600 [Assemblée nationale.] Bien entendu que ladite augmentation n’aura lieu qu’au profit des procureurs qui procéderont contre plusieurs parties. Art. 5. Il sera pareillement dû un demi-droit de plus à chacun des procureurs, pour chaque tiers dont la mise en cause serait ordonnée, pour chaque intervenant volontaire, pour une enquête, descente de lieux, rapport d’experts ; et généralement dans tous les cas où l’instruction sortirait d’une simple discussion entre les parties principales, et nécessiterait comme ci-dessus l’intervention de tiers, témoins ou experts. Art. 6. Mais il ne sera dû que le quart des droit et demi-droit ci-dessus, lorsqu’il n’aura été rendu qu’un jugement par défaut faute de comparoir; et moitié lorsqu'il y aura eu contestation en cause ou instruction contradictoire commencée, jusqu’au jugement définitif contradictoire, ou par défaut sur débouté d’opposition, exclusivement ; en conséquence, le jugementdéfinitif pourra seul donner ouverture à la totalité des droits. Art. 8. Quand les parties transigeront avant le jugement définitif, il sera alloué les trois quarts desdits droit et demi-droit aux procureurs qui auront concouru à la conciliation, et qui auront signé la transaction comme conseils des parties. Chapitre IV. De l'obligation des parties pour le 'payement des frais. Art. 1er. Les procureurs auront action pour le payement de leurs déboursés, honoraires et vacations, tant contre les parties qui les auront mis en œuvre, que contre celles qui seront condamnées aux dépens, jusqu’à concurrence de ladite condamnation, sans qu’il soit besoin de faire prononcer aucune distraction au profit desdits procureurs. Art. 2. Mais dans le cas où le défendeur aurait été déchargé de partie de la demande, son procureur ne pourra répéter contre lui que les frais proportionnés à la somme ou valeur des condamnations principales, ensemble la totalité de ses déboursés, sauf au procureur à poursuivre le demandeur qui aurait été condamné au surplus des frais. Art. 3. Quand le défendeur aura été entièrement déchargé de la demande, il aura la faculté de se libérer envers son procureur, ou sur le pied du tarif, ou sur le pied de la fixation déterminée par la somme en valeur de l’objet de la demande, sauf, au premier cas, les droits du procureur contre le demandeur condamné aux dépens, pour raison du surplus des frais. Art. 4. Les dispositions portées aux deux articles précédents auront lieu dans les cas mêmes où le défendeur aurait fait ou accepté l’évaluation de l’objet litigieux. Art. 5. En matière d’exécutions et poursuites mobilières et immobilières, les procureurs des créanciers et même du poursuivant n’auront d’action contre leurs parties que pour raison des vacations et honoraires qui leur seront dus sur le pied des créances de leurs parties seulement, et pour la totalité de leurs déboursés, sauf l’action desdits procureurs, pour le surplus de leurs droits, contre la partie saisie et sur la masse. Art. 6. Les procureurs auront hypothèque sur les immeubles des parties, pour raison de leur s honoraires, vacations et déboursés, à compter de la date des demandes introductives des instances [13 octobre 1790.] ou poursuites sur lesquelles ils auront occupé. Et ilsseront privilégiés sur les créances ou objets qu’ils auront fait recouvrer, en matière d’actions directes, et sur la masse active, en matière de poursuites et opérations. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. MERLIN. Séance du mercredi 13 octobre 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. fiuiïlaume fait lecture de différentes pièces envoyées à V Assemblée nationale par V assemblée provinciale de la partie nord de Saint-Domingue. La première est une adresse de cette assemblée provinciale, qui rend un compte rapide des événements et des fautes de l’assemblée générale de Saint-Marc, qui ont nécessité et amené sa dissolution par la réunion et le concours de tous les bons citoyens et de tous les vrais Français, constamment attachés à leur mère-patrie. L’assemblée provinciale du nord dit qu’à une obéissance coupable aux décrets inconstitutionnels de l’assemblée de Saint-Marc, elle a préférée hautement une périlleuse déférence aux sages décrets de l’Assemblée nationale; elle se flatte que sa confiance ne sera pas trahie, et sollicite l’approbation et les soins de l’Assemblée nationale, pour rétablir le calme dans la colonie. A cette pièce est joint : un extrait des registres des délibérations de la même assemblée provinciale du Nord, contenant un discours patriotique du président; Une lettre de la même assemblée aux citoyens du Port-au-Prince; Une délibération de la paroisse de l’Anse-à-Veau, contre l’assemblée générale de Saint-Marc; Et une délibération pareille de la province de l’Arcahaye. L’Assemblée décrète l’impression de l’adresse de l’assemblée provinciale du Nord, ainsi que de la lettre de la même assemblée à MM. les citoyens des districts du Port-au-Prince. Voici le texte de ces deux* documents : ADRESSE DES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE PROVINCIALE DU NORD DE SAINT-DOMINGUE A L’ASSEM-BLÉE NATIONALE. Messieurs, la colonie de Saint-Domingue s’écroulait sur elle-même ; la plus belle des possessions françaises d’oulre-mer enlevée à la mère-patrie; nous étions à la veille de perdre le glorieux titre de Français. La nouvelle du monstrueux décret par leque l’assemblée coloniale licencie les troupes de ligne, a alarmé, a révolté tous les patriotes. L’indignation de l’assemblée provinciale du Nord a éclaté/et après avoir renouvelé son serment de soumission à vos décrets des 8 et 28 mars, elle a réuni tout ce qui lui restait d’éuergie, de courage et de force, pour arrêter l’assemblée colo-(I) Le Moniteur ne donne qu’un sommaire de cette séance. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 octobre 1790.] 601 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. niale dans sa marche rapide, dans ses coupables projets d’indépendance. Vous êtes instruits, Messieurs, jusqu’à l’époque de notre arrêté du 30 juillet qui vous a porté notre lettre du 2 août. Vous savez, qu’effrayés par les actes de souveraineté qui émanaient de rassemblée inconstitutionnelle de Saint-Marc, les colons français delà province du Nord envoyèrent des commissaires au Port-au-Prince pour requérir le secours des forces dont le général dispose, et l’assistance des colons de la province de l’Ouest, à l’effet de dissoudre une assemblée dont les manœuvres et le succès nous avaient mis dans la nécessité la plus indispensable d’opposer une ferme résistance. Nous levâmes en même temps un corps de troupes patriotiques soutenues par des troupes réglées; pendant que nous faisions ces préparatifs exigés impérieusement par les circonstances, l'assemblée de Saint-Marc continuait ses perfides manœuvres. Le vaisseau du roi, le Léopard, était révolté et sous les ordres de ses séducteurs; il protégeait leurs opérations commandé par un lieutenant fait capitaine. Les membres du comité du Port-au-Prince, entièrement dévoués à cette assemblée, autorisaient, présidaient même des attroupements de gens armés que le gouverneur général crut devoir dissiper pour assurer la tranquillité publique. Nous nous abstiendrons d’entrer dans des détails dont il doit avoir rendu compte à l’Assemblée nationale. Cependant nos détachements s’avançaient vers les Gonaïves sous les ordres de M. ne Vincent, maréchal de camp, appelé par le vœu unanime de tous ses concitoyens au commandement de nos généreux défenseurs. Arrivé aux Gonaïves, il reçut une députation de la ville de Saint-Marc, qui annonçait ses craintes. Le commandant crut les dissiper par sa réponse qui accordait à l’assemblée un délai de dix-huit heures pour se dissoudre, et promettait garantie pour la sûreté individuelle de chaque membre qui se retirerait chez lui. Après de longs débats, cette assemblée a quitté le lieu de ses séances, et s’est retirée à bord du vaisseau le Léopard, qu’ils avaient qualifié du Sauveur de la colonie, ci-devant vaisseau du roi. On pense qu’ils dirigent leur route vers la France, et qu’ils se disposent à nous y peindre commedes ennemis de la régénération. Nous osons espérer que leurs mensonges ne séduiront personne. En cet état de choses, rassemblée provinciale du Nord rappelle ses forces, elle va se reconstituer assemblée administrative, rassemble tous ses travaux depuis l’arrivée, dans la colonie, de votre décret du 8 mars, époque de sa division avec l’assemblée de Saint-Marc, et vous jugerez. Notre conduite franche et loyale, notre attachement inviolable à la mère-patrie, notre confiance en vous, voilà ce qui caractérise toutes nos opérations. Nous publions hautement que nous voulons vivre et mourir Français; l’assemblée coloniale exprime le même vœu; vous verrez laquelle des deux assemblées a le mieux prouvé ses sentiments par ses actions. Nous ne craignons pas que vous vous laissiez abuser par la troupe nombreuse qui conduit dans vos ports un vaisseau révolté, traînant à sa suite de lâches déserteurs, escortés par une foule de vagabonds qu’elle avait ramassés dans tous les coins de là colonie, et qu’elle soudoyait pour y entretenir l’épouvante et l’effroi; tout ce qui l’entoure dépose contre elle. Cette assemblée avait cependant trouvé le moyen de séduire une partie de nos frères colons, par le masque du patriotisme dont elle savait couvrir sa coupable ambition. Elle disait : Nous sommes Français, nous chérissons la patrie, et on la croyait, tandis que toutes ses opérations concouraient à consommer la ruine de la France. Elle s’apprête sans doute à tenir devant vous le même langage; mais son langage ne vous en imposera pas. C’est en développant, aux yeux de la nation, les principes invariables de la province du Nord, que vous pourrez prononcer sur cette importante discussion. Notre adresse ultérieure vous portera toutes les pièces nécessaires pour jeter le plus grand jour dans cette affaire, la province paraît désirer de charger des commissaires de cette mission très importante; l’exécution de ce projet est soumis au retour de nos commissaires auprès du gouverneur général et de nos concitoyens employés à l’expédition. Il est douloureux, sans doute, pour nous, Messieurs, de vous affliger par le récit d’objets aussi tristes ; mais encore faut-il que vous sachiez tout, faut-il que nous ne vous cachions rien. Vos décrets des 8 et28 mars nous sont parvenus trop tard. L’assemblée coloniale déjà formée avait manifesté des prétentions extraordinaires. Jamais son ambition n’a pu se renfermer dans les bornes que vous lui avez tracées. Disons tout, Messieurs: M. de La Luzerne a été le prétexte dont s’est servi l’assemblée de Saint-Marc pour vous enlever tous les cœurs que la séduction a égarés. Vous savez, disaient les orateurs de ce sénat despote, «;vous savez que La Luzerne est toujours « ministre, et vous adoptez sans hésiter les dé-« crets de l’Assemblée nationale qui veut vous « tenir toujours attachés au joug ministériel. « Barnave, le perfide Barnave est sa créature. « L’article 4 de ses instructions est l’arme qn’ii « tient cachée, pour la perte, pour la ruine de tous « les colons. » Vous êtes nos juges, Messieurs, soyez nos médiateurs. A une obéissance coupable aux décrets inconstitutionnels de l’assemblée de Saint-Marc, l’assemblée provinciale du Nord a préféré hautement une déférence périlleuse pour vos sages décrets. Notre confiance eu vous ne sera point trahie. C’est à vous à ramener la paix dans cette colonie; nous l’avons perdue au moment où nous apprenons que la métropole goûte le calme le plus pur, que la régénération, objet de vos travaux infatigables, se consomme. Que la colonie de Saint-Domingue puisse en goûter aussi les fruits précieux, qu’elle soit l’objet de vos inquiétudes. Le temps presse; les journées se succèdent; elles peuvent amener des événements funestes; hâtez-vous de conjurer l’orage; hâtez-vous de venir au secours de vos frères de la province du Nord, qui ne demandent qu’à rester Français. Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs. Les membres de l’assemblée provinciale du nord de Saint-Domingue. Signé : Tréuiondrie, président de l'assemblée provinciale du nord de Saint-Domingue ; Mail- 602 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 octobre 1790.] Jard de Rocheland, vice-président ; Lévesque et Lux, secrétaires. Au Cap, le 15 août 1790. Lettre des députés de la province du nord de Saint-Domingue à Messieurs les citoyens des districts du Port-au-Prince. Messieurs, chers frères et amis, votre situation critique a vivement affecté les membres de la députation de la province du Nord; elle s’est appliquée sérieusemement à rechercher la source de vos maux, pour en découvrir le remède : elle croit y avoir réussi. Amis, écontez-nous avec un désir aussi sincère de recouvrer la paix, que nous avons de contribuer à vous la rendre. Vos principaux griefs sont renfermés dans ce petit nombre d’objections que nous avons recueillies, tant au milieu de vos assemblées, que de la bouche de vos principaux membres. Pourquoi M. le général se déclare-t-il contre nous? Pourquoi nous fait-il la guerre? Pourquoi une partie de nos concitoyens se joint-elle aux troupes pour nous accabler ? Voici, Messieurs et chers frères, la solution de ce grand et terrible différend, qui n’existerait pas si vous l’aviez bien connu. Vous juriez de toutes vos forces, et certainement de tous vos cœurs, que vous vouliez rester fidèles à la nation, à la loi et au roi ; mais en même temps vous étiez fidèles et attachés aux opérations de l’assemblée coloniale et de votre comité, ennemis déclarés de la nation, de la loi et du roi. Vous paraissez douter encore de cette fatale vérité, parce qu’on vous a caché ou falsifié les décrets de cette assemblée séditieuse. Vous demandez que l’on vous prouve ses entreprises téméraires; mais, Messieurs, il faudrait vous retracer, presque sans exception, tous ses travaux; un seul de ses principes vous les peindra tous. Personne de vous n’ignore ni conteste, sans doute, cette base de la Constitution qu’elle s’est faite le 28 mai, par laquelle elle se déclare législative : voilà son principe fondamental, et c’est ce principe que nous avons en horreur. Tout ce qu’elle a fait depuis a été et devait être conséquent à cette déclaration : voilà ce que nous voulons punir. Vous avez encore demandé, Messieurs, quel droit la province du Nord avait de dissoudre, par la force, l’assemblée coloniale, sans la participation des autres provinces? Nous vous répondons que nous les y avons invitées; mais que si elles ne veulent pas y concourir, nous y travaillerons seuls, par le droit incontestable que chacun adepoursuivre ladestruction de quiconque médite la sienne, et que pour nous destruction ou esclavage sont une même chose ; nous y sommes encore déterminés par la nécessité de prévenir l’ennemi public avant qu’il acquît assez de forces par l’intrigue et la séduction, pour nous affermir à son pouvoir despotique; enfin, par la certitude d’être approuvés de la nation française, notre mère commune, dont nous soutenons les droits outragés par cette criminelle coalition. Eh 1 pouvez-vous croire, Messieurs, que les habitants d’une province entière fussent assez fous pour se disputer l’honneur de coopérer à cette grande entreprise, au péril de leur vie, si le danger de l’asservissement ne lui paraissait pas inévitable ! Voilà, Messieurs et chers amis, des idées nou-yelles sans doute pour vous ; vos guides sont bien coupables de vous les avoir laissé ignorer, puisque c’est de là que viennent tous vos maux ; en effet, n’est-il pas affreux pour vous de voir une partie de vos concitoyens, mieux instruits de la vérité, obligés de se séparer de vous, et, la loi française à la main, sommer M. le général de leur prêter l’appui du pouvoir exécutif pour le maintien de cette loi, et par une conséquence nécessaire contre votre comité antinational, contre vous-mêmes, infortunés citoyens, assez abusés pour vouloir le maintenir? Oh ! combien cet aveugle attachement vous a été funeste ! Combien il doit en coûter à vos cœurs, bons Français sans doute, que ce soit comme ennemis de la nation française qu’on ait pu vous poursuivre! Quelle haine ne devez-vous pas concevoir contre une assemblée qui vous procure desi grands maux et un si douloureux affront! Enfin, quels regrets seront les vôtres, lorsque vous concevrez que, bien loin d’être opprimés, vous auriez joui de tout l’honneur, de toute la dignité qui appartient à un peuple sage, si vous aviez été assez bien conseillés pour vous couvrir de l’étendard national, en abjurant la criminelle association de Saint-Marc! Alors votre caractère français n’étant plus équivoque, quiconque aurait déployé contre vous des forces militaires se serait rendu coupable du crime de lèse-nation. Mais, Messieurs, tout n’est pas désespéré, hâtez-vous de faire votre profession de foi et vous rentrez aussitôt dans tous vos droits. Ne vous y trompez pas cependant; ce ne sont plus ces paroles de fidélité à la nation , à la loi et au roi, que l’assemblée de Saint-Marc a su rendre vaines à force de les profaner , qui peuvent attester désormais votre croyance : si vous ne reconnaissez pas la forfaiture de l’assemblée de Saint-Marc , vous l’approuvez ; si vous l’approuvez, vous n’êtesplus Français. Désavouez-la hautement; vous reprenez votre caractère ; vous recouvrez le calme et la paix. Voilà, Messieurs, chers frères et amis, le point fondamental où vous devez vous rallier. N’allez point vous égarer dans ces idées ennemies de votre repos et de votre bonheur; ces idées de haine ou de crainte que vous inspirent les noms de Corporations , de Poufs , de Pompons et autres choses semblables. Remplissez cette première condition, nécessaire à votre bonheur autant qu’à votre sûreté, remplissez-la sincèrement et de bonne foi, et nous osons vous promettre que tous les sujets de mécontentement, quels qu’ils soient, disparaîtront à l’instant. Nous allons plus loin; et, si vous étiez trompés dans votre attente, lorsque vous vous serez revêtus de tous les caractères nationaux et pacifiques des bons citoyens, interpellez notre députation ; quelque part qu’elle se trouve, elle sera, ainsi que la province que nous représentons, votre conseil et votre appui. Quelle satisfaction pour nous, Messieurs, pour notre province et pour vos généreux voisins, les députés de la Groix-des-Bouquets, si nos efforts communs pouvaient vous rendre la paix et le bonheur dont nous ne jouissons nous-mêmes que par les principes que nous vous proposons d’adopter. Nous avons l’honneur d’être, avec un fraternel et sincère attachement, Messieurs et amis, vos trè s humbles et très obéissants serviteurs. Les députés de la province du Nord, Signé : Rouyssou, Gauvain, Gouet de Monta-rand, et fitiesneau de La Mégrière, commis*