365 [Assemblée tt&tiousilo.] ARCHIVES PARLEMRWTAtRRS» [21 juin 1791. J blée prendrait alors des mesures ultérieures et différentes; mais puisqu’elle croit, dans ce moment-ci, devoir laisser les choses dans l’état où elles sont, la proposition qui lui est faite par M. le ministre de l’intérieur me parait devoir être rejetée. M. Rœderer. Je demande la parole. M. Démennler. Je demande la parole. M. le Président. Avant de donner la parole à M. Rœderer, à M. Démeunier, je demande à à l’Assemblée si je peux mettre aux voix la proposition faite par M. de Lameth, c’est que les ministres soient autorisés à venir assister à ses séances, et qu’en ce moment ils puissent se retirer ensemble dans le bureau le plus voisin, afin qu’ils puissent donner les ordres les plus précis pour Inexécution des décrets que vous avez rendus. (Oui! oui!) (Cette motion est adoptée.) M. le Président. M. le ministre de la justice demande à parler à l’Assemblée. M. de Cazalès. Permettez-moi, Monsieur le Président, de représenter à l’Assemblée nationale qu’il faut suivre la délibération qui est commencée, et savoir si des individus seront ajoutés aux ministres. (Non! non!) Comme c’est contre toute espèce de principe, je demande que cela soit rejeté absolument. M. d’André. On ne peut pas délibérer sur le rejet d’une proposition qui n’est pas faite par un des membres de l'Assemblée, ainsi elle doit être regardée comme n’existant pas. M. de Cazalès. A la bonne heure. M. le Président. Le décret que l’Assemblée vient de rendre est que les ministres seront autorisés à venir à l’Assemblée jusqu’à nouvelle dis-osition, et qu’ils pourront se retirer dans les ureaux les plus voisins pour donner en ce moment les ordres les plus prompts pour l’exécution des décrets que l’Assemblée a rendus ce matin. Je donne la parole à M. le ministre de la justice. M. Duport, ministre de la justice. Je prie l’Assemblée de prendre en considération l’observation que je vais lui faire. Je crois qu’il serait utile que l’Assemblée ajoute à son décret une disposition qui m’autorise formellement à apposer le sceau de l’Etat à ces décrets. C’est le roi qui m’a remis le sceau; en conséquence, il n’y a qu’une délibération de l’Assemblée nationale, une injonction expresse de la volonté souveraine de la nation qui puisse m’autoriser à apposer le sceau sans le consentement du roi. Cette autorisation est d’autant plus nécessaire, que M. de Laporte m’a communiqué ce matin, non pas un ordre officiel, mais un billet, un papier qui est encore entre ses mains, si son zèle ne l’a pas porté à le remettre à l’Assemblée nationale. Le roi, par uoe apostille, mise au bas de ce mémoire, remis à M. de Laporte, m’enjoint de ne signer aucun ordre comme ministre qui ne serait point émané de lui et de ne faire aucun usage du sceau de l’Etat jusqu’à ce qu’il n’en ait autrement ordonné; il m’eDjoint même de lui renvoyer le sceau dès qu’il m’en enverra l’ordre. Ce De sont peut-être pas les propres termes de la note, mais c’en est le sens. D’après cela, Messieurs, vous sentez qu’il me serait impossible, sans un décret formel de l’Assemblée, d’employer le sceau de l’Etat. M. d’André. C’était là ma motion. Plusieurs membres demandent la parole. M. le Président. Sur l’avis qui est donné par M. le ministre de la justice et qui a été donné précédemment par M. d’André, un grand nombre de membres me demandent la parole. Je crois devoir interrompre la discussion pour commnui-quer à l’Assemblée une lettre écrite par M. de Montmorin à M. Delessart. M. le Président donne lecture de cette lettre qui porte en substance ; « Je ne puis pas sortir de chez moi : on y amis des gardes qui ne laissent sortir personne. S’il y a quelques démarches, quelques affaires auprès de l’Assemblée, je vous prie de vouloir bien demander qu’on envoie l’ordre de me laisser passer. Je ne demande pas mieux qu’on examine toute ma conduite, et je désire qu’on l’examine avec toute la sévérité possible. Peut-être serez-vous plus libre que moi. Dans ce cas, je vous prie de songer à moi, et de m’envoyer chercher si vous allez à l’Assemblée; car il paraît sans doute extraordinaire que je n’y fusse pas. Vous connaissez mon inviolable attachement à la Constitution. Mandez-moi, je vous prie, s’il y a quelque chose à faire. » M. le Président. J’ajoute, Messieurs, à cette annonce, qu’un chef de division de la garde nationale vient de me remettre une lettre adressée à la reine. Elle a été trouvée entre les mains du peuple qui Pavait trouvée lui-même dans l’appartement du rez-de-chaussée de la reine. Il y a sur l’adresse : A la reine; elle est cachetée avec un pain à chanter. Voix diverses ; Ouvrez! ouvrez! — Non! non! Un membre : Il ne faut pas la décacheter .'L’Assemblée doit donner l’exemple de l’inviolabilité du secret des lettres. M. d’André. En attendant, avec toutes ces motions incidentes, nous n’avançons à rien; tout cela n’est que secondaire. Je supplie l’Assemblée de ne pas détourner ses idées de la motion que je lui ait faite et de réfléchir combien il est intéressant que les 3 décrets que nous avons rendus ce matin, qui peuvent rétablir d’une manière sûre la tranquillité dans Paris, qui peuvent nous mettre à même de délibérer tranquillement, paisiblement sur les mesures qu’il y a à prendre, combien, dis-je, il est important que ces décrets soient mis à exécution. Tout le reste, comme j’ai eu l’honneur de le dire à l’Assemblée, n’est que secondaire, tout le reste ne peut venir qu’après; il faut que nos décrets soient connus. Je supplie instamment l’Assemblée d’aller aux voix sur la proposition que j’ai faite, qui n’a point de contradicteur, et qui tend à la plus grande, à la plus prompte exécution de tous les décrets par le moyen des ministres qui sont ici. Ajoutons seulement à la motion ce qu’a demandé M. le ministre de la justice, qui 366 [Assemblée nationale.] était certainement dans mon intention, c’est qu’il soit spécialement auiorisé à apposer le sceau de l’Etat aux décrets qu’elles aura rendus, afin que sur-le-champ nos décrets soient exécutés. Lorsqu’ils seront publiés, lorsque nous aurons la paix la plus comnlète, ce que nous devons espérer, nous prendrons toutes les mesures nécessaires. M. de Caïalèg. J’ai l’honneur d’observer (Murmures.) qu’il e-d d’une très grande importance, pour l’ordre de l’E npire et pour la sûreté de l’Etat, que l’Assemblée donne connaissance au peuple et qu’elle envoie des courriers dans les départements. Plusieurs membres : C’est fait ! M. de Cazalès. J’ajoute à cette motion celle d’envoyer chetcher M. le commandant de la garde nationale. Plusieurs membres : G’ést fait. M. de Cazalès. Ces mesures sont d’autant plus importantes ( C'est fait /)... qu’au moment même j’ai failli être déchiré par le peuple et que sans le secours de la garde nationale de Paris qui m’a témoigné toute l’afiection, toute la valeur dont elle est susceptible ..... (Murmures prolongés.) Ce n’est pas pour moi que je parle, c’est pour l’intérêt public. Quant à moi, il y a très longtemps que le sacrifice de ma faible existence est fait à la cause publique. Ce n’est pas pour moi que je parle, je le répète, mais il importe essentiellement ..... (Murmures à gauche.) M. Trellhard. Je demande que la discussion soit fermée. M. Emmery. Eb! laissez parler, quel mal y a-t-il? M. de Cazalès. Je parle pour l’intérêt général de l’Empire; il impoite à tout l’Empire qu’aucune espèce de mouvement tumultueux ou séditieux ne se passe dans la ville de Paris et ne trouble vos séances à l’époque où nous nous trouvons. Je demande qu’il soit donné ordre à tous les fonctionnaires publics d’user de tout le pouvoir qui leur est coutié pour maintenir la tranquillité publique. Plusieurs membres : C’est fait! M. de Cazalès. J’appuie la motion de M. d’André. Plusieurs membres : C’est bon ! M. d’André. Ma proposition consiste à décréter que provisoirement et jusqu’à ce qu’autre-ment il eu soit ordonné, les décrets rendus par elle seront mis à exécution par les ministres, et qu’il est enjoint au ministre de la justice d’y apposer le sceau de l’Etat, sans qu’il soit besoin de sauctiou ou d’acceptation du roi. ' M. Canins. Je demande, par amendement, que lés décrets soient signés du Président. M. de Custine. Je demande, par amendement, qu’aucun ordre ne soit exécutoire dans le royaume, qu’il n’ait été préalablement signé par les ministres actuellement en place. [21 juin 1791.] M. Popuïus. Je demande qu’on ajoute : quiconque exécutera aucun autre ordre qui ne sera pas signé par les ministres actuellement en place , sera regardé comme criminel de lése-nation. M. le Président. Avant de mettre aux voix l’amendement de M. de Custine, je demande à l’Assemblée si elle m’autorise à donner d' s ordres p<>ur que M. de Montmoria se rende à l’Assemblée. (Oui! oui !) Je vais en conséquence expédier les ordres. M. Démeunier. La proposition de M. d’André a donné lieu à divers amendements relatifs à la forme à donner aux lois. Outre les dispositions qu’elle contient, li en est plusieurs autres non moins împoriantes pour compléter le décret. Aya�t moi-même des observations à présenter sur ce sujet, je demande pour le moment qu’on mette purement et simplement aux voix la proposition de M. u’Audré et je. me réserve la parole pour proposer les additions que je crois nécessaires. (Oui ! oui ! Aux voix ! aux voix !) (La motion de M. d’André est mise aux voix et décrétée.) M. Démeunier. Maintenant, Messieurs, il s’agit de savoir si vous conserverez à vos décrets l’intitulé de loi , c’est une question qui demande à être examinée, il s’agit de savoir ensuite si le ministre ce la justice y apposera sa signature, je ne pense pas qu’il puisse y avoir de doute là-dessus ; mais il faut l’v autoriser et il faut l’y autoriser d’autant plus, que ceux qui ont commis l’attentat d’enlever la personne du roi n’ont pas négligé avant son départ, de lui faire ordonner au ministre de la justice de ne point se servir du sceau de l’Etat, afin de ménager contre lui une sévère responsabilité. Sans doute, ils ne connaissent pas le patriotisme et le courage que ce ministre montrera dans cette occasion ; mais enfin il faut que l’Assemblée l’autorise par un décret à faire usage du sceau qui lui est confié. Un membre : Cela vient d’être décrété avec la proposition de M. d’André. M. Démeunier. Un troisième objet non moins important regarde les décrets qui ont été rendus, qui ne sont pas encore acceptés et sanctionnés, et dont cependant l’exécution pourrait être instante dans le moment. Si l’Assemblée entrevoit quelque difficulté à conserver l’intitulé de loi aux décrets, non sanctionnés, que vous rendrez dans la circonstance où nous nous trouvons, il y aurait un moyen très simple de la trancher; ce serait d’enjoindre au comité de Constitution de se retirer une demi-heure, pour rédiger on décret par lequel vous direz que, dans la circonstance où l’on se trouve, avec l’apposition du sceau de l’Etat, les décrets certifiés par le ministre de la justice conserveront l'intitulé de loi , et auront toute la force des lois. Quant aux décrets qui ont été ren tus, cette mesure n’étant pas si instante, il me semble que vous pourriez ordonner que, dans la journée, on vous rende compte des moyens que le comité aura cru nécessaires de prendre pour le moment. Je me borne donc, Monsieur le Président, à demander que le ministre de la justice soit autorisé à signer les décrets, en même temps qu’à faire l'apposition du sceau. En second lieu que les décrets de l’Assemblée nationale constituante ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 367 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juin 1791.J continuaient à porter le nom de loi, et que la troisième proposition soit renvoyée pour en rendre compte dans une heure. M. Camus : C’est fait ! Un membre : C’est hors de l’ordre ! M. Démeunier. Je viens à un point qui n’est pas en discussion, mais qui est extrêmement important dans la circonstance où nous sommes. Après que vous aurez mis aux voix les 3 propositions que je viens de faire, j’en ferai une quatrième : c’e.-t que le ministre de la justice dépo-e sur le bureau de l’Assemblée la note qu’il a reçue ce matin, par laquelle on lui avai donné ordre, de la part du roi, de ne point apposer le sceau de l’Etat et que cette note reste déposée au h reau. L’As embiee nationale, en temps et lieu, pourra prendre les mesures nécessaires à la suite de la note qui a été adressée au ministre de la justice. M. le Président. Personne ne s’oppose à cette disposition. Plusieurs membres : Mais c’est déjà décrété I M. le Président. Je donne la parole à M. le ministre de la justice. M. Duport, ministre de la justice. J’ai demandé la parole pour éclaircir, par le récit du fait, la dernière proposition qui vient d’être faite. Ce matin, M. de Laporte, intendant de la liste civile, est venu chez moi. Il m’a communiqué, de la part du roi, un mémoire que je n’ai pas eu le temps de lire et qui est tout entier de la main du roi, et à la suite de ce mémoire était par apostille, une note de la main du roi. En voici à peu près les expressions : Vous enjoindrez de ma part à tous les ministres de ne signer aucun ordre qui ne vienne pas de moi ; vous enjoindrez au garde des sceaux de ne faire aucun usage du sceau que je lui ai confié, jusqu’au moment où il sera requis de le rendre. M. de Laporte m’a consulté sur le parti qu’il y avait à prendre dans cette circonstance. Je lui ai dit qu’il n’avait rien autre chose à faire que de se retirer sur-le-champ chez M. le Président de l’Assemblée nationale, et j’ai rendu à M. de Laporte le mémoire qu’il m’avait communiqué. Je reçois dans l’instant une lettre de M. de Laporte que voici: (Murmures.) « Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, Monsieur, n’était pas chez lui. Il était sorti à huit heures et demie avec M. le maire qui était venu ie chercher. Je suis rentré chez moi. M. de Beauharnais me trouvera inscrit chez lui lorsqu’il y rentrera et j’attendrai les événements avec la confiance la plus grande et la conscience la plus pure. « J’ai l’honneur d’être, etc.... » Voici la lettre ; je la remets à MM. les secrétaires de l’Assemblée. M. Duportail, ministre de la guerre , est introduit dans l’Assemblée. M. Moreau (de Tours). Je fais la motion que M. de Laporte soit mandé sur-le-champ à la barre de l'Assemblée. M. Briois-Beaumetz. Il faut commencer par mettre aux voix la motion de M. Démeunier; et ensuite vous nous proposerez des motions sur ce qui a été proposé par M. le garde des sceaux. M. Moreau (de Tours). Ma motion est urgente. M. le Président. Il ne faut pas enchevêtrer les motions. Pour simplifier les délinéraiions, je mets aux voix les 3 propositions de M. Démeunier. (Les propositions de M. Démeunier sont mises aux voix et adoptées.) M. le Président. Une quatrième proposition e t faite, c’est de mander M. de Laporte, afin qu’il puisse donner connaissance à l’Assemblée nationale des mémoires, lettres ou ordres qu’il pourrait avoir reçus du roi. M. Camus. Je ne crois pas, Messieurs, qu’il soit dans les principes de mander M. de Laporte. Vous avez mandé les ministres, parce que les ministres sont faits, sont connus de vous pour exécuter les ordres du pouvoir exécutif; parce qu’à défaut du chef du pouvoir exécutif, ils doivent être à vos ordres. M. de Laporte est un, particulier, M. de Laporte est un domestique du roi, intendant de la liste civile. Or, je ne vois pas que nous devions avoir ici aucune relation avec les domestiques du roi. M. de Crillo n, jeune, et plusieurs autres membres : Pourquoi donc cela? (Applaudissements.) M. Camus. Ce n’est qu’un particulier domestique du roi. Il est possible que vous ayez un jour à mander M. de Laporte à la barre, mais c’est dans un tout autre sens. Ici vous proposez de le demander pour vous apporter des mémoires qu’il dit lui avoir été remis par le roi. Eh! que feriez-vous, si M. de Laporte vous disait qu’il est porteur des lettres du roi; qu’il ne peut les remettre ces lettres particulières? Je crois qu’il pourrait être dans le cas d’être interrogé, mais je ne crois pas que vous deviez le mander ici pour lui enjoindre, au nom de l’Assemblée nationale, de remettre des mémoires que le roi lui a remis entre les mains, et qui n’ont pas été communiqués effectivement aux ministres ; ce serait une imprudence, et je conclus à ce que l’on ne mande pas M. de Laporte. M. Dupont. C’est le mémoire qu’il faut faire rendre; il est fort simple de demander le mémoire à la personne qui l’a, car le mémoire est la pièce dont nous avons le plus besoin et sans laquelle nous ne pouvons prendre aucune délibération raisonnable. Il faut savoir avec quelles cartes nous jouons, et ce que contient le mémoire qui a a éié remis. M. Briois-Beaumetz. Rien ne me paraît plus simple et plus conforme aux principes. M. le Président. Il m’arrive successivement des avis de députations de différentes sections de Paris qui demandent à être entendues pari’Asseœ-blée. Si l’Assemblée m’y autorise, je vais nommer 3 commissaires qui pourront rendre successivement compte des objets de ces députations, afin que je puisse en rendre compte à l’Assemblée, et que, si véritablement c’était un objet qu’elle dût prendre en considération, qu’il ne fallût pas retarder, alors je puisse les faire paraître. (Oui! oui!)