530 [Assemblée aationale.l regorge, et que le maire soit mandé pour nous en rendre compte. M. l’abbé Gouttes. Cette proposition est d’autant plus j : ste que le bruit court déjà dans le public qu’ou se prépare demain à de nouvelles scènes. Voix diverses : Bah ! Bah! À l’ordre du jour! M. Rabaud-Saint-Etienne. Je ne sais à quoi peut servir cette espèce de pusillanimité, de laquelle il résulterait que nous nous endormirions. Je crois que cette vérité doit être connue; je crois que si elle doit être dite, c’est ici, et par conséquent, je vais me permettre de vous dire ce que je sais. Messieurs, nous savons par M. de Montmorin qu’il y a lieu de croire que les émigrants se proposent de faire une tentative folle, extravagante; mais ils se proposent d’en faire une aux frontières. Il est possible que les conspira'eurs, qui sous prétexte de relever la royauté l’ont eux-mêmes avilie par leurs folies, il est possible que les conspira eurs ne lassent pas réflexion que, taudis qu’ils feront une invasion sur les frontières, le mécontentement du peuple de la ville de Paris soit giaud, et que peut-être la sûreté de personnes auxquelles nous nous intéres ons tous, soit en danger, ils seraient ainsi la cause, en attaquant les frontières, d’un mouvement dans Paris. C’est pour former ce mouvement qu’on a envoyé une foule d’étrangers, c’est (tour cela que nous voyons arriver de nos départements des hommes qui n’ont rien à faire ici. Plusieurs membres : C’est vrai! C’est vrai ! M. Rabaud-Saint-Etienne. Messieurs, les régiments sont dégarnis d’officiers; plusieurs ont été renvoyés par leurs soldats, d’autres se sont retirés d eux-mêmes, 2 ou 3,000 ont refusé de prêter le serment; une foule de soi-disant gentilshommes et une foule de ceux qui l’étaient, se sont rendus en foule à Pans. De tous ces moyens combinés il résulte évidemment, aux yeux de ceux qui veulent y réfléchir, que l’on ménage un mouvement dans Paris. Je n’ajoute point foi aux bruits qu'ils font courir, que l’on mine sous Paris, que l’on veut faire sauter l’Assemblée nationale; je les abandonne à la vigilance du département et de la municipalité; mais enfin, Messieurs, à moins que les conspirateurs ne soient insensés, ils doivent avoir combiné le mouvement extérieur avec le mouvement intérieur; et comme c’est à Paris qu’e.-t le foyer du pouvoir actuel, c’est contre ce pouvoir que tout a été combiné. Vous avez vu des société? populaires qui, dans le commencement, étaient dans de très bons princip s, mais qui ensuite ont été égarées; vous avez vu des homme-, des étrangers soudoyés qui répandaient de l’argent, qui, par des insurrections, dirigeaient les c mps de ce peuple tiompé contre l’Assemblée nationale qui avait sauvé le peuple même. Ils font agir, d’un autre côté, les émigrants contre l’Assemblée nationale et les conspirateurs de toutes les provinces. Ainsi, Messieurs, je répète ma motion, que le maire soit mandé à la barre; mais j’ajoute aux dispositions générales qui vous ont été présentées hier par le comité militaire, dont j’ai admiré la sagesse, quelques dispositions additionnelles. Il ne nous suffit pas de savoir que nous sommes [23 juillet 1791. J en état de mettre sur pied 143,000 hommes de troupes de ligne, que nous avons 9,700 gardes nationaux enregistrés, etc.; tous ce< projets-là me paraissent mfin ment sages, mais je ne m’y fie que quand cela sera exécuté. Je demande donc, Messieurs, que votre comité militaire soit tenu de venir, ainsi que le ministre de la guerre, vous rendre compte, non pas des dispositions que l’on veut faire, mais des dispositions que l’on a faites. _ J’observe ensuite qu’il y a quelques contradictions entre ce qui nous est rapporté sur les bonnes dispositions des frontières et les lettres que reçoivent les députés des front ères. Je crois que le peuple, qui se fait aisément illu-ion, et qui s’et fraie facilement, peut avoir exagéré le défaut de défense de certaines frontières. Mais je demande que le comité militaire se concerte avec les députés des fron ières, afin que des connaissances particulières que l’on aura acquises, il en résulte que vous soyez parfaitement rassurés à cet égard. M. Rewbell. Gomme il paraît que l’Assem-semblée se dispose à mander M. le maire de Paris, je demanderai que l’on lui fasse une question bien sim pie qui jettera un très grand jour sur la question. On m’a assuré de bonne part, que parmi les personnes blessées ou tuées dans les malheureux événements dont nous avons été les témoins, il y avait plusieurs chevaliers de Saint-Louis dont on a trouvé la croix dans la poche. Plusieurs membres : Oui ! oui I M. Rabaud-Saint-Etlenne. Voici mon projet de décret : « L’Assemblée nationale décrète que le maire de Paris sera appelé ce matin à l’Assemblée, pour rendre compte des mesures prises par la municipalité pour le recensement générai des habitants et des étrangers qui se trouvent à Paris. » (Ge décret est adopté.) M. d’André, au nom du comité diplomatique. Avant d’avoir l’honneur de vous rendre compte, au nom du comité diplomatique, de Y affaire de Porentruy, je crois devoir dire un mot relativement à ce que vient d’observer M. Rabaud. Il vous a dit que le ministre des affaires étrangères nous avait fait craindre une invasion des émigrants. IL est vrai que le ministre nous a dit qu’il ne répondait pas que les émigrants ne fissent une tentative; mais sans vouloir nous endormir dans une fausse et trompeuse sécurité; je crois cependant qu’il serait utile pour prévenir le mauvais effet que pourraient fa re sur la fortune publique des craintes exagérées; je crois, dis-je, qu’il est nécessaire de vous dire l’état dans lequel se trouvent les émigrants, d’après les rapports les plus sûrs. D’après un rapport que M. Fréteau doit avoir fait, il s’ensuit que le recensement des émigrants est d’environ 5 à 6,000 hommes, dont 3,500 ont été nombrés, et de ces 3,500 on compte 306 ci-devant conseillers au parlement (Rires). Il y a ensuite un régiment de prêtres, de chanoines, etc. (Rires.) Je le répète, mon intention n’est pas, en citant ce fait, d’endormir l’Assemblée nationale par une fausse tranquillité, je pense au contraire qu’il faut prendre toutes les mesures possibles pour ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juillet liai J nous mettre dans l’état de défense le plus respectable. Aussi, ai-je, de même que M. Rabaud, applaudi aux mesure-! du comité militaire, et ne serai-je pas un des derniers, à en solliciter l'exécution. Ces faits posés, qui m’ont paru nécessaires pour la tranquillité générale, je passe au rapport dont l’Assemblée m’a chargé. Vous avez entendu hier la réclamation de M. l’évêque de Paris. Il résulte des faits qui sont à notre connaissance, que d’après quelques troubles arrivés dans l’évêché de Bâle, dans le pays de Porentruy, l’évêque de Bâle a réclamé des secours de l’empereur. L'empereur a fait passer à l’évêque de Bâle des forces militaires qui s’élèvent de 4 à 500 hommes. Cette arrivée de iroapes a causé de l’inquiétude dans les départements voisins du pays de Porentruy. On s’est adressé à l’Assemblée nationale; le comité dans cette circonstance ne croit pas vous faire un rapport plus précis qu’en vous lisant les articles de notre traité avec l’évêque de Bâle. Ce traité est de 1780, l’article 2 porte : « Le roi et le prince-évêque de Bâle contractent, par le présent traité, l’engagement de maintenir leurs avantages réciproques et de détourner tout ce qui pourrait leur être contraire. A l’effet de quoi, le roi promet particulièrement que si le prince-évêque était outragé par qu< lques ennemis, ou troublé par des soulèvements intérieurs, la mu-niciparité l’aidera de ses forces et à ses frais et à la première réquisition qui lui en sera faite, suivant que les circonstances l’exigeront. De son côté, le prince-évêque de Bâle s’oblige, pour lui et ses successeurs, de maintenir, dans cet Etat, les levées d’hommes pour le service delà Fra ce. En conséquence, la capitulation du 4 mars 1768, au sujet du régiment que le pays entretient à la couronne, sera exécutée selon la forme et teneur, et il sera libre d’en faire une autre à son expiration; mais si on ne la renouvelait pas, les-dites levées se feront, par la suite, de la même manière qu'elles ont été pratiquées avant l’époque de 1760 et de 1768. » Voici l’article 3 : « Le roi et le prince-évêque de Bâle s'engagent d’empêcher et de ne pas souffrir que leurs ennemis et adversaires respectifs, s’établissent dans leur pays, terres et seigneuries, et de ne leur accorder aucun passage pour aller attaquer ou contester l’autre allié ; promettent réciproquement de s’y opposer, même à main armée, si la nécessité le requiert. Les deux parties conviendront ensemble, le cas échéant, des moyens nécessaires pour prouver la sûreté de leur Etat, en fermant les passages par lesquels les ennemis ou adversaires y pourraient pénétrer. Voici l’article 4 : « Le prince-évêque de Bâle déclare, de la manière la plus positive et la plus expresse, vouloir observer dans la guerre à venir entre la France et telle autre puissance que ce soit, la plus exacte neutralité, sauf les stipulations contenues aux articles précédents, sauf aussi les devoirs que le prince-évêque de Bâle peut avoir à remplir en sa qualité de membre du corps germanique. » D’après ces trois articles, la France est en droit, lorsque des ennemis ou adversaires voudraient s’établir dans le pays de l’evêque de Bâle, de réclamer l’exécution de l’article 3, et d’empêcher qu’ils ne s’y établissent. D’après cet article, le cas échéant, c’est-à-dire des ennemis ou adversaires se présentant, les deux partis doivent convenir ensemble des moyens nécessaires pour procurer la sûreté de leurs Etats, en fermant les 531 passages par lesquels leurs ennemis ou adversaires y pourraient pénétrer. Dans ce même article, on trouve encore ces mots : « De s'y opposer meme à main armée , si la nécessité le requiert ». Les comités diplomatique et militaire réunis ont pensé que, pour suivre à la lettre le traité, et pour ne point témoigner des inquiétudes que nous ne sommes pas encore dans le cas d’avoir, il fallait ordonner au ministre des affaires étrangères d’envoyer vers le prince-évêque de Bâle, pour y traiter des moyens convenables dans la circonstance actuelle, pour procurer la sûreté respective des deux Etats. On demande qu’il soit mis dans le d cret : « en fermant les passages » . Sans doute, fermer les passages est le résultat de la négociation; mais les mots fermer les passages dans le décret, indiqueraient que vous avez déjà des ennemis et adversaires qui veulent s’introduire chez nous. Or je ne crois pas opportun ni vrai de dire que nous avons actuellement des ennemis établis dans le pays de Porentruy. D’après cela, le comité n’a pas cru qu’il fût convenable de dire, dans le projet de décret, fermer les passages, parce qu’en effet le traité ne porte pas précisément que ce seront les Français qui fermeront les passages, le traité porte : « En fermant les passages. » Il est resté indécis à qui ce serait à fermer les passages. lise présente une première difficulté : c’est que l’évêque de Bâle a dé-armé tous les habitants de Porentruy ; que par con-équent il lui est impossible, avec les habitants de Poreniruy, de garder et de fermer les passages. Il n’est pas convenable que l'Assemblée veuille d’ici, sans information ultérieure, sans négociation préalable, s’emparer des passages, et par là même déclarer que les troupes de Porentruy sont ennemies, et reconnaître que nous avons des ennemis effectifs et actuellement existants. Nous avons pensé, au contraire, que c’était précisément là le but de la négociation ; que dans les instructions données à l’envoyé, il lui serait dit de représenter à l’évêque de Bâle les inquiétudes que pouvaient donner à la nation française, non seulement l’établissement des troupes dans son pays, non seulement l’impossibilité où il s’était mis en désarmant ses habitants, de pouvoir garder les passages, mais encore l’inquiétude que peuvent nous causer le rassemblement d’é-migrants, les différents mouvements causés dans la diète de Rastibonne, et autres objets qui sont faits pour nous faire mettre sur nos gardes. Mais nous avons cru devoir laisser à la négociation tous les moyens possibles, soit d’obtenir de l’évêque de Bâ'e la retraite des troupes autrichiennes en lui offrant des troupes françaises, soit d’obtenir la garde des passages par des troupes françaises, soit enlin d’obtenir de lui la garde des passages par des troupes françaises et des habitants de Porentruy. L’Assemblée ne peut pas décréter tous ces objets, car il en résulterait que vous lieriez tellement les maios au négociateur, qu’il n’aurait rien à faire que de signifier votre dérret. Voici le projet de décret que votre comité vous propose : « L'Assemblée nationale décrète que le ministre des affaires étrangères enverra auprès de l’évêque de Bâle un minisire chargé de réclamer l’exécution du traité de 1780. » M. Rewbell. La réflexion de M. d’André est