118 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE prochoient de plus près la source d’où découloit pour eux la pluie d’or qui étoit la sueur et le sang du peuple. Je dirai donc à leur égard : 1° que leur situation n’est pas à beaucoup près aussi intéressante qu’elle pourroit le paraître au premier coup d’œil. Ce sont les premiers vampires du trésor public. Sans eux, nous eussions eu moins de fortunes à soutenir, à rétablir, moins de faveurs sollicitées, et par conséquent, moins de faveurs accordées. 2° Les créanciers de Godefroi-Charles-Henri ne sauroient mériter la plus légère considération. Ceux que son père lui a laissés n’ont jamais pu concevoir aucun espoir de recours sur son brevet de retenue; car vous n’aurez pas perdu de vue qu’il lui fut accordé pour lui faciliter des emprunts. Ce brevet ne fut qu’une simple lettre de crédit, lettre que les prêteurs ont pu et dû se faire représenter, lettre qui n’a pu lier le gouvernement envers eux, et qui ne leur a jamais offert ni privilège, ni hypothèque. 3° Les créanciers personnels de Godefroi-Charles-Henri ne sont pas dans une position plus favorable : ils n’étoufferont jamais le principe que la cause précéda toujours et accompagne nécessairement l’effet; et cependant ici ils voudraient supposer l’effet avant la cause, car vous vous souviendrez sans doute que, dès le mois d’octobre 1775, Godefroi-Charles-Henri avoit affecté à ses créanciers son brevet qu’il n’obtint qu’en 1786. Mais à qui s’est-on flatté de persuader que ces hommes toujours avides, ayent assis leur fortune sur une faveur abusive, sur une faveur non existante, sur une faveur éloignée, sur une faveur incertaine ? Quel homme aurait pu mettre quelque confiance, et quel homme pourroit conserver quelque respect pour une hypothèque sans objet, ou dont l’objet étoit immoral ? Vous connoissez maintenant, citoyens, l’avis de votre comité. Voici le projet de décret qu’il m’a chargé de vous proposer (1) : Un autre membre [BORDAS] se présente au nom du comité de liquidation; et, sur son rapport, la Convention nationale décrète ce qui suit : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de liquidation sur la demande de 300 000 liv. portées au brevet de retenue accordé, le 9 novembre 1736, à Godefroy-Charles-Henri de Bouillon, dit prince de Turenne, Décrète qu’il n’y a pas lieu à remboursement ni indemnité. Le présent décret ne sera pas imprimé; ils sera inséré au bulletin (2). (1) C 311, pl. 1229, p. 22. (2) P.V. , XLIII, 239. Rapport de Bordas. Décret n° 10 147. J. Mont., n° 108; J.S. -Culottes , n° 548; Débats, n° 694, 490; J. Perlet, n° 693; J. Fr. , n° 690; Ann. R. F. , n° 256; Audit, nat. , n° 691. 54 Un membre [SALLENGROS}, au nom du comité des secours publics, fait 3 rapports, à la suite desquels la Convention nationale rend successivement les décrets suivans : La Convention nationale, après avoir entendu son comité des secours publics sur la pétition de la citoyenne Marie Gielken, veuve du citoyen Michel Hainly, ci-devant sergent-major du 2 e bataillon du 77 e régiment d’infanterie mort au service de la patrie après 22 ans de service, Décrète que la trésorerie nationale fera passer, sans délai, au conseil général de la commune de Belfort la somme de 500 liv., secours provisoire qu’il demeure chargé de remettre à la citoyenne veuve Hainly, ci-devant sergent-major du 2 e bataillon du 77 e régiment d’infanterie; Renvoie la pétition et les pièces y jointes au comité de liquidation, pour déterminer les secours et la pension auxquels cette veuve et son enfant peuvent avoir droit (1). 55 La Convention nationale, après avoir entendu [SALLENGROS, au nom de] son comité des secours publics, Décrète que la trésorerie nationale fera passer, sans délai, à l’agent national du district de Grasse, département du Var, la somme de 600 liv. de secours provisoire qu’il demeure chargé de remettre à la citoyenne Madeleine Brunet, domiciliée dans la commune de Grasse, veuve Léonard Villevalleix, mort capitaine au 51 e régiment d’infanterie, par suite des fatigues qu’il a supportées pendant 24 ans ou environ de service militaire; Renvoie la pétition de la citoyenne Villevalleix, avec les pièces y jointes, au comité de liquidation pour déterminer la pension à laquelle elle peut avoir droit (2). 56 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [SALLENGROS au nom de] son comité des secours publics sur la pétition du citoyen Hippolyte Bergue, âgé de 25 ans, né à Maubeuge, ci-devant brigadier au 2 e régiment de chasseurs à cheval, à l’appui de laquelle il joint un certificat des officiers de santé en chef des hôpitaux ambulans et hospices militaires de Dole, un (1) P.V., XLIII, 239-240. Rapport de Sallengros. Décret n° 10 409. M.U., XLII, 478. (2) P.V., XLIII, 240. Rapport de Sallengros. Décret n° 10 408. SÉANCE DU 28 THERMIDOR AN II (15 AOÛT 1794) - N08 57-60 119 autre certificat du conseil d’administration du régiment, et son congé absolu, en date du 10 germinal dernier, visés par le commissaire des guerres, qui attestent que, depuis le 10 mai 1786 jusqu’au 10 germinal, il s’est toujours conduit avec honneur et probité et qu’il n’a cessé de -donner des preuves d’une bravoure exemplaire et du civisme le plus épuré; que son congé lui a été délivré parce qu’il est hors d’état de continuer son service, à cause d’un coup de sabre qu’il a reçu, le 6 frimaire dernier, dans une charge que le régiment a faite à Nendoff contre les cuirassiers hongrois, qui lui a coupé la plus grande partie des tendons des doigts de la main droite à leur passage près le ligament annulaire, et le mouvement du poignet étant perdu : Décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera au citoyen Hippolyte Bergue la somme de 400 liv. de secours provisoire; renvoie la pétition de ce brave militaire, avec les 3 pièces y jointes, au comité de liquidation pour déterminer les secours et la pension auxquels il a droit par les bons services qu’il a rendus à la patrie (1). 57 La Convention nationale, sur la proposition d’un membre [LE COINTRE (de Versailles)], renvoie la demande des militaires détenus dans les prisons d’Arras, et depuis transférés dans celles d’Ypres, à la commission chargée du mouvement des troupes de terre, pour faire exécuter le décret du 18 messidor qui ordonnoit leur prompte mise en jugement devant le tribunal militaire d’Arras (2). 58 Sur l’observation d’un membre [LE COINTRE (de Versailles)]que les représen-tans du peuple Bourdon (de l’Oise), Charles Duval, Audouin, surchargés d’occupations, et Perrin, actuellement en mission, ne peuvent se livrer aux travaux de la commission chargée de la levée des scellés apposés sur les papiers des conspirateurs et de leurs complices, la Convention nationale, sur la proposition du bureau, nomme, pour les remplacer, les représentans du peuple Legaux [sic pour Legot], Le Tourneur (de la (1) P.V., XLIII, 240-241. Rapport de Sallengros. Décret n° 10 407. Moniteur (réimpr.), XXI, 498-499; Débats, n° 694, 490-491; M.U., XLII, 477-478. (2) P.V., XLIII, 241. Rapport de Le Cointre (de Versailles). Décret n° 10 415. Moniteur (réimpr.), XXI, 498; Débats, n° 694, 491. M.U., XLII, 476. Sart[h]e), Espert (de l’Ariège) et Izès [sic pour Dyzez] (1). 59 La société populaire de Machecoul (2) écrit à la Convention nationale : « Encore une fois vous avez sauvé la République ! Recevez l’hommage de notre reconnois-sance; elle est celle d’hommes libres, dont les cœurs sont [sic pour sententjle prix de vos travaux, et n’exprime[nt] que la vérité ». Mention honorable, insertion au bulletin (3). [La sté républicaine et montagnarde de Machecoul, à la Conv.; Machecoul, 20 therm. II] (4) Citoyens représentants, Encore une fois vous avez sauvé la patrie. Recevez l’hommage de notre reconnoissance. Elle est celle d’hommes libres dont le cœur sent le prix de vos travaux et n’exprime que la vérité. Continuez, par votre énergie et votre attitude majestueuse, à terrasser touts les ennemis de la République. Nous attendons de vous la destruction prochaine des brigands qui souillent encore le territoire de la Vendée. Il exista toujours un pacte d’alliance entre les brigands, les intrigants et les traîtres. Lorsque ceux-ci ont expié leurs forfaits, les autres doivent promptement disparoître du sol de la liberté. Tardiveau ( présid .), Musset ( secrét .) et une 3e signature (de secrétaire) illisible. 60 Le PRÉSIDENT : Le comité de salut public me prévient qu’il attend les ordres de la Convention pour l’introduction du ministre plénipotentiaire des Etats-Unis de l’Amérique. La Convention décrète son admission (5). Avant qu’il ne paroisse, LEQUINIO observe que c’est le représentant d’un peuple libre; qu’il ne peut être mieux placé qu’au milieu des représentans d’un autre peuple libre et qu’il ne doit point avoir de place marquée. (1) P.V., XLIII, 241. Rapport anonyme, selon C* II 20, p. 254. Décret n° 10 410. M.U., XLII, 461; J. Sablier, n° 1502; Moniteur (réimpr.), XXI, 498; Débats, n°694, 491; J. Fr., n° 690; J. Mont., n° 108; Ann. R.F., n° 256; J. Perlet, n° 692; J. S. -Culotte s, n°547; Gazette frise , n° 958; F. de la Républ., n° 407. (2) Loire-Inférieure. (3) P.V., XLIII, 241-242. (4) C 316, pl. 1267, p. 30. (5) Moniteur (réimpr.), XXI, 499.