[Assemblée nationale. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |7 juillet 1791.] des bâtiments de la commune de Paris est admise à la barre. L'orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, i! Vous voyez devant vous les artistes composant le bureau des bâtiments de la commune de Paris; ils viennent, pleins du respect que l’on doit eux représentants d’un peuple libre, offrir à la patrie une contribuiion volontaire destinée à payer les braves défenseurs de nos frontières. <■ Vivre libres ou mourir, voilà le cri de tous les Français. Nous en avons tous faitle serment : nous venons le renouveler devant l’Assemblée nationale. La patrie est en danger: il faut que tous ses enfants se réunissent pour la défendre; il faut voler à la frontière pour s’opposer aux efforts que les despotes, ennemis de notre liberté, pouiraient tenter contreelle. Qu’ils tremblent, ces ennemis insensés ! ils apprendront, en recevant la mort, avec quelle énergie des Français combattent pour la liberté. « Pour nous, Messieurs, ne pouvant abandonner le poste où nous a placés la municipalité de Paris, nous continuerons à remplir nos fonctions et tous les devoirs qui y sont attachés ; nous défendrons ici nos foyers, nos femmes et nos enfants, avec le courage d’hommes libres. Mais cela ne suffit pas à notre patriotisme : nous voulons, sinon individuellement, du moins par tous les moyens qui sont à notre disposition, concourir à la défense commune. Eu conséquence, nous supplions l’Assemblée nationale de recevoir l’engagement, que nous contractons devant elle, de pourvoir, pendant un an, à l’entretien de dix de nos Pères d’armes qui se destinent volontairement à la défense des frontières, par une contribution volontaire de trois mille livres prélevée s sur nos appointements, qui nous sont accordés par la municipalité. « Puisse noire exemple être suivi par tous ceux que des circonstances particulières attachent à leurs foyers I Puisse également le léger sacrifice que nous faisons à la patrie, être auprès de l As-semblée nationale le gage de notre dévouement pour la défense de notre Constitution »! ( Applaudissements .) M. Ic President répond : « Messieurs, « Le goût et l’étude des arts élèvent l’âme, la rendent plus propre à sentir le prix de la liberté et à s’entlammer pour sa défense. On a remarqué dans notie Révolution que les artistes célèbres s’étaient presque tous distingués par leur patriotisme : la preuve d’attachement que vous donnez aujourd’hui à la patrie confirme cette observation, qui honore la profession des arts. L’Assemblée nationale reçoit avec satisfaction, et votre offrande, et vos liommages; elle vous invite à assister à sa séance ». (Applaudissements.) (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et de la réponse du président ainsi que leur insertion dans le procès-verbal.) Une députation du département de la Marne , du district et de la commune de Châlons, est admise à la barre. L'orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, « La nation triomphe pour la troisième fois de ses ennemis. Le roi, séduit par des conseils pervers, abandonnant ses serments, oubliant les sentiments de son cœur, si clairement exprimés au milieu de vous le 4 février 1790, fuyait son peuple; et devenu, sans le prévoir sans doute, le ministre de la vengeance des mécontents, il allait immoler la France entière à l’orgueil humilié et au fanatisme désespéré. « Rassurons-nous : un ange tutélaire a veillé au salut de l'Empire; l’être invisible, qui est présent aux conseils des rois, a vu les desseins des méchants et la trame des traîtres : il s’en est joué; il a posé le terme où leurs projets devaient échouer; il a marqué de son doigt le lieu de leur confusion. Le roi, au moment d’échapper à la nation, est arrêté dans sa fuite par les braves citoyens de Yarennes. Reconquis par le peuple français, il est rendu à la capitale; et ainsi se vérifie ce que nous avons dit en invitant un ancien prélat à l’obéissance : La régénération du royaume est trop marquée dans les desseins de la providence , pour oser tenter d'en contrarier le succès. « Oui, Messieurs, nous serons libres ; et la liberté, ce patrimoine que nous tenons de la nature, nous appartient aujourd’hui de nouveau par droit de conquête. Dans ce grand événement, qui agite maintenant le royaume, les Français montrent à l’Europe étonnée qu’ils sont dignes de cette liberté, puisqu’ils savent la défendre. Nous voudrions qu’il nous fût donné de vous peindre l’ardeur et l’intrépidité qui se sont manifestées pour la cause commune dans tous les cœurs français, à la nouvelle du péril qui, dans la fuite du roi, semblait menacer la chose publique. Un sentiment de courage et de force s’est exprimé à la fois dans toutes les parties de l’Empire. C’est dans ce moment que s’est vraiment déployée toute l’énergie d’un grand peuple pour le maintien d’une Constitution qui le rétablit dans sa dignité, et sur laquelle il fonde sa prospérité et son bonheur. « Achevez-la donc, Messieurs ; achevez-la, cette Constitution, pour laquelle vous avez été envoyés; achevez-la avec ce courage qui triomphe de tous les obstacles, avec cette intrépidité qui en déconcerte les ennemis, avec cette fierté qui les dédaigne. Plus les ennemis de la patrie feront d’efforts contre elle, plus ils connaîtront la force invincible d’une nation qui a repris sa souveraineté, et qui veut enfin user de sa puissance. « Dépositaire-des droits de la nation que vous représentez, que manquerait-il à vos pouvoirs pour assurer, dans la crise où vous êtes placés, une Constitution que tous veulent, et que tous ont juré de maintenir? Le nouvel ordre d’événe-rnents exige de nouveaux travaux, de nouvelles fatigues, et vous expose peut-être à de nouveaux dangers; mais c’est de la sagesse de vos con-eils, de la prudence de vos délibérations, et de cette fermeté constante qui a vaincu, bravé et surmonté toutes les difficultés, que le peuple français attend le complément de sa Constitution. Les circonstances peuvent bien la retarder, mais elles ne peuvent l’arrêter. La souveraineté de la nation serait imparfaite, serait nulle, s’il exi-tuit hors d’elle un maîire, tandis qu’elle n’en reconnaît d’autre que la loi. « Dignes de la confiance du peuple français, dont vous avez si bien mérité en travailla t à son bonheur, ce peuple, aujourd’hui vraiment grand par vos efforts, se repose entièrement sur votre zèle infatigable. Il verrait avec regret, avec inquiétude, se trop rapprocher le moment de votre 33 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juillet 1791 -j séparation; terme auquel les ennemis de la patrie paraissent avoir fondé leurs folles e-pérances, et placé leurs tentatives pour le renversement de notre liberté. « Après avoir assuré la tranquillité et l’ordre public dans toutes les parties par vos décrets préparatoires des 21 et 24 juin, dont la sagesse, la modération et la prévoyance ont emporté l’assentiment général, il vous reste à répondre au vœu des citoyens, que nous vous portons pour ceux de notre département ; c’est de prolonger votre session autant qu’il sera nécessaire pour que vous puissiez remplir la promesse que vous avez faite de remettre à la première législature le dépôt complet de la liberté publique et de la Constitution. « En ce qui nous concerne, Messieurs, fidèles au serment que nous avons fait, vous pouvez compter sur notre zèle dans l’exécution parfaite de vos décrets. Nous vous regardons comme le centre d’autorité où, graduellement, doivent répondre en ce moment tous les pouvoirs subordonnés : nous ne souffrirons point que la partie de l’Empire confiée à notre surveillance, soit ébranlée par l’inactivité de l’administration. Prenant pour modèle votre iidélité, votre courage et votre patriotisme, qui n’a en vue que le bonheur commun, nous croyons avoir rempli et exécuté, dans le grand événement qui s’est passé en partie dans ce département, tout ce qu’une sage prévoyance et le véritable amour de la patrie indiquaient pour le salut de l’Etat ; e1, jaloux de remplir vos intentions manifestées, de prévenir le seul danger réel qui nous menace maintenant, nous nous appliquerons, sous yos ordres, à arrêter les malh urs qui suivraient de l’anarchie, en unissant nos efforts pour empêcher les agitations sans mesure, et F s violences que produit souvent l’excès du patriotisme, comme l’instigation de nos ennemis; pour assurer le payement des contributions, et la libre circulation des subsistances; et enfin, pour maintenir la sûreté des personnes et de toutes les propriétés. ( Applaudissements .) « Nous sommes avec respect, vos très humbles et très obéissants serviteurs, les administrateurs du directoire du département de la Marne. Signé : Jeannel, A.-L. Grosjean, Vallin, de Branges, Roze, Choiset, secrétaire général. M. le Président répond : « Messieurs, l’Assemblée nationale a reçu à la fois, de toutes les parties de l’Empire, les mêmes témoignages de patriotisme, de courage et d’immortel attachement à la Constitution. S'il restait des incrédules, s’jI y avait encore des Français assez aveugles pour douter de l’établissement de la Constitution, ou assez erimineds pour conserver l’espoir de la renverser, cette heureuse unanimité a du éclairer les uns et faire le désespoir des autres. « L’Assemblée nationale n’a jamais douté de la confiance de la nation, parce qu’elle était sûre de sa justice; et si elle désire ardemment la fin de ses travaux, c’est que la fin de la Constitution doit être l’heorcuse époque où les progrès de la prospérité nationale deviendront plus rapides et plus sensibles. « L’Assemblée reçoit vos serments; elle vous assure de son estime et de sa satisfaction, et vous invite à assister à sa séance. » ( Applaudissements. ) (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et de la réponse du président, ainsi que leur insertion dans le procès-Yerbal.) Série. T. XXVIII. M. Populus fait lecture d’une alresse de la société des amis de la Constitution de Bourg, département de l’Ain, dans laquelle l’Assemblée remarque avec satisfaction des traits multipliés d’énergie, de dévouement et d’attachement à la Constitution. M. le Président fait lecture d’une soumission de quinze jeunes citoyens formant la société logographique , qui s’engagent à en retenir deux gardes nationaux sur les frontières, en offrant un assignat de 60 livres, qui est remis sur le bureau, promettant de prélever sur le produit de leur travail, et de payer chaque mois pareille somme jusqu’au jour où les ennemis de la patrie, i n tirnidés ou abattus, laisseront les Français jouir paisiblement du bonheur d’une Constitution libre. M. Prieur. Je demande que l’Assemblée nationale reçoive avec satisfaction l’offre de ces jeunes patriotes. ( Applaudissements .) M. le Président fait lecture d’une lettre de M. Lepage , arquebusier , et soldat citoyen, rue de Richelieu, qui ne pouvant personnellement se transporter à la défense des frontières, vu son état de père de famille, offre en don pratriotique pour les frais des gardes nationales auxiliaires, la somme de 150 livres par année de guerre à compter du 1er juillet, présent mois. Un de MM. les secrétaires donne lecture d 'une soumission de M. Eus tache, homme de loi, et juge de paix du canton de Trévoux , faite au département de l’Ain, de céder 5 mois échus de son traitement, pour contribuer à la solde des gardes nationaux de son département. Un de 31M. les secrétaires donne lecture, tant par extrait qu’en totalité, des adresses suivantes; Adresses des administrateurs composant les directoires du département du Gers , du département de la Charente, du département du Lot, du département de l'Ardèche , du département du Finistère, du département de la Côte-d'Or, du département du Tarn, du département des Pyrénées-Orientales , du département de la Corrèze, du département du Nord , du déparlement de Saône-et-Loire , du département de la Creuse, du département de l'Aude , du département des Basses-Alpes, du département de VAriège , du département de la Haute-Garonne, du département de la Vienne, des électeurs du département du Jura , qui expriment avec énergie les sentiments d’admiration, de reconnaissance et de dévouement dont ils sont pénétrés envers l’Assemblée na'ionale. Ils annoncent que la nouvelle de l’évasion du roi n’a fait que réveiller le patriotisme dans l’esprit des peuples ; que la tranquillité publique n’a pas été troublée; que tous s’empressent ue jurer de défendre, jnsiu’à leur dernier soupir, les décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés ou non sanctionnés. Adresses du même genre, des districts d’ Avran-ches, de Casielnaudary , de Faulquemont , de Lou-hans, de Vendôme, de Saint-Denis, de Louviers, de Sarrebourg, de Bar-sur-Seine , de Bar-sur - Aube, de Vierzon, de Nîmes, d'Uze relie, de Mezenc , de Lisieux, de Roanne , de Verneuil, de Guin-guamp, de Mette et de Tarascon. La plupart des administrateurs de districts sont réunis, dans leurs adresses, avec les juges des 3