insurrection. Quant aux circonstances où la défense de la patrie contre les ennemis du dehors nécessiterait le concours des gardes nationales avec les troupes de ligne, l’emploi des gardes citoyennes ne pourrait se faire que de deux manières, ou par bataillons séparés, ou par incorporation. Je préférerais la première méthode, laissant aux troupes de ligne toute la latitude possible pour les engagements volontaires, et le recrutement nécessaire à les compléter ; mais je ne voudrais donner au pouvoir exécutif aucun moyen d’altérer le civisme des gardes nationales, et l’esprit d’indépendance légale qui doit animer désormais tous les citoyens français que n’enchaîne pas une discipline habituelle et indispensable. Voilà, Messieurs, l’analyse de mes pensées sur l’organisation des gardes nationales, et leurs rapports immédiats avec la Constitution. Si je me suis trompé en principe, je demande à être éclairé, et mon cœur me dit que mon erreur ne peut être un crime. Si j’ai raison, je réclame la réunion de tous les bon3 citoyens autour du faisceau de nos lois constitutionnelles, seul? garants de la liberté publique. Suite du discours sur la force publique, ou série de décrets sur l'organisation de la garde nationale, par M. Üiibois-Crancé (1). Articles constitutionnels. Art. 1er. La garde nationale est la collection de (1) Le comité de Constitution m’ayant communiqué 39 010 [Assemblée nationale.] tous les citoyens reconnus pour tels, en état de porter les armes, à l’effet de remplir le but de toute association politique, lequel but est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Art. 2. Les droits naturels de l’homme étant la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression, la première base du maintien de ces droits est que tout garde national soit armé. Art. 3. Le droit de port d’armes étant essentiellement inhérent à la qualité de citoyen actif, il est du devoir de chaque citoyen de s’en pourvoir, et nul ne peut être désarmé qu’en perdant la qualité par un jugement légal. En conséquence, tout citoyen, au moment où il viendra réclamer son inscription civique, justifiera qu’il" est muni d’un fusil, d’une baïonnette et d’une giberne. Ces armes doivent rester entre les mains de chaque citoyen, paisiblement dans la maison, et aucun corps, aucun individu ne peut exiger la remise de ces armes dans un dépôt public sans violer la Constitution, et mériter d’être poursuivi comme criminel de lèse-nation. Art. 4. La nation française ayantreconnu, pour principes fondamentaux de la monarchie, que la loi est l’expression de la volonté générale, à la formation de laquelle tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants ; qu’il n’y a point en France d’autorité supérieure à la loi ; que le roi ne règne que par elle, et que ce n’est qu’en vertu des lois qu’il peut exiger l’obéissance ; la garde nationale, spécialement destinée au maintien de la liberté publique, ne peut et ne doit obéir qu’aux décrets émanés du Corps législatif pour le soutien des lois et de la Constitution. En conséquence, tous les citoyens actifs et leurs enfants, inscrits au rôle de garde nationale, sont obligés de prêter le secours de leurs forces pour la défense de la patrie contre les ennemis, soit du dedans, soit du dehors, lorsqu’ils en seront légalement requis. Art. 5. La force publique résidant essentiellement dans la collection de tous les citoyens, et toute autre force ne pouvant en être qu’une émanation, nul corps armé ne pourra prétendre le pas dans aucune circonstance sur la garde nationale. Art. 6. La force armée étant essentiellement Obéissante, nul corps armé ne peut en cette qualité délibérer sans se rendre coupable du crime de lèse-nation. Art. 7. Les officiers des troupes de ligue en activité de service ne pourront jamais être officiers de gardes nationales. Art. 8. Les gardes nationales ne porteront des son projet d’organisation des gardes nationales, pour y faire mes observations avant de le présenter à l’Assemblée, après l’avoir lu attentivement, j’ai cru devoir en faire part à la société des amis de la Constitution, persuadé que c’est au creuset du patriotisme que l’homme de bien doit épurer ses idées. Quoique la lecture que j’ai faite du plan du. comité à la fin d’une séance ait été rapide, j’ai noté avec précaution les articles qui ont été accueillis, et ceux qui ont été réprouvés. J’ai donc cherché à combiner mes idées dans le nouveau projet de décret que je présente à la sagacité des membres du comité do Constitution, avec ce qui m’a paru fixer l’attention des membres de la société; j’ai supprimé des articles, j’en ai ajouté d’autres, enfin j’ai laissé entiers ceux qui m’ont paru essentiels. C’est dans cet état que je représente à mes collègues, non pas mon ouvrage, mais le leur ; trop heureux si, de mes réflexions, il peut résulter une modification utile à la chose publique. Dubois-Crancé . [21 novembre 1790.] armes que lorsqu’elles seront de service ; dans ce cas, elles devront respect et obéissance à leurs chefs; hors du service, tous les citoyens sont égaux, et ne se doivent que ce qui est ordonné par la loi. Art. 9. Toute fédération particulière et séparée sera regardée comme un attentat à l’unité du royaume et à la fédération générale de tous les Français. Art. 10. Les liens du mariage servant à resserrer les nœuds qui attachent un citoyen à la patrie, et leur donnant de nouveaux droits l’un envers l’antre, nul citoyen actif ne pourra se marier que revêtu de l’uniforme national. Art. 11. L’uniforme national sera le même pour tous les Français, jamais il ne sera toléré aucune distinction d?épaulettes entre les officiers et les soldats citoyens; jamais un officier n’occupera pendaüt plus d’un an le même grade, et il ne pourra redevenir officier qu’après avoir été un an soldat, excepté les circonstances de guerre, et dans ce cas les officiers conserveront leur poste jusqu’au retour de l’expédition. Art. 12. Les sergents et caporaux seront distingués par des galons de laine sur la manche ; les officiers recevront, lors de leur nomination, chacun un hausse-col différent, affecté à chaque grade, des mains du directoire du district, auquel ils le remettront en sortant d’exercice. Les commandants de bataillon et de légion porteront en outre une plume aux trois couleurs de la nation. Art. 13. Les officiers et sous-officiers de tous grades dans la garde nationale seront électifs chaque année au scrutin individuel et à la majorité absolue, savoir : les capitaines, lieutenants, sous-lieutenants et sous-officiers par leur compagnie; les commandants de bataillon par tous les citoyens actifs du bataillon auquel ils seront attachée, et les commandants de légion par le corps électoral de chaque district. Art. 14. Il n’y aura jamais de grade supérieur à celui de commandant de légion, dans la garde nationale, et lorsque plusieurs légions seront réunies dans un même lieu, si c'est accidentellement, le commandement appartiendra au plus âgé. Si c’est habituel, comme dans les grandes villes dont le nombre des citoyens actifs excède celui nécessaire à ia formation d’une légion, le commandement sera exercé à tour de rôle toutes les semaines par un commandant de légion, qui occupera pendant ce service un appartement près de l’hôtel de ville, pour être à portée de recevoir les ordres de la municipalité, et d’en ordonner l’exécution. Art. 15. Jamais il ne sera infligé aucune peine afflictive à un citoyen pour faits contraires à la discipline; des amendes proportionnelles et par corps, la suppression des droits de citoyen actif, à terme, seront les seules punitions applicables aux différentes circonstances; et ces punitions, lorsqu'elles excéderont une amende de 6 livres, ne pourront être infligées à un citoyen que sur la plainte du conseil de discipline du bataillon, par le directoire du district. Tous délits graves seront dénoncés aux tribunaux pour être jugés dans la forme ordinaire. Art. 16. Lorsque les gardes nationales, légalement requises, sortiront de leurs foyers, elles seront payées par le Trésor public, sans distinction de grade. Art. 17. Lorsque les gardes nationales seront corps d’armée à la guerre, elles seront soumises ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 611 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 novembre 1790. J à toutes les lois militaires, et jugées par une eour martiale. Art. 18. Jamais les gardes nationales proprement dites ne pourront être incorporées individuellement ni par section avec les troupes de ligne; elles marcheront toujours avec leur drapeau, et sous le commandement des officiers de leur choix. Art. 19. Dans l’intérieur de3 villes, pour le rétablissement de l’ordre public, les troupes de ligne et les maréchaussées n’agiront qu’en cas d’insuffisance des gardes nationales ; en campagne les gardes nationales n’agiront que pour soutenir les troupes de ligne et les maréchaussées. DÉCHETS RÈGLEMENTAIRES. Section lre. De la composition de la liste des citoyens. Art. 1er. Les citoyens actifs, depuis dix-liuit jusqu’à soixante ans révolus, s’inscriront pour le service de la garde nationale sur des registres qui seront ouverts à cet effet dans les municipalités de leur domicile: ils seront ensuite distribués par compagnie, comme il sera dit au titre suivant. Art. 2. A défaut de cette inscription et de cette distribution, ils demeureront suspendus de l’exercice des droits que la Constitution attache à la qualité de citoyen actif, ainsi que celui de port d’armes. Art. 3. Ceux qui ne sont pas citoyens actifs ne sont obligés à aucune inscription sur les registres, ni à aucun service; mais ils pourront requérir cet honneur près du conseil général de la commune par une requête signée et approuvée de l’assemblée primaire de leur canton ; et alors ils participeront aux mêmes avantages, quant à ce qui concerne la garde nationale, que tous les citoyens actifs. Art. 4. Aucune raison d’état, de profession, d’âge, d’infirmités, de taille ou autres ne dispensera de l’inscription des citoyens actifs qui voudront conserver l’exercice de leurs droits, mais plusieurs seront dispensés du service, ainsi qu’il sera dit ci-après. Art. 5. Tout fils de citoyen actif sera tenu de s’inscrire sur lesdits registres, lorsqu’il sera parvenu à l’âge de dix-huit ans accomplis. Art. 6. Ceux qui n’auront pas pris cette inscription à l’âge de dix-huit ans ne pourront prendre à vingt-et-un l’inscription civique: ils ne seront admis à cette dernière inscription, que trois ans révolus après la première, quelles que soient les raisons qui Jes auraient empêchés de s’inscrire. Art. 7. Tout citoyen actif, ayant maintenant plus de dix-huit ans et se faisant inscrire sur-le-champ, sera dispensé de ce noviciat de trois années, et pourra prendre à vingt et uu ans l’inscription civique. Art. 8. Les étrangers qui auront rempli les conditions prescrites pour devenir citoyens français et leurs enfants seront traités à cet égard comme des Français naturels. Art. 9. Nul ne sera reçu à s’inscrire par procuration, mais tous seront tenus de faire leur inscription en personne ; les pères pourront cependant faire inscrire leurs enfants absents, si la suite de leur éducation est ta cause de leur absence. . Art. 10. Les fils de citoyens actifs qui auront satisfait à ce devoir jouiront, après dix ans révolus, depuis leur inscription sur le registre de la garde nationale et leur distribution par compagnie, de tous les droits de citoyens actifs* quand ils ne payeront pas la contribution exigée, pourvu que d'ailleurs ils remplissent les conditions préscrites per la Constitution. Art. 11. Les registres d’inscription des municipalités seront doubles, et l’un d’eux sera envoyé tous les ans et conservé dans le directoire de district. Art. 12. Les fils de citoyens actifs, qui se seront inscrits dans l’année, seront reçus au serment de la garde nationale, qui se prêtera à ta fête civique du 14 juillet suivant, dans le chef-lieu du district. Section II. De l'organisation des citoyens pour le service des gardes nationales. Art. 1er. Les citoyens seront organisés par district et par canton; sous aucun prétexte ils ne pourront l’être par municipalité ou par département. Art. 2. Les sections dans les villes seront considérées comme canton. Art. 3. Il y aura une ou plusieurs légions par district, un ou plusieurs bataillons ou demi-bataillons par canton, à raison de ia population. Art. 4. Les légions seront de quatre à sept bataillons, par conséquent huit bataillons formeront deux légions, et lorsqu’il y aura moins de quatre bataillons dans un district, les commandants du bataillon alterneront entre eux le commandement en chef. Les bataillons seront composés de huit compagnies au taux commun de 68 hommes chacuoe, compris les officiers et sous-oiliciers. Art. 5. Chaque légion aura un commandant eu chef et un commandant en second. Chaque bataillon aura un commandant en chef et un commandant en second, un adjudant, un porte -drapeau et un maître-armurier. Art. 6. Chaque compagnie sera divisée en deux pelotons, quatre sections et huit escouades. Art. 7. Il y aura dans chaque compagnie un capitaine, uu lieutenant, un sous-lieutenant, un sergent-major, un trésorier, deux sergents et quatre caporaux. Art. 8. Le lieutenant elle sous-lieulenant commanderont chacun un peloton ayant chacun un sergent sous leurs ordres. Art. 9. Il y aura à la tête de chacune des quatre sections un caporal qui commandera la première escouade; les secondes escouades seront commandées par le plus âgé des soldats de l’escouade. Art. 10. On tirera, tous les ans au sort, savoir : dans le chef-lieu de district, le rang des légions et bataillons; dans le chef-lieu decantoû,! e rang des compagnies; à la tête des compagnies, le rang des pelotons, des sections et des escouades. Art. 11. La formation des compagnies se fera de la manière suivante dans les villes ou gros lieux : 68 citoyeus actifs ou fils de citoyens actifs âgés de dix-huit ans, formeront une compagnie composée de tous les citoyens du même quartier inscrits au registre de la municipalité sans distinction ni préférence; dans les communes qui ne pourraient pas former une compagnie, il sera formé des pelotons de vingt-huit hommes , des 612 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. sections de quatorze, ou des escouades de sept, de manière que plusieurs communes fourniront une compagnie en se réunissant de, proche en proche, selon les ordres qui seront donnés par les directoires de districts, sous la surveillance de ceux de départements. Art. 12. S’il arrivait que' le nombre des citoyens inscrits, soit dans une commune de campagne, soit dans plusieurs communes réunies à cet effet, ne s’accordât pas avec le nombre de 68 dont chaque compagnie doit être formée, la compagnie pourra s'élever jusqu’à 76, ou se réduire à 60, non compris le tambour. Dans les grandes villes, les compagnies susceptibles de former à elles seules plusieurs légions, pourront s’élever jusqu’à cent hommes. Art. 13. Lorsque la garde nationale marchera par détachement, chaque escouade fournira un contingent égal, et il sera pourvu, par l’officier commandant du bataillon , à ce que ces détachements réunies forment des compagnies complètes, et à ce qu’ils aient des officiers et sous-officiers de leur canton en nombre suffisant pour les commander. Lorsque la garde nationale marchera en corps, sans exception, les compagnies seront commandées par les officiers et sous-offl-ciers qui leur appartiennent, quelque inférieur que soit au complet le nombre des soldats citoyens qui se trouveront au lieu de rassemblement. Art. 14. Toutes les fois que la garde nationale légalement requise sortira de ses foyers pour cause extraordinaire, il sera payé, à chaque officier, sous-officier et soldat sans distinction, vingt sous par jour sur le Trésor public. Art. 15. Tout service intérieur de police ordinaire se fera gratuitement, et à tour de rôle, par chaque citoyen inscrit sur le registre des gardes nationales ; et cependant il sera libre à un citoyen de se faire remplacer, en payant de gré à gré, par un autre citoyen actif de sa compagnie, de l’agrément de ses camarades. Art. 16. L’uniforme réglé pour les gardes nationales ne pourra être exigé, et le service des citoyens actifs sera reçu sous quelque vêtement qu’iis se présentent. Mais ceux qui porteront l'uniforme seront tenus de s’y conformer sans aucun changement. Art. 17. Les anciennes milices bourgeoises, les compagnies d’arquebusiers, fusiliers, chevaliers de l’arc ou de l’arbalète, compagnies de volontaires, et tout autre, sous quelque forme ou dénomination que ce soit, sont supprimées. Art. 18. L’Assemblée nationale voulant rendre honneur à la vieillesse des bons citoyens, permet que, dans chaque canton, il se forme une compagnie de vétérans, composée, comme les autres, d’individus qui aient passé soixante ans. Ces vétérans seront distingués par un chapeau à la Henri IV; ils ne seront employés qu’aux fonctions qu’ils aurontdésiré remplir; ils assisteront assis aux exercices des gardes nationales, adjugeront les prix et seront appelés les premiers dans chaque district au renouvellement de la fédération générale du 14 juillet, Art. 19. L’Assemblée nationale permet également qu’il s’établisse dans chaque canton, sous la même forme d’organisation, une compagnie composée des jeunes citoyens au-dessous de l’âge de dix-huit ans; cette compagnie, commandée par des officiers de la même classe, sera soumise à l’inspection de trois vétérans nommés à cet effet par leur compagnie. Ces jeunes élèves feront leurs exercices sous l’œil des vétérans, et J {21 novembre 1190.| apprendront à la fois à respecter les anciens et à servir la patrie. Art. 20. Sont exempts de tout service ou de toute contribution pour icelui, les citoyens qui exercent les fonctions de juge ou de commissaire du roi près les tribunaux, les présidents des administrations, vice-présidents et membres des directoires, les procureurs-syndics de département ou de district, les greffiers, les dépositaires de caisse publique, les ofticiers municipaux et procureurs de la commune, ainsi que leurs substituts. Sont pareillement exempts de tout service et de toute taxe relative à la garde nationale, les membres de l’Assemblée nationale, les évêques, curés, vicaires, les officiers, sous-officiers, cavaliers et soldats des troupes de ligne et de la marine étant en activité de service, les officiers, sous-officiers et cavaliers de la maréchaussée et gendarmerie nationale , les sexagénaires , les femmes et les tilles. SECTION III. Des fonctions des citoyens servant en qualité de gardes nationales. Art. 1er. Les fonctions des gardes nationales, lorsque la réquisition leur en est faite légalement dans la personne de leurs chefs, sont de maintenir l’ordre et l’obéissance aux lois. Art. 2. Les citoyens requis et leurs chefs ne pourront se permettre déjuger si les réquisitions ont dû être faites, et seront tenus de les exécuter provisoirement et sans délibération ; mais ils pourront en exiger la remise par écrit signé, pour assurer la responsabilité des requérants. Art. 3. Les citoyens ne pourront, ni prendre les armes, ni se rassembler en état de gardes nationales, sans l’ordre des chefs médiats ou immédiats, ni ceux-ci l’ordonner, sous une réquisition légale dont il sera donné communication aux citoyens. Art. 4. Seront exceptées de cette règle générale les fonctions du service ordinaire et les patrouilles de sûreté qui se feront dans les villes et lieux où les citoyens se gardent eux-mêmes. Art. 5. En cas de flagrant délit ou clameur publique, tous Français sans exception doivent secourir ceux qui sont attaqués dans leur personne ou dans leur propriété; les coupables sont saisis sans qu’il soit besoin de réquisition. Art. 6. Dans les cas de réquisition permanente, qui aura lieu aux époques d’alarme et de trouble," les chefs donneront des ordres nécessaires pour que les citoyens se tiennent prêts à un service effectif; les patrouilles seront renforcées et multipliées. Art. 7. Dans les cas de réquisition particulière, ayant pour objet de réprimer les incursions extraordinaires du brigandage, ou les attroupements séditieux contre la sûreté des personnes et des propriétés, la perception des contributions, ou la circulation des subsistances, les chefs pourront ordonner, selon les occasions, ou les détachements tirés des compagnies, ou le mouvement et l’action des compagnies entières. Art. 8. Les gardes nationales dissiperont les éléments, les attroupements séditieux, et emploieront la force des armes dans les cas exprimés par la loi martiale, si elle est proclamée, ou pour la défense de leur poste et leur propre sûreté, dans le cas seulement ou des voies de fait mem> (Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (21 novembre 1790.J 643 trières auraient été employées contre eux-mêmes. Art. 9. Tout officier municipal qui, de son chef, ou même par délibération du conseil général de la commuue, requerrait le service des gardes nationales d’une municipalité contre une nutre, sera poursuivi comme criminel de lèse-nation, et responsable de tous les événements, cette réquisition ne pouvant être faite que par le directoire du département. Art. 10. Les gardes nationales ne pourront jamais marcher, hors de leurs foyers, à la guerre, qu’à la réquisition des corps administratifs, sur un décret émané du Corps législatif, à moins d’une invasion hostile et subite faite par une troupe étrangère, et dans ce cas le roi pourra faire donner les ordres qu’il croira nécessaires par l’intermédiaire du directoire de département , aux commandants des différentes légions pour la défense de la patrie. Art. 11. Lors de l’adjonction des gardes nationales aux troupes de ligne, les gardes nationales conserveront leurs officiers; mais l’armée ou le détachement sera toujours commandé par un officier des troupes de ligne en activité, et qui aura au moins le brevet de colonel, et s’il n’y avait point de colonel à ce détachement, il serait commandé par le chef des gardes nationales. L’Assemblée renvoie à l’organisation de l’armée auxiliaire les secours détachés, soit en hommes, soit en chevaux, que la nation pourra fournir pour incorporer à l’armée de ligne. Arf. 12. Le service ordinaire se bornera, dans les campagnes, à quatre hommes de garde tous les dimanches et fêtes pour la police, surtout aux heures des offices. Dans les villes il y aura toujours un factionnaire et un corps de garde à la maison commune, qui se relèvera toutes les vingt-quatre heures. Ce set vice se fera à tour de rôle par tous les citoyens inscrits au registre, ou par leurs représentants, comme il a été dit (art. 15 du litre II). Art. 13. Dans les villes, dont la population exige une plus grande surveillance, il sera dressé, par le conseil général de la commune, un règlement de service qui, après avoir été visé et approuvé du directoire du district et celui du département, aura force de loi dans la ville pour laquelle il aura été fait. Art. 14. Tous les dimanches, pendant le mois de mai, juin, juillet et août, les citoyens se rassembleront par section dans leur municipalité, pour s’y former aux exercices militaires, et tous les premiers dimanches de ces mêmes mois, ils s’assembleront par bataillon dans le chef-lieu de leur canton, pour y prendre l’ensemble des évolutions militaires et tirer à la cible. Il sera donné un prix de douze livres chaque fois au meilleur tireur, dont les fonds seront faits librement par compagnie pour l’année, ou pris sur les amendîes. Art. 15. Les drapeaux seront déposés chez le commandant de chaque bataillon. Art. 16. Le serment fédératif sera renouvelé chaque année par tous les gardes nationales dans le chef-lieu de leur district, le 14 juillet. Art. 17. Il est défendu à tout citoyen de porter, hors du temps du service, soit dans les rues, soit dans les lieux publics, des épées, sabres ou autres armes, sans préjudice aux circonstances de voyage pour lesquelles un citoyen a droit de porter des armes pour sa défense. Art. 18. Sont exceptés de cet article les officiers, sous-officiers et soldats ou cavaliers de troupes de ligne de service, ou à leur garnison, ainsi que les officiers, sous-officiers et cavaliers de maréchaussée, ou corps soldés préposés à la po~ lice des villes. Section IV. Des délits et des peines. Article 1er. Les punitions pour délits contre la discipline seront égales pour tous les citoyens, sans distinction d’état ni de grades. Art. 2. Jamais il ne pourra y avoir d’autre peine prononcée contre un citoyen, en matière de discipline, que des amendes, et la suspension des droits de citoyen au plus pour un an. Art. 3. La plus faible amende sera de trente sous, et la plus forte de douze livres. Art. 4. Il sera formé un conseil de discipline par canton, composé de huit officiers, sous-officiers et de dix soldats, tous pris au sort. A ce conseil l’accusé et l’accusateur seront entendus contradictoirement, et dans le cas où l’accusateur serait jugé non recevable dans sa demande, il sera condamné aux mômes peines qu’aurait encourues l’accusé, s’il avait été jugé coupable du délit qui lui était imputé. Art. 5. Lorsque le conseil de discipline con-damnera un citoyen à une peine plus forte qu’une amende de six livres, le jugement sera envoyé au directoire du district pour être confirmé, annulé ou modifié en dernier ressort. Art. 6. Le conseil tiendra un registre où seront inscrits et motivés tous ses jugements, avec le nom du particulier qui en aura été l’objet. Art. 7. Tout refus de service ordinaire sera' puni, pour la première fois, d’une amende double du prix d’une garde en remplacement ; pour la seconde fois, du triple; pour la troisième fois, du quadruple; et pour la quatrième fois de douze livres, avec suspension pour un an des droits de citoyen actif. Art. 8. Tout soldat citoyen qui, dans l’année, aura été puni deux fois par le conseil de discipline, ne pourra, l’année suivante, être choisi pour remplir les fonctions d’officier ou sous-officier dans la garde nationale. Art. 9. Si ce citoyen est un officier en exercice, il sera suspendu à l’instant de ses fonctions. Arl. 10. Il ne peut être supposé commis aucun acte d’insubordination par la garde citoyenne que sous les armes et en fonction ; et, dans ce cas, le plaignant sera tenu de constater sa plainte par un procès-verbal signé au moins de deux témoins. S'il n’y a point de voies de fait, le conseil de discipline pourra condamner le délinquant à une amende proportionnelle au délit, sauf l’appel au directoire du district ; s’il y a voies de fait, la suspension des droits de citoyen s’ensuivra, même l’arrestation s’il y a lieu, et l’affaire alors ira par devant Je tribunal du district, au criminel. Art. 11. Ala guerre, les gardes nationales seront soumises à toutes ie3 lois décrétées pour le militaire, et jugées par une cour martiale ; mais il ne pourra être prononcé contre eux de peine de mort que dans les cas de haute trahison.