1.04 [Convention national©.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES-j 5 frimaire an H 1 VJ, ( 25 novembre 1793 Art. 2. « A cet effet, il passera la Sambre, soit au-dessus, soit au-dessous de Maubeuge, soit à Maubeuge même; il cernera l’ennemi, il l’en¬ veloppera, il l’enfermera dans la portion du ter¬ ritoire qu’il a envahie, lui coupera les commu¬ nications avec son propre pays et le séparera de ses magasins, qu’il brûlera, s’il ne peut s’en emparer. Art. 3. « Néanmoins l’armée française ne s’enga¬ gera qu’avec prudence en terre étrangère; elle côtoiera les frontières le plus près que faire se pourra et maintiendra toujours ses communi¬ cations assurées avec les places; elle fera, autant que possible, une guerre de poste; elle engagera une affaire générale aussitôt que l’occasion s’of¬ frira de combattre avec avantage et de mettre F armée ennemie en déroute complète. Art. 4. «p Le général fera son possible pour tromper Fennemi sur son projet; il lui persuadera qu’il a des forces immenses; il pourra tenter un coup de main sur Namur, et, s’il ne peut prendre cette forteresse, il tâchera du moins d’isoler le château en coupant le pont qui communique au pays ennemi; il tâchera également d’enlever lé Quesnoy, soit par surprise, soit en le faisant sommer, s’il est instruit que la garnison est faible; Art. 5. « Le général tiendra ses forces en masse et donnera à l’ennemi de la jalousie sur plusieurs points, pour l’engager à diviser les siennes; il tirera des garnisons tout ce qui n’est pas absolu¬ ment nécessaire à leur sûreté, en remplaçant les vieilles troupes par celles de la réquisition. Art. 6. « En même temps qu’une division agira ainsi du côté de Mons, l’autre pressera l’ennemi du côté de Cysoing, Maulde et Tournai, et tâchera d’opérer sa jonction avec la première, soit en enveloppant Mons et Tournai, soit en passant entre ces villes et la frontière. » B. Le citoyen Jourdan, général en chef de V armée du Nord, au citoyen Bouchotte. ministre de la guerre (1). * Au quartier général à Maubeuge, le 5e jour du 2e mois de l’an II de la République une et indivisible. « Citoyen ministre, te Le comité de Salut public m’avait envoyé, • fl ) Archives du ministère de la guerre : Armées du Nord et des Ardennes. il y a quelques jours, l’arrêté dont vous m'avez fait passer copie dans votre dernière. Je l’ai médité et me suis pénétré des intentions qu’il contient. Elles cadrent parfaitement avec les miennes, je sais qu’il est essentiel de profiter de la victoire que je viens de remporter sur l’ennemi, il ne l’est pas moins de l’expulser du territoire de la République. Il s’agit donc de trouver les moyens de réussir, c’est à quoi je pense continuellement. Cette besogne a bien des difficultés, je compte sur le courage de nos troupes pour les vaincre, j’espère que leur éner¬ gie ôtera les moyens aux esclaves et aux tyrans de recommencer une autre campagne ou au moins de la rendre très laborieuse. Il ne tiendra paB à moi que le crédit de la nation française ne soit dans la plus grande splendeur. « Je fais mes dispositions pour attaquer après demain; si la fortune me seconde, cette action terminera la campagne. Nos braves républicains témoignent le plus grand désir de faire sentir aux ennemis, avec plénitude, la pesanteur de leurs armes. « Salut et fraternité. « Jourdan. » G. Lettre des représentants Saint-Just et Lebas, commissaires à V armée du Rhin (1). « Citoyens nos collègues, « La République est victorieuse sur toute la ligne de mouvement, depuis Sarrebruclc jus¬ qu’au bord du Rhin. L’armée sous les murs de Strasbourg a' repris Wantzenau et Brumpt; la division de Saverne a repris Bouxwiller et nous l’avons laissée hier se portant sur Hagueneau. Nous sommes à Bitche aujourd’hui avec une partie du rassemblement de Bouquenom. « Occupés à suivre le plan et à surveiller les opérations, nous ne vous apprendrons point les premiers la tentative de l’ennemi sur le château de Bitche. Il avait pratiqué des intelligences dans le fort : un émigré, qui avait demeuré plusieurs années à Bitche, conduisait l’entre¬ prise, il avait été ingénieur dans le fort et con¬ naissait tous les détours. Déjà l’ennemi avait brisé les portes, le commandant, que nous vous envoyons, avait laissé les ponts-levis baissés. 6.000 hommes environnaient la place, le seul bataillon du Cher a sauvé le fort, chaque soldat n’a pris de commandement que de son courage, les artilleurs se conduisirent de même, l’ennemi fut écrasé par les grenades et assommé par les soldats du Cher à coups de bûches. Nous avons vu les fossés, les glacis, les murs et les escaüers par où l’ennemi avait pénétré teints de son sang. Une commission militaire va juger sur l’heure les émigrés faits prisonniers. « Les autres prisonniers, au nombre de 2 ou 300, seront conduits dans l’intérieur. L’ennemi avait choisi, pour ce coup de main, ce qu’il (1) Archives du ministère de la guerre : Armées du Rhin et de la Moselle, carton 2/24. Aulard ! Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p. 611. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |gfrIî“emb?e 1793 135 avait de plus robustes soldats. Un volontaire de 16 ans du bataillon du Cher en a désarmé quinze. Nous avons demandé les noms des oraves qui ont sauvé le fort, nous vous les ferons passer, afin que la Convention nationale ré¬ compense une des plus belles défenses que l’on ait vue depuis la guerre. Tous jugez de quelle importance était pour l’ennemi la possession du fort de Bitche, et surtout dans le plan qui s’exécute. « Nous allons nous rendre à Hornback, à l’armée du général Taponier; de là nous irons à Deux-Ponts où. l’armée du général Hoche, di¬ rigée en chef par Pichegru, est entrée hier. La République a la fortune de César et la mérite mieux. Vous voyez qu’elle est victorieuse par¬ tout. Nous espérons que les armées ne se ralen¬ tiront point. Nous ne sommes point restés un demi-jour dans le même endroit depuis le mou¬ vement. La surveillance la plus rapide est exercée, nous vous tiendrons parole, nous t⬠cherons qu’on ne s’arrête point que l’ennemi ne soit exterminé, sa retraite doit être dans le Rhin si tout le monde fait son devoir. « Saint-Just; Lebas. « A Bitche, le 1er frimaire l’an II. » D. Lettre des représentants du peuple commissaires à l’armée de l’Ouest (1). Minute. Les représentants du peuple, délégués par la Convention nationale près l’armée de l’Ouest, à leurs collègues, membres du comité de Salut public. « A Rennes, le 6e jour de la 3e décade du 2e mois de l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. « Citoyens collègues, « C’est au moment où nous allions vous ins¬ truire de notre marche et de nos combinaisons* militaires que nous recevons à 7 heures du soir, aujourd’hui 26 brumaire, votre lettre datée du 21 même mois, ainsi que de l’arrêté du comité qui était joint (2). Nous avons vu avec plaisir que presque toutes les dispositions que ren¬ ferme cet arrêté étaient absolument les mêmes que celles que nous avions concertées et dont la majeure partie ont déjà été mises à exécution. « Aussitôt que notre armée a été en état de marcher, nous sommes partis d’Angers pour nous porter à Laval, sur deux colonnes, qui y sont arrivées le même jour. Le lendemain nous devions aller coucher à Vitré pour de là (1) Archives nationales, carton AFn 277, pla¬ quette 2323, pièce 40. (2) Voy. ci-après, p. 136, la pièce justificative E. M. Aulard, dans son Recueil des actes et de la corres¬ pondance du comité de Salut public (t. 8, p. 468) ne donne qu’une analyse de cette lettre. marcher sur Fougères, mais par la négligence des employés dans les vivres, l’armée ayant manqué de pain pendant deux jours, on fut obligé de coucher une nuit de plus à Laval, ce qui ne nous permit d’arriver à Vitré que le 23. Là, par le résultat d’un conseil de guerre tenu entre les généraux des' deux armées des côtes de Brest et de l’Ouest, il fut arrêté que cette dernière, au lieu de marcher sur Fougères se rendrait à Rennes pour de là se porter en masse, et sur deux colonnes, du côté de Dol où nous savions que les brigands étaient réfugiés. Notre marche a été rapide de Vitré à Rennes; les soldats de la liberté ont fait dix lieues sans s’arrêter pendant une pluie continuelle, dans la boue, quoique une très grande quantité fussent sans souliers, et d’autres en sabots, ce qui ne les empêchait pas de chanter le long de la route des airs patriotiques, et de répéter à plusieurs reprises le cri chéri de : Vive la Répu¬ blique ! « Deux heures après notre entrée dans Rennes, un conseil de guerre a été tenu entre les généraux des deux armées. Vous verrez par la copie ci -jointe du plan (1) qui y a été arrêté, combien les vues du comité de Salut public, quoique à de longues distances, s’accordaient avec celles que le conseil de guerre jugea les plus propres à assurer le succès de nos armes contre les rebelles fugitifs, ce qui prouve évi¬ demment que quand on désire le bien public on ne diffère jamais d’opinion sur les vrais moyens de l’établir. Notre jonction s’est donc opérée facilement avec l’armée des Côtes de Brest. L’harmonie qui paraît régner entre les officiers et les soldats de l’une et de l’autre armée est pour nous le présage des succès qui vont cou¬ ronner leurs travaux. Au moment où les co¬ lonnes ainsi mélangées allaient prendre la direc¬ tion que la nouvelle de la prise de Pontorson et d’Avr anches par les rebelles avait déterminé qu’on leur donnât, un courrier qui nous est dépéché par nos collègues Prieur de la Marne et Jean -B on -Saint -André, nous apprend que les rebelles se sont portés sur Granville, qu’ils assiègent cette ville en cet instant et qu’il faut que les deux armées de l’Ouest et des Côtes de Brest réunies viennent promptement au secours de cette place. A l’heure même, nous nous sommes réunis à nos collègues pour requérir de porter toutes nos forces sur Granville, et l’armée tout entière marche en ce moment sur Granville à pas redoublé, dans le meilleur ordre et avec les plus rassurantes dispositions. « Que ne pourrait la liberté sur des hommes qui combattent pour sa défense ! Un très grand nombre de ces généreux soldats sont sans aucune espèce de chaussures; eh bien ! ils vont marcher toute la nuit par de très mauvais che¬ mins, et nous n’avons entendu de leur part aucun murmure. « Dès le premier jour de notre arrivée à Rennes nous avions enjoint à toutes les auto¬ rités constituées de cette commune de requérir de tous les habitants sans distinction les objets nécessaires et indispensables pour l’équipement de la troupe. Cette mesure n’ayant pas produit le résultat que nous devions en attendre, et l’armée ne pouvant marcher faute de chaus¬ sures, alors nous nous sommes nous-mêmes (1) Voy. ci-après, p. 137.1a pièce justificative F