[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 août 1791.] 623 des séances et établissement des bureaux de cette administration, et charge les directoires du département du Bas-Rhin et du district d’Haguenau de surveiller les réparations, pour qu’il n’en soit fait que ce qui est indispensablement nécessaire. » (Ce décret est adopté.) M. Prugnon, rapporteur, propose ensuite un projet de décret relatif au logement du tribunal du district de Louviers {Eure). Ce projet de décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du district de Louviers, au département de l’Eure, à louer pour deux années, aux frais des administrés, et moyennant le prix fixé d’après les dispositions du décret du 31 juillet dernier, au prolit de la nation, la cour et église des pénitents du eouvent de Saint-François, avec trois petits bâtiments voûtés, dont deux ouvrent dans l’église, pour y établir le tribunal de justice de ce district, et à faire procéder à l’adjudication au rabais des réparations ou arrangements intérieurs à faire pour l’emplacement des greffes, parquet, chambre de conseil, et autres établissements du tribunal, pour le montant de ladite adjudication être également supporté par lesdits administrés. « L’Assemblée nationale ordonne en outre aux directoires du département de l’Eure et du district de Louviers de surveiller les ouvrages, pour qu’il n’en soit fait que ce qui est indispensablement nécessaire. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Prugnon , rapporteur , propose ensuite un projet de décret relatif au logement du tribunal du district de la Tour-du-Pin . Ce décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, et sans préjudice toutefois des droits de la nation sur les biens appartenant aux frères pénitents de Bourgoin, approuve l’échange de la chapelle et bâtiments desdits frères pénitents, contre l’église Notre-Dame, cour et emplacements en dépendant , sans autre charge vis-à-vis des frères pénitents, que de leur faire remettre les ornements, vases sacrés, armoires, cloches, autels, et choses mobilières qui sont dans le local cédé par la confrérie. « Autorise le directoire du district delà Tour-du-Pin à louer pour deux années, aux frais des administrés, et moyennant le prix fixé d’après les dispositions du décret du 31 juillet dernier, an profit de la nation, ladite chapelle et bâtiments ci-devant auxdits frères pénitents de Bourgoin, pour y établir le tribunal de justice dudit district de la Tour-du-Pin, et à faire procéder à l’adjudication au rabais des réparations ou arrangements intérieurs à faire pour l’emplacement des dépendances du tribunal, pour le montant de ladite adjudication être également supporté par lesdits administrés. « L’Assemblée ordonne, en outre, aux directoires du département de l’Isère et du district de la Tour-du-Pin, de surveiller les ouvrages dans la chapelle et dépendances, pour qu’il n’en soit fait que ce qui est indispensablement nécessaire. » (Ce décret est adopté.) M. Prugnon, rapporteur , présente enfin un projet de décret relatif au logement du directoire et aux réparations du palais de justice du district de Nogaro (Gers). Ce décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du district de Nogaro, au département du Gers, de louer pour deux années, aux frais des administré-, les édifices dont ils peuvent avoir besoin pour la tenue des séances, formation des bureaux et autres établissements indispensables à son administration, et à faire procéder à l’adjudication au rabais des réparations et arrangements intérieurs à faire dans ces édifices pour le bien du service ; « L’autorise pareillement à faire procéder à l’adjudication au rabais des réparations à faire au palais de justice de ce district, séant à Puissance, conformément au devis qui en a été dressé par l’ingénieur des ponts et chaussées le 27 mai dernier, pour le montant des dites adjudications être également supporté par lesdits administrés. « L’Assemblée nationale ordonne en outre aux directoires du département du Gers, et du district de Nogaro, de surveiller les ouvrages, pour qu'il n’en soit fait que ce qui est indispensablement nécessaire. » (Ce décret est adopté.) M. le Président donne connaissance à l’Assemblée d’une lettre du ministre de la marine , ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Je m’empresse de vous adresser copie littérale ci-jointe d’une lettre que je viens de recevoir de M. de Blanchelande, gouverneur de la colonie de Saint-Domingue. Je vous prie de la communiquer à l’Assemblée nationale. « Je suis, etc. « Signé : THÉVENARD. « Un de MM. les secrétaires donne lecture de la lettre de M. de Blanchelande, qui est ainsi conçue : « Au Gap, le 3 juillet 1791. « Monsieur, « Uu navire, arrivé de Nantes le jeudi 30 juin, a apporté plusieurs lettres qui annoncent le décret rendu par l’Assemblée nationale aux séances des 13 et 15 mai, qui admet les gens de couleur nés de père et mère libres aux assemblées primaires et coloniales. Je voudrais qu’il me fût permis de vous laisser ignorer la sensation qu’il a faite, et la rapidité avec laquelle elle commence à se communiquer à toutes les parties de la colonie. « Indépendamment de l’habitude du préjugé, les colons les plus sages et les plus froids sont convaincus que la soumission des noirs dépend essentiellement de ce qu’il existe entre eux et les blancs une classe intermédiaire, marquée autant par l’état civil que par la couleur. Ensuite ce décret a paru une violation formelle de la promesse consignée dans le préambule du décret du 12 octobre. « Ainsi, Monsieur, trois motifs suffisants se réunissent pour exciter la fermentation : l’amour-propre offensé; on croit le salut de la colonie compromis, et on réclame un engagement que l’on croit violé. 624 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [22 août 1791.J « Le souvenir des importants services que la partie du Nord a rendus à la Dation; l’aveu authentique que l’Assemblée nationale en a fait, les éloges et les remerciements qui ont accompagné cet aveu, tout favorise et excite le mécontentement. « N’exigez pas, Monsieur, que je vous fasse le détail des propositions, toutes plus violentes les unes que les autres, qui s’agitent dans les conversations. Les cœurs les plus fidèles sont aliénés, et la guerre civile la plus affreuse, ou la perte de la colonie pour la France, peuvent être les suites de la disposition présente des esprits. « Le silence du commerce dans la discussion de cette affaire est comparé au zèle avec lequel il s’est montré lorsqu’il était question de la traite des noirs; et cette comparaison irrite encore davantage. « La première partie du décret sur les esclaves et les simples affranchis ne rassure même pas à l’égard des propriétés; on n’y voit qu’une disposition , qu’un décret subséquent abrogera , comme celui-ci anéantit la promesse du 12 octobre. Ainsi (ce qui est le plus granddes malheurs) la confiance des colons en l’Assemblée nationale se détruit. « Les mêmes lettres annoncent que l’Angleterre a un armement de 45 vaisseaux, et ma plume se refuse à vous rendre les discours, et peut-être les vœux que celte circonstance fuit naître. « L’Assemblée provinciale s’assemble demain, m’assure-t-on, pour prendre un parti. Je ne saurais prévoir ce qui y sera résolu; j’ai IVxpé-rience de son patriotisme; mais l’Assemblée nationale a vu ses principes sur les gens decouleur, dans son adresse du mois de juillet. Ils n’ont pas changé. D’un autre côté, il est difficile que les gens de couleur n’aient pas avis de ce décret si public; et s’ils remuent, tout est perdu. « Jugez, Monsieur, quelle doit être ma position. Il ne m’appartient pas de commenter les décrets ; et mon devoir est de les faire exécuter. Mais je suis résolu de verser jusqu’à la dernière goutte de mon sang plutôt que de répandre celui de mes concitoyens et de mes frères. « Je fais des vœux pour que la retraite des députés des colonies de l’Assemblée nationale et les réclamations du commerce aient fait retirer ce décret fatal; je désire qu’au moins l’Assemblée nationale daigne l’interpréter ; car en supposant (ce qui est comme impossible) une soumission stricte des blancs, il peut donner lieu à une foule toujours renaissante de prétentions capables de mettre les armes à la main aux deux partis. « Il prononce uniquement l’admission des gens de couleur aux assemblées, et les blancs s’en tiendront à ce droit; mais les gens de couleur en tireront la conséquence qu’ils sont admissibles à tous les emplois; et, véritablement, cette assimilation parfaite de gens dont les frères peuvent encore être esclaves peut détruire la colonie, en rompant tous les liens de la subordination. J’ai cru devoir, Monsieur, vous rendre compte de cette première impression; je serai exact dans la suite journalière de ma correspondance. Je ferai mes efforts pour entretenir la paix, ou plutôt pour empêcher l’effusion du sang; mais la position de la colonie vous annonce combien mes moyens seront faibles, surtout après la réunion inévitable de tous les blancs en un seul parti, qui ne sera pas celui de l’Assemblée nationale. « En un mot, Monsieur, j’ai tout lieu de craindre que ce décret, s’il n’est au moins modifié, ne soit l’arrêt de mort de, plusieurs milliers d’hommes, et ne devienne également funeste au petit nombre de ceux-là mêmes qu’il a pour objet de favoriser. à « Je suis, etc. « Signé : BLANCHELANDE. » M. Lanjuinaig. Les navires qui arrivent des colonies nous apprennent sans cesse que la cocarde blanche y est ouvertement arborée par les troupes, que les officiers y soutiennent ouvertement le parti contraire à la Révolution. D’après cela, je dis, Messieurs, que cette lettre doit vous être suspecte; d’autre part, j’observe, qu’il y a 5 mois que vous avez décrété l’envoi des commissaires à Saint-Domingue et que ces commissaires ne sont pas encore partis. Je demande que l’Assemblée se fasse rendre compte de ce qui regarde le départ des commissaires et qu’ils soient envoyés le plus promptement possible. M. Lavie. Il vient de vous être dit par M. Lan-juinais que la cocarde blanche était arborée dans les colonies ; je nie le fait hautement, et je somme l’opinant de déclarer d’où il tient le fait Su’il vient d’avancer. Je le nie, moi. Je reçois es lettres des colonies. Nous sommes 150 dans l’Assemblée qui recevons des letires, qui avons quelques propriétés là, pas un de nous pourrait, comme M. Lanjuii ais, attester la vérité de ce fait que je nie. Le militaire qui vous écrit est un homme connu par son patriotisme, et je soutiens qu’il serait infiniment criminel s’il n’avait averti la nation qu’il y avait une insurrection de toutes les troupes de ce pays-là ; par conséquent, Monsieur, je veus prie de mettre sur le bureau les pièces qui constatent le fait que vous venez d’avancer, et dont je fais la dénégation publique. M. Lanjninais. Ce fait que j’ai déclaré est connu de plusieurs membres du comité de la marine. Il m’a été écrit de Lorient, et voici un dernier fait bien plus grave. Vous connaissez les troubles de Lorient dont on vous a parlé il y a quelques jours; eh bien I ces troubles ont eu heu à cause du débarquement d’officiers qui sont descendus avec la cocarde blanche ; ils ont trouvé leurs anciens soldats... (Murmures.) M. Lavte. Déposez votre pièce. M. Ijanjuinais. Je demande que le comité de la marine vous rende compte incessamment de ce qui a pu retarder, pendant cinq mois, l’envoi des commissaires, et qu’il soit ordonné par l’Assemblée que leur départ ne pourra être retardé sous aucun prétexte. Il y a un mois que les commissaires sont nommés et ne sont pas encore partis. M. La vie. Vous calomniez les colonies. M. lianjuinaig. Non. Je parle des officiers de l’armée aux colonies, qui ont arboré la cocarde blanche. M. Iiegrand. Je demande que M. Lanjuinais dépose sa lettre. M. Moreau-Saint-Méry. Je demande la parole. A l'extrême gauche : A l’ordre du jour î