072 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {31 mai n91;J M. Luchner ayant quatre aides de camp à nommer, dont deux du grade de capitaine, un de celui de lieutenant-colonel et un de celui de colonel, il est évideut qu’il pouvait choisir le député dont il s’agit pour sou aide de camp, dans le grade que celui-ci occupe déjà dans l’armée; et alors il n’y aurait pas eu lieu à réclamation. Mais puisqu’il est question de faire passer, par le seul fait du choix de M. Luchner, ce député du grade de capitaine à celui de lieutenant-colonel, il est évident qu’il s’agit d’un avancement hors de rang. J’insiste donc sur..... M. de Castiiie. M. de Broglie ne met tant de chaleur à cette question, que parce que son cousin est eu rivalité pour celte place avec M. de Pusy. M. de Broglie. Je dois remercier le préopinant de me iuurnir, contre son intention, le moyen de présenter à l’Assemblée une explication simple et satisfaisante sur ce fait. Mon cousin, qui est lieutenant-colonel, est désigné par M. Luckner pour être son aide de camp. SiM. de Pusy, puisque le préopinant l’a nommé, gagne sa cause, en acquérant le grade de lieutenaut-colonel, il assurera à mon cousin un avancement proportionné, et M. Joseph de Broglie deviendra le premier aide de camp de M. Luckner, avec le grade de colonel; mais mon amitié ne peut me forcer à méconnaître la loi. Je demande que l’Assemblée ne se laisse pas entraîner à une mesure déshonorante, pour favoriser un de ses membres : J’insiste sur la question préalable. Je ne demande que l’exécution stricte et rigoureuse de la loi, sans modification ni interprétation; et je requiers d’ailleurs la lecture de vos décrets des 7 et 8 avril dernier. (. Applaudissements à gauche .) Un de MM. les secrétaires fait lecture des dispositions des décrets des 7 et 8 avril 1791 portant: « Que les militaires, membres de l’Assemblée nationale, pourront être employés, pendant l’exercice de leurs fonctions de députés, dans le grade dont ils sont actuellement pourvus; qu’ils avanceront, pendant les 4 ans qui suivront la cessation de leurs fonctions, à ceux qui leur seraient dévolus par ancienneté; mais qu’ils ne pourront profiter, pendant ce temps, du choix du roi pour obtenir un grade supérieur à celui dont ils jouissent aujourd’hui. » (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur le projet de décret du comité militaire.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur les baux à convenant et domaines congéables ; mais M. Salle demande à être entendu pour faire une communication au nom des comités diplomatique et. militaire. M. Salle. Messieurs, je suis chargé par vos comités diplomatique, militaire, ecclésiastique, des recherches et des rapports réunis, de vous rendre compte des événements qui ont eu lieu à Colmar les 21, 22 et 23 mai dernier. Si l’Assemblée veut bien m’accorder la parole, je suis prêt à lui faire ce rapport. (Oui! oui!) (L’Assemblée décrète qu’elle entendra de suite lé rapport sur les événements de Colmar et elle décrète qu’elle tiendra demain soir, mercredi, une séance extraordinaire, pour continuer la discussion sur les domaines congéables.) M. Salle, au nom des comités diplomatique , militaire , ecclésiastique , des rapports et des recherches réunis , fait un rapport sur les troubles de Colmar et s’exprime ainsi : Messieurs (1), vous parler des départements du Rhin, c’est vous rappeler un des principaux objets de votre sollicitude; c’est vous indiquer tout à la fois et les plus chères espérances des ennemis de la chose publique, et tous les soins que vuus devez prendre pour déjouer leurs coupables manœuvres. C’est dans le trouble et l’anarchie que les factieux se reposent aujourd’hui du succès de leurs vœux; il leur importe d’agiter l’Empire, mais c’est surtout sur nos frontières qu’ils réunissent tous leurs efforts : ils assiègent de terreurs ridicules un peuple simple; et comme la différence du langage et d’antiques préjugés livrent de préférence les habitants des départements du Rhin à toutes leurs insinuations perfides, ils ne cessent de les tourmenter de leurs intrigues séditieuses : ils veulent dévaster cette importante frontière par les horreurs d’une guerre de religion, et la tenir de cette manière ouverte aux invasions de la horde de brigands rassemblés de l’autre côté du Rhin pour leurs intérêts communs. Pour le succès de cette œuvre exécrable, les plus corrompus des hommes sont devenus tout à coup religieux : après avoir caché sous le masque de l’hypocrisie la soif du sang qui les dévore, après avoir habilement semé toutes leurs fureurs parmi les citoyens au nom d’une religion sainte, ils se découvrent enfin, ils annoncent hautement leur projet; et si vous ne mettez un terme à leur insolence, si vous n’arrachez à leurs machinations perfides celle province qu’ils se plaisent à troubler, il est difficile de savoir où peut s’arrêter leur audace. Messieurs, vous connaissez les dispositions des corps administratifs des départements du Rhin . Déjà vous avez été obligés de retirer, dans votre sagesse, au directoire de Strasbourg tous ses pouvoirs. Vous savez avec quelle faiblesse de son côté celui qui siège à Colmar a soutenu l’exécution de la loi. Dès son installation, il s’est signalé par un acte de pusillanimité condamnable, en abandonnant le chef-lieu du département, au risque d’enhardir les ennemis de la chose publique. A la vérité, sur les sollicitations de votre comité des rapports, il a repris ses fonctions; mais ç’a été inutilement qu’il s’est vu investi enfin de son autorité et protégé de toute la force de la loi : son caractère était décidé, et tous ses actes d’administration ne devaient plus être qu’un tissu de faiblesses et de fausses mesures. Je n’ai pas besoin, Messieurs, de vous rappeler ce qui vous a déjà été dit de sa négligence par un précédent rapport. Je ne vous ferai pas remarquer que cette négligence a été partagée par toutes les autorités établies à Colmar; que la municipalité, dans les divers événements qui ont eu lieu, n’a montré que préventions en faveur des perturbateurs de l’ordre; que lors de l’arrivée des commissaires du roi, elle n’a pas même requis la garde nationale pour les protéger et les mettre hors d’insulte. Je ne vous rappellerai pas qu’à cette époque le tribunal, bien loin de poursuivre les coupables, les protégeait en quelque sorte par son silence, et qu’il a fallu toute l’activité des commissaires pour lui faire commencer contre eux quelques informations. Tous ces (1) Ce rapport est incomplet au Moniteur.