[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [10 août 1790.1 695 département de Rhône-et-Loire, sont autorisés à imposer et à répartir tant sur les habitants de ladite ville, que sur ceux de ses faubourgs, provisoirement, et jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu, la somme de 2,400 livres par année, pour fournir à la dépense connue sous le nom de « frais de ville », et, en sus, 6 deniers par livre pour les frais de rôle et de collecte, ainsi et de la même manière que par le passé, à la charge de rendre compte de l’emploi à l’administration de département, le directoire duquel est autorisé à en vérifier le rôle, et à le rendre executoire sur l’avis du directoire du district. » M. le Président. L’ordre du jour est le rapport du comité des recherches sur V affaire de la municipalité de Saint-Aubin. M. Brulart de Genlis (ci-devant de Sillery), rapporteur (1). Messieurs, la municipalité de Saint-Aubin, près de Bar-le-Duc, vient d’arrêter un courrier venant de Strasbourg et porteur d’un paquet à l’adresse de M. d’Ogny, intendant général des postes. Ce courrier n’avait aucun-passeport de la municipalité de Strasbourg et n’était muni que d’un simple ordre du sieur Mouilleseaux, directeur des postes de cette ville, qui lui ordonnait de se rendre à Paris, en tout!- diligence, pour y remettre à M. d’Ogny le paquet en question. La municipalité de Saint-Aubin, probablement peu instruite des formes usitées pour la prompte expédiùon des paquets ministériels, et le courrier n’étant muni d’aucun passeport de la municipalité de Strasbourg, a eu l’imprudence d’ouvrir le paquet adressé à M. d’Ogny, intendant des postes, portant sur le coin de l’adresse, service national très pressé. Cette municipalité a trouvé dans le paquet adressé à M. d’Ogny, plusieurs lettres, dont elle s’est permis également l’ouverture. Dans le nombre de ces lettres, l’une était à l’adresse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères; une seconde à celle de M. le comte de Florida-Blanca, ministre d’Espagne; une troisième à celle de M. le comte de Fernan-Nuriez, ambassadeur d’Espagne; une quatrième à l’adresse de M. Tessier, commis des affaires étrangères; enfin, une gazette allemande. Cette municipalité, après avoir lu, dans ces dépêches, tout ce qui n’était pas en chiffre, a renfermé ces différents paquets dans l’enveloppe, à l’adresse de M. d’Ogny, et elle est venue en rendre compte à la municipalité de Bar-le-Duc. MM. les officiers municipaux de cette ville en ont référé au directoire de cette ville, qui, sentant les conséquences de cette arrestation, ont sur-le-champ envoyé un de leurs officiers pour apporter le paquet à l’Assemblée nationale, en ordonnant que le courrier restât à Bar-le-Duc jusqu’à la réception des ordres du roi. A la lecture du procès-verbal de la municipalité de Saint-Aubin, votre comité a, sur-le-champ , nommé deux de ses membres pour porter à M. de Montmorin le paquet qu’il venait de recevoir. M. de Montmorin, auquel nous avons lu le procès-verbal de l’arrestation du courrier, nous a dit qu’il ne pouvait se dispenser d’en porter plainte à l’Assemblée nationale et il a refusé le paquet qui était à l’adresse de M. d’Ûguy. (1) Ce rapport n’a pas été inséré au Moniteur. Nous l’empruntons au journal Le Point du Jour , tome XIII, page 44. Vos commissaires ont été chez M. d’Ogny et, en leur présence, il a fait l’ouverture du paquet, dans lequel se sont trouvées les lettres ouvertes et conformes à la description qui en a été faite dans le procès-verbal de la municipalité de Saint-Aubin. Nous lui avons laissé le paquet, et il en a donné une reconnaissance sur le procès-verbal qui constatait les différentes pièces qui y étaient renfermées. Vous avez reçu hier, Messieurs, une lettre de M. de Montmorin qui se plaint, avec raison, de l’ouverture des paquets que la municipalité de Saint-Aubin s’est permis de faire. Votre comité des recherches a pensé qu’il était absolument indispensable que l’Assemblee nationale prononçât un décret, pour instruire toutes les municipalités du royaume, qu’ayant jdécrété oue le secret des lettres entre particuliers était inviolable, ce principe constitutionnel acquerrait, s’il était possible, un plus grand degré d’importance, lorsqu’il s’agissait de la correspondance des ministres des cours étrangères et de ceux de France. Il a également pensé que la conduite de la municipalité de Saint-Aubin ne pouvait être ëxcu-sable que par le motif qui l’avait déterminée ; que le courrier, n’étant muni d’aucun passeport de la municipalité de Strasbourg et n’ayant qu’un simple ordre du directeur de la poste de cette ville, avait pu lui paraître suspect dans la circonstance critique où ce pays vient de se trouver. Vous n’ignorez pas, Messieurs, que les bruits qui s’étaient répandus du passage des Autrichiens, ont alarmé tous les *babitants des campagnes de ces cantons; que les gardes nationales se sont portées en foule du côté de Stenay, au nombre de trente mille hommes. Que dans ce moment d’effervescence leur zèle les a entraînés à ouvrir des paquets qu’ils croyaient avoir quelques rapports aux alarmes des habitants ; que, par une suite de la terreur où ils étaient, ils n’ont pas senti les conséquences qui pourraient résulter de l’ouverture des paquets du ministre des finances et des ministres espagnols. Votre comité a pensé que les ministres espagnols seraient en droit de se plaindre de la violation du droit des gens si l’Assemblée nationale ne désapprouvait pas hautement la conduite de cette municipalité. En conséquence, Messieurs, votre comité a l’honneur de vous proposer le projet de décret suivant : (Le rapporteur donne lecture de son projet de décret.) M. Gossin. Le 4 de ce mois, quelques particuliers ont porté la terreur dans le département de la Meuse, en annonçant que des troupes ennemies s’étaient répanaues sur les frontières, que l’on ravageait les moissons et qü’on pillait les villes. Le lendemain, il y eut plus de trente mille gardes nationales sur pied qui se portèrent vers Stenay et qui furent bientôt convaincdes que ce n’était qu’une fausse alarme. C’est dans ces moments qu’une municipalité de campagne, effrayée pour la sûreté des habitants, a suspecté un homme qui n’avait pas de passeport et qui portait un paquet adressé à M. d’Ogny. Persuadée que c’était une correspondance avec les ministres, cette municipalité a cru que le salut de la patrie dépendait de l’ouverture du paquet. Sa conduite est excusable par son motif et je demande que le sage décret proposé par le comité s.oit adopté*