[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [22 mars 1791.] 236 M. Trellhard. Pour adopter le décret qui vous est présenté, il sultit d’en connaître le véritable objet. Son objet, c’est de mettre les électeurs dans la possibilité de nommer leur évêque dimanche, parce que si le département avau indiqué le lieu de la séance à Lille, il serait peut-être impossible aux électeurs de s’y transporter avant dimanche prochain.il faut donc, pour que l’élection soit faite dimanche prochain, il faut maintenant décréter, comme on vous le propose, que cette élection sera faite dans le lieu qui aura été indiqué en Yertu de votre décret de samedi dernier. Plusieurs membres : Aux voix! aux voix! (L’Assemblée, consultée, adopte le projet de décret du comité ecclésiastique.) M. Foucault-Fardimalie. Je fais un amendement... (Rires.) Mon addition remplira sans doute le but du comité. Nous avons décrété avant-hier que l’élection ne pourrait se faire que huit jours après la nouvelle convocation : au moins faut-il aujourd’hui, d’après votie décret, ne pas établir une contradiction aussi manifeste et qui empêchera un grand nombre des électeurs de se trouver à l’élection; car le décret d’aujourd’hui va donner à penser aux électeurs assemblés qu’ils ne seront nécessaires que dans 8 jours ; et ils iront vaquer à leurs af fair. s. Dites donc alors que l’assemblée révoque formellement le décret d’a-vant-hnr. M. Merlin, rapporteur. Cette addition me paraît d’autant moins digne de réponse, qu’elle s’applique à un décret déjà rendu; mais j’observe que le délai de 8 jours se trouve parfaitement rempli, au moins à certains égards : vous avez décrété avant-hier qu’il faudrait au moins 8 jours emre la nouvelle convocation et la tenue de l’assemblée. Or, la nouvelle convocation a éié faite le 19; et il est vrai que par cette convocation on n’indique pas le lieu, mais au moins on a désigné le jour; et cela suffit pour qu’il n’y ait point de contradiction. (11 n’est pas donné suite à la motion de M. Fou-cauit-Lardimalie.) M. le Président annonce l’ordre du jour de demain. Un membre demande qu’il soit tenu mercredi soir une séance extraordinaire où serait discutée la question concert ant les invalides. (Cette motion est décrétée.) M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE MONTESQUIOU. Séance du mardi 22 mars 1791, au matin ( 1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la soance d’hier, qui est adopté. M. deTracy. Je fais la motion que les droits d’usage, de chauffage et pacaee soient déclarés rachetables, et que les comités des domaines, d'agriculture, d’aliénation et féudal soient chargés de fixer le mode du rachat ou du cantonnement nécessaires pour s’en libérer. M. Fe Chapelier. J’observe à l’Assemblée qu’un décret qui intéresse si essentiellement Fagriculture ne doit pas ê re rendu précipitamment ; je demande que l’Assemblée naiionale se borne à charger s* s comités de féodalité, d’aliénation, des domaines, d'agriculture et de commerce de lui présenter incessamment un projet de décret sur cet objet. M. de Tracy. Je réduis ma motion à ceci : «L’Assemblée nationale, sans rien préjuger sur la manière de prouver la légitime existence des droits d’usage, chauffage et pacage, charge ses comités des domaines, d’alienation, d’.'griculture et féodal de présenter dans le p us court délai un projet de décret sur la manié e d’évaluer lesdits droits, et d’en libérer les propriétaires des fonds, soit par un rachat, soit par un cantonnement. » (Ce décret est adopté.) M. de Mirabeau. Je demande la parole pour une motion d’ordre ; mais, avant de faire ma motion, je dois vous présenter une observation: c’est que le comité diplomatique n’a jamais cessé de vous inviter à prendre, à < ruonner toutes les mesures possibles pour que la France soit sur le pied le plus respectable de défense sur les frontières du Nord; et cela, avec d’auiant plus de sécurité qu’il croyait pouvoir rassurer et tranquilliser les citoyens sur les bruits populaires faussement répandus. Le comité diplomatique, fondé sur scs propres observations, l’était plus sur les instants et constants avertissements du ministre des affaires étrangères qui, respomable comme tout autre, déclarait que rien n’était à craindre sur les frontières, mais que, rie craignant rien en hiver et ne devant jamais rien craindre en aucun temps ni en général pour un Empire aussi justement redoutable, il demandait cependant, qu’au printemps on fût sur le pied ne défense le plus respectable sur toutes les frontières H n’a cessé de le dire depuis six mois au comité diplomatique, qui n’a cessé de le répéter à l’Assemblée. Maintenant je fais ma motion d’or ire : je demande que l’Assemblée veuille bien nommer quatre commissaires pour aller demander au mi-rus re de la guerre s’il est vrai, comme on le mande d'Alsace, qu’il ri’y ait nu» 7,0U0 hommes de troupes de ligne sur icBis-Rhm et 2,000 sur le Haut-Rhin, et, si ce’aest, pourquoi l’Alsace est dans unétat de dénuement aussi scandaleux après nos décrets. Si cela n’est pas vrai, qu’on lui demande l’état positif et exact des mesures qu’il a prises pour la sûretéde la frontière, en exécution des ordres et décrets de l’Assemblée nationale. Je demande que F Assemblée nomme immédiatement ces quatre commi-saires, qu’ils se rendent sans désemparer nup.ès du ministre de la guerre et que des réponds irès prêches, très réelles, très effectives soient fait»s et i apportées ce matin môme à l’Assemblée avant la lin de la séance. (1) Celte séance est incomplète au Moniteur. M. Hegnaud (de Saint-Jean-à' Angèly). J’appuie d’autant plus la mesure qui vous est pré- [22 mars 1791.] 257 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] sentéepar M. de Mirabeau, que je dois vous rappeler, comme je l’ai fait hier matin, en parlant d’un autre objet, qu’il y a déjà quinze jours que vous avez donné des ordres pour que le ministre vous rendît compte de i’état de vos frontières. Vous n’avez point reçu de réponse; il est de votre devoir d’envoyer aujourd’hui la réclamer. Je ne crains pas de dire qu’il paraît y avoir dans l’état d’alarme que je crois mal fondé à la vérité une négligence incroyable à ne pas tranquilliser la nation sur ces mêmes alarmes qu’on cherchait à répandre. J’appuie donc la motion de M. de Mirabeau et je demande que M. le Président soit chargé de nommer sur-le-champ quatre commissaires. M. de Mirabeau. J’ajoute un seul mot : le décret dont parle le préopinant n’a été porté qu’hier à la sanction, chose très remarquable. J’ajoute un autre mot : assurément ce ne sont pas des alarmes que je veux répandre, car je ris ou d’indignation ou de pitié sur les efforts de pygmées et les attaques qu’on nous prépare ou qu’on ne nous pré «are pas ; mais il faut, en tout état de cause, que les ordres de l’Assembléesoient rigoureusement exécutés et je crois qu’ils ne le sont pas. De plus, je prends occasioa de vous annoncer que votre comité diplomatique connaît officiellement la fausseté, qu’il a préjugée et que le ministre des affaires étrangères avait préjugée avec lui, de la pièce de llatisbonne; il a eu deslettres du ministre de France àRatisbonne qui ne laissent à cet égard aucun doute. ( Applaudissements .) Plusieurs membres : Aux voixl aux voix ! M. Martineau. Je demande, Monsieur le Président, qu’on nomme pour commissaires les membres du comité diplomatique. M. Defermon. Je dois vous annoncer qu’il n’y a eu que des rassemblements dans diverses parties pour des formations de corps. Dans cet état, les divers travaux du ministère de la guerre ont dû être concertés en partie avec le comité militaire; je voudrais donc qu’on chargeât Le comité militaire de nous (aire un rapport à ce sujet. M. Regnaud(da Saint-Jean-d'Angêly). Le comité militaire ne peut en rien se mêler de l’objet dont il est question. Le ministre seul a dû exécuter vos décrets sans le concours du comité, qui n’est fait que pour vous présenter des projets de loi pour l’org inisatioQ de l’armée et non pour en déterminer l’emnloi. Le comité diplomatique seul peutavoirle droit de vous manifester ses vues sur les mesures à prendre ; mais tous les autres comités doivent être étrangers à l’administration; sans quoi, il n’y aura jamais de gouvernement. M. de Choiseul-Praslin. J’appuie la motion du préopinant. Plusieurs membres : Oui! oui! tout le monde est d’accord. (L’Assemblée, consultée, adopte la motion de M. de Mirabeau.) M. le Président annonce que les quatre commissaires qu’il a choisis pour se rendre chez le ministre sont : MM. de Mirabeau, Fréteau, Le Chapelier et Goupil-Préfeln. lro Série. T. XXIV. M. Merlin. C’est encore du département du Nord que je viens vousparler. Un courrier extraordinaire arrivé hier de Lille apporte à M. le Président une lettre émanant du directoire du département du Nord qui contient des détails sur une espèce de désordre, commune dans ce moment à plusieurs départements et qui prend précisément sa source dans l’exemple de faiblesse donné par la municipalité de Paris, lorsqu’elle a fait arrêter deux fois sous vos yeux une diligence sous prétexte qu’elle était chargée d’argent pour les villes de l’intérieur du royaume. Voici cette lettre : « Monsieur le Président, nous avons l’honneur de vous informer que la voiture publique, venant de Paris à Lille, a été arrêtée deux fois à Douai et que le numéraire qui s’y trouvait a été saisi par la garde nationale. Nous avons cru devoir prendre des mesuresextraordinaires pour assurer la liberté si importante de la circulation du numéraire; et nous avons en conséquence changé la route de la diligence; précaution que l’effet de l’exemple qu’avait donné la ville de Douai rendit inutile. « La même voiture fut arrêtée encore dans deux lieux différents, et l’on y saisit un caisson de 14,000 livres. « Vous voyez que la liberté de la circulation intérieure, que les lois du commerce sont détruites; que les gardes nationales se portent à des violences très répréhensibles et que des suites affreuses pourraient résulter de ces mouvements: l’anéantissement du commerce, la suspension du payement dans les manufactures, le pillage des deniers publics. . . « C'est donc avec sévérité qu’il faut réprimer ces excès. Il est aisé de sentir combien il serait facile d’abuser de ces saisies d’argent, pour des usages funestes. On n’a qu’un pas à faire pour tous les crimes, quand on a une fois transgressé les lois... » Ce serait le cas, en tout autre circonstance, de renvoyer purement et simplement cette adresse à votre comité des rapports pour vous présenter un projet de décret, mais la nécessité qu’il y a d’aller en avant sur ce projet infiniment touchant nous a déterminé à vous présenter un projet de décret qui, si vous ne l’adoptez pas, pourra être renvoyé au comité militaire. Le voici : « Sur le compte rendu à l’Assemblée nationale des voies de fait récemment commises dans divers départements par des compagnies entières de gardes nationales, pour arrêter les voitures et bateaux portant ou grains ou numéraires d’un lieu du royaume à l’auire; « L’Assemblée, profondément affligée des funestes erreurs dans lesquelles les ennemis du bien public entraînent le peuple, en le portant à rompre la circulation des objets sans lesquels il ne peut exister ni agriculture, ni commerce, ni manufacture, ni société, et à tarir par là les sources de son travail et sa subsistance; « Considérant que déjà elle a fait et que le roi a sanctionné plusieurs lois qui assurent la plus grande liberté et la protection la plus efficace à la circulation des grains et du numéraire dans l’intérieur du royaume ; « Considérant qu’elle n’a pas voulu même excepter de cette liberté, ni soustraire à cette protection les transports qui se font par mer d’un port du royaume à l’autre, en remplissant les formalités prescrites; <■< Considérant enfin qu’au terme de son décret constitutionnel du 5 décembre 179(J nulle force armée ne peut exercer le droit de délibérer et 17