746 [Assemblée nationaie.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [o juillet 1791.1 qui vous est proposé, on pourrait dire que l'amende sera du tiers ou delà moitié de la contribution mobilière, en disait qu’elle ne pourra jamais être au dessous de 50 livres. Ou bien, on pourrait prendre encore une autre base, celle des patentes, en fixant le minimum toujours à 50 livres. M. Heurtault-Kiamerville. Vous ne pouvez avoir trop de sévérité, par exemple, sur les frontières; il faudrait y doubler l’amende. M. Fe Pelletier-Saint Fargeau. Je crois qu’il,serait très injuste d’appliquer la même peine à un aubergiste qui, placé dans une grande ville, Lut peut être un commerce de 100,000 livres par année, et à un malheureux aubergiste qui, dans nos campagnes, ne fait pas pour 80 ou 100 pis-tôles de commerce par an. Ainsi, ne pouvant pas prendre une mesure tixe, il faut que nous prenions une mesure correspondant avec la nature du commerce de l'aubergiste. Quelle est cette mesure, cette proportion? C’est la quotité de son droit de pa'ente. Je demande donc que l’amende soit du quart de la patente, en cas de contravention et que le minimum soit de 12 livres, parce que dans les campagnes il me paraît qu’on ne peut pas la porter plus haut. (Applaudissements.) ; M. Bouche. Quant aux places frontières, nous connaissons le danger qu’il y a à n’être pas rigoureux sur la partie dont il s’agit. J’appuie infiniment l’amendement fait par M. de Lamerville, et je ne crois pas qu’en l’adoptant on puisse trouver dans cette loi rien de trop rigoureux. Mille exemples doivent nous porter à être extrêmement circonspects, je le répète, surtout pour les villes frontières du royaume; c’est là que les mauvais sujets vont se retirer. Ils arrivent chez un câbaretier de campagne et ils lui disent: Tenez, voilà un louis, deux louis ; logez-moi, laissez-moi passer. Si vous décrétez l’amendement du préopinant, voici l'inconvénient qui en résultera, c’est que l’aubergiste serait tenté de faire la fraude par la modicité de l’amende que vous auriez décrétée et par l’argent que Je mauvais sujet lui aurait donné. Ainsi je demande que l’amende soit fixée à 25 francs pour les campagnes et à 50 pour les villes. M. Boutteville-Dumetz . Je demande la priorité de l’amendement de M. Le Pelletier. (L’Assemblée accorde la priorité à l’amendement de M.LePelleiier-Saiut-Fargeau, lequel est ensuite mis aux voix et adopté.) En conséquence, l’article est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 6. « Faute de se conformer aux dispositions du précédent article, ils seront condamnés à une amende du quart de leur droit de patente, sans que celte amende puisse être au-dessous de 12 livres, et ils demeureront responsables des désordres et délits commis par ceux qui logeront dans leurs maisons. » (Adopté.) M. Démeunter, rapporteur , donne lecture de l’article 7, ainsi conçu ; « Les propriétaires ou principaux locataires des maisons et appartements où le public serait admis à jouer des jeux de hasard seront, s’ils demeurent dans ces maisons et s’ils n’ont pal averti la police, condamnés pour la première fois à 300 livres et pour la seconde à 1,000 livres d’amende, solidairement avec ceux qui occuperont les appartements employés à cet mage. » M. Marti u. Je demande que l’amende soit portée à 1,000 livres pour la première fois, et 2,000 pour la seconde. Je demande même que les municipalités soient responsables de cette infraction aux lois et aux bonnes mœurs, car il y a au Palais-Royal des parties de jeu très coupables que la municipalité ne réforme pas. M. Chabroud. 11 me paraît, par cet article, que l’on inflige une p ine aux principaux locataires qui pourraient bien être irrépréhen ibles; mais il est possible que, dans ma maison, pour peu qu’elle soit vaste, on joue des jeux de hasard loin de l’appartement où je suis, sans que j’en sois instruit. Alors il est évident que je ne puis pas avertir la police, et il est encore plus évident que je ne dois pas être puni. Il est évident au-si qu’un principal locataire, après avoir passé bail à un citoyen, doit le laisser tranquille chez lui. D’après cela, le principal locataire n’ayant aucun moyen de s’assurer précisément si l’on joue ou non, il me parait de toute injustieequ’onie condamne à une pareil le amende. Je demande donc que M. le rapporteur supprime cet article. M. Boutteville-Dumetz. Je crois qu’on lèvera toutes les difficultés en ajoutant ces mots : où le public est librement admis. : M. Démeunier, rapporteur. Si vous voulez que la municipalité de Paris soit responsable, donnez-lui une loi sévère; mais il n’est pas possible de mettre le mot librement; car vous devez savoir que, dans ces mai-ons de jeux qui causent tant de ravages dans la capitale, le public n’y est pas admis librement. Ainsi vous détruiriez l’effet de l’article si vous y mettiez ce mot. Quant aux inquiétudes que l’on pourrait concevoir des recherches à faire dans les maisons pour des citoyens qui jouent chez eux avec leurs amis des"jeux de hasard, Messieurs, la législation ne doit pas se mêler de ce qui se passe dans l’intérieur des familles. On peut se permettre d’y jouer des jeux de hasard ; mais le public ne doit pas y être admis, et on ne doit pas craindre que les municipalités aillent chercher dans les maisons, lorsque ce n’est pas le public où les affiliés qui y sont admis. Quant à ce qu’a dit M. Chabroud, qu’il était impossible de condamner un propriétaire ou un locataire parce qu’il ne saurait pas si on donne à jouer au public, Messieurs, il est impossible qu’on ne s’aperçoive pas d’un rendez-vous habituel fréquenté par un grand nombre de personnes. Il y a sur ce point une notoriété publique. Je conclus à ce que l’article soit adopté ; ou pourrait toutefois placer en tête une disposition générale et prohibitive sous les peines qui seront désignées. Voici quel serait l’article : Art. 7. « Les jeux de hasard où l’on admet, soit le public, soit les affiliés, sont défendus sous les peines qui seront désignées plus bas : les propriétaires ou principaux locataires des maisons [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 juillet 1791.] et appartements où le public serait admis à jouer des jeux de hasard seront, s’ils demeurent dans ces maisons et s’ils n’ont point averti la police, condamnés pour la première fois à 300 livres, et pour la seconde à 1,000 livres d’amende, solidairement avec ceux qui occuperont les appartements employés à cet usage. » {Adopté.) M. Démennier, rapporteur , donne lecture de l’article 8, ainsi conçu : « Il en sera de même à l’égard des propriétaires ou principaux locataires des maisons ou appartements abandonnés notoirement à la débauche, s'il y arrive des rixes, batteries ou violences. » M. Garai aîné. Je demande à proposer un article additionnel. Il n’est peut-être aucun membre de cette Assemblée qui n’ait été arrêté au Palais-Royal par des proxénètes établies au devant des portes pour achalander ces maisons de joie. Ils vous disent que c’est une charmante société bourgeoise où l’on joue. Voilà comment ils vous arrêtent. Je voudrais, Messieurs, qu’il y ait un article exprès contre ces infâmes courtiers. M. Démeunier , rapporteur. La proposition du préopinant me paraît juste, mais elle demande uelque soin dans la rédaction: ce serait dans le ode. do la police correctionnelle que nous pourrions placer cet aiticle, et j’en demande le renvoi au comité. Il n’est ni dans l’intention du comité ni dans celui de l’Assemblée, d’autoriser les lieux adonnés à la débauche. Nous avons vu que dans toutes les ordonnances, même dans celles de saint Louis, nou seulement on en parlait, mais que souvent on les autorisait en y mettant un impôt. Il nous a paru que l’ordre public était intéressé à une surveillance particulière de ces maisons; que si la loi ne pouvait ni les autoriser ni les tolérer, il était convenable d’assurer des moyens pour prévenir les rixes, les batteries ou les désordres qui pouvaient y avoir lieu. Ce sont ces motifs qui nous ont déterminés, conformément à toutes les ordonnances, même à celles de saint Louis, à en parler dans le code de la police municipale. Nous avons cherché longtemps des expressions qui ne semblassent ni autoriser ni tolérer, et nous n’avons pu trouver rien de mieux que celles qui sont présentées dans l’article. M. Pétion de Villeneuve. Votre comité vient de vous exposer l’embarras dans lequel il s’était trouvé lors de la rédaction de l’article 8. Il n’est personne qui ne s’en soit aperçu en le lisant, et qui n’ait vu que la loi, en quelque sorte, ne devait ni indiquer ni reconnaît! e de semblables maisons. C’est pourquoi je crois qu’il serait couve-nable et digne de l’Assemblée de retrancher absolument cet article. M. Moreau. Et moi je demande que l’article soit maintenu. Nous sommes d’autant plus délicats sur les expressions que nous sommes plus corrompus, il faut le dire. Tout le monde sait à quel point les mœurs sont corrompues dans les grandes villes; combien il est intéressant d’empêcher que cetie corrupiion augmente... Je ne vois pas quel inconvénient peut avoir l’article de votre comité. lime paraîtau contraireinfiniment sage, le comité en a senti la nécessité. 11 serait scandaleux de retrancher un tel article. 747 Je demande seulement qu’on retranche les derniers mots depuis : il y a des rixes. Cela est inutile à mettre. Il suffit, comme le suppose l’article, qu’il se commette débauche notoire dans une maison pour que le principal propriétaire qui l’habite soit tenu d’en avertir la police. M. Démeunier, rapporteur. Le comité n’a jamais eu d’autre intention que de placer ces maisons sous une surveillance particulière, et comme il faut, dans le régime de la loi, de grandes précautions, et déterminer avec précision le cas où l’on pourra pénétrer dans les maisons des citoyens quels qu’ils soient, il me semble que si vous adoptez l’article 10 ci-après , vous aurez rempli même les vues du préopinant qui demande la conservation de l’article, et qn’ensuite vous aurez pourvu à ce qu’exige une bonne police. Je crois donc que nous pouvons passer aux 5 articles suivants qui déterminent les cas où les officiers de police pourront entrer dans les maisons des citoyens. Dans l’article 10 on fera mention de ces maison�, et alors vous aurez rempli toute l’intention du préopinant. (L’Assemblée décrète le retranchement de l’article 8 du projet de décret.) M. Démeunier, rapporteur , donne lecture de l'article suivant : Art. 8 {art. 9 du projet). « Nul officier municipal, commissaire ou officier de police municipale ne pourra entrer dans les maisons des citoyens, si ce n’est pour la confection des états ordonnés par les articles 1, 2 et 3, et la vériticution des registres des logeurs, pour l’exécution des lois sur les contributions directes, Ou en vertu des ordonnances, contraintes et jugements dontils seront porteurs, ou enfin sur le cri des citoyens, invoquant de l’intérieur d’une maison le secours de la force publique. » {Adopté.) M. Démeunier, rapporteur. Voici, pour l’article suivant (art. 10 du projet de décret), notre nouvelle rédaction : « A l’égard des lieux où tout le monde est admis indistinctement, tels que les cafés, cabarets, boutiques, les officiers de police pourront toujours y entrer, soit pour prendre connaissance des contraventions aux règlements, soit pour vérifier les poids et mesures, le titre des matières d’or et d’argent, la salubrité des comestibles et médicaments. Us pourront aussi entrer dans les maisons où l’on donne habituellement à jouer des jeux de hasard, mais seulement sur la désignation qui leur en aurait été donnée par deux citoyens domiciliés. Ils pourront entrer également dans les lieux notoirement livrés à la débauche ; on ne pourra entrer dans les boutiques et magasins que dans le jour. » M. Robespierre. Messieurs, il faut qu’un citoyen soit prévenu d’un délit pour qu’on puisse rendre sa condition pire que celle des autres citoyens, et surtout pour que l’on puisse entrer arbitrairement dans sa propre maison et violer le secret de ses affaires. {Murmures.) Je sais qu’il existe un préjugé contraire, et cela doit être, puisque tel était l’ancien usage et l’esprit de l’ancienne police. Mais, Messieurs, il vous appartient d’examiner si la sûreté publique exige la violation arbitraire et très dangereuse de