738 [Assemblée nationale.] g. Malouet. Il n’y a qu’à mettre aux voix, si Pon peut proposer un amendement. M. le rapporteur vient de dire que le droit de miséricorde ne peut s’exercer que lorsque le crime a été trouvé excusable, et qu’il y a des précautions prises dans le Code pénal pour que ce jugement fut déféré aux jurés ; mais, lorsqu’ils ont proposé que le délit est excusable, voilà le moment d’appliquer le droit de miséricorde. Or, trouvez-vous plus raisonnable d’accorder ce droit au juge qu’au roi ? {Murmures prolongés à gauche.) A gauche : Votre amendement 1 . M. Malouet. Messieurs, je n’aime point à recevoir des ordres particuliers , et je ne les recevrai jamais. Ainsi, votre ton imposant ne m’en imposera pas. Je vais dire mon amendement, le motiver à ma manière, et personne ne peut m’en empêcher; et votre train ne signifie rien. Un membre : Votre train ? M. Malonet. Oui ! c’est le mot. Un membre à droite : Monsieur le Président, faites donc dire à M. Malouet son amendement et qu’il finisse. M. le Président. Monsieur, vous n’êtes pas juge de ma conduite, c’est l’Assemblée. Monsieur Malouet, continuez votre opinion. M. Malonet. Il n’y en aura pas un mot de retranché. Vous avez tous entendu qu’il était nécessaire qu’il y eût un droit de miséricorde ; que ce droit de miséricorde s’exerçait utilement, lorsque ce crime, soumis au jugement des jurés, était trouvé excusable ; je dis que jamais une grâce n’a été accordée, que quand un crime a été jugé excusable. Qu’ainsi lorsque vous empêchez l’inconvénient très grave qu’une grâce soit accordée quand le crime est inexcusable, il faut encore que le mot grâce, que le mot miséricorde soit prononcé et qu’il appartient à la dignité du roi de prononcer miséricorde, en vertu ne la loi qui l’accorde, lorsque le crime est excusable. Je conclus donc à ce que, quand les jurés auront prononcé que le crime est excusable, le prévenu soit renvoyé par-devant le roi, pour prononcer la loi. Plusieurs membres : La question préalable ! M. FePelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. 11 y a deux réponses fort simples à faire à ta proposition du préopinant. L’une est un décret, l’autre est la raison. Par le décret rendu sur la procédure criminelle par jurés, vous avez un article qui dit, que dans le cas où le juré aura répondu excusable , en ce cas le juge prononcera que l’accusé est innocent. Ensuite, Messieurs, voici quelle en est la raison; c’est que le préopinant désire que le nom du roi se trouve à côté du droit de miséricorde. Cette idée-là est très belle et très vraie; mais elle existe par le fait; car au nom de qui la justice est-elle rendue ? c’est au nom du roi. ( Murmures à droite .) Ainsi, au moment oùle tribunal prononce, V accusé est acquitté ; c’est au nom du roi qu’il prononce ce jugement, et c’est au nom du roi que se rendent tous les jugements. Plusieurs membres : Aux voix I aux voix 1 [4 juin 1791.J (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’amendement de M. Malouet.) M. FePelletler-Saint-Fargéau, rapporteur. Voici l’article que nous vous proposons : « L’usage de tous actes tendant à empêcher ou à suspendre l’exercice de la justice criminelle, l’usage des lettres de grâce, de rémission, d’abolition, de pardon, et commutation de peine, sont abolis. » (Adopté.) (Les tribunes applaudissent.) Un membre : Monsieur le Président, je demande que vous fassiez exécuter le décret rendu relativement aux tribunes. M. Fe Pelletier-Salnt-Fargeau, rapporteur. J’observerai à l’Assemblée, avant de passer à d’autres articles, que dans le titre de la réhabilitation des condamnés, qui a été décrété hier, il y a quelques changements à faire quant à la rédaction. M. Durget. Monsieur le Président, d’après le décret que l’on vient de rendre, on peut adopter tout de confiance, il n’est pas besoin de discuter. M. Bouttevllle-Dumetz. Monsieur le Président, je crois que vous devez rappeler monsieur à l’ordre. M. Fe Pelletier-Salnt-Fargeau, rapporteur. Messieurs, voici les difficultés qui se sont présentées dans le titre de la réhabilitation des condamnés : vous avez décrété qu’il faudrait des preuves de dix années de bonne conduite, pour que les condamnés puissent avoir droit à la réhabilitation. Sur cette proposition, on a présenté quelques amendements à l’Assemblée ; on a demandé que le condamné eût un domicile fixe et certain depuis 2 ans, avant de pouvoir demander au corps municipal son attestation pour parvenir à la réhabilitation ; d’autres personnes ont demandé que l’on y joigne encore des attestations et des certificats de bonne conduite de toutes les municipalités dans le territoire desquelles il aurait vécu depuis dix ans ; c’est cet amendement qui présente quelques difficultés. Il est bien difficile de faire représenter à un homme des certificats de toutes les municipalités où il a pu avoir un domicile ou une habitation passagère ; cela est très difficile et même impossible, si l’homme a été voyager dans les pays étrangers; car alors il ne peut pas représenter une suite non interrompue pendant les 10 années, depuis l’instant où il a fini l’expiration de la peine. C’est pour suppléer à cette précaution, qu’il paraît impossible d’exiger, que le comité vous propose de déterminer que nul ne pourra demander la réhabilitation si, depuis 3 ans, il n’a un domicile fixe. M. Moreau. Messieurs, vous avez eu l’indulgence d’admettre le condamné à une réintégration dans tous ses droits ; vous avez attaché une condition essentielle, c’est la preuve de bonne conduite pendant dix ans, et vous avez assujetti, par l’amendement de M. Delavigne, cet homme, qui changerait de domicile, à prendre des certificats dans toutes les municipalités, où il établirait un domicile quelconque; c’est là ce qui a été décrété textuellement : on vous propose de revenir expressément sur ce décret, en se con-ARCHIVES PARLEMENTAIRES.