174 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE vers la domination. Un roi était nécessaire à leurs projets abominables; ils l’avaient bien choisi, c’était un scélérat. Il a disparu; comme lui tous les tyrans disparaîtront à leur tour. Que de jouissances à la fois pour de vrais amis de la patrie, et pour nous surtout qui la voyons applaudir à deux de ses enfants dont le sang a coulé pour sa défense ! Ils nous ont mutilés, les monstres que nous avons combattus; mais nous vivons encore malgré eux, et nous vivons pour la république. Citoyens représentants, armez de nouveau le seul bras qui nous reste; nous voulons venger celui que nous n’avons plus. [L’autre] : Oui, citoyens représentants, la mort est plus douce que les fers auxquels nous nous sommes échappés. Nous ne nous y sommes soustraits que pour servir de nouveau notre patrie. Les lâches ont osé nous nommer les défenseurs de l’indigne tyran qui vient de succomber sous le glaive de la loi; ils ont osé publier que nous n’avions les armes à la main que pour servir ses complots liberticides; mais, avec nos dignes frères d’armes, nous savons leur montrer que la vertu et la mort des tyrans sont chez nous à l’ordre du jour, et que nous versons toujours notre sang pour faire triompher la république (1). Un membre [André Dumont] dit : le premier des deux braves militaires que vous venez d’entendre est le citoyen Traullé, d’Abbeville, capitaine au 1er bataillon de la Somme; c’est ce courageux républicain qui, après avoir perdu par un coup de feu le bras droit, se servit de la main gauche; frappé à cette dernière main d’un nouveau coup de feu, et privé de l’usage de deux doigts par un coup de sabre, son corps tomba au pouvoir des esclaves, mais son âme républicaine, son âme fière et généreuse n’en ressentit aucune atteinte : il se servit alors des doigts qui lui restoient pour écrire à sa mère une lettre conçue en ces termes : « Je m’empresse de vous écrire avec deux doigts de la main gauche; je ne vous parle pas de mon bras droit, je l’ai laissé sur le champ de bataille. Je suis républicain invariable. Sans doute cette lettre, si elle est connue des esclaves au pouvoir desquels je suis, sera mon arrêt de mort; mais je mourrai digne de vous ». Le digne ami de Traullé, le citoyen Ca-thala, lieutenant des grenadiers au 25e régiment, couvert de blessures et échappé de même des mains des esclaves, se comporta avec la grandeur d’âme d’un vrai républicain; ces deux courageux défenseurs de la patrie, ces deux modèles d’héroïsme, indignés d’entendre appeler leurs dignes frères d’armes les soldats de Robespierre, ont plusieurs fois bravé les dangers en défendant les soldats de la patrie. A la nouvelle de l’approche des Français, ils se sont réfugiés (1) Bm, 17 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 393; Débats, n° 683, 300; J. univ., n° 1 716; M.U., XLII, 284. à Bruxelles chez des patriotes; ils y ont attendu l’arrivée de leurs frères; ils se sont jetés dans leurs bras, et sont ensuite rentrés dans leur patrie, qu’ils avoient si glorieusement défendue. Vous les voyez couverts des plus honorables blessures; ils ne viennent pas vous demander une pension de retraite; ils sentent encore couler dans leurs veines le sang de la vertu et du courage; ils veulent encore être utiles à leur patrie; ils ne demandent que de l’emploi : la mort est le terme qu’ils fixent à leurs travaux. Sans doute vos âmes sont émues au récit des traits héroïques de ces braves soldats. Eh bien ! citoyens, je vous propose le renvoi de la pétition au comité de salut public. Je demande qu’en signe de satisfaction, le président leur donne le baiser fraternel : je demande enfin qu’il soit rendu compte à la Convention de ce que le comité de salut public fera en faveur de ces deux républicains courageux (1). Sur cette proposition, l’Assemblée a décrété : I. La Convention renvoie au comité de salut public la pétition des citoyens Alexandre Traullé, capitaine au 1er bataillon de la Somme, et Cathala, lieutenant des grenadiers au 25e régiment d’infanterie. IL Le comité de salut public rendra compte à la Convention de ce que le comité aura fait en faveur de ces deux républicains. III. Le président donnera le baiser fraternel aux citoyens Traullé et Cathala (2). [ Vifs applaudissements] 120 Les députés de la société populaire de Nancy (3) apportent à la Convention nationale les félicitations de cette société sur le courage et l’énergie avec lesquels, au milieu du plus grand péril, elle a déjoué et puni la conspiration de l’infâme Robespierre et de ses complices. Au récit des dangers que vient de courir la représentation nationale, les cœurs des membres de cette société se sont serrés; ils ont envié la gloire acquise aux braves Parisiens de lui faire un rempart de leurs corps; ils se sont tous levés pour lui jurer un attachement inviolable, et bénir le décret qui frappe les conspirateurs et leurs complices (4). (1) Cette proposition est prêtée par J. Mont. (n° 97) à Dubois-Crancé. Il en est de même dans F.S.P. (n° 396). (2) P.-V., XLIII, 42. Moniteur (réimpr.), XXI, 393; Débats, n° 683, 300; J. Fr., n° 679; Mess. Soir, n° 715; J. Mont., n° 97; Audit, nat., n° 681; Ann. patr., n° DLXXXI; C. Eg., n° 716; J. Sablier, n° 1 480; J. Perlet, n° 681. Décret n° 10 238. Rapporteur : André Dumont. (3) Meurthe. (4) P.-V., XLIII, 44. Mentionné par Bm, 26 therm. (2e suppf). Mentionné par J. Fr., n° 679; J. Sablier, nos 1 479 et 1 480; C. Eg., n° 716; Ann. patr., n° DLXXXI. 174 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE vers la domination. Un roi était nécessaire à leurs projets abominables; ils l’avaient bien choisi, c’était un scélérat. Il a disparu; comme lui tous les tyrans disparaîtront à leur tour. Que de jouissances à la fois pour de vrais amis de la patrie, et pour nous surtout qui la voyons applaudir à deux de ses enfants dont le sang a coulé pour sa défense ! Ils nous ont mutilés, les monstres que nous avons combattus; mais nous vivons encore malgré eux, et nous vivons pour la république. Citoyens représentants, armez de nouveau le seul bras qui nous reste; nous voulons venger celui que nous n’avons plus. [L’autre] : Oui, citoyens représentants, la mort est plus douce que les fers auxquels nous nous sommes échappés. Nous ne nous y sommes soustraits que pour servir de nouveau notre patrie. Les lâches ont osé nous nommer les défenseurs de l’indigne tyran qui vient de succomber sous le glaive de la loi; ils ont osé publier que nous n’avions les armes à la main que pour servir ses complots liberticides; mais, avec nos dignes frères d’armes, nous savons leur montrer que la vertu et la mort des tyrans sont chez nous à l’ordre du jour, et que nous versons toujours notre sang pour faire triompher la république (1). Un membre [André Dumont] dit : le premier des deux braves militaires que vous venez d’entendre est le citoyen Traullé, d’Abbeville, capitaine au 1er bataillon de la Somme; c’est ce courageux républicain qui, après avoir perdu par un coup de feu le bras droit, se servit de la main gauche; frappé à cette dernière main d’un nouveau coup de feu, et privé de l’usage de deux doigts par un coup de sabre, son corps tomba au pouvoir des esclaves, mais son âme républicaine, son âme fière et généreuse n’en ressentit aucune atteinte : il se servit alors des doigts qui lui restoient pour écrire à sa mère une lettre conçue en ces termes : « Je m’empresse de vous écrire avec deux doigts de la main gauche; je ne vous parle pas de mon bras droit, je l’ai laissé sur le champ de bataille. Je suis républicain invariable. Sans doute cette lettre, si elle est connue des esclaves au pouvoir desquels je suis, sera mon arrêt de mort; mais je mourrai digne de vous ». Le digne ami de Traullé, le citoyen Ca-thala, lieutenant des grenadiers au 25e régiment, couvert de blessures et échappé de même des mains des esclaves, se comporta avec la grandeur d’âme d’un vrai républicain; ces deux courageux défenseurs de la patrie, ces deux modèles d’héroïsme, indignés d’entendre appeler leurs dignes frères d’armes les soldats de Robespierre, ont plusieurs fois bravé les dangers en défendant les soldats de la patrie. A la nouvelle de l’approche des Français, ils se sont réfugiés (1) Bm, 17 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 393; Débats, n° 683, 300; J. univ., n° 1 716; M.U., XLII, 284. à Bruxelles chez des patriotes; ils y ont attendu l’arrivée de leurs frères; ils se sont jetés dans leurs bras, et sont ensuite rentrés dans leur patrie, qu’ils avoient si glorieusement défendue. Vous les voyez couverts des plus honorables blessures; ils ne viennent pas vous demander une pension de retraite; ils sentent encore couler dans leurs veines le sang de la vertu et du courage; ils veulent encore être utiles à leur patrie; ils ne demandent que de l’emploi : la mort est le terme qu’ils fixent à leurs travaux. Sans doute vos âmes sont émues au récit des traits héroïques de ces braves soldats. Eh bien ! citoyens, je vous propose le renvoi de la pétition au comité de salut public. Je demande qu’en signe de satisfaction, le président leur donne le baiser fraternel : je demande enfin qu’il soit rendu compte à la Convention de ce que le comité de salut public fera en faveur de ces deux républicains courageux (1). Sur cette proposition, l’Assemblée a décrété : I. La Convention renvoie au comité de salut public la pétition des citoyens Alexandre Traullé, capitaine au 1er bataillon de la Somme, et Cathala, lieutenant des grenadiers au 25e régiment d’infanterie. IL Le comité de salut public rendra compte à la Convention de ce que le comité aura fait en faveur de ces deux républicains. III. Le président donnera le baiser fraternel aux citoyens Traullé et Cathala (2). [ Vifs applaudissements] 120 Les députés de la société populaire de Nancy (3) apportent à la Convention nationale les félicitations de cette société sur le courage et l’énergie avec lesquels, au milieu du plus grand péril, elle a déjoué et puni la conspiration de l’infâme Robespierre et de ses complices. Au récit des dangers que vient de courir la représentation nationale, les cœurs des membres de cette société se sont serrés; ils ont envié la gloire acquise aux braves Parisiens de lui faire un rempart de leurs corps; ils se sont tous levés pour lui jurer un attachement inviolable, et bénir le décret qui frappe les conspirateurs et leurs complices (4). (1) Cette proposition est prêtée par J. Mont. (n° 97) à Dubois-Crancé. Il en est de même dans F.S.P. (n° 396). (2) P.-V., XLIII, 42. Moniteur (réimpr.), XXI, 393; Débats, n° 683, 300; J. Fr., n° 679; Mess. Soir, n° 715; J. Mont., n° 97; Audit, nat., n° 681; Ann. patr., n° DLXXXI; C. Eg., n° 716; J. Sablier, n° 1 480; J. Perlet, n° 681. Décret n° 10 238. Rapporteur : André Dumont. (3) Meurthe. (4) P.-V., XLIII, 44. Mentionné par Bm, 26 therm. (2e suppf). Mentionné par J. Fr., n° 679; J. Sablier, nos 1 479 et 1 480; C. Eg., n° 716; Ann. patr., n° DLXXXI. SÉANCE DU 17 THERMIDOR AN II (4 AOÛT 1794) - N° 121 175 [Les députés de la sté popul. régénérée de Nancy lisent à la barre la présente adresse; s.d] (1) Citoyens représentans Quand le génie de la liberté vient d’éclairer les plus noirs forfaits, quand votre inébranlable fermeté vient encore de sauver la patrie, la société populaire et les républicains de Nancy s’empressent de vous féliciter sur cette nouvelle victoire. Au récit des dangers que vient de courir la représentation nationale, nos cœurs se sont serrés et ont envié la gloire acquise aux bons citoyens qui lui ont fait un rempart de leurs corps, nous nous sommes tous levés pour lui jurer un attachement inviolable et bénir le décret qui frappe les conspirateurs et leurs complices. Il faut que l’ambition de ces scélérats les ait bien aveuglés, pour leur avoir donné l’horrible espoir de domter( sic) notre amour pour la liberté et lui substituer les fers honteux qu’ils nous préparoient. Les monstres ! Ils n’ont pas calculé tout ce que peuvent votre courage et le nôtre, et la haine que le peuple français a vouée à toute espèce de tyrannie. Non ! les sacrifices et les sermens que nous avons fait ne seront pas vains, et notre liberté n’aura jamais d’autres protecteurs que nos armes et vos décrets. Continuez à poursuivre les traîtres, et, nouveaux Brutus, faites tomber la hache nationale sur toutes les têtes coupables, sans pitié pour ces hommes qu’une fausse popularité avoit placés au milieu de vous, pour soutenir le peuple, et qui, trahissant votre confiance et la notre, n’avoient pris le masque de la vertu que pour faire plus sûrement triompher le crime. Febvé l’aîné ( présid . de la sté et du tribunal criminel !) [et 125 autres signatures], Les mêmes députés déposent sur le bureau les adresses du comité de surveillance révolutionnaire, du tribunal, du conseil général de la commune de Nancy, qui expriment les mêmes sentimens (2). [Nancy, 14 therm. II] (3) Respect, amitié, fidélité, soumission, et reconnaissance. Encore une fois des sélérats ont voulu disoudre la représentation national, mais le génie de la liberté qui siège sur la montagne a fait échouer leurs complots parricide; pères d’un peuple qui vous aime, vous êtes restés fermes à votre poste, bravant tous les dangers. Nous n’attendions pas moins des montagnards qui ont bravé le despotisme et qui travaille sans relâche pour le bonheur du peuple; combien nous sommes jaloux des braves parisiens qui ont eu le bonheur de vous faire un rempart de leurs corps. Si nous n’avons pas eu le bonheur de partager leur gloire, nos cœurs pensoient comme eux. (1) C 315, pl. 1 260, p. 46. (2) R-V, XLIII, 44. (3) C 312, pl. 1 242, p. 65, 47. Mentionné par Bm , 27 therm. (1er suppl1). Nous vous demendons de décrété que les parisiens ont bien mérité de la république; nous vous prions de nous compter au nombre des républiquains qui sont prêts à versé jusqu’à la dernière goûte de leur sang pour la conservation de la Convention national. Périsse les tyrans et les traîtres. Vive la montagne, Vive la république. S. et F. Les membres composant le comité de surveillance révolutionnaire Duthé (présid.), Munier, Dessoue (off. mun.), Bouché, Ignace Perny, Preinchard, J. B. Tisseront [et 1 signature illisible]. [Le conseil gal de la comm. de Nancy à la Conu.; s.d.) Citoyens Représentants, Votre sagesse et votre courage viennent encore de sauver la liberté en écartant de vous les dangers et le crime. A la nouvelle des périls qui vous ont menacés, nous avons frémi, et notre indignation contre les traîtres a égalé la haute estime et la confiance sans bornes que mérite la Convention. Tout le conseil s’est levé pour luy jurer fidélité, et a délibéré de célébrer aujourdhuy dans une fête civique la victoire que vos vertus et votre énergie ont remportée sur les scéllérats qui avoient osé concevoir la folle et détestable espérance de replacer le peuple français sous un autre joug que celuy de ses loix. Recevés donc le serment que nous allons renou-veller en présence de tous nos concitoyens de rester fidels à la représentation nationale, et de livrer au glaive de la loy tout homme qui seroit assez téméraire pour attenter à ses pouvoirs et à la vie d’aucuns de ses membres vertueux (1). Berçon, Desrivage (présid.), Botta (off. mun.), S. Müller (off. mun.), Ceret, Laurent (off. mun.), F. Barbietry, C.F. Viole, Wachter, Vornant (notable), Claude (notable), Febvé l’aîné (notable), Croizier fils, Bourgeois, Ray-bois, Fabvre (off. mun.), Massiard, Lhuillier dit Barrois, Lechize (subst), F. Clair, Gavu, Marc Briey, antoine Duchez, Le Seuvre, Durupt l’aîné, D.S. Marçoto l’aîné (off. mun.), Dautray, Thouvenin F. et fils [et 1 signature illisible]. 121 La société populaire (2), les administrateurs du district, le tribunal (3) et le conseil général de la commune de Sarrebourg, département de la Meurthe, expriment à la Convention l’horreur dont ils ont été pénétrés à la nouvelle des dangers qu’elle a courus, par la conspiration de Robespierre et de ses complices; ils applaudissent à la juste punition de leurs crimes, et invitent la Convention nationale à rester à son poste (1) Ce dernier qualificatif ajouté d’une autre encre. (2) Voir, ci-dessus, n° 35. (3) Voir, ci-dessus, n° 36.