ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (27 août 1790.] 350 [Assemblée nationale. ] été faites depuis l’impression du tarif, quelques-uns des droits fixés sur l’exportation des vins pourront être susceptibles de modification. (L’Assemblée applaudit vivement le rapport fait par M. Goudard. Elle ordonne l’impression du rapport du tarif et du projet de loi.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur l'affaire d'Avignon. M. Tronchet, rapporteur , se dirige vers la tribune. M. Bmot. D’après l’ordre de nos travaux, le vendredi est un jour consacré aux finances, je demande qu’on ne s’écarte pas de cette règle. M. de Murinais. Je fais la motion de consacrer la séance au traitement des religieuses dont le sort mérite tout l’intérêt de l’Assemblée. M. d’André. Les questions de finances sont tellement urgentes qu’elles doivent primer toutes les autres. J’appuie donc la motion de M. Buzot, mais avec cet amendement qu’il y aura ce soir une séance extraordinaire pour l’affaire d’Avignon. (Cette double proposition est adoptée.) M. le Président. M. de Montesquiou, organe du comité des finances, a la parole pour un rapport sur la dette pvblique (1). M. de Montesquiou, rapporteur . Messieurs, l’Assemblée nationale va régler définitivement tous les objets qui composeront désormais la dépense publique. Il ne lui restera plus qu’à statuer sur la dette, pour être en état de déterminer la somme des contributions. Lorsque la nation attendait avec tant d’impatience la convocation des Etats généraux , le poids de la dette publique pesait sur les contribuables, de manière à attaquer tous les moyens de reproduction, et c’est le dernier terme des malheurs d’un peuple. Cependant les dépenses s’accroissaient tous les jours, les arrérages se convertissaient chaque année en capitaux par de nouveaux emprunts; le désespoir était le précurseur de la banqueroute. L’Assemblée nationale s’est formée; l’honneur a consacré tous les engagements qui devaient reposer sur la foi publique; l’espérance a reparu avec la liberté. Un des premiers objets de vos travaux, Messieurs, est de prouver que vous ne preniez pas un engagement téméraire, lorsque vous placiez tous les créanciers de l’Etat sous la sauvegarde de l’honneur et de la loyauté français. Un autre objet non moins intéressant vous occupe, celui de soulager le peuple de l’énorme fardeau qui l’a si longtemps accablé. Pour en avoir une idée ] uste, ce ne serait pas assez d’ajouter à la somme des revenus versés au Trésor public tout ce que coûtait l’armée de commis, de gardiens, de suppôts du fisc, tant supérieurs qu’inférieurs; il faudrait y joindre encore les abus personnels et malheureusement trop faciles à ces agents si multipliés; supputer les frais de contrainte, les effets de la contrebande, ceux de cette guerre intestine, suite de tant de prohibitions, parce qu’effecti veinent le poids en retombe toujours en dernière analyse sur le peuple : un tel résultat serait effrayant sans doule; mais bientôt il ne rappellerait plus à la nation que le souvenir du passé, et le prix de vos travaux. Quelque intéressante que fût cette recherche, nous ne nous jetterons pas dans les calculs qu’elle entraînerait, et qu’il serait toujours possible de regarder comme hypothétiques. Nous nous arrêterons anx seules idées précises, et nous prendrons pour termes de nos comparaisons, non ce que la nation payait sous les formes variées, arbitraires et vexatoires, dont nous venons de parler, mais la somme des con-tributions-qui entraient au Trésor public, et celle de frais bien constamment attachés aux impôts indirects que vous avez supprimés. Vous porterez l’économie plus loin que vous n’avez fait encore, soit par de nouvelles suppressions, soit par la simplicité du régime que vous établirez; mais nous n’entreprendrons pas d’apprécier ce qui ne pourrait l’être avec l’exactitude qui doit accompagner notre travail. Au mois de mai 1789, les revenus de l’Etat, versés au Trésor public, étaient de 475 millions; les provinces payaient en outre 4 millions pour diverses dépenses du département de la guerre, et l’accessoire des impôts indirects que vous avez supprimés, coûtait, outre le prix du bail, en frais de garde, d’achat, de transport, de fret, et pour le bénéfice des fermiers, environ 18 millions. Nous ne. parlons pas de la subvention représentative de la corvée, qui alors, comme aujourd’hui, avait une destination spéciale dont elle n’était pas détournée, et qui n’entrait pas au Trésor public. La contribution des peuples était donc effectivement de 497 millions, sans y comprendre beaucoup d’autres surcharges, et sans y joindre le calcul des saisies, contraintes et vexations de tout genre. G’est de cette base simple et incontestable que nous partirons. Malgré l’immensité de cette charge trè3 inégalement distribuée entre le peuple et les ci-devant privilégiés, il s'en fallait de 56 millions que les revenus de l’Etat pussent suffire à l’acquittement des dépenses invariables. Dans une semblable position, il était difficile de songer aux moyens d’effectuer l’extinction d’une dette immense. Les engagements anciens étaient mal acquittés; les plus récents même étaient violés depuis 1788; et comment ne l’eussenl-ils pas été, lorsque tout l’art de la finance, et toute l’autorité d’un gouvernement auquel dès longtemps rien ne résistait, ne pouvaient arracher d’un peuple déjà si malheureux la somme nécessaire pour établir l’équilibre entre la recette fixe et la dépense prévue? ..... Les besoins extraordinaires qui se sont fait sentir si vivement depuis que vous êtes assemblés , les nouveaux emprunts qu’ils rendaient inévitables, ont encore augmenté la masse de vos engagements. Toujours fidèle à ses principes, l’Assemblée nationale n’en a pas moins décrété que la justice serait gratuite, et n’a pas été arrêtée dans une décision si importante, par la crainte d’une augmentation considérable dans la somme des intérêts de la dette publique; augmentation résultant de la différence entre le produit des offices de magistrature et l’intérêt qui sera dû après leur liquidadon. G’est dans cet état des choses que le comité des finances, voulant répondre à la confiance dont l’Assemblée nationale l’a honoré, s’est occupé constamment des moyens de faire disparaître le déficit par des économies, et d’opérer avec certitude l’extinctiop entière de la dette, en (1) Ce rapport est incomplet au Moniteur. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [37 août 1790.] améliorant le sort des peuples. Les projets de réforme sur les dépenses sont, depuis longtemps, soumis à votre discussion: c’est le plan de liquidation générale que nous avons aujourd’hui l’honneur de vous présenter. Avant d’entrer en matière, permettez - nous quelques explications sur la véritication de la dette publique dont on a souvent parlé dans cette Assemblée. Cette vérification a été, sans doute, un de nos premiers devoirs; mais de quelle manière avons-nous du y procéder? Notre mission a-t-elle été d’approfondir les secrets de l’administration, ou de fouiller dans celui des familles? Nous allons vous rendre compte de notre conduite, en vous exposant notre opinion. Les dettes que l’Assemblée nationale a prises spécialement sous sa garde, sont, avant tout, les engagements revêtus d’un titre légal. On n’a jamais montré d’incertitude sur la légitimité des anciennes renies perpétuelles; elles ont été, depuis un siècle, le jouet de toutes les opérations ban-queroutières : réduites à plusieurs reprises, leur histoire ferait la honte de l’ancienne administration de nos finances; il n’en existe plus aujourd’hui, dont l’intérêt représente le capital originaire. Loin de vouloir troubler cette classe de créanciers dans leur jouissance, il eut été conforme à vos principes de les rétablir dans leur état primitif, si vous n’eussiez été fondés à penser qu’après un laps de temps aussi considérable, et en raison des nombreux changements de propriété, cet acte de justice eût été bien plus une libéralité qu’une restitution. Les anciennes rentes viagères ont éprouvé aussi différentes vicissitudes; des rentes arbitraires les ont réduites à diverses reprises. Ce qui reste de ces anciens engagements est devenu plus respectable encore par cet inconcevable abus de l’autorité. Le public prévenu, sans doute, par beaucoup d’exemples de prodigalité, a paru élever des doutes sur la pureté originaire des nouvelles rentes viagères. Ou a prétendu qu’il en existait un grand nombre dont les capitaux n'avaient pas été versés au Trésor public : c’est de ce fait surtout que l’on a demandé la vérification. Il semblerait effectivement permis d’examiner scrupuleusement la légitimité des rentes constituées daus ces derniers temps qui, par de gros intérêts, et par de nouvelles combinaisons, ont rendu ce genre d’emprunt plus onéreux qu’il ne l’avait jamais été. Le même préjugé s’est répandu sur les effets au porteur des différents emprunts ouverts depuis le règne du roi, et l’on a supposé que ces nouvelles créances ne souffriraient pas une discussion sévère de leur origine. Il est possible effectivement que quelques-uns de ces effets, soit viagers, soit remboursables à terme, aient été délivrés gratuitement dans le principe, ou que leur capital ait été puisé dans des libéralités abusives ; et cependant, cela n’empêcherait pas ces mêmes effets d’être aujourd’hui une propriété sacrée dans les mains de ceux qui les possèdent : c’est une conséquence de leur nature même et de la forme sous laquelle ils ont été créés. Les effets au porteur n’ont d’autre propriétaire que celui qui les a, et sont sensés n’en avoir jamais eu d’autre. Le premier acquéreur n’en est pas plus connu que ne le sont les intermédiaires entre lui et le possesseur actuel. Nulle formalité n’étant nécessaire à leur transmission, la trace en est impossible à suivre ; elle est donc inutile à chercher. La loi ne voit 351 qu’un titre de créance et un porteur de ce titre ; la vie même, preuve de l’origine, ne permettrait pas d’attaquer la légitimité de la possession, puisque rien ne pourrait servir à prouver l’identité. Ce raisonnement ne paraîtrait pas applicanle à des rentes constituées; mais c’est dans cette même forme, c’est en bordereaux au porteur, que presque toutes les rentes viagères des derniers emprunts ont été délivrées. On a voulu leur donner cet attrait de plus, pour les spéculateurs, et, par là, un voile impénétrable a été jeté sur le moment de l’acquisition. Le porteur d’une ordonnance de comptant, s’il est vrai qu’il y ait eu des particuliers favorisés à ce point, se trouve confondu avec celui qui a livré sa fortune à l’Etat. Les titres sont muets à cet égard; la recherche individuelle ne servirait donc qu’à répandre uue alarme générale, et cette alarme serait un graud mal, que la découverte d’un fait isolé ne pourrait, ni justifier, ni réparer. Votre comité a pesé toutes ces considérations, et il croit avoir remidi sa mission, en se contentant de remonter aux titres créateurs de chaque genre d’effets, en se les faisant représenter, eu vérifiant la somme des remboursements opérés, en calculant ce qui restait dû après ces remboursements, et en s’assurant que ce qui devait rester, était la seule chose dont le payement vous serait demandé. Le résultat de cette vérification générale est renfermé dans trois tableaux imprimés, que le comité des finances a fuit rédiger avec le plus grand soin. Ces états, quoique fort abrégés contiennent tous les details et tomes les observations dont chaque partie peut être susceptible. Si vous avez daigné les examiner, vous savez, avec la dernière précision, en quoi consiste: 1° La dette dont les capitaux sont aliénés, et que dans aucun cas vous ne pouvez être obligés de rembourser ; 2° Celle qui vous impose l’obligation actuelle du remboursement effectif ; 3° Celle dont le remboursement est promis, mais ne doit s’effectuer que successivement, à des termes plus ou moins éloignés. C’est sous ces trois rapports qu’il est nécessaire que vous considériez la dette publique; sans quoi, vous n’en auriez qu’une idée imparfaite. Après l’avoir examinée ainsi, vous ne trouverez, ni juste, ni possible d’assimiler entre eux tous les créanciers de l’Etat. Une seule chose leur est commune, c’est le droit qu’ils ont tous à la sûreté de leur créance et à l’exactitude de leur payement: mais considérés chacun en particulier, leurs droits ne sont plus semblables, puisque les engagements contractés avec eux ne sont pas tous les mêmes. Le résultat d’un traitement égal serait à la fois fidélité pour les uns et infidélité pour les autres. Vous ne devez à ceux-ci que des arrérages et point de remboursement ; vous devez à ceux-là le remboursement entier et actuel; à d’autres enfin, un remboursement successif. Si vous étiez en état de les rembourser tous, vous pourriez, avec justice, les traiter tous avec égalité; mais ne le pouvant pas, il ne serait pas juste d’employer, en faveur de ceux à qui vous ne devez que des arrérages, les fonds de remboursement qui appartiennent à d’autres. Vous allez supprimer les charges de finance et les offices de magistrature; vous voulez que dans les armées, à la cour môme, la vénalié des emplois soit proscrite; vous désirez sortir de la dépendance où vous étiez des compagnies de finance, leur rendre les cautionnements en argent et n’en plus exiger qu’en immeubles; dès iors, 352 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 août 1790.] vous ne pouvez priver de la jouissance de leurs fonds, ceux que vous dépouillez de leur état ou de leurs espérances ; il faut donc rembourser toutes les charges supprimées, et restituer les cautionnements. Vous n’approuvez sans doute, ni ne voulez conlirmer l’acte d’autorité arbitraire par lequel, le 16 août 1788, on a suspendu les remboursements à terme. Trois années se sont écoulées et ont accumulé des sommes considérables, qui sont évidemment exigibles : elles le sont, parce que la suspension était injuste; elles le sont d’autant plus, que le terme de cette suspension est expiré. Vous devrez successivement tout ce qui doit échoir de ces mêmes engagements à époque fixe. Ces échéances arriveront tous les ans, jusqu’en 1824, et, chaque année, la partie échue sera exigible. Cette classe d’engagements comprend ceux qui ont été particulièrement contractés avec des prêteurs hollandais ou génois. Le gouvernement y a été religieusement fidèle jusqu’à présent. L’Assemblée nationale ne voudrait pas donner un exemple contraire. Vous avez décrété, au mois de septembre dernier, un emprunt de 80 millions, avec promesse d’en rembourser chaque année 8 millions pendant dix ans. C’est le premier engagement que la nation ait contracté en son propre nom. Votre exactitude à le remplir ne peut être révoquée en doute Le dette arriérée, dont vous avez ordonné la liquidation, est encore du genre des précédentes. Elle sera composée de salaires ou de fournitures. Vous avez voulu la connaître, et voudrez aussitôt l’acquitter. Vous voulez vendre la totalité des biens dont jouissait le clergé. Quoique vous ayez réuni ses créanciers à ceux de l’Etat, et que vous leur ayez donné pour sûreté toutes les propriétés de la nation, vous penserez peut-être qu’au moment où ils ont prêté leurs fonds au clergé, ils ont pu regarder ses biens comme leur gage, et qu’au moment de la vente totale, ils doivent être remboursés et l’être de leur capital originaire, parce que c’est la loi de tout remboursement forcé. Vous avez ordonné la suppression des dîmes inféodées, et leur remboursement aux propriétaires; vous voudrez remplir cet engagement. Ces différents articles réunis vous présenteront une dette d’environ 1,900 millions. Les états im primés ne vous laisseront rien à désirer sur les détails. Nous ne vous en ferons pas ici la fastidieuse énumération ; c’est dans le silence du cabinet que vous les examinerez et les jugerez. Il vous suffit, en ce moment, de connaître la somme et la nature de ces engagements, pour apprécier l’obligation qu’ils vous imposent: nous pensons qu’à tous égards, la priorité leur est due. Ce ne sera donc qu’après y avoir satisfait, que nous vous proposerons de rembourser des capitaux que personne n’aura jamais le droit de vous demander. D’après ces faits bien constatés, nous devons établir un système raisonnable de liquidation et un plan de libération qu’il soit possible de suivre. M. l’évêque d’Autun a, le premier, porté à l’Assemblée l’idée salutaire d’acquitter l’Etat par la vente des domaines ci-devant consacrés aux frais du culte. Il a développé cette idée, en dernier lieu, avec son talent ordinaire; et si un examen plus particulier des différentes natures d’engagements que vous avez, nous force à moins généraliser son plan, nous en adoptons cependant la majeure partie, et nous attachons à son succès la destinée de l’Empire. Pour vous convaincre de son importance, ou, pour mieux dire, de sa nécessité, nous commencerons par examiner les affaires publiques, isolées de tout secours étranger, telles enfin qu’elles seraient, si nous ne pouvions consacrer à leur rétablissement d’autres ressources que les contributions des peuples. Dans cette hypothèse, obligés d’avoir égard à la fois au droit rigoureux des créanciers et au droit plus rigoureux encore qu’a le peuple de ne pas supporter un fardeau au-dessus de ses forces, il faudrait bien balancer ces intérêts divers, composer avec la justice, limiter les remboursements, implorer le secours du temps, et soumettre le droit à la nécessité. Nous allons fonder sur ces bases un projet de liquidation, qui pourra vous donner une idée juste de la position où nous sommes. Réduits, dans ce système, à la nécessité de suspendre les remboursements, il faudrait du moins acquitter les intérêts avec exactitude. Ainsi, le premier calcul que nous ayons à faire est celui des intérêts que le Trésor public aurait à payer jusqu’après le remboursement. Il n’y a point de composition à faire à cet égard. En voici la totalité. Tableau. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 août 1790. J 353 INTÉRÊT DE LA DETTE PUBLIQUE. Dette ( La dette constituée, tant perpétuelle que viagère, dont de la première < 3,522,694 livres seraient éteitits par le remboursement de la partie. ( dette exigible ............................................... CAPITAUX EXIGIBLES. Dettes de la deuxième partie (1). Dettes de la troisième partie. 1. La dette du clergé ......... . ............. 149,434,4691. 2. Les offices de magistrature ............... 450,000,000 3. Les charges de finances .................. 118,143,885 4. Les cautionnements ...................... 203,401,400 5, Les charges des maisons du roi, de la reine et des princes ...................... ... 52,000,000 6. Les charges et emplois militaires ........ 35,121,984 7. Lesgouvemements et lieutenances générales de l’intérieur .......................... 3,783,150 8. Les dîmes inféodées (2) .................. 100,000,000 9. Somn.es échue-au 1er janvier 1791 des emprunts à terme ......................... 107,856,925 10. L’arriéré (3), en l’évaluant seulement à 120 millions ............................... 120,000,000 1. L’emprunt de septembre 1789 ............. 51,939.768 2. Les emnrusts de Hollande et de Gênes... 18,330,970 3. Les avances des fermiers de Sceaux et de Poissy. ...... . ......................... 902,673 4. Les emprunts à terme à échoir (4) ......... 414,427,408 5. Les annuités des notaires et de la caisse d’escompte ............................. 77,000,000 Les assignats, 400 millions. Ils ont un gage et une hypothèque particulière. Il n’est plus question de penser à leur remboursement qui est assuré. 1,339,741,813 1. 562,600,819 1. Total des capitaux exigibles. 1,902,342,6321. INTÉRÊTS. 167,737,8191. 5,833,594 22,500,000 5,907,194 10,105,218 2,600,000 1,756,099 189,157 4,000,000 5,392,846 6,000,000 2,596,958 844,493 36,880 15,963,081 6,020,000 257,483,1591. (1) Le seul article de la dette publique, qui ne soit pas compris ici, est celui des dépôts faits au Trésor public; savoir, par M. Necker, 2,400,000 livres, et par M. Mori, 1,400,000 livres: total, 3,800,000 livres. Le comité a pensé que les dépôts de confiance pouvant être demandés à chaque instant, et devant toujours être remis sans délai, le Trésor public ne doit plus s’en charger. 11 propose, en conséquence, le remboursement de celte somme, sans la comprendre dans la liquidation. Il existe encore un article d'un million sans intérêts, ayant pour titre: débets antérieurs à 1781. Nous avons cru devoir le renvoyer à l'arriéré. (2) On n’en connaît qu’imparfaitement la valeur. Les personnes les plus instruites dans cette matière, pensent qu’après la liquidation des charges auxquelles elles sont assujetties, et après leur contribution aux portions congrues, cet objet ne s’élèvera pas au-dessus de 3 à 4 millions de rente, et à un capital de 100 millions. (3) L’arriéré des departements est l’objet d’une liquidation qui n’est pas terminée. M. Necker, dans un de ses mémoires à l’As semblée, l’avait présumé devoir monter à 150 ou 200 millions; mais i1 y comprenait des objets qui se trouvent ici dans d’autres articles. Le comité de liquidation qui, à la vérité, ne peut encore donner que des aperçus, ne croit pas que cette dette aille au delà de 100 millions. C’est pour éviter toute erreur que le comité des finances la porte à 120 millions. (4; Il se trouve employé, dans les rentes de la première partie, 19,155,400 livres de capitaux constitués, produisant 957,770 livres de rente, qui ont conservé leur droit de remboursement, et qui appartiennent, sous ce rapport, à la troisième partie. Ces capitaux proviennent de l’emprunt de 100 millions et de celui de 125 millions. Il a fallu, par cette raison, les représenter deux fois, et c’est un double emploi. Il en est de même des trois emprunts de la ville de Paris, et dont le capital est employé dans l’Etat des remboursements à terme pour leurs epoques de remboursement, dont les intérêts, avec évaluation du capital au denier 20, sont employés dans la dette constituée. Ce second article est de 51,398,480 livres de capital. Ainsi, lor-que les remboursements à terme seront effectués, le capital de la dette constituée sera diminué de 70,553,830 livres, et les intérêts de cette même dette de 3,522,694 livres. La somme des intérêts annuels s’élèverait, comme vous venez de le voir, sans y comprendre celui des assignats, environ à 257 millions, et tout le monde conviendra qu’il serait impossible de ne pas y ajouter le remboursement annuel promis, au nom de la nation, sur l’emprunt de septembre 1789. Il est de. ..... . 8,000,000 liv. Les remboursements de Gênes et de Hollande sont d’une oh i-galion aussi stricte, et s'élèvent à. 3,000,000 Les avances des fermiers de Sceaux et de Poissy exigent de même u u remboursement annuel de ........................... 200,000 11,200,000 liv. Cette somme de 11,200,000 livres, jointe à 1- SÉRIE. T. XVIII. celle des intérêts ci-dessus, donnerait un total d’environ .................... 268,500,000 liv. Mais vous n’aurez pas encore pourvu à l’acquittement de votre dette exigible, de cette dette dont près de 1200 millions devraient être payés sur-le-champ, dont le reste doit l’être à des échéances prochaines, et que l’inévitable loi de la nécessité vous autoriserait seule à partager entre un grand nombre d’années. Pour l’acquitter en 32 ans, et assurément il serait difficile d’exiger davantage de la patience et du patriotisme des créanciers de l’Etat, il faudrait ajouter 12,500,000 livres par an au fonds du remboursement ci-dessus, et laisser accroître ce fonds de la somrne accumulée des intérêts éteints par le remboursement de chaque année. Vous trouverez, sans doute, ce moyen bien faible pour des engagements aussi nombreux, et cepen-23 [Assemfcïée hatioriafé.] fiant cette nouvelle charge vous paraîtra avec faison excessive pour le peuple. L’addition de 12,500,000 livres à 268,500,000 litres porterait la somme à acquitter par an, à 281 millions. Aiufci, c’est à cette dernière somme tja’ii faudrait nécessairement élever celle des contributions destinées tant à l’acquittement des Intérêts qu’à l’extinction lente des capitaux. Si* éomme nous le présumons avec quelque fondèrent, la somme dés dépenses publiques, tant celle èonfiéë du gouvernement que celle qui sera administrée , par les départements des provinces, è’élèvè à 240 millibns(l), il faudrait que la somme totale des impositions fût portée à 521 millions* feans � ébinbrendj’e les frais du culte dont vous fconnaissez retendue, et en faisant abstraction de l’intérêt des 400 millions d’assignats que nous retardons fcbrhme acquittés par la délégation déjà faite des domaines qui leur servent de gage. Tel est, Messieurs, le tableau lidèle et sans au-fcune ëiâgératioil de l’état où nous serions, si, Voulant rétablir Tordre dans les finances et mé-hager le peuple autant que les circonstances le permettraient, nous étions dénués de ressources accessoires. Vous voyez que la somme des antiennes contributions serait nécessairement au�- inentéë, ët que le soulagement du peuple, le pre-inierbut de vos travaux, ne serait qu’une chimérique espérance. A côté de ce tableau nous allons vous en présenter hn autre. Vous verrez ce que peut et doit produire l’emploi de vos ressources et l’effet subit de la venté entière des domaines nationaux. Us sont généralement estimés, y compris les Anciens domaines de la couronné, le rachat des rentes et celui des droits féodaux, entre deux et trois milliards. 400 millions eti ëotit déjà destinés au remboursement. des assigiiâts. Nous dévaluerons qu’à deux milliards ce qui reste à votre dis-pdsitiorl. Ndbs lés borüet-ohs même, si Ton veut, au montant exact de votre dette exigible pour éditer tout mécompte et pour qu’oû ne puisse nous reprocher aucune exagération. S’il était possible d’échanger, dans un instant* la plus grande partie* ou même la totalité d�. ces domaines contré là totalité dé la dette exigible, TËlàt ne serait plus astreint à des remboursements forcés; l’intérêt de la dette constituée décroissant toùS les ahS pàr l’extinction dés rentes Viagères et déjà diminué de 3,500,000 livres, par l’effet des remboursements à termes qui en éteindraient une partie, serait réduit, dès le premier moment, à 164 millions. La contribution des peuples pourrait donc être bornée à 404 millions, indépendamment des frais du culte. L'évaluation à venir des dépenses relatives à là religion, a été portée, par votre comité ecclésiastique, ëtttre 60 et 70 millions. C’est la nation t}üi doit l’acquitter désormais sur les revenus ordinaires, ét ce sera lè premier article des dépenses pübÜquës. Ën ajoutant cette dernière gommé à cel Té 'des àutres dépenses de l’Etat et dés intérêts dê la dette, vous voyeS que le revenu pdbliè, élevé à 474 millions, suffirait aux char-es de toute espèce : les 'contributions du peuple égagé, dans cêtte dernière hypothèse, de toute autre contribution pour la dépense dü édite, s’élèveraient à £3 millions de moins que dans le -(1) Dans -cette somme, n’est pas compris l’impôt qui a remplacé ta corvée en nature, impôt connu sous le nom tjta subvention représentative de la corvée : il n’a pas «te compris aôn plus dans dévaluation des charges pu-bliqués, qûi é'st ai là tète de hé ràppdrt; f27 âôtft I79d.f temps où le partage de l’impôt lui était si désavantageux, où la dîme lui enlevait 100 millions chaque année* oùeofin il s’en fallait de 56 millions que les revenus ordinaires pussent suffire aux dépenses courantes. Il jouirait, en outre, de tout ce que les anciens privilégiés payeraient à sa décharge. Le premier ministre des financer estime 32 millions* par an, cette portion contri-* butiVe des anciens privilégiés. Nous croyons cètté évaluation trop faible ; mais en nous y bornant, il est clair que le peuple* objet principal de votre sollicitude, payerait, ën 1791, 55 millions de moins qu’en IŸ88,, et que la matière imposable serait accrue de la valeur entière des dîmes. Il serait juste cependant que, sur la remise absolue du plus ancien et du plus onéreux des impôts, il fût prélevé un secours borné pour la somme et pour la durée, qui serait uniquement destiné aü traitement viager des anciens titulaires et des religieux (1). Cet état, Messieurs, serait celui d’une grande prospérité, d’une prospérité qui était bien loin de nos espérances, lorsque, de toutes les parties de ce ÿaste empire, nous étions appelés au secours de la chose publique. Vous connaissez à présent votre situation sous deux de ses plus importants rapports; le büt où nous devons at-(1) Tl est itüportànt qüë le calcul des deux positions soit clair pour tout le monde. Le voici tout entier : Premier système du remboursement de la dette, par les moyens ordinaires. Dépense publique égale dans les deux systèmes, ................... ...... Intérêts de là dette constituée, idem.. Intérêts dé la dette éiigible ........... Intérêts des assignats ..... ............ Remboursements indispensables pendant trente-deux ans . . ................. . Le culte évalué, pouf là dépensé à veüiC, à 70 millions, qui seraient acquittés pàr le revenu dü clergé qü’ôn suppose bien administrés ..... .... » ......... Les pensions des titulaires et des religieux évaluées à .................. ; Total. ........ .. 583,183,159 1. Séùond Système du féràboùrSémènl de la dette, par la vente dès domaines nationaux. Dépense publique comme ci-dessus..,. 240,000.000 li Intérêts de la dette constituée, réduite ()ar les remboursements à terme pour a partie convertie en contrats...... 164,215,125 Intérêts de la dette exigible, anéantie par lès ventes .................... . » » » Intérêts dés assignats, idem ........... » » » Remboürsetaèrlts devcülls ihütlleS, idem. » » Le culte à payer par le Trésor public . . 70,000,000 Les pôüsiotts des titulaires, idem.i..,i 50,000,000 Total i , . 524,215,125 1 . Dépéilsê dtl premier système ................ $83, 183,459 1. Dépense du second .... 624,215,123 différence ...... 58,968,034 1» Cette différence serait bien plus grande, si les domaines nationaux étaient mal administrés, et produisaient, pàr cette râîsôn, moittS âè *ÎO millioüS. ARCHIVES £ArtLEltiEfrî'AfRÉ&. 240,000,000 h 167,737,819 89,745,340 12,000,000 23,700,000 » » » 50,000,000 [Assemblée natioflalâ.j ÂÙÙftlŸËâ [iï août 1190.] 3SS teindre est marqué. Il faut examiner quels moyens peuvent nous y conduire. Nous vous avons exposé les droits de vos créanciers dans toute leur étendue, et vos obligations dans toute leur rigueur. Vous avez vu que dans l’état où font les affaires publiques, si vous étiez dénués d’autres ressources, Il vous serait i/npos� sible d’être à la fois justes envers les créanciers, et humains envers le peuple, et que même eu aggravant le poids des impôts, voüs parviendrez à peine à remplir lentement et imparfaitement les nombreux engagements qui ont été contractés. Vous venez de voir en même temps que l’aliénation des domaines nationaux vous mettait en état de satisfaire à tout; que non seulement elle vous épargnait la nécessité d’augmenier les charges du peuple, mais qu’elle vous permettait encore de rendre sa position meilleure qu’elle n'a jamais été. Ge rapprochement était bien nécessaire; il prouve la sagesse de vos résolutions en démontrant que le salut du peuple y était attaché. Il offrira du moins à beaucoup de bous ch toyens un granddédommagement pourde grands sacrifices, et à vous, Messieurs, la Seule apologie dont vous ayez besoin. C’est donc à accélérer la vente des domaines nationaux qu’il faut vous attacher avec cette obstination qui surmonte tous les obstacles. On ne peut échanger trop promptement, contre une partie de ces immeubles , tous les titres de créances exigibles sur l’Etat. Il faut muUipiier à l'infini lés moyens de faire ces acquisitions ; il faut exciter la concurrence en distribuant ces moyens dans un très grand nombre de mains; mais comment y parvenir? C’est le moment de vous soumettre une des plus grandes questions politiques qui puisse être présentée à des hommes l’Etat. Vous avez ordonné et exécuté la création des signes représentatifs de 400 millions de domaines vendus aux municipalités. Ge moyen simple de convertir immédiatement des valeurs foncières en valeurs mobilières, a été fort contredit au moment où il vous fut proposé* et le Succès cependant n’en est plus équivoque. Bien des gens entraînés par cette expérience et séduits par la facilité de cette opération, pensent qu’un gage évident peut toujours être représenté sans risque par des valeurs de convention; que la somme des signes représentatifs est indifférente, dès qu elle n’est pas arbitraire, et dès qu’elle est subordonnée à la valeur incontestable des immeubles représentés. Ils en concluent que la totalité des domaines nation ux peut être évaluée, qu’elle peut être représentée par des assignats-monnaie, et donnée en payement pour toutes les créances exigibles. Ils pensent que les assignats employés de la sorte, non à payer des dépenses, mais à rembourser des capitaux, n’entreraient pas dans la circulation plus que les capitaux eux-mêmes n'y entrent, et, par conséquent, ne la surchargeraient pas; que leur modique intérêt porterait vivement à l’acquisition des biens qui sont à Vendre; qu’à l’instant de cette opération tous les effets publics ayant disparu à la fois, il faudrait nécessairement ou que les capitalistes se contentassent de l’intérêt de 3 0/0 des assignats, ou qu’ils les employassent à acheter des terres. Nous sommes obligés d’avouer que ce système #st appuyé sur des raisons au moins plausibles, et qu’il aurait le singulier avantage de terminer tn un jour l’ouvrage d’un demi-siècle. On lui oppose tout ce qui vous a été dit contre le papier-monnaie; l’engorgement de la circulation, le retrait absolu du humêraire, le discrédit* ou n’épargne pas même lé mot de banqueroute! qui, assurément, n’est pas applicable à un moyen légitime de payer ses dettes; mais en admettant toutes les objections ou exagérées, ou de mauvaise foi, nous ne pouvons nous dissimuler que le succès d’une opération de 4(J0 millions d’assignats, n’est pas une preuve suffisante du succès d’une opération cinq fois plus considérable, et que les erreurs, dansce genre, peuvent être mortelles. Il serait possible, en effet, qu’une masse énorme de numéraire, mise à la fois dans la circulation, ou du moins pouvant y entrer, élevât tout à coup le prix des denrées à Un point exorbitant, ce qui accroîtrait infiniment toutes les dépenses publiques et les malheurs particuliers; i! serait à craindre que passant de main en main,’ comme il faut que cela arrive, jusqu’aux créateurs des premières et des seules richesses, le laboureur et le manufacturier, ces signes trop nombreux et peut-être avilis, au lieu d’être frour eux des moyens de reproduction, ne devinssent, à cê dernier terme do la circulation, des instruments stériles, sans valeur pour tous les échanges libres, sans utilité pour le premier besoin de l’industrie’ celui de payer des salaires. ’ 11 est vrai qu’ù côté de cette surcharge et de cet engorgement, vous placez un emploi facile et certain, pour la somme entière des effets publics par la vente ouverte de tous les biens nationaux : il est vrai que la circulation qu’il s’agit d’établir n’est que momentanée , qu’active à l’instant des ventes, et dirigée vers un seul but, elle disparaîtra aussitôt que l’objet en sera rempli; mais il faudrait pouvoir calculer, avec la dernière certitude, l’effet de la traosition, et, dans Une question si délicate, nous u’oserions prononcer un avis absolu. Votre comité a conservé des doutes, quoiqu’il ait examiné cet important objet avec la plus sérieuse attention, et que de longues et fréquentés séances aient été consacrées à le discuter. Aucune des raisons pour et contre n’y a été négligée* et si la vérité doit jaillir du choc des opinions’ nous devrions être en état de vous la présenter! Tous les avis se sont réunis sur quelques points principaux. C’est unanimement que nous regardons la vente des biens nationaux comme le salut de l’Etat, et le seul moyen de l’opérer. Nouspeb-I sons tons que ces ventes ne peuvent être rapides qu’autant qu’il sera mis à la fois, dans beaucoup de mains, des valeurs plus propres à ces acquisitions qu’à tout autre emploi. Nous pensons que cette vente étant destinée à acquitter la plus embarrassante portion de la dette publique, la dette exigible, c’est elle qu’il faut convertir en valeurs disponibles pour ia rendre propre à sa destination; que le but ne sera pas atteint si les titres des charges, les cautionnements, les brevets de retenue, étaient reçus dans leur forme primitive comme espèces dausles acquisitions. Ces grosses valeurs appartiennent à trop peu d’individus. C’est dans toutes les classes des citoyens qu’il est important de placer les moyens d’acquérir les plus-petits objets comme les plus considérables. Il faut imprimer un grand mouvement à la circulation, et que ce mouvement se communique à ia fois d’un bout du royaume à l’autre pour établir uueconcurrenceavantageuse.Nous sommes en conséquence d’avis que ia dette exigible, tant celle qui l’est dans le moment actuel, que celle qui le deviendra successivement, soit remboursée en valeurs uniformes, divisibles, disponibles et d’un produit modique. C’est le moyen de diriger 356 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 août 1790.] tous les intérêts vers un but commun, et d’établir une sorte de rivalité très utile au moment des enchères. Mais si votre comité est d’accord sur ces points, il ne l’est pas également sur la qualité des signes représentatifs qui seront donnés en remboursement, et destinés en même temps aux acquisitions. Malgré cette destination spéciale et définitive, ces signes existeront au moins un moment dans la circulation. Y seront-ils transmissibles de tout débiteur à tout créancier ? Ces derniers auront-ils le droit de les refuser? Voilà les premières questions qui se présentent. Si la transmission du signe est de droit vis-ià-vis du créancier hypothécaire, c’est-à-dire du vrai propriétaire de l’office remboursé (car ce premier pointue peut pas être mis en question); cette faculté de transmission s’arrêtera-t-elle à lui ou s’étendra-t-elle de créamier à créancier à l’infini? Si elle s’arrête au créancier hypothécaire, il est telle position où un honnête homme, ayant dans sa main un effet national qii’if aurait été forcé d accepter, serait impitoyablement poursuivi par ses créanciers, et pourrait se voir forcé de manquer à ses engagements, par le fait même de cette puissance qui doit veiller au bonheur des citoyens. Si la tranmission est forcée et indéfinie, ne sera-ce pas un véritable papier-monnaie? et, dans ce cas, serait-il juste de mettre des bornes à sa circulation, en la concentrant dans le cercle des remboursements de capitaux constitués? Vous jetteriez alors dans le plus grand embarras les chefs de manufactures, les ouvriers qui, en grande partie, composeront la classe des créanciers de l’arriéré. Ils ont des matières premières à payer, des ouvriers à salarier; et les ateliers languiraient, si leurs capitaux n’y étaient sans cesse en activité. Si l’on liorne la transmission au premier degré des créances, le grand objet sera manqué, celui de la subdivision des valeurs disponibles, de leur dispersion pour multiplier les capitalistes acquéreurs. Si on ne la borne point, ne serait-il pas à craindre que, vu leur quantité, les nouveaux effets ne perdissent beaucoup de leur prix? Ce n’est pas tout encore. Dès que vous ne donnez pas d’argent à vos créanciers, dès que vous substituez des valeurs à l'argent que vous leur devez, ces valeurs doivent-elles être stériles? Vous désirez que tout le monde acquierre, mais vous ne voulez y forcer personne; ainsi, vous croirez peut-être devoir attacher un intérêt à vos signes représentatifs : si l’intérêt est trop faible, ne ferez-vous pas une injustice? s’il est trop fort, n’allez-vous pas directement contre votre but? Ne détournez-vous pas de faire l’échange d’un revenu net et liquide, contre une propriété plus solide, mais bien moins productive? On a proposé trois partis différents à votre comité. 11 va vous les exposer, et l’Assemblée, dont nous invoquons le secours, nous pardonnera sans doute la méfiance que nous avons eue de nos propres lumières, et le besoin que nous avons senti des siennes. Le premier de ces partis consiste à rembourser toute la dette exigible, montant, outre les assignats actuels, environ à dix-neuf cents millions, en quittances de finance produisant 5 0/0 d’intérêts , divisibles à la volonté des propriétaires, transmissibles du gré à gré dans le commerce, mais forcées pour les seuls créanciers hypothécaires, bailleurs de fonds, des offices remboursés, qui n’au raient pas le droit de les refuser de celui qui les tiendraient du Trésor public. A ce premier avis, on a proposé pour amendement l’extension du droit de transmission à tons les créanciers d> s capitaux constitués, sans mettre de différence entre le privilégié et les autres, et sans borner ce droit aux personnes qui auraient reçu dir ctement du Trésor public l’effet transmissible. L’obj < t de cet amendement était de ne point favoriser une classe de débiteur? aux dépens d’une autre, et de diviser davantage les effets destinés à l’acquisition des domaines nationaux. Il a été proposé aussi de ne pas accorder aux quittances de finance l’intérêt de 5 0/0. Le second parti consiste dans le remboursement général de la dette exigible en assignats-monnaie, semblables, de tout puinf, à ceux qui ont été émis. Cette proposition à été appuyée d’abord sur les principes de justice générale qui seront d’autant moins violé, que le signe employé pour vos remboursements se rappro hera plus dans son usage, de l’argent que vous avez reçu, et que vous devez rendre. Elle s’appuie encore sur le grand moiif d’utilité publique qui vous presse d’accélérer, de toutes manières, les ventes que vous avez décrétées, de multiplier et de diviser les moyens d’acquérir, de ne pas leur attacher un intérêt qui s’oppose aux spéculations en terre, et d’opérer tout de suite une grande différence à l'avantage de l’Etat, par celle qui se trouve entre un intérêt de 5 0/0 et celui de 3 0/0. Ces deux dernières raisons ont motivé un amendement qui a été fait à cette pro «ositioa par quelques membres du comité. Leur avis était d’admettre le remboursement général en assignats, mais de ne leur attacher aucun intérêt, afin de provoquer plus vivement aux ventes par la stérilité même des signes représentatifs, qui, cependant, conserveraient toute leur valeur pour cet emploi utile et vraiment national. Cette dernière opinion serait bien séduisante, s’il était possible de séparer entièrement l’intérêt général de la société de l’intérêt individuel d’une partie des citoyens qui la composent. Mais pourriez-vous être indifférents au sort de ceux qui, n’ayant à recevoir que de petites sommes inutiles pour des acquisitions de domaines, se verraient sans ressource au milieu d’une abondance apparente? celte classe de citoyens est précisément celle dont les intérêts nous sont les plus chers. La troisième proposition qui a été faite, au comité, en est moins une nouvelle qu’un amendement des deux autres. C’est un parti mixte qui consiste à admettre des quittances de finance et des assignats-monnaie, et ne laisseraux créanciers de l’Etal le choix du modede leur remboursement. L’intérêt des quittances de finance serait supérieur à celui des assignats; maisellesne pourraient se transmettre que de gré à gré. Les assignats au contraire auraient toutes les qualités de ceux qui existent. Ce parti mitoyen a pour motifs le désir de concilier tous ies~in lérëts ; de fournir à tous les créanciers de l’Etat la facilité de s’acquitter eux-mêmes, et à ceux qui ne cherchent q te leur tranquillité, les moyens d’en jouir, sans être forcés à des spéculations auxquelles ils ne se sentent pas propres. Il aurait l’avantage de soutenir, dans le commerce, la valeur des qu ittances de finance, par la facilité de leur échange contre des assignats, et celle des assignats par l’effet de celte même négociation. La liberté du choix (tarait propre à vous garantir du danger d’une trop grande émission d’assignats. L’intérêt particulier serait votre sauvegarde, et en quelque sorte le thermomètre des besoins de la circulation. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 août 1790.] 357 [Assemblée nationale.] Telles sont, Messieurs, les diverses propositions sur lesquelles votre comité a suspendu son jugement. Qielle que soit '-elle que vous adopterez, elle aura l’avantage de rendre inutile, dès le premier moment, tout fonds extraordinaire d’amortissement, parce que vos engagements se trouveraient remplis à la fois, et cette sm le disposition épargnerait au peuple 26 millions chaque année. Si vous admettiez les seules quittances de finance avec l’intérêt de 5 0/0, votre position vis-à-vis de vos créanciers, resterait la même qu’elle est aujourd’hui, quant aux intérêts, jusqu’à ce que les ventes fussent opérées. Vous examinerez, dans votre sagesse, si ce moyen doit les accélérer, ou les ralentir, et jusqu’à quel point on peut, en attendant leur terme, compter sur le revenu des anciens domaines de l’église. Si les quittances de finance ne produisaient que 4 0/0 d’intérêt, au lieu de 5, par cela seul vous épargnerez au peuple 18 à 19 millions. Le second moyen, celui du remboursement total en assignats, double cette dernièreéconomie d’intérêt, et la double à l’instant même; mais cet avantage suffit-il pour compenser les dangers d’une émission immense d’assignats ? Gesdangers eux-mêmes sont-ils aussi réels qu’on le suppose? Faut-il se livrer à tontes les alarmes qu’on veut vous inspirer sur des résultat qu’il sera toujours impossible de prouver mathématiquement? Ce sera, Messieurs, l’objet d’une de vos plus importantes délibérations. Enfin, le troisième parti, le parti mixte, n’a certainement ni tons les avantages, ni tous les inconvénients de chacun des deux autres. Il ne nous permet pas un calcul aussi précis; mais son son résultat doit se rapprocher davantage de la seconde proposition que de la première. Il est probable que le choix se porterait en géuéral vers les assignats, et cette opinion fort répandue paraît favorable à ce moyen de remboursement. Dans l’examen de ces différents systèmes, vous considérerez, avant tout, l’intérêt public : c’est le premier moteur de vos résolutions. Vous considérerez, avec le même soin, les devoirs d’une justice rigoureuse. Vous voudrez d’abord arriver au but, qui est de soulager le peuple, et de prévenir la dilapidation des biens nationaux; vous voudrez ensuite y arriver sans secousse et sans ma heurs particuliers. Ainsi, pour que votre objet soit rempli, il faut que l’Htat soit légitimement acquitté avec ses créanciers, et qu’aprcs l’opération, chacun d’eux se trouve dans une position aussi bonne ou meilleure que celle où elle était. 11 serait beau d’effectuer à la fois une révolution favorable dans les fortunes particulières, et de sau er la patrie par une seule opération bien combinée. La vôtre ne laissera rien à désirer, si les ventes s exécutent promptement, si la concurrence les rend avantageuses, et si le numéraire fictif n’a fait que paraître un moment pour se charger de votre detie, et s’engloutir à jamais avec elle. En même temps que vous réalisez cette grande idée, vous rendez une foule de citoyens à notre véritable industrie, l’industrie agricole, et vous encouragez le cultivateur par la suppression de la dîme, par la diminution des impôts. On critiquera peut-être un système de remboursement qui, ficiil'daus le principe, nedevien-drait réel qu’au moment de l’acquisition des domaines nationaux : mais nous répondrons à ceux qui ue seraient pas touchés des pressants intérêis que nous venons de balancer, et qui leur opposeraient des principes abstraits, inapplicables à la circonstance où nous sommes; nous leurs répondrons, qu’une nationa, au moins, le droit qu’auraient tous les narliculiers, l’acquitter leurs dettes avec des valeurs dont la solidité serait inattaquable; qu’une délégation sur le prix d’un immeuble prêt à être aliéné, n’est pas une valeur idéale. Nous ajouterions enfin qu’il s’agit ici d’un arrangement de famille, à laquelle le plus grand nombre des créanciers de l’Etat n’est pas étranger: et que, citoyens comme uous, intéressés comme nous à la prospérité générale, ces mêmes créanciers ont plus que nous encore un intérêt personnel au rétablissement des affaires publiques. Il ne faut pas se le dissimuler, Messieurs : le parti que vous allez prendre influera plus ou moins directement sur le sort et sur la fortune de tous les citoyens dans quelque classe et dans quelque position qu’ils se trouvent. Un succès entier mettrait les finances du royaume dans une position plus florissante que celles de toutes les puissances de l’Europe; mais pons l’obtenir ce succès, il faut que toutes les volontés y concourent. C'est de l’opinion publique que nous avons besoin. La sage lenteur de vos délibérations lui laisse le temps de se former, et vous permet de la mettre à profit. Leur solennité appelle autour de vous toutes les lumières éparses dans la société. Le travail solitaire de vos comités les prive de ce grand avantage. C’est principalement par cette raison que le comité des finances a, dans cette grande occa-ion, borné ses fonctions à celles de rapporteur. Cette marche n’entraînera ni plus de longueurs, ni plus de difficultés que la marche ordinaire. Le petit nombre de questions que nous desirons vous soumettre, présentera à votre discussion des points aussi clairs et aussi précis que les articles d’un projet de décret: il eût t»u-juurs fallu les agiter dans l’Assemblée, et, après leur solution, le décret dérivera naturellement du jugement que vous aurez prononcé. Quel qu’il soit, vous ne pourrez vous dispenser de faire plusieurs dispositions générales d’ordre nécessaires pour préparer et pour compléter l’effet de la liquidation. Nous ne vous avons point parlé de la dette non exigible, parce qu’elle vous est assez connue par les états imprimés qui sont entre vos mains. Ces états répondent à tout ce qui vous a été dit d’exagéré sur l’évaluuûon des capitaux. Vous avez vu que les rentes viagères représentaient un capital de 1,018.000,000, mais qui vous est indubitablement acquis. Vous avez vu que les rentes perpétuelles ont représenté, dans le principe, un fonds de 2,690,000,000, mais que leur intérêt actuel ne correspond aujourd’hui qu’à une somme de 1,321,000,000, qui, par le remboursement de la dette exigible, dont une partie existe en contrats, se trouvera réduit à 1,250, 000, U00, et que nous sommes autorisés à ne plus compter le capital que sur ce pied, puisque, libres de le rembourser ou d’en payer les intérêts, vous ne serez jamais tentés de vous en libérer au-dessus du denier 20 de leur produit. Ces rentes, qui bientôt seront votre seule dette foncière, doivent subsister quelque temps encore, peut-être même n’est-il pas inutile qu’il en existe toujours pour une somme modérée; mais il nous paraît convenable, nécessaire même, de faire disparaître l’étrange bigarrure qui tient à leur ori-gin j. Vous avez tout ramené à l’unité d’un grand système, et vous ne pouvez approuver que les dettes de la nation demeureut hypothéquées sur les gabelles que vous avez détruites, sur les cuirs 358 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. \%l août *790., dont les droits sont supprimés, et sur vingt autres hypothèques ou anéanties, ou près del’être. La yolonté nationale les a toutes remplacées au grand avantage des créanciers. Yous voudrez effacer jusqu'aux traces de notre ancienne barbarie. Le bon ordre, autant que votre loyauté, vous invitent à décréter le renouvellement de ces titres si variés, et à ordonner, l’échange de leurs dénominations mensongères, de leur hypothèque illusoire contre uq titre national, uniforme et vrai. Cette opération serait fort peu compliquée. Des titres dou veaux tous pareils, tous fort simples pourraient être préparés d’avance; et an moment de la représentation des anciens contrats qui resteraient toujours entre les mains du propriétaire pour constater l’origine de sa dette, on n’aurait a placer dans les titres nouveaux qui leur seraient remis, que les noms et l’énonciation de la somme nette des intérêts annuels. On pourrait même, simplifier la comptabilité, réunir plusieurs contrats appartenant à la même personne en un seul, mais cependant au gré des titulaires. Les anciens créanciers du clergé qui voudraient demeurer, au même titre, créanciers de l’État seraient admis à cet échange et choisiraient entre le renouvellement de leurs contrats et leur remboursement. Avant de procéder à la liquidation des effets au porteur, il serait nécessaire d’ordonner le tirage de toutes les loteries; les chances avantageuses qui ne devaient échoir que dans quelques années seraient aisément fixées avec les déductions de l’escompte, et rapportées par un calcul de rapprochement au premier janvier 1791. Nous avons ce calcul tout fait, L’application en sera très facile. En reconnaissant l’importaqce dp hâter les ventes, vous pensere?que cette considération doit vous epgager à ordonner la liquidation immédiate de tous les offices de magistrature, de toutes les charges de finances, de charges et emplois militaires, des gouvernements et lieutenances générales de l’intérieur du royaume, des charges de la maison du roi, de la reine et des princes, ainsi que des fonds d’avance et des cautionnements. Mais au moment où vous décréterez le remboursement général, soit en quittances de finance, soit en assignats-monnaie, soit de toute autre manière, vous jugerez important de veiller à l’exécution des lois établies pour la sûreté des hypothèques. L< s oppositions déjà faites sur les objets qui eu sont susceptibles, où celles qu’on serait en droit de faire, s’appliqueraient aussi bien au mode de remboursement que vous adopterez, qu a celui des remboursements ordinaires. Si les ventes sont rapides et avantageuses, if est possible que toute la dette exigible soit bientôt anéantie, sans que la totalité des domaines nationaux soit aliénée; et alors, tranquilles sur les engagements sacrés que vous aurez voulu remplir avant tout, tranquilles sur l’existence éphémère de la monnaie fictive qui vous aura servi, sans avoir eu le temps devous nuire, vous pourrez admettre à un nouveau concours les créanciers de la dette constituée. Dans tous les cas, l’amortissement futur de cette dette non exigible doit aussi être pris en considération. Nous vous proposerions en conséquence de décréter que les extinctions viagères seraient mises eu réserve pendant dix ans, pour former un fonds d'amortissement applicable aux remboursements, et s’accroissant par l’accumulation des intérêts éteints. Lq simplicité de ce plan a un avantage moral auquel l’Assemblée nationale ne peut être insensible; celui de faire disparaître en un jour cette multitude d’effets différents sujets à diverse* chances, payables à beaucoup d’époques, changeant tous les jours de valeurs, objet habituel de spéculations ou d’intrigues , aliment nécessaire de cet agiotage dont on parle sans cesse, et contre lequel on tonnera vaiuement , tant qu’on ne l’aura pas attaqué à sa source et détruit dans son principe. CYst d’après les observations que-nous venons de vous soumettre, que votre comité a l’honneur de présenter à la décision de l’Assemblée les deux points sur lesquels il a exprimé son vœu, et le* deux questions qu’il a arrêté de lui proposer. avis pu COMITÉ. Art. 1er. La dette exigible de j’Etat provenant des divers emprunts à terme, ou échus ou à échoir, d’annuités, de cautionnements, d’offices et charges dont la suppression ou le remboursement ont été décrétés, de l’arriéré des departements, de la suppression des dîmes inféodées et des contrats de rentes constituées au nom de l’ancien corps du clergé, sera seule admise, ainsi quq les assignats déjà créés, à concourir dans l’ac-quisjtioïi des domaîpes nationaux. Art. î. fi sera créé des titres uniformes, divisibles et disponibles pour le remboursement dq la dette exigible, et ces titres seront reçus pn payement des domaines nationaux, Questions proposées pur le comité, Art. 1�, Ses effets donnés en remboursement seront-ils quittances de finance qu assigpats-mon* naie, ou l’un et l’autre au choix des créanciers remboursés? Art. %. Qes effets porteront-ils intérêt, et quel sera-t-il ? M. le Président. Je consulte l’Assemblée pour savoir si elle ygut ouvrir immédiatement la discussion sur l’objet du rapport qu’elle vient d’eu-tendre? (L’Assemblée décide que la discussion est ouverte.) M. 4e Mflrnheqn, U aîné demande la parole, Un de MM. les secrétaires se présente la trîr bune pour lire un mémoire de M* Neckep. M. de Ifilrahe�n. Je demande que l’ Assemblée décide si la lecture du mémoire du ministre géra faite avant ou après ia discussion ; quant à npi* que dix-huit mois de travaux parmi yous n’onf pas accoutumé à l’initiafive ministérielle, j’avoue qu’il me paraît singulier que quand un membre de cette Assemblée est à la tribune? on l’en écarte. par un mémoire du ministre, (L’Assemblée applaudit.) — Le comité ne présente qu un avis; c’est une opinion qu’il vous faut: plus Jiarcfiqué lui, je vais vous présenter celle que j’ai conçue, si vous mè maintenez ia parole. ' M. le Président consulte l’Assemblée. Elle décide què M. de Mirabeau aura ia parole avant la lecture du mémoire du premier ministre des finances, et que cette lecture aura lieti à la fin de la séance. M, de Mirabeau l'aîné. Messieurs, étonné