[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 octobre 1789.] 467 r Méditez les heureux résultats de l’union, de la concorde et d’une confiance méritée. Pesez les �obstacles qu’il a eu à surmonter et convenez que rc’esl à son sang-froid et à sa fermeté qu’il doit ses succès dans les circonstances orageuses où il s’est trouvé. ► Les sauvages indomptés font retentir les airs de leurs cris de mort en allant à l’ennemi; et le Français intrépide sait braver la mort en silence. ' Français, qu’avez-vous à désirer maintenant? L’auguste famille, qui depuis huit cents ans vous ►gouverne, est maintenant parmi vous; elle veille à votre sûreté et vous presse de tout son amour. 'Ahl qu’ils daignent entendre la voix d’un sujet fidèle. Je leur annonce d’avance les plus beaux ''jours de la gloire. Notre bon Roi va bientôt sentir le prix de commander aune nation libre et obser-, vatrice des lois. Vous l’avez toujours vu calme et tranquille au milieu d’événements auxquels il c’aurait jamais dû s’attendre. 11 donne en ce moment aux souverains le plus grand exemple delà modération et de la sagesse. Français, serez-vous le dernier peuple de l’Europe qui reconnaisse ces �grandes vérités? Et vous, ministres et grands du royaume qui, par vos charges et votre naissance, avez l’honneur ‘ d’entourer le trône, apprenez que les rois n’ont iplus besoin de flatteurs, puisqu’on peut leur faire �entendre la vérité. Secondez les vues bienfaisantes de notre sage monarque ; méritez la confiance de la nation, mais n’oubliez jamais qu’elle ne souffrira plus qu’il soit trompé ou abusé. * Dignes représentants de la nation, c’est à vous maintenant à diriger les moyens de rétablir la . paix et l’union dans tout le royaume. Vous y parviendrez difficilement, avant d’avoir organisé les , municipalités. Hâtez-vous de consommer cet ouvrage. Les fonctions des officiers des municipalités sont de surveiller les intérêts des communes : il est donc essentiel pour la tranquillité du royaume que les bases fondamentales des lois sur lesquelles doit reposer la sûreté des com-jmunes émanent du même principe ; il est donc de votre devoir de vous occuper promptement de les prescrire. • S’il est nécessaire au bonheur commun que le royaume, qui n’a qu’un Roi, n’ait, pour le régir, �qu’une même jurisprudence, qu’une même monnaie, qu’une même mesure, combien est-il encore plus essentiel pour la tranquillité publique, qu’il n’y ait qu’un même plan d’organisation pour les �municipalités. Ce sera de ce plan général que naîtra naturelle-. ment le respect dû au pouvoir exécutif ; et comme il y a maintenant dans l’Etat le citoyen soldat et je soldat citoyen, que le dernier ordre est à peine la quatre-centième partie de l’autre, le soldat citoyen sera toujours soumis à l’autorité et à la force d’un corps quatre cents fois plus considérable que lui. D’ailleurs, les soldats eux-mêmes seront choisis dans les communes dont ils connaîtront les lois “ et les devoirs; et du moment que chaque individu pourra croire que le. degré d’obéissance qu’il Ltoit à celui qui le commande est soumis à l’intérêt commun et au bien général, la soumission deviendra entière, comme elle doit l’êiire, et le pouvoir exécutif sera respecté d’un bout du 'royaume à l’autre. Dès que le plan d’organisation dicté par l’As-semblée nationale aura été agréé par la ville de Paris, non-seulement on y verra renaître l’ordre >et la tranquillité, mais bientôt toutes les villes du royaume suivront cet exemple, en adoptant les mêmes principes; et vous terminerez ce grand ouvrage par l’établissement de vos assemblées provinciales, d’où doit dépendre la sûreté publique. Ne vous effrayez pas des nouveaux obstacles que vous pourrez rencontrer; opposez-y l’égide redoutable de vos vertus et de votre confiance. Cette Constitution si désirée sera le fruit de votre persévérance; et vos travaux seront couronnés en voyant la liberté triomphante. Je propose l’arrêté suivant, sur lequel je supplie l’Assemblée nationale de vouloir bien délibérer sur-le-champ : « Article 1er. L’Assemblée nationale ayant déjà décrété dans un des articles constitutionnels que le pouvoir exécutif suprême résidait dans les mains du Roi, Sa Majesté sera suppliée de faire usage du pouvoir qui lui appartient, pour prévenir les exportations des grains hors du royaume, et pour rétablir l’ordre et le calme dans l’intérieur des provinces. « Art. 2. Que Sa Majesté sera suppliée d’accorder son crédit à la bonne ville de Paris, poui‘ faire venir, tant de l’étranger que des provinces, les grains nécessaires pour l’approvisionnement de la ville pendant deux ans. « Art. 3. Qu’il sera nommé un comité de douze membres de l’Assemblée nationale, qui se réuniront avec les ministres du Roi, et huit membres delà commune de Paris, ayant le maire delà ville et le commandant de la milice nationale à leur tête, pour travailler de concert à tous les moyens de rétablir l’ordre et la paix dans la capitale. « Art. 4. Que l’Assemblée nationale s’occupera sans relâche du projet d’organisation des municipalités, et que ce sera le premier objet dont elle va s’occuper, comme le plus nécessaire pour donner au pouvoir exécutif la force qu’il doit avoir pour rétablir la tranquillité daüs le royaume. » ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. PRÊTE AU. Séance du mardi 20 octobre 1789 (î). La séance est ouverte par la lecture des procès-verbaux des deux dernières séances. Plusieurs observations sont faites sur le décret projeté dans l’avant-dernière séance concernant les fonctions du Conseil d’Etat du Roi, jusqu’à ce çpje l’Assemblée nationale ait organisé le pouvoir judiciaire et le pouvoir administratif. L’Assemblée nomme six commissaires pour la rédaction de ce décret ; MM. MM. Lanjuinais. Le Chapelier. Camus. Target. Anson. Duport. Le rapport achevé, les commissaires rentrent dans la salle. M. Target propose le décret suivant qui est adopté en la forme accoutumée : « L’Assemblée nationale a décrété que, jusqu’à (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 468 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 octobre 1789.] ce qu’elle ait organisé le pouvoir judiciaire et celui d’administration, le conseil du Roi sera autorisé à prononcer sur les instances qui y sont actuellement pendantes, et qu’au surplus, il continuera provisoirement ses fonctions comme par le passé, à l’exception néanmoins des arrêts de propre mouvement, ainsi que des évocations avec retenue du fond des affaires, lesquels ne pourront plus avoir lieu à compter de ce jour ; mais le Roi pourra toujours ordonner les proclamations nécessaires pour procurer et assurer l’exécution littérale de la loi. » Dans le compte mentionné au procès-verbal de la séance d’hier, du rapport fait à l’Assemblée par M. le comte d’Esthérazy, de ce qui s’était passé dans la province où il commande, on a remarqué les dénominations de milices nationales et des troupes du Roi. Quelques membres pensent que ces dénominations ne doivent pas subsister dans le procès-verbal. M. Bureaux de Pusy, secrétaire, observe que les expressions contre lesquelles on s’est élevé sont celles qui ont été employées par M. le comte d’Esthérazy. L’Assemblée décide que les expressions seront conservées au procès-verbal. M. le Président. Conformément à la volonté de l’Assemblée, je me suis rendu chez le Roi pour lui demander le jour et l’heure où il voudrait recevoir l’Assemblée nationale. Sa Majesté a répondu qu’il la recevrait aujourd’hui à six heures et demie. Des erreurs et des surprises nombreuses s’étant produites dans les rapports des dons patriotiques, l’Assemblée arrête que dorénavant la vérité de ces dons sera constatée par les trésoriers chargés de les recevoir, qu’ils seront ensuite inscrits sur le registre à ce destiné et qu’il en sera fait rapport à l’Assemblée. Le comité de rapport a demandé qu’il lui fût permis de rendre compte à l’Assemblée d’affaires pressantes et de la dernière importance ; il a été décidé qu’il serait entendu demain à deux heures. Les nouveaux membres du comité des recherches, élus au scrutin dans les bureaux, ont été proclamés dans l’ordre suivant : MM. MM. Glezen. Gouttes. Buzol. Boutteville-Dumetz. Rewbell. Pétion de Villeneuve. Salomon. Emmery. Le président le Berlhon. Goupil de Préfeln. Le chevalier de Lameth. Chasset. M. le President a consulté l’Assemblée sur la réponse qu’il devait faire au district des Filles Saint-Thomas, qui avait délibéré de lui décerner une garde d’honneur en sa qualité de président de l’Assemblée nationale. L’Assemblée a décidé que le district serait remercié par M. le président. H a été fait lecture de la réponse du comité d’Alençon à la lettre que M. le président lui avait écrite, au nom de l’Assemblée, relativement à la détention de M. le vicomte deCaraman, major en second du régiment des chasseurs de Picardie, commandant un détachement à Alençon ; suit la teneur de cette lettre: « Nosseigneurs, « Nous sommes trop pénétrés du respect le plus profond que nous devons à l’Assemblée nationale, t pour en différer un moment l’expression. Ne pouvant, par le départ instant de votre courrier, réunir tous les membres nécessaires pour opérer une réponse plus détaillée sur l’affaire de M. de Gara-’ man, nous ne manquerons pas de vous l’adresser par le courrier de lundi prochain, et vous pouvez, compter sur notre attachement aux lois et aux décrets de l’Assemblée nationale. A « Nous sommes avec un profond respect, « Nosseigneurs, « Vos très-humbles et très-obéissants serviteurs,, « Les président et membres du comité permanent « d’Alençon, « Signé : ÜEMUR, président, « Quilhet, d’Auteville, secrétaires ? « Alençon, ce 17 octobre 1789. » La discussion est ajournée jusqu’à l’arrivée des éclaircissements annoncés par le comité d’Alençon. | M. Target. J’ai été instruit que les arrêtés du 4, dont le Roi a ordonné la publication, n’ont pas été envoyés dans plusieurs villes peu éloignées de la capitale. On y a seulement fait aflicher la Ion-4 gue lettre dans laquelle Sa Majesté a examiné et discuté les arrêtés lorsqu’elle a refusé de les accepter. J’ai cru devoir prévenir l’Assemblée de ce malentendu ou de cette négligence des bureaux� de M. le garde des sceaux. M. le duc de la Rochefoucauld ajoute à cette observation que beaucoup de villes n’ont pas encore connaissance du décret sur les subsistances. i. M. Coroller pense qu’il faut mander à ce sujet M . le garde des sceaux. M. Buzot représente combien la conduite des* ministres est répréhensible. Les peuples attendent des lois : c’est d’elles seules que l’on peut espérer le retour du calme, et le retard de leur publication perpétue le désordre, et doit faire accuser* l’Assemblée d’inactivité et de lenteur. Il est aussi d’avis de mander le garde des sceaux, pour qu’il rende compte de sa conduite, et pour qu’il reçoive l’ordre de faire publier les arrêtés sans déliai . M. de Custine. La manière dont les lois doivent être sanctionnées et promulguées n’était pas encore arrêtée, et nécessairement n’était pas connue des ministres. Tout ce qu’on pouvait exiger d’eux se bornait à la publication par affiche : s’ils' n’ont pas rempli cette formalité, ils méritent les reproches de l’Assemblée; ils les méritent encoré s’ils ont, comme on l’a exposé il y a quelque temps, altéré le texte des décrets. M. lue Chapelier. La forme de la sanction et de la promulgation est décidée. Que les ministres la connaissent ou ne la connaissent point, rien . n’a pu les autoriser à altérer un décret, et à en transformer un autre en loi royale. Ils ne pou-< raient d’ailleurs se borner à l’affiche des décrets,