[Convention nationalo.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! Ln‘vrjsc an „ 141 ( 22 décembre 1793 jugements révolutionnaires. Vous y verrez les principes qui nous ont dirigés; nous vous prions de fixer notre marche dans les cas semblables à venir, et le mérite de celle que nous avons tenue dans le cas particulier. Nous joignons copie des jugements. Nous continuerons l’ins¬ truction d’après nos principes, mais nous croyons de notre devoir de ne point passer au jugement définitif sans avoir reçu votre déci¬ sion. « Cassaigne, président. » Extrait des registres du tribunal criminel du département des Basses -Pyrénées (1). Vu par le tribunal criminel du département des Basses-Pyrénées, l’acte d’accusation dressé par le citoyen accusateur public près le tribunal contre Jean-Baptiste Bardou, natif de Lescar, cultivateur, dont la teneur suit : Jean Casebonne, accusateur public près le tribunal criminel du département des Basses-Pyrénées, procédant en conséquence des pou¬ voirs attribués aux tribunaux criminels de la République par les décrets de la Convention nationale des 19 mars, 7, 9 avril et 7 juin der¬ niers, qui les autorisent à juger sans recours à la voie de cassation les causes et délits mention¬ nés auxdits décrets, expose que le citoyen Bar¬ dou, natif de Lescar, a été traduit audit tribu¬ nal en exécution de ladite attribution, comme prévenu de propositions et provocations au rétablissement de la royauté en France, et dans tous les cas des propos et démarches inciviques susceptibles d’être ou de devenir des sujets de trouble et d’agitation dans les parties delà Répu¬ blique où ces propos et démarches ont eu lieu; que l’accusateur public a reçu le 9 octobre cou¬ rant les pièces concernant ledit Bardou, qui lui ont été adressées par le substitut du procu¬ reur général syndic du département avec un arrêté pris le même jour par le conseil général dudit département, contenant renvoi au tribu¬ nal criminel des pièces adressées à l’Administra¬ tion par l’officier de police et la municipalité de Monein, consistant dans la dénonciation civique faite contre ledit Bardou, et dans le cahier des déclarations de divers témoins. Qu’il a été aussi¬ tôt procédé, par le citoyen président du tribu¬ nal à l’interrogatoire dudit Bardou; qu’ examen fait de toutes les pièces reçues par l’accusateur public et par lui transmises, il en résulte que déjà dès le mois d’août dernier ledit Bardou, abusant du rassemblement existant dans sa métairie de Coustey, située à Monein, de plu¬ sieurs habitants de la campagne employés à dépiquer son froment, se permit de dire, même à plusieurs reprises, qu’il était du nombre des aristocrates qui étaient beaucoup plus forts que les patriotes, que la nation avait beau faire, qu’elle perdrait toujours, qu’avant la fin de ce même mois d’août nous aurions un roi qui con¬ venait beaucoup plus que la République, que cet événement aurait lieu, n’y eût-il que lui seul, et qu’il en donnait sa tête pour garant, dût-il s’exposer à la perdre; que les émigrés rentre¬ raient en France, et qu’il se mettrait à leur tête; qu’ enfin, sur les représentations qui lui furent (1) Archives nationales, carton Dm 206, dossier Pau. faites sur l’inconvenance de ce langage, il répon¬ dit d’un ton colère et animé que la Convention ne tarderait pas à être détruite et que ses membres seraient livrés à un autre supplice que celui de la guillotine; qu’au surplus, ceux qui s’avisaient de lui faire des observations devaient faire attention qu’ils étaient chez lui, et qu’il était le maître de les congédier. En second lieu, qu’il répéta vers la même époque les mêmes propos soit vis-à-vis d’autres citoyens, soit dans les maisons où il allait, et qu’il en ajouta encore d’autres qui offrirent le même caractère et la même gravité, particulière¬ ment dans le cabaret de Mauba, dans la maison de Coustey de Monein, où il s’était rendu pour l’achat d’un cheval, et où, entre autres choses, il donna pour raison de la préférence qu’il donnait au gouvernement monarchique sur le gouvernement républicain, qu’auparavant la France n’avait qu’un tyran, au lieu qu’elle en a aujourd’hui huit cents, c’est-à-dire autant que de membres de la Convention; qu’il usa aussi, dans quelques-unes de ces occasions, des menaces les plus violentes envers les personnes qui avaient le courage de le contrarier. En troisième lieu, enfin, qu’à son retour d’un voyage de Bordeaux, entrepris vers le 10 ou 11 septembre dernier, et après lequel il revint dans sa métairie de Coustey, le 5 octobre cou¬ rant, il assura que, peu de jours avant, il y avait dans cette ville tantôt dix mille hommes, tantôt cent mille qui s’étaient rassemblés sous les armes pour anéantir la Constitution, détruire la République, qu’il était lui-même du nombre et qu’il était dans l’intention d’y revenir pour concourir à faire prévaloir l’ancien régime. D’après l’exposé ci-dessus, l’accusateur public a dressé la présente accusation contre ledit Bardou, pour avoir, méchamment et à dessein, tenu tant les propos ci-dessus énoncés relatifs aux propositions du rétablissement de la royauté, aux provocations dans le même objet à F avilissement de la Convention nationale et des autorités constituées, aux alarmes commu¬ niquées à ses concitoyens sur les prétendus dan¬ gers de la patrie, aux motifs qu’il y avait d’y croire, à ses projets de concourir à les augmen¬ ter, que tous autres consignés dans les pièces et accompagnés de mouvements propres à ajouter à leur gravité, ce qui est contraire aux décrets des 4 décembre--4792, 9 avril, 7 juin sui¬ vants, et autres lois de la République. En conséquence, l’accusateur public requiert qu’il lui soit donné acte, par le tribunal assem¬ blé, de la présente accusation, qu’il soit, en outre, ordonné qu’à sa diligence et par un huissier du tribunal porteur de l’ordonnance à intervenir, ledit Bardou, actuellement détenu dans la maison d’arrêt dite la Conciergerie du Palais, soit écroué sur les registres de ladite maison pour y rester, comme en maison de jus¬ tice; comme aussi que l’ordonnance à intervenir sera notifiée à la municipalité de Lescar et à l’accusé. Fait au cabinet de l’accusateur public le 23e jour, ère vulgaire du mois d’octobre 1793, an II de la République, une et indivisible. Signé : Casebonne. Le jugement rendu le 24 dudit, qui donne acte de ladite accusation, et qui décrète de prise de corps ledit Bardou; l’exploit contenant signi¬ fication dudit acte d’accusation et ordonnance