ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (27 août 1790.] 350 [Assemblée nationale. ] été faites depuis l’impression du tarif, quelques-uns des droits fixés sur l’exportation des vins pourront être susceptibles de modification. (L’Assemblée applaudit vivement le rapport fait par M. Goudard. Elle ordonne l’impression du rapport du tarif et du projet de loi.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur l'affaire d'Avignon. M. Tronchet, rapporteur , se dirige vers la tribune. M. Bmot. D’après l’ordre de nos travaux, le vendredi est un jour consacré aux finances, je demande qu’on ne s’écarte pas de cette règle. M. de Murinais. Je fais la motion de consacrer la séance au traitement des religieuses dont le sort mérite tout l’intérêt de l’Assemblée. M. d’André. Les questions de finances sont tellement urgentes qu’elles doivent primer toutes les autres. J’appuie donc la motion de M. Buzot, mais avec cet amendement qu’il y aura ce soir une séance extraordinaire pour l’affaire d’Avignon. (Cette double proposition est adoptée.) M. le Président. M. de Montesquiou, organe du comité des finances, a la parole pour un rapport sur la dette pvblique (1). M. de Montesquiou, rapporteur . Messieurs, l’Assemblée nationale va régler définitivement tous les objets qui composeront désormais la dépense publique. Il ne lui restera plus qu’à statuer sur la dette, pour être en état de déterminer la somme des contributions. Lorsque la nation attendait avec tant d’impatience la convocation des Etats généraux , le poids de la dette publique pesait sur les contribuables, de manière à attaquer tous les moyens de reproduction, et c’est le dernier terme des malheurs d’un peuple. Cependant les dépenses s’accroissaient tous les jours, les arrérages se convertissaient chaque année en capitaux par de nouveaux emprunts; le désespoir était le précurseur de la banqueroute. L’Assemblée nationale s’est formée; l’honneur a consacré tous les engagements qui devaient reposer sur la foi publique; l’espérance a reparu avec la liberté. Un des premiers objets de vos travaux, Messieurs, est de prouver que vous ne preniez pas un engagement téméraire, lorsque vous placiez tous les créanciers de l’Etat sous la sauvegarde de l’honneur et de la loyauté français. Un autre objet non moins intéressant vous occupe, celui de soulager le peuple de l’énorme fardeau qui l’a si longtemps accablé. Pour en avoir une idée ] uste, ce ne serait pas assez d’ajouter à la somme des revenus versés au Trésor public tout ce que coûtait l’armée de commis, de gardiens, de suppôts du fisc, tant supérieurs qu’inférieurs; il faudrait y joindre encore les abus personnels et malheureusement trop faciles à ces agents si multipliés; supputer les frais de contrainte, les effets de la contrebande, ceux de cette guerre intestine, suite de tant de prohibitions, parce qu’effecti veinent le poids en retombe toujours en dernière analyse sur le peuple : un tel résultat serait effrayant sans doule; mais bientôt il ne rappellerait plus à la nation que le souvenir du passé, et le prix de vos travaux. Quelque intéressante que fût cette recherche, nous ne nous jetterons pas dans les calculs qu’elle entraînerait, et qu’il serait toujours possible de regarder comme hypothétiques. Nous nous arrêterons anx seules idées précises, et nous prendrons pour termes de nos comparaisons, non ce que la nation payait sous les formes variées, arbitraires et vexatoires, dont nous venons de parler, mais la somme des con-tributions-qui entraient au Trésor public, et celle de frais bien constamment attachés aux impôts indirects que vous avez supprimés. Vous porterez l’économie plus loin que vous n’avez fait encore, soit par de nouvelles suppressions, soit par la simplicité du régime que vous établirez; mais nous n’entreprendrons pas d’apprécier ce qui ne pourrait l’être avec l’exactitude qui doit accompagner notre travail. Au mois de mai 1789, les revenus de l’Etat, versés au Trésor public, étaient de 475 millions; les provinces payaient en outre 4 millions pour diverses dépenses du département de la guerre, et l’accessoire des impôts indirects que vous avez supprimés, coûtait, outre le prix du bail, en frais de garde, d’achat, de transport, de fret, et pour le bénéfice des fermiers, environ 18 millions. Nous ne. parlons pas de la subvention représentative de la corvée, qui alors, comme aujourd’hui, avait une destination spéciale dont elle n’était pas détournée, et qui n’entrait pas au Trésor public. La contribution des peuples était donc effectivement de 497 millions, sans y comprendre beaucoup d’autres surcharges, et sans y joindre le calcul des saisies, contraintes et vexations de tout genre. G’est de cette base simple et incontestable que nous partirons. Malgré l’immensité de cette charge trè3 inégalement distribuée entre le peuple et les ci-devant privilégiés, il s'en fallait de 56 millions que les revenus de l’Etat pussent suffire à l’acquittement des dépenses invariables. Dans une semblable position, il était difficile de songer aux moyens d’effectuer l’extinction d’une dette immense. Les engagements anciens étaient mal acquittés; les plus récents même étaient violés depuis 1788; et comment ne l’eussenl-ils pas été, lorsque tout l’art de la finance, et toute l’autorité d’un gouvernement auquel dès longtemps rien ne résistait, ne pouvaient arracher d’un peuple déjà si malheureux la somme nécessaire pour établir l’équilibre entre la recette fixe et la dépense prévue? ..... Les besoins extraordinaires qui se sont fait sentir si vivement depuis que vous êtes assemblés , les nouveaux emprunts qu’ils rendaient inévitables, ont encore augmenté la masse de vos engagements. Toujours fidèle à ses principes, l’Assemblée nationale n’en a pas moins décrété que la justice serait gratuite, et n’a pas été arrêtée dans une décision si importante, par la crainte d’une augmentation considérable dans la somme des intérêts de la dette publique; augmentation résultant de la différence entre le produit des offices de magistrature et l’intérêt qui sera dû après leur liquidadon. G’est dans cet état des choses que le comité des finances, voulant répondre à la confiance dont l’Assemblée nationale l’a honoré, s’est occupé constamment des moyens de faire disparaître le déficit par des économies, et d’opérer avec certitude l’extinctiop entière de la dette, en (1) Ce rapport est incomplet au Moniteur.