300 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE célèbres ; les pleurs de l’esclave sont indignes de leur gloire, et les honneurs des rois troublent la paix de leur tombeau. Les ouvrages immortels que nous ont laissés les pinceaux de Rubens, de Van-Dyck, et des autres fondateurs de l’école flamande, ne sont plus dans une terre étrangère. Réunis avec soin par les ordres des représentans du peuple, ils sont aujourd’hui déposés dans la patrie des arts et du génie, dans la patrie de la liberté et de l’égalité sainte, dans la République française ; c’est là, c’est au Muséum National que désormais l’étranger viendra s’instruire ; l’homme sensible y viendra verser des larmes devant les productions des siècles passés, et l’artiste dévoré du feu du génie y viendra chercher des modèles que son mâle pinceau, libre des chaînes du despotisme, pourra peut-être surpasser. C’est pour faire connoître à la République quels sont l’ordre et la discipline de ses armées; c’est pour faire connoître à tous les peuples de quelles dépouilles la France s’est enrichie; c’est enfin pour faire connoître à la Convention nationale quel est le respect que l’armée du Nord a gardé pour les productions des arts, que le représentant du peuple Richard m’a chargé de venir vous annoncer l’arrivée de ces nouvelles richesses. J’ai recueilli et accompagné jusqu’ici les tableaux les plus précieux ; d’autres arriveront successivement. Je vous demande, citoyens représentans, d’ordonner que les mesures nécessaires seront prises pour les placer à fur et mesure de leur arrivée, dans les dépôts qui leur seront destinés afin que, libre de ma mission, je puisse de nouveau retourner combattre les despotes. Vive la République! Le citoyen Luc Barbier a été admis aux honneurs de la séance au milieu des plus vifs applaudissemens (15). 7 Les citoyens Audinot et Mussot-Ar-nould, directeurs et entrepreneurs associés du théâtre de l’Ambigû-comique, déposent 518 L 2 s., montant du produit d’une représentation qu’ils ont donnée en faveur des familles des infortunés péris par l’explosion de Grenelle. Mention honorable, insertion au bulletin (16). (15) Bull., 4e jour s.-c. ; Moniteur, XXII, 26-27 ; Débats, n° 730, 570 ; Gazette Fr., n° 994 ; J. Mont., n° 144 ; Mess. Soir, n° 763 ; Ann. Patr., n° 628 ; C. Eg., n° 763 ; F. de la Républ., n° 441 ; J. Fr., n° 726 ; M.U., XLIII, 559 ; Rép., n° 725 ; J. Perlet, n° 728 ; J. Univ., n° 1761 et n° 1763 ; J. Paris, n° 629. (16) P.-V., XLV, 344. C 318, pl. 1297, p. 13. J. Fr., n° 726. 8 Les entrepreneurs du théâtre de Metz [département de la Moselle] déposent, par les mains du citoyen Belleval, une somme de 1 510 L 10 s., résultat d’une représentation, sans frais prélevés, donnée au bénéfice des malheureuses victimes de l’explosion de Grenelle. Mention honorable, insertion au bulletin (17). [Belleval, artiste dramatique, un des entrepreneurs du théâtre de Metz, à la Convention nationale s.d.] (18) Législateurs, Je suis chargé par mes collègues, les entrepreneurs du théâtre de Metz, de déposer sur l’autel de la patrie une somme de quinze cent dix livres dix sols, résultat d’une représentation, sans frais prélevés, donnée au bénéfice des malheureuses victimes de l’explosion de Grenelle. Belleval, artiste dramatique, un des administrateurs du théâtre de Metz. 9 La société populaire de Commune-Affranchie [ci-devant Lyon, département du Rhône] offre à la Convention nationale cent cavaliers jacobins et un vaisseau de guerre; elle demande que la Convention nationale s’occupe des moyens de relever le commerce de cette commune. La Convention nationale décrète la mention honorable, et l’insertion au bulletin de l’adresse des députés de la société populaire de Commune-Affranchie, la renvoie aux comités des Finances, de Commerce et d’Agriculture, et renvoie à ses comités de Salut public et de Sûreté générale la motion qui a été faite par un membre, de rapporter le décret qui déclare Commune-Affranchie en rébellion et en état de siège, pour qu’il lui soit fait, sur cette motion, un rapport dans trois jours (19). Une députation de la société populaire [régénérée] (20) de Commune-Affranchie à la barre. L’orateur : Citoyens représentans, vous voyez devant vous les députés de la société populaire de Commune-Affranchie. Ils viennent vous offrir non des hommages stériles, mais (17) P.-V., XLV, 345. (18) C 318, pl. 1297, p. 14. (19) P.-V., XLV, 345. C 318, pl. 1288, p. 1. Décret n° 10 963. Minute de la main de Pressavin, rapporteur. Bull., 4e jour s.-c. (20) Moniteur, XXII, 15. SÉANCE DU 4e JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (SAMEDI 20 SEPTEMBRE 1794) - N° 9 301 des moyens puissans contre nos ennemis : cent cavaliers jacobins et un vaisseau de guerre. Notre malheureuse commune, successivement déchirée par les factions des royalistes, des fédéralistes ; justement punie de ses crimes et de sa rébellion envers la patrie, al-loit respirer sous les lois sévères mais consolantes de la République, lorsque Robespierre nous replaça sous le despotisme le plus horrible, sous le règne dévorant du brigandage le plus effréné. Grâce à l’énergie de vos décrets et de la résolution forte des représentans que vous nous avez envoyés, nous sommes encore une fois rendus à la liberté; mais soyez en garde contre les hypocrites calomniateurs qui, dans ce moment, fuyent Commune-Affranchie, pour venir vous entourer et vous tromper ; ces hommes ne peuvent avoir une bonne intention. Le patriote probe et sincère ne cherche pas à se soustraire à l’œil de ses juges. Nous vous prions, au nom de notre commune, de jeter promptement vos regards sur les moyens de relever son commerce ; il est actuellement anéanti ; nos ateliers, nos manufactures sont dépourvus de tous les objets de première nécessité; ils semblent avoir été livrés au pillage royal sous l’autorité du crime. Vous avez déjà beaucoup fait, en établissant dans l’ame de nos concitoyens la sécurité et la justice ; rendez-nous à nos droits de citoyens français ; nos sentimens sont républicains, bientôt notre commerce recevra le mouvement et la vie, et des milliers de bras paralysés par les factions, tourneront leur force, leur vigueur et leur industrie vers la prospérité de la République. Vive la République, vive la Convention nationale (21) ! [Le président leur répond que la Convention, qui a dû punir avec sévérité Lyon coupable et rebelle, rendra à Commune-Affranchie, purgée des scélérats qui l’avoient égarée, l’éclat et la prospérité auquel son industrie lui donne le droit de prétendre. Un membre demande qu’on rapporte le décret qui déclare cette commune en état de siège] (22). COLLOT D’HERBOIS : Le comité de Salut public après avoir consulté celui de Commerce, avait préparé un rapport tendant à rendre à Commune-Affranchie le commerce qui alimentait ses habitants : ce rapport avait pour but de revivifier l’industrie en la ramifiant, c’est à dire en faisant des avances aux ouvriers industrieux, en les mettant à même, par ce moyen, de faire valoir leurs talents, en les délivrant du honteux servage où les retenaient des entrepreneurs cupides ; ce rapport avait pour but de prendre les mesures nécessaires relativement au séquestre et relativement à l’échange des produits du travail de cette commune avec l’étranger; enfin il avait pour but de répandre l’instruction parmi les habi-(21) Bull., 4e jour s.-c. ; Moniteur, XXII, 16 ; Débats, n° 730, 571. (22) Débats, n° 730, 572. tants de cette commune, puisque l’ignorance a causé les égarements dans lesquels ils ont été entraînés par des conspirateurs. Au moment où ce rapport allait être fait, Couthon a emporté les pièces, elles doivent se trouver sous les scellés. Ce rapport était un sommaire des réflexions des représentants envoyés en mission près de cette commune (23), et de celles des comités de Salut public, de Commerce et d’Agriculture. Comme cet objet est du plus grand intérêt, je demande le renvoi de la pétition aux comités, et s’il était possible de trouver dans les papiers de Couthon notre précédent travail, je demande qu’il leur soit transmis, parce qu’il pourra leur présenter des idée utiles. PRIEUR (de la Marne) : C’est avec satisfaction que les amis de la liberté doivent voir l’essor généreux que de toutes les parties de la République on contribue à faire prendre à notre marine. Déjà plusieurs départements ont fait l’offrande à la patrie de vaisseaux de ligne, et tout nous présage que bientôt nous serons en état de détruire cette puissance navale dont l’Angleterre s’enorgueillit. Je saisis cette occasion pour vous faire connaître l’état dans lequel sont les constructions du port de Brest; elles se poursuivent avec cette activité que le génie de la liberté peut seul enfanter; il est impossible d’ajouter rien au dévoûment des marins pour le triomphe de la République. Je dois vous dire aussi qu’il existe à Brest une immense quantité de marchandises qu’il serait convenable de livrer à la circulation. Je demande donc que le comité de Salut public et celui de Commerce soient chargés de prendre des mesures pour établir la circulation de ces marchandises de toute nature, sucres, cafés, draps et autres. [Un membre annonce que les dispositions nécessaires sont faites à cet égard.] (24) GUYOMAR : La Convention nationale a annoncé qu’elle veut protéger le commerce ; mais il ne faut pas s’en tenir à l’énonciation des principes, il faut les faire suivre de l’exécution. A Commune-Affranchie, les scélérats et les intrigants qui l’avaient égarée ont été punis ; vous devez justice aux bons citoyens. Il est bon de rappeler ici ce qui a été dit hier par un de nos collègues, parce que cela est arrivé surtout à Commune-Affranchie. On a mis les scellés chez une multidude de citoyens ; et lorsqu’on les a levés il ne s’est plus rien trouvé des effets qui devaient y être. On a parlé contre l’aristocratie et contre les riches, mais on ne vous parle pas des brigands ; on ne vous parle pas de ceux qui se sont enrichis par des dilapidations, qui ont regardé la République, ses domaines et les biens des citoyens comme leur proie. Nous voulons nous opposer à l’agiotage et à la cupidité mercantile, fléaux de la société ; (23) Les Débats, n° 730, 572, font état de 12 députés envoyés en mission. (24) Débats, n° 730, 572.