228 [Élats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Bar-le-Duc.] CAHIER DES POUVOIRS ET INSTRUCTIONS DONNÉS AUX DÉPUTÉS DU CLERGÉ DU BAILLIAGE DE PONT-A-MOUS-SON, A LA VILLE DE BAR, POUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX (1). Aujourd’hui 18 mars 1789 , nous, soussignés, députés de l’ordre du clergé des villes et communautés du bailliage de Pont-à-Mousson, conformément à l’ordonnance du lieutenant du bailli dudit bailliage en date du 27 février dernier, avons procédé à la rédaction des pouvoirs que nous confions à nos députés pour l’assemblée de la nation qui doit se tenir à Versailles lé 27 avril prochain. Et d’abord les avons chargés de porter aux pieds de Sa Majesté l’hommage de notre profond respect, de notre amour et attachement pour sa personne sacrée, et de notre vive reconnaissance pour sa bonté paternelle, qui daigne appeler auprès d’elle l’élite de la nation pour opérer avec elle la restauration de la France, déraciner les abus et faire circuler le bonheur dans les différentes provinces. Pleins de confiance en la pureté des intentions de Sa Majesté, nous nous livrerions sans réserve à tout ce qu’elle pourrait* régler et ordonner, si la prudence n’exigeait pas des précautions pour l’avenir, parce qu’on peut surprendre la religion du meilleur des rois. Considérant l°que le bien que Sa Majesté se propose de faire dans cette respectable assemblée, ne peut résulter qu’autant que chaque ordre, comme chaque membre, pourra déduire librement ses opinions et les raisons qui les motivent, nous protestons contre toute violence qui pourrait être faite à aucun ordre ou membre, et déclarons illégal ce qui serait arrêté et décidé en conséquence. Nous demandons aussi qu’il puisse y avoir une correspondance libre entre les députés et leurs commettants respectifs, sans qu’aucune autorité puisse arrêter ou ouvrir aucune lettre. 2° Que les propriétés de tous les ordres de citoyens étant l’apanage le plus précieux de la liberté civile et sous la sauvegarde des lois indestructibles, nous protestons également et chargeons nos députés de protester contre tout ce qui pourrait y donner atteinte. 3° Que si Je monarque était seul législateur, il serait nécessairement despote ; ni qu’en son nom, ses ministres pourraient faire des lois attentatoires à notre constitution qui veut que le Français soit libre. Nous chargeons expressément nos députés de poser pour principe qu’aucune loi, hormis celle de simple administration provisoire, ne pourra obliger la nation, qu’elle n’ait été librement consentie par elle ; même consentement pour toute espèce d’impôt. 4° Que personne ne pouvant plus connaître les besoins d’une province, y pourvoir et en opérer le bien, qu’un assemblage d’hommes choisis, tirés des différentes classes et parties de la province, pour réunir en masse leurs lumières, ils demanderont que les duchés de Lorraine èt de Bar soient formés en Etats particuliers, qui aient la pléni-.tuae des pouvoirs d’administration, sans qu’aucune partie leur puisse être soustraite. 5° Que comme dans une vaste monarchie il peut y avoir des classes d’hommes qui vivent de rapines, qui ont intérêt à propager les abus et à écarter l’ordre que l’on voudrait mettre dans les finances, nous enjoignons expressément à nos députés de ne consentir aucun impôt que préala-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. blement on ait examiné l’état actuel des nôtres, qu’on ne soit remonté aux causes du déficit qui doit s’y trouver, et qu’on ait pris des moyens efficaces pour prévenir à jamais toute déprédation. Pour cela ils demanderont une connaissance exacte des dettes de l’Etat et des dépenses de la maison du Roi, des différents départements et des charges quelconques, pour, après avoir réduit tous les genres de dépenses inutiles, superflues, assigner à chaque département et objets une somme fixe qu’on ne pourra excéder. 6° Que comme les plus sages lois et ordonnances n’atteignent leur effet qu’autant qu’elles sont constamment surveillées et mises en activité, ils demanderont le retour périodique des Etats généraux, qui seront tenus à époques fixes, et ils feront rendre compte de la manière dont leurs lois et règlements, nommément sur l’objet important des finances, auront été observés et exécutés, qui prorogeront, suspendront et diminueront les impôts selon les besoins de l’Etat. Ces préliminaires posés et consentis, mais non autrement, nous donnons pleins pouvoirs à nos députés d’approuver, consentir, statuer avec les autres membres de l’assemblée générale, tout ce qui pourra tendre à la bonne constitution du royaume, à la réforme des abus et au bonheur du peuple français-, leur défendant expressément de recevoir aucune grâce ou faveur de la cour pendant la durée de leurs pouvoirs et les trois années qui suivront. Fait et arrêté à Pont-à-Mousson les jour, mois et an susdit, et ont tous messieurs du clergé signé à la minute. Collationné, certifié véritable par nous, avocat en parlement, greffier en chef à Pont-à-Mousson soussigné. Signé Vistor, avec paraphe. CAHIER Des pouvoirs pour MM. les députés de l’ordre de la noblesse du bailliage de Pont-à-Mousson. Aujourd’hui 18 mars 1789, les membres composant l’ordre de la noblesse du baillage de Pont-à-Mousson, assemblés en exécution des lettres de Sa Majesté pour concourir à la rédaction du cahier des remontrances, plaintes et réclamations qu’ils entendent être portées par la voix de leurs députés au bailliage de Bar, à l’assemblée des Etats généraux convoqués à Versailles le 27 avril prochain, et pour conférer leurs pouvoirs auxdits députés, déclarent qu’ils acceptent, avec les sentiments d’une vive reconnaissance, la grâce que Sa Majesté daigne leur faire de les consulter sur les plans de réforme et d’amélioration que sa sollicitude paternelle lui suggère comme une occasion précieuse de lui acquitter en corps pour la première fois depuis la réunion des deux duchés au domaine de sa couronne le tribut du respect profond et de l’attachement inviolable qu’ils portent à la personne de Sa Majesté et qu’ils partagent avec l’ordre entier de leur province. Ils chargent donc leurs députés d’en présenter à Sa Majesté l’hommage le plus pur et le plus sincère; de la supplier d’agréer pareillement celui d’un dévouement sans bornes à son service et au bien de l’Etat, et de lui exprimer les vœux qu’ils font de répondre à sa confiance par un sacrifice absolu de leurs propres intérêts et de concourir de tous leurs efforts et de concert avec (I) Nous reproduisons ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire.