464 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 octobre 1789.] que tous les officiers municipaux, dans des assemblées composées de tous les contribuables domiciliés, âgés au moins de vingt-cinq ans, Français ou régnicolesdepuiscinq ans, et irréprochables aux yeux de la loi, et lesquels seront à la fois tous électeurs et tous éligibles, en vertu seulement de leur mérite. Art. 11. Lorsque les communes et communautés auront élu leurs officiers municipaux, elles tiendront une assemblée de ville et de communauté, dans laquelle il sera arrêté, à la majorité des suffrages, de demander à faire partie du district, ou département, que le voisinage et la facilité des communications feront préférer. Le chef de chaque municipalité, s’adressera, pour cet effet, au maire de la ville chef-lieu dudit district, qui en délibérera avec sa municipalité, et enverra copie de la délibération en réponse, à qui de droit. Art. 12. La règle qui devra diriger ces délibérations, concurremment avec celle tirée des raisons locales, c’est que les moindres districts devront comprendre au moins cinquante municipalités, et les plus forts en comprendre au plus cent ; observant surtout qu’un homme puisse dans un jour aller de sa commune au chef-lieu du district, et en revenir sans effort. Art. 13. Les maires de chaque ville désignée par les demandes des communes pour être le chef-lieu d’un distric, enverront à l’Assemblée nationale un état du nombre des municipalités de leurs districts respectifs; et, après la réception de tous ces états particuliers, l’Assemblée nationale arrêtera un plan général de division de tout le royaume en tant et tant de districts ou départements. Art. 14. Dans le temps que les communes se prépareront ainsi à faire partie des arrondissements les plus convenables à leur position particulière, l’Assemblée nationale arrêtera : 1 un mode constitutionnel de représentation nationale; 2 un nouveau plan de finances destiné à extirper à jamais les gabelles, les aides, toutes les entraves de la circulation dans l’intérieur du royaume ; et tandis que ce plan sera ensuite mis à exécution, l’Assemblée nationale décrétera les règles d’administration provinciale qui-devront être suivies dans toutle royaume, et combinées de manière à concilier l’intérêt national avec l’intérêt et les besoins locaux de chaque ville et province ou canton particulier. Mais en attendant, l’Assemblée nationale décrète que les divisions et subdivisions existantes pour l’administration de la justice et le recouvrement des impôts, subsisteront en entier, jusqu’à ce que l’extirpation radicale de l’hydre du fisc, et la réforme effective des tribunaux de. justice, aient achevé d’apprendre aux peuples qu’ils peuvent, sans aucun inconvénient et avec un très-grand avantage, toucher aux susdites divisions et subdivisions... J’ai l’honneur de vous observer, Monsieur le président, que la substance de ce décret est consignée dans une brochure où l’on trouve la suite de l’organisation générale des administrations provinciales, l’organisation des Assemblées nationales, et une idée du grand tribunal français, après l’établissement duquel la nation soupire depuis si longtemps et avec tant d’ardeur. Il a été distribué à MM. les députés environ trois cents exemplaires de cette brochure, connue sous le litre de Réponse laconique relativement à la meilleure destination des biens ecclésiastiques et au perfectionnement de la nouvelle Constitution. DISCOURS que M. le marquis de Sillery devait prononcer à l' Assemblée nationale le lundi 19 octobre 1789 (1). Messieufs, dans les circonstances orageuses où l’Assemblée nationale s’est trouvée depuis le commencement de ses séances, vous avez conservé le calme et la tranquillité qui doivent être inséparables de vos délibérations (2). Les malheurs de la France étaient à leur dernier période, et l’ascendant de la puissance ministérielle était tellement enraciné, que même en convenant de la position dangereuse où l’Etat se trouvait, les fauteurs de l’autorité arbitraire s’opposaient aux moyens d'y remédier par la crainte de perdre une partie de leur influencé. Votre courage, votre énergie, secondés du patriotisme de tous les citoyens de cette immense cité, ont jeté les fondements de cette liberté si universellement désirée, et encore si méconnue. Nous avons forcé les barrières qui eussent été insurmontables sans votre constance, et je crois dans ce moment remplir également les devoirs de citoyen, de sujet fidèle et de représentant de la nation, en vous mettant sous les yeux, les détails de nos malheurs passés, et des grandes destinées qui sont promises à cet empire. Mais il faut, pour le bonheur de la nation entière, abjurer, avant tout, toute prévention particulière, tout intérêt personnel. Que le seul amour de la patrie enflammant tous les cœurs, dicte les décrets des représentants de la nation ; et que le peuple qui nous entoure se persuade que dévoués entièrement à ses plus chers intérêts, nous sommes également inaccessibles à la séduction et à la crainte. Jusqu’à présent, Messieurs, chaque fois que je suis monté dans cette tribune, j’ai eu une tâche pénible à remplir : il est douloureux pour un citoyen de n’avoir que des abus à dénoncer. Egalement éloigné de tout esprit de parli, j’ai toujours défendu la liberté, mais je dois également m’opposer à la licence. Un législateur doit dire la vérité aux souverains et aux peuples. J’ai l’espoir qu’un nouveau jour va luire sur la France, et que notre vertueux monarque, écoutant les conseils de sa nation fidèle, va devenir le point de ralliement de toutes les opinions. Ce n’est plus le moment de vouloir opposer à la cause commune un système différent ; l’impulsion est donnée, les plus grands obstacles sont vaincus. Les chefs augustes de la nation ont prononcé eux-mêmes, que c’était avec plaisir et confiance qu’ils se trouvaient au milieu de nous ; et maintenant le plus saint de nos devoirs est de leur prouver qu’ils ne seront pas trompés dans leurs (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. (2) Dès que l’Assemblée nationale eut décidé de se transporter à Paris, je conçus le projet de profiter de cette circonstance favorable pour parler aux citoyens de cette ville, et les rassurer sur les maux qui ne sont que trop souvent exagérés; je crus que rien ne pouvait mieux convenir qu’un discours entièrement patriotique. En conséquence, j’avais demandé la parole, et elle m’avait été accordée. Au moment où je suis monté dans la tribune, je me suis aperçu qu’il y avait une rumeur considérable pour m’empêcher de parler. J’ai demandé l’aveu de l’Assemblée, lequel ayant décidé que l’on s’occuperait, suivant l’ordre du jour, des municipalités, je m’y soumis avec respect, et n’ai pu être entendu ; mais comme je serais fâché d’avoir eu une seule pensée pendant ma légation à l’Assemblée nationale, dont le public ne pût être juge, j’ai cru devoir faire imprimer ce discours. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 octobre 1789.] 465 . espérances, et que leur bonheur étant inséparable de celui des peuples, nous allons tous nous réunir pour parvenir à ce but si désiré. L'Assemblée nationale est maintenant au milieu delà capitale. Qu'aurait-elle à redouter? Rien, sans doute ! Honorée de la confiance de 24 mil-* lions d’hommes, pourrait-elle douter un moment du respect qu’elle doit inspirer ? Le lieu de notre Assemblée n’est-il pas le sanctuaire de la li-■ berté? Kt pourrait-on imaginer que les citoyens qui nous entourent fussent les premiers à porter ►atteinte à cette liberté pour laquelle ils combattent ? Non, Messieurs ; l’Assemblée nationale est " un dépôt sacré qui, maintenant, est sous la garde des citoyens de Paris et garanti par toute la t France. Attentifs aux délibérations que nous allons prendre, ils jugeront que c’est par les dis-, eussions que la vérité se découvre. Lorsque des citoyens ont à délibérer du bonheur de leurs com-v patriotes, ne doivent-ils pas examiner les affaires 7sous tous les points de vue différents ? Et la sagesse de l’Assemblée peut-elle prononcer, avant d’avoir pesé dans une balance exacte les avantages ou les inconvénients de la loi qu’elle va proclamer? Pénétrés de ces grandes vérités, ils écouteront avec respect et silence nos décrets. vLes signes d’applaudissements ou d’improbation fcne peuvent avoir aucune influence sur le législateur qui parle pour le bonheur public et d'après sa conscience ; et c’est à nous, Messieurs, de ’ donner ici l’exemple du silence respectueux qui doit s’observer. * Dans ce moment, Messieurs, la destinée de la France est dans vos mains ; ranimons toutes nos » forces, tout notre courage. Au nom de la patrie, oublions nos discordes civiles ; que le même in-jtérêtnous enflamme : un seul moment peut décider du sort de cet empire. Vous êtes, Messieurs, les représentants de toute la France et vous devez vous considérer, dans ce moment, comme réunis au milieu d’une partie de vos commettants. En effet, nous ne devons pas regarder la ville de Paris comme une cité particulière, et son peuple nombreux, composé des habitants de toutes les provinces du royaume, forme, 'pour ainsi dire, une Diète immense qui s'est volontairement soumise à nos sages délibérations. rEn même temps l’Assemblée nationale doit se déclarer protectrice de la capitale et s’occuper des ' moyens d’y rétablir l’ordre et de pourvoir à sa subsistance. * Daignez, Messieurs, jeter un coup d’œil sur les événements qui se sont passés. Dans l’état malheureux où la France était réduite, la convocation de l’Assemblée nationale a, pour un moment, consolé tous les citoyens du royaume. Ils ont entrevu un avenir plus heureux. On leur avait . promis la liberté, ils ont voulu en jouir. Les obstacles que nous avons éprouvés ont pu leur faire croire qu’on voulait tromper leurs espérances, ils n’ont plus connu de bornes. Cette nation valeureuse et franche a déployé son antique caractère. Rien peut-il contenir l’impétuosité des Français, quand ils se croient offensés? Et est-il fen même temps un peuple plus doux et plus humain, quand il s’aperçoit qu’on est véritablement ■ occupé de son bonheur ? Sans doute que c’est un très-grand malheur que l’insurrection des peuples, Anais elle était inévitable. Ce n’est pas dans le court espace de quelques mois que l’on peut espérer de calmer une effervescence occasionnée par le souvenir de plus de huit cents ans de calamités -�t de peines ; mais au point d’instruction où la nation française est arrivée, je ne puis m'alarmer > lre Série, T. IX. sur les suites de cette Révolution. Pouvait-on se flatter d’anéantir tous les abus, et d’établir un nouvel ordre dans l’administration, sans une commotion violente dans tout le royaume ? Mais examinez avec attention que le peuple se calme presque au moment où il se soulève, et qu’il est impossible que la raison ne prenne sur lui l’empire que elle doit avoir. Je ne crains pas de le dire, il n’y a que ceux qui regrettent le gouvernement arbitraire qui doutent de la paix et de la tranquillité prochaine du royaume. Au même instant où la capitale a pris les armes , vous avez vu les provinces se soulever. Get ouragan furieux s’est manifesté sur tout l’empire, et les ravages en ont été plus ou moins funestes dans les différents cantons. Je le répète, Messieurs, Paris, par sa population, sa richesse, son commerce, ses consommations, a une telle relation avec toutes les provinces du royaume, que chaque fois qu’il éprouvera une secousse violente, le mouvement doit se propager à tous les rayons qui aboutissent à ce centre commun. Calmons la capitale; que les lois reprennent leur vigueur ; que les tribunaux remplissent leur auguste ministère ; que la sagesse des représentants de la nation s’occupe d’organiser la commune de Paris! Occupons-nous des moyens d’assurer la subsistance à cette grande cité, et démontrons au peuple que nous ne pouvons espérer aucun de ces heureux changements, s’il ne rentre dans l’ordre et la tranquillité. Vous le verrez, Messieurs, car je ne puis douter un moment que la voix de la raison ne prenne l’empire qu’elle doit avoir sur une nation aussi douce et aussi éclairée. A peine Paris sera-t-il calme, que vous verrez la paix régner dans nos provinces. Une heureuse circulation des grains sera le fruit de la paix et de la concorde : si l’on est, dans ce moment, quelquefois inquiet sur les moyens de subsistance, il faut que les citoyens soient instruits, que la seule cause des embarras n’est que la suite inévitable des troubles et des dissensions qui désolent en ce moment le royaume. La France renferme dans son sein plus de grains qu’il n’en faut pour nourrir ses habitants pendant deux années. L’Assemblée nationale a prononcé des décrets pour empêcher toute exportation en pays étranger et pour favoriser la libre circulation des grains dans l’intérieur du royaume. Ces lois sages doivent tranquilliser les peuples, et ils verront l’abondance renaître au moment où la paix sera rétablie. Ah! je remplis dans ce moment le plus saint de mes devoirs ; je n’ai jamais douté un moment du bonheur de mon pays ; mais pour y parvenir il faut arracher le bandeau dont on a voulu couvrir les yeux des peuples ; il faut leur dire la vérité. Qu’ils daignent m’écouter : je vais les avertir des pièges qu’on leur tend et des malheurs qui en seraient la suite. Ce n’est plus l’instant où il faut redouter d’éclairer la nation; elle connaît heureusement ses droits, mais elle a besoin d’être guidée dans les moyens de les faire valoir. Il n’est malheureusement que trop vrai que deux systèmes différents partagent en ce moment tous les esprits. L’universalité de la France a manifesté son opinion, et le parti contraire inutilement a cherché à persuader au pouvoir exécutif qu’un nouvel ordre de choses était un attentat à son autorité et entraînerait la subversion totale de l’empire. Les vaines tentatives que les ennemis du bien public ont faites jusqu’à présent, doivent enfin les persuader que les vrais citoyens, sans 30 [19 octobre 1789. j 400 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. cesse en garde contre leurs brigues et leurs manœuvres obscures, dénonceront tous leurs projets sans les craindre. Ils veulent en vain persuader aux peuples qne la dissolution de l’empire sera la suite de la Révolution : sans doute on doit s’attendre aux plus grands malheurs si les peuples ne se persuadent pas de la nécessité de rentrer dans l’ordre et dans l’obéissance aux lois ; mais, s’ils se laissaient séduire par les perfides avis qü’on ne cesse de leur donner, ils retomberaient bientôt dans l’esclavage le plus abject, et sous le fléau d’un despotisme irrité des obstacles qu’il a éprouvés. Ceux qui s’opposent à la liberté des peuples ne peuvent avoir aucune générosité dans le cœur, et le moment de leur triomphe deviendrait celui de leurs vengeances et des proscriptions. Devions-nous nous attendre aux malheurs qui désolent la France? Chacun de nous arrivait n’ayant pour objet que le bonheur public : ne pourrons-nous jamais découvrir la trame funeste de tous les intrigants qui bouleversent l’Etat ? Avons-nous trouvé des obstacles auprès du Roi quand nous lui avons parlé du bonheur des peuples? N’est-ce pas lui qui nous a conjurés lui-même de réformer les abus, et son coeur paternel ne va-t-il pas au-devant de tous les sacrifices ? Quel est le but que l’Assemblée nationale se propose en ce moment? Le bonheur de tout le peuple français. Pouvons-nous nous égarer avec celte grande perspective sous les yeux ? Qu’il médite avec attention tous les décrets que nous arrêtons : il y verra peut-être le bonheur de quelques individus négligés ; mais que fie doit-on pas sacrifier à l’intérêt général? Avons-nous le droit de balancer un moment entre le superfilu de quelques citoyens et l’absolu nécessaire d’un peuple immense, écrasé et surchargé depuis plusieurs siècles ? Non, sans doute. Pourquoi ne serions-nous pas arrivés à l’époque heureuse où la raison doit enfin triompher des antiques erreurs? Et de vaines considérations particulières doivent-elles s’opposer au bonheur général ? Si la nation veut réfléchir avec attention sur ces grandes vérités, si elle daigne écouter les avis que nous lui donnons en ce moment, qu’elle considère l’avenir heureux qui lui est destiné : Les économies ordonnées et maintenues dans toutes les parties de l’administration ; Les agents de l’autorité soumis à la responsabilité la plus entière ; La justice rendue gratuitement dans tout le royaume, et les peuples délivrés de ce dédale de formes judiciaires, qui ne tendaient qu’à ruiner également les deux parties ; La féodalité anéantie, les droits de la nation reconnus et les charges également réparties ; La perception des contributions établie sans frais et par conséquent moins onéreuse pour les peuples ; Tous ces impôts fatigants anéantis et convertis on une subvention égale et qui n’aüra plus rien d’humiliant, puisque chaque citoyen sera également soumis suivant ses facultés. La certitude que le Trésor de l’Etat sera administré par des mains pures et économes. Tous ces heureux changements peuvent s’opérer en fort peu de temps, si les peuples ne veulent écouter que la raison et la prudence; mais si ces flatteuses espérances n’étaient qu’une illusion, qu’ils frémissent des dangers qui les environnent. Les nations qui nous entourent portent un œil attentif sur nos divisions intestines (peut-être en sont-elles les premiers intrigateurs). Sans cesse en rivalité de l’excellence de notre � territoire, de la richesse de nos manufactures, de la situation du royaume dominant également les deux mers, peut-être ont-elles déjà calculé sur les suites funestes de nos troubles. * Français, sortez de l’état d’aveuglement où vous êtes : vous avez fait un grand effort, mais votre situation est dans ce moment encore plus ’ dangereuse qu’elle ne l’a jamais été. Si vous ne . voulez pas vous persuader de la nécessité de-1 calmer l’effervescence qui vous agite ; si vous n’écoutez pas les sages avis qui vous sont ' donnés ; si les provinces cessaient de regarder Taris comme la métropole de l’empire ; si vous f sépariez vos intérêts les uns des autres, bientôt une guerre cruelle et civile serait la suite des i funestes conseils qüe vous avez reçus, et, fatigués par le malheur et le désespoir, vous ne trouveriez� d’autre ressource que de vous jeter peut-être entre les bras du despotisme, qui est ordinairement la suite inévitable de l’anarchie et du désordre. Ecartons loin de nous ces funestes images. Nation généreuse! vous avez maintenant la liberté , si vous en savez jouir; mais calmez-vous : ne vous effrayez pas des contrariétés que vous pouvez� encore éprouver; laissez paisiblement vos représentants éclairer la marche que vous devez prendre. Nous ne pouvons avoir un intérêt différent des vôtres, dans la route difficile que nous� avons à parcourir : nous pouvons nous égarer, mais au moins vous êtes certains de n’être jamais trahis ; et la franchise avec laquelle nous vous • avertissons de vos dangers doit vous en être un sûr garant. Vous ne pouvez prévenir tous ces malheurs que par le rétablissement de l’ordre, et vous ne pouvez l’espérer qu’autant que les différents pouvoirs, sagement distribués, concourront également à l’harmonie générale. Croyez-vous pouvoir y parvenir tant que l’anarchie subsistera? et-n’ êtes-vous pas 'convaincus par l’expérience fatale de quelques mois, que l’Etat sera bouleversé, si vous ne vous hâtez d’engager le pouvoir exécutif’ à reprendre toute l’autorité qu’il doit avoir? Votre bon Roi n’a-t-il pas juré de ne vous commander* qu’au nom de la loi, et pouvez-vous douter qu’il n’en soit plus le fidèle observateur? Dans la position critique où vous vous trouvez� une ferme résolution de votre part peut calmer tous les maux dont la Frahce gémit maintenant. Tous les moyens sont à vous et la destinée de ceP empire est dans vos mains. Rentrez dans l’ordre. Que les bravés citoyennes de Paris restent eé paix dans leurs foyers ; qu’elles se livrent aux soins intéressants de leur ménage et de l’éducation de leurs enfants. Que les ouvriers reprennent leurs travaux et ne perdent plus un temps si précieux pour la subsistance de leur famille, en attroupements si dangereux pour la tranquillité, publique. Que les districts réfléchissent que dans la commune de Paris sont les dignes représentante, qu’ils ont choisis eux-mêmes, qüe l’élection en a été libre, et qu’ils doivent les honorer de leur confiance. Si chacun reprenait paisiblement ses occupa� tions, y aurait-il rien à craindre dans la capitale ? n’est-elle pas maintenant soüs la garde de cette formidable milice nationale, créée, orga-" nisée et disciplinée en deux mois, par la seule influence du brave chef que les citoyens ont eux*" mêmes choisi? [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 octobre 1789.] 467 r Méditez les heureux résultats de l’union, de la concorde et d’une confiance méritée. Pesez les �obstacles qu’il a eu à surmonter et convenez que rc’esl à son sang-froid et à sa fermeté qu’il doit ses succès dans les circonstances orageuses où il s’est trouvé. ► Les sauvages indomptés font retentir les airs de leurs cris de mort en allant à l’ennemi; et le Français intrépide sait braver la mort en silence. ' Français, qu’avez-vous à désirer maintenant? L’auguste famille, qui depuis huit cents ans vous ►gouverne, est maintenant parmi vous; elle veille à votre sûreté et vous presse de tout son amour. 'Ahl qu’ils daignent entendre la voix d’un sujet fidèle. Je leur annonce d’avance les plus beaux ''jours de la gloire. Notre bon Roi va bientôt sentir le prix de commander aune nation libre et obser-, vatrice des lois. Vous l’avez toujours vu calme et tranquille au milieu d’événements auxquels il c’aurait jamais dû s’attendre. 11 donne en ce moment aux souverains le plus grand exemple delà modération et de la sagesse. Français, serez-vous le dernier peuple de l’Europe qui reconnaisse ces �grandes vérités? Et vous, ministres et grands du royaume qui, par vos charges et votre naissance, avez l’honneur ‘ d’entourer le trône, apprenez que les rois n’ont iplus besoin de flatteurs, puisqu’on peut leur faire �entendre la vérité. Secondez les vues bienfaisantes de notre sage monarque ; méritez la confiance de la nation, mais n’oubliez jamais qu’elle ne souffrira plus qu’il soit trompé ou abusé. * Dignes représentants de la nation, c’est à vous maintenant à diriger les moyens de rétablir la . paix et l’union dans tout le royaume. Vous y parviendrez difficilement, avant d’avoir organisé les , municipalités. Hâtez-vous de consommer cet ouvrage. Les fonctions des officiers des municipalités sont de surveiller les intérêts des communes : il est donc essentiel pour la tranquillité du royaume que les bases fondamentales des lois sur lesquelles doit reposer la sûreté des com-jmunes émanent du même principe ; il est donc de votre devoir de vous occuper promptement de les prescrire. • S’il est nécessaire au bonheur commun que le royaume, qui n’a qu’un Roi, n’ait, pour le régir, �qu’une même jurisprudence, qu’une même monnaie, qu’une même mesure, combien est-il encore plus essentiel pour la tranquillité publique, qu’il n’y ait qu’un même plan d’organisation pour les �municipalités. Ce sera de ce plan général que naîtra naturelle-. ment le respect dû au pouvoir exécutif ; et comme il y a maintenant dans l’Etat le citoyen soldat et je soldat citoyen, que le dernier ordre est à peine la quatre-centième partie de l’autre, le soldat citoyen sera toujours soumis à l’autorité et à la force d’un corps quatre cents fois plus considérable que lui. D’ailleurs, les soldats eux-mêmes seront choisis dans les communes dont ils connaîtront les lois “ et les devoirs; et du moment que chaque individu pourra croire que le. degré d’obéissance qu’il Ltoit à celui qui le commande est soumis à l’intérêt commun et au bien général, la soumission deviendra entière, comme elle doit l’êiire, et le pouvoir exécutif sera respecté d’un bout du 'royaume à l’autre. Dès que le plan d’organisation dicté par l’As-semblée nationale aura été agréé par la ville de Paris, non-seulement on y verra renaître l’ordre >et la tranquillité, mais bientôt toutes les villes du royaume suivront cet exemple, en adoptant les mêmes principes; et vous terminerez ce grand ouvrage par l’établissement de vos assemblées provinciales, d’où doit dépendre la sûreté publique. Ne vous effrayez pas des nouveaux obstacles que vous pourrez rencontrer; opposez-y l’égide redoutable de vos vertus et de votre confiance. Cette Constitution si désirée sera le fruit de votre persévérance; et vos travaux seront couronnés en voyant la liberté triomphante. Je propose l’arrêté suivant, sur lequel je supplie l’Assemblée nationale de vouloir bien délibérer sur-le-champ : « Article 1er. L’Assemblée nationale ayant déjà décrété dans un des articles constitutionnels que le pouvoir exécutif suprême résidait dans les mains du Roi, Sa Majesté sera suppliée de faire usage du pouvoir qui lui appartient, pour prévenir les exportations des grains hors du royaume, et pour rétablir l’ordre et le calme dans l’intérieur des provinces. « Art. 2. Que Sa Majesté sera suppliée d’accorder son crédit à la bonne ville de Paris, poui‘ faire venir, tant de l’étranger que des provinces, les grains nécessaires pour l’approvisionnement de la ville pendant deux ans. « Art. 3. Qu’il sera nommé un comité de douze membres de l’Assemblée nationale, qui se réuniront avec les ministres du Roi, et huit membres delà commune de Paris, ayant le maire delà ville et le commandant de la milice nationale à leur tête, pour travailler de concert à tous les moyens de rétablir l’ordre et la paix dans la capitale. « Art. 4. Que l’Assemblée nationale s’occupera sans relâche du projet d’organisation des municipalités, et que ce sera le premier objet dont elle va s’occuper, comme le plus nécessaire pour donner au pouvoir exécutif la force qu’il doit avoir pour rétablir la tranquillité daüs le royaume. » ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. PRÊTE AU. Séance du mardi 20 octobre 1789 (î). La séance est ouverte par la lecture des procès-verbaux des deux dernières séances. Plusieurs observations sont faites sur le décret projeté dans l’avant-dernière séance concernant les fonctions du Conseil d’Etat du Roi, jusqu’à ce çpje l’Assemblée nationale ait organisé le pouvoir judiciaire et le pouvoir administratif. L’Assemblée nomme six commissaires pour la rédaction de ce décret ; MM. MM. Lanjuinais. Le Chapelier. Camus. Target. Anson. Duport. Le rapport achevé, les commissaires rentrent dans la salle. M. Target propose le décret suivant qui est adopté en la forme accoutumée : « L’Assemblée nationale a décrété que, jusqu’à (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.