[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 août 1791.] 309 « 1° La somme de 100,000 livres en capital pour lui tenir lieu de toute indemnité en raison de la réforme faite en 1760 du régiment de son nom, dont il était colonel propriétaire; « 2° Les arrérages, à raison de 10,000 livres par an, du traitement qui lui avait été conservé à l’époque de la réforme, échus depuis le 1er janvier 1790 jusqu’à ce jour. « Le tout sans préjudice de ce qui a été accordé audit Lowendal par le décret du 28 avril dernier. « Au surplus, PAssemblée nationale renvoie ledit Lowendal, pour représenter ses titres à la pension de 3,000 livres à lui accordée en 1783, selon la forme prescrite par ses décrets, à l’effet qu’il lui en soit délivré un titre nouveau, s’il y a lieu. » M. Gaultier - Bianzat. Je demande la question préalable sur le projet de décret : la famille Lowendal a déjà reçu 100,000 écus et il n’y a pas de nouvelles causes d’indemnité. M. Bureaux de Pusy. J’appuie le projet de décret : M. Lowendal était propriétaire d’un régiment et vous avez supprimé toutes les propriétés de cette nature. M. Emmery. Le décret du 28 avril qui a accordé 300,000 livres à la famille Lowendal était une récompense de services ; aujourd’hui l'Assemblée fera acte de justice en payant 100,000 livres d’indemnité pour la propriété supprimée du régiment. M. Chabroud, rapporteur. Voici, Messieurs, le texte du décret rendu le 28 avril dernier : « L’Assemblée, prenant en considération les importants services rendus à l’Etat par feu Wol-demar de Lowendal, maréchal de France, la perte que ses enfants ont faite, à sa mort, du régiment d’infanterie allemand de son nom, dont il était propriétaire, la situation actuelle de ses descendants Woldemar de Lowendal , Marie-Louise de Lowendal, femme Brancas ; les enfants nés desdits de Lowendal, et d’Elisabeth-Marie-Constance de Lowendal, femme de Lance-lot-Turpin-Grissé, décrète qu’il sera remis par la caisse de l’extraordinaire, à Woldemar de Lowendal, aux enfants d’Elisabeth-Marie-Cons-tance de Lowendal, et à Marie-Louise de Lowendal, la somme de 300,000 livres, faisant pour chacun desdiis Woldemar de Lowendal, Marie-Louise de Lowendal, et pour tous les enfants d’Elisabeth-Marie-Constance de Lowendal, la somme de 100,000 livres, pour servir à leur subsistance, et à celle des enfants nés desdits Woldemar et Marie-Louise de Lowendal; à l’effet de quoi la somme de 100,000 livres ne sera délivrée par le trésorier de l’extraordinaire à chacun des susnommés, qu’après que, par avis du tribunal de la famille , l’emploi desdites sommes en constitution de rente, dont l’usufruit seulement, soit en tout, soit eu partie, suivant l’avis dudit tribunal, appartiendra auxdits Woldemar et Marie-Louise de Lowendal, aura été déterminé et sera remise alors à la personne désignée par le tribunal de famille, pour la recevoir et en faire le placement ; au moyen desquelles indemnités et récompenses les pensions accordées à Marie-Louise de Lowendal et aux enfants d’Elisabeth-Marie-Constance de Lowendal, demeurent définitivement rayées, comme annulées par le décret du 3 août 1790. » M. Camus. Le décret du 28 avril, dont M. le rapporteur vient de vous faire lecture, a été rendu sur la proposition que j’en ai faite au nom des comités des pensions et militaire; il est évident que ce décret contient véritablement la mention de la différence que la réforme du régiment de Lowendal a apportée dans la fortune de la famille du maréchal, et qu’en la rendant, nous avons cru accorder une récompense à la famille de Lowendal en raison des services du père. Mais il n’en est pas moins certain qu’à cette époque nous ne savions pas que M. de Lowendal fils avait eu pendant 5 ans la propriété du régiment de son père et que nous croyions que la réforme de ce régiment avait été faite ou pendant la vie du maréchal de Lowendal ou immédiatement après sa mort. G’est là une des considérations qui ont engagé alors l’Assemblée à partager également les 300,000 livres accordées entre les 3 enfants ou leurs descendants. Les nouvelles pièces produites établissant que la réforme a été faite pendant l’exercice de M. de Lowendal fils, il s’en suivrait qu’en recevant seulement 100,000 livres, alors qu’on en donne autant à tous les ci-devant colonels propriétaires, celui-ci ne retirerait rien de la somme accordée par la nation, autant à titre d’indemnité que de récompense, aux héritiers d’un citoyen qui a rendu des services distingués à la patrie; il se trouverait, de plus, privé de traitement dont il a joui à cause de la réforme faite pendant son exercice. Je conclus de ces observations que nous devons une indemnité à M. de Lowendal, mais que nous ne devons pas lui en accorder une, comme si nous n’avions encore rien donné. Je propose donc de rendre le décret en ces termes ; « L’Assemblée nationale, ajoutant au décret du 28 avril dernier, décrète qu’il sera accordé à François-Xavier Woldemar de Lowendal, aux mêmes conditions d’emploi et de jouissance d’usufruit portées dans le décret du 28 avril, la somme de 50,000 livres, au moyen duquel payement et de la somme de 100,000 livres qui lui* revient aux termes dudit décret, il ne sera plus admis à aucune répétition, sous quelque prétexte que ce soit, d’indemnité, propriété au régiment, intérêts ou arrérages, sauf la pension de 3,000 livres, personnelle audit Lowendal, qui sera conservée, s’il y a lieu, d’après l’examen qui en sera fait par le comité des pensions. » Voix diverses : Aux voix! aux voix! — La question préalable sur le tout! (Bruit.) (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer.) M. Babey. Je demande le renvoi à la prochaine législature ; nous verrons si elle sera aussi aristocrate qu’on l’est ici. (Murmures.) (L’Assemblée, consultée, accorde la priorité à la motion incidente de M. Camus, qui est ensuite mise aux voix et adoptée.) En conséquence, le projet de décret modifié est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités militaire et des pensions, qui lui ont représenté son décret du 28 avril dernier, concernant la famille de Lowendal, et rendu compte de nouveaux faits relatifs à la jouissance que François-Xavier de Lowendal (dénommé seulement Woldemar de Lowendal dans le décret du 28 avril), fils du maréchal de ce nom, a eue du régiment [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 août 1191.] 310 levé par son père; ajoutant au décret dudit jour 28 avril dernier, « Décrète qu'il sera remis par la caisse de �extraordinaire, aux mêmes conditions d’emploi et de jouissance d’usuiruit, portées par le décret du 2,8 .avril, pour ledit François-Xavier de Lo-wendal et ses enfants, lq somme de 50,000 livres par augmentation à celle de, 100,000 livres qui leur revient, aux termes dudit décret. , « Décrète, en outre, qu’au moyen du payement des sommes accordées, tant par le présent décret que par celui du 28 avril, les enfants et petits-enfants du maréchal de Lowendal ne seront reçus à former aucune prétention ultérieure d’autre somme, sous quelque prétexte que ce soit, de récompense, indemnités, arrérages échus, ouin-térêts, dus ; excepté seulement quant à la pension de 3,Q00 livres dont François-Xavier de Lowen-dal jouissait personnellement au 1er janvier 1790, sur la récréation ou le rétablissement de laquelle il , sera statué par l'Assemblée d’après le décret dit 3 tjtdût 1790, lors du rapport qui lüi en sera mit dans l’ordre établi pour l’examen des pen-ëibns supprimées. » (Ce décret est adopté.) M. le President lève la séance à dix fieuies. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU MARDI 9 AOUT 1791, AU SOIR. Adresse aux représentants des français, en réclamation du bien patrimonial de la* branche directe et du nom de Lowendal, soit comme conservation de revenu héréditaire ou remboursement de sa propriété , réclamation ouverte en juillet 1790 et renouvelée en mal 1791, par suite et adx termes du décret dti 28 avril 1791, rendu à l’égard dès héritiers réunis du maréchal de Lowendal. Aux Représentants des Français. Messieurs, menacée par là voie publique, delà ruine totale de nos enfants et de leur père, le premier mouvement de mon cœur alarmé m’à porté, le 28 avril dernier, vers votre rapporteur, pdur m’instruire d’une nouvelle si faite pour suspendre ma crédulité... Je ne me permettrai d’eApiiquér son entretien, qu’en disant que nous nous sommes vraisemblablement mal entendus, puisque je remportai d’auprès de lui le trait de ma bléssure* plus douloureux qu’auparavaüt... La lettre qiife je lui portais tomba alors de mes mains dans, les siennes... C’était l’expression subite et confuse du désordre d’une âme déchirée et partagée entre les sentiments de l’honneur et de la nature... Elle devait en dire assez à celui qui était instruit; elle en disait trop peu pour le public, mais elle n’avàit pas été faite pour lui. Je portai ensuite à vos comités les représentations indispensables que je devais leur faire, etjTillais avoir l’honneur de vous les soumettre, et de soutenir des titres que jhi produits à vos comités, il y a dix, mois; titres que je devais répondre parmi vous, au moment au rapport; mais qu’un rapport aussi imprévu, à l’instant où il a été fait, qu’il avait été longtemps attendu, m’a seul empêché d’y répondre. Au moment où je m’en occupais, ]'ai reçu de votre comité des décrets, l’expédition du décret du 28 avril, relatif a la famille de Lowendal. Sa lecture est devenue pour moi un. rayon de lumière, par lequel nos alarmes se dissipént à mesure que votre justice s’y développe à nos yeux ; j’y retrouve l’espérance que je n’ai pu cesser, et que je ne cesserai de fonder sur la justice d’une nation noble et franche, qui ne peut vouloir s’enrichir des débris des lauriers cueillis pour elle, en paraissant les apprécier et y faire droit. J’y reconnais que les Français ne peuvent, en Assemblée nationale, consacrer l’injustice sur leurs registres, a côté du nom de Lowendal, en paraissant y consigner la reconnaissance, ni être plus économes vis-à-vis des héritiers du maréchal de Lowendal, que les ministres ne l’avaient été jusqu’ici. Votre décret, Messieurs, consacre les vérités suivantes : 1° Que les enfants et petits-enfants d’un maréchal de France aussi illustre, qui est mort ruiné, et qui ne s’est ruiné et n’a ruiné ses enfants que pour le service et la gloire des Français, ne peuvent être dépouillés du peu de fortune qu’ils ont, sans indemnité, de la main des représentants d’une nation faite pour ne connaître l’économie qu’après avoir satisfait à la justice et à la reconnaissance. 2° Que l’indemnité de l’incorporation du régiment de Lowendal (opérée par un ministère malfaisant, et sans religion pour la foi des traités) (1) ne pouvait pas être oubliée à côté des indemnités. Les pensions des dames de Brancas et Turpin, tilles du maréchal de Lowendal, lorsque la nation entraînant dans ses réformes les pensions de ces dames, a détruit en même temps par ses nouvelles lois l’espoir que. la branche directe et masculine de cette famille, propriétaire à ce titre du régiment de Lowendal, a toujours conservé de voir rétablir ce régiment héréditaire, aux termes de son traité. 3e Que l’indemnité de la propriété pécuniaire de ce régiment, respectée par tous les ministres* même par celui qui n’a détruit la partie honorifique, inattaquée jusqu’ici et inattaquable, n’a pu être et n’a point été confondue dans i’indem-nitê de sa privation honorifique, ni dans celles des pensions des dames de Brancas et de Turpin. 4° Qu’en conséquence les pensions des filles du maréchal de Lowendal sont seules réformées, comme elles sont seules indemnisées par le décret qui donne à chacune 100,000 livres d’inden-mité. 5° Que les 100,000 livres décrétées en favçur de M. de Lowendal, si elles sont une indemnité, ne sont, aux termes du décret, que l’indemnité de ce que la branche masculine a perdu 5 ans après la mort du maréchal de Lowendal, dans le légiment d’infanterie allemande de son nom, dont son fils unique est seul propriétaire; et cette indemnité n’est que celle de l’incorporation de ce régiment, et de l’espoir qu’il perd par vos nouvel-(1) La capitulation de Lowendal, portait qu’il ne serait jamais réformé en temps de guerre; qu’un seul bataillon, en temps de paix, pourrait subir la réforme comme dans les autres régiments étrangers; mais que l’étal-major serait conservé dans tous les temps en son entier. C’est en temps de guerre que le régiment a été incorporé. Cinq ans après la mort du maréchal de Lowendal, il y en avait de moins âUciétis qui ont été conservés; et le régiment du maréchal de Lowendal était devenu le seul héritage de son fils.