(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 août 17S9.[ 434 aucun temps pour des avis et des opinions qu’il aurait pu manifester dans jes Assemblées, et sa personne doit être déclarée inviolable. 2° Le corps exécutif ne pourra, sous aucun prétexte, se mêler de la police des assemblées du corps législatif. Il n’ordonnera dans aucun temps aux soldats d’approcher du lieu où elles sc tiendront, à moins qu’il n’en soit requis par l’autre, auquel cas lesdits soldats seront uniquement aux ordres du corps législatif. Art. 57. Il faut également que le corps exécutif, non-seulement ait connaissance de toutes les résolutions du corps législatif qu’il doit être chargé de faire exécuter, mais qu’il ait encore le droit de s’opposer efficacement à toutes celles qu’il jugera nuisibles: ainsi aucune résolution du pouvoir législatif ne pourra être érigée en loi que par la sanction du corps exécutif. Art. 58. Le pouvoir exécutif aura encore dans tous les temps le droit de faire au corps législatif les demandes et propositions qu’il croira avantageuses à la chose publique, et s’il éprouve un refus de sa part, il aura celui de s’adresser au peuple en qui réside la plénitude des pouvoirs, de le faire assembler pour qu’il prononce lui-même, qu’il manifeste ses intentions à ses représentants; et même pour qu’il lui en substitue d’autres, s’il le juge nécessaire. Art. 59. Par le même motif, si le corps exécutif s’oppose par un veto à quelque décret du corps législatif, celui-ci aura le droit, sans que le premier puisse s’y opposer, de faire assembler le peuple qui devra manifester son vœu sur ledit décret. Art 60. Le pouvoir exécutif peut être confié (sans que la liberté soit compromise) à un seul individu, ou à plusieurs, ou à une partie considérable du peuple. De là naît la distinction des trois espèces de gouvernement, savoir : Je monarchique, l’aristocratique et le démocratique. Art. 61. Si un peuple est peu nombreux et qu’il occupe peu d’espace, un grand nombre d’individus peut sans inconvénient avoir part au pouvoir exécutif. Ce nombre doit diminuer à mesure que le peuple est plus nombreux et que son territoire est plus vaste ; en telle sorte que ..... Art. 62. L’intérêt d’une grande nation exige que le pouvoir exécutif soit concentré dans une seule personne, afin que son activité, qui doit être toujours proportionnée aux obstacles qui doivent être surmontés, et à la masse qui doit être mise en mouvement, soit la plus grande possible. Art. 63. Il résulte de cet exposé, que si chaque nation a le plus grand intérêt à bien discerner le gouvernement qui lui convient le mieux, son choix ne saurait être fait au hasard, et qu’il doit être principalement déterminé par sa population et l’étendue de son territoire. Art. 64. Quelle que soit l’étendue et la population d’un Etat, le pouvoir législatif ne saurait être confié à un seul, sans compromettre la liberté. 11 y aurait à craindre qu’il ne consultât que son propre intérêt dans l’établissement des lois. Art. 65. Dans toute espèce de gouvernement, les membres du corps législatif et ceux du corps judiciaire doivent être amovibles et révocables à volonté. Le peuple, en les faisant rentrer dans la classe ordinaire des citoyens, évite le danger d’être opprimé par eux. Art, 66. Il doit en être de même dans une république pour les membres du corps exécutif. Mais si dans une monarchie le peuple voulait se réserver le droit de renvoyer le Roi, et même celui d’en nommer un autre à son gré après sa mort, il est aisé de prévoir que le Roi ne manquerait pas de faire usage des grandes forces qui lui auraient été confiées, pour se maintenir sur le trône ou pour le transmettre à sa postérité, et que cette réserve du peuple serait une source perpétuelle de cabales, de factions et de guerres civiles. Art. 67. Le bonheur d’une société, qui ne peut exister au milieu des dissentions, exige donc que dans une monarchie le pouvoir exécutif soit concentré dans une seule famille, et que l’ordre de la succession à la couronne soit déterminé d’avance d’une manière claire et invariable. Alors l'ambition du monarque est satisfaite. Son intérêt et celui du peuple ne font qu’un, et la tranquillité publique ne peut être altérée. Art. 68. Il est de l’intérêt d’une nation que le corps exécutif soit respecté et jouisse de la plus haute considération, sans quoi les lois seront mal exécutées. Ainsi dans une monarchie il doit être érigé en principe que le Roi ne peut mal faire, et sa personne doit être sacrée. Art. 69. Si donc il survient des abus d’autorité dans l’exercice du pouvoir exécutif, ils ne peuvent être imputés qu’à ses ministres, qui doivent� eu demeurer responsables. Art. 70. La loi ne puuvant atteindre les délits secrets, c’est à ta religion et à la morale à la suppléer. Ainsi le bon ordre et la conservation d’une société dépendent essentiellement de la piété, de la religion et des bonnes mœurs, qui ne peuvent se répandre parmi loat un peuple que par des instructions publiques, et par l’exercice d'un culte public. Aussi les corps exécutif et législatif devront-its veiller soigneusement à ce qu’il y ait dans tous les temps des fonds convenables et suffisants pour la construction et l’entretien des églises, �et pour la subsistance de ses ministres. Art. 71. Et néanmoins aucun membre de la société ne pourra sous aucun prétexte être inquiété pour ses opinions religieuses. 11 ne doit point cesser de jouir de tous les droits de citoyen, tant qu’il se conforme aux lois et qu’il ne trouble pas le culte public. PROJET DE DÉCLARATION DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN, Discuté dans le sixième bureau de l'Assemblée nationale (1). Les représentants du peuple français, réunis et siégeant en Assemblée nationale, *à l’effet de régénérer la Constitution de l’Etat, et de déterminer les droits, l’exercice et les limites du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif; considérant que l’ordre social et toute bonne constitution doivent avoir pour base des principes immuables; que l’homme, né pour être libre, ne s’est soumis au régime d’une société politique, que pour mettre ses droits naturels sous la protection d’une force commune; voulant consacrer et reconnaître solennellement, en présence du suprême législateur de l’univers, les droits de l’homme et du citoyen, déclarent que ces droits reposent essentiellement sur les vérités suivantes. (1) Ce document n’a pas été inséré au Slonücur. 432 [Assemblée nationale.] . ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 août 1789.] Art. 1er. Chaque homme tient de la nature le droit de veiller à sa conservation et le désir d’être heureux. Art. 2. Pour assurer sa conservation et se procurer le bien être, chaque homme tient de la nature des facultés : c’est dans le plein et entier exercice de ces facultés que consiste la liberté. Art. 3. De l’usage de ces facultés dérive le droit de propriété. Art. 4. Chaque homme a un droit égal à sa liberté et à sa propriété. Art. 5. Mais chaque homme n’a pas reçu de la nature les mêmes moyens pour user desesdroils. De là naît l’inégalité entre les hommes : l’inégalité est donc dàns la nature même. Art. 6. La société s’est formée par le besoin de maintenir l’égalité des droits, au milieu de l’inégalité des moyens. Art. 7. Dans l’état de société chaque homme, pour obtenir l’exercice libre et légitime de ses facultés, doit le reconnaître dans ses semblables, le respecter et le faciliter. Art. 8. De cette réciprocité nécessaire résulte, entre les hommes réunis, la double relation des droits et des devoirs. Art. 9. Le but de toute société est de maintenir cette double relation; delà l’établissement des lois. Art. 10. L’objet de la loi est donc de garantir tous les droits, et d’assurer l’observation de tous les devoirs. Art. 11. Le premier devoir de tout citoyen étant de servir la société selon sa capacité et ses talents, il a le droit d’être appelé à tout emploi public. Art. 12. La loi étant l’expression de la volonté générale, tout citoyen doit avoir coopéré immédiatement à la formation de la loi. Art. 13. La loi doit être la même pour tous ; et aucune autorité politique n’est obligatoire pour le citoyen, qu’autant qu'elle commande au nom de la loi. Art. 14. Nul citoyen ne peut être accusé, ni troublé dans l’usage de sa propriété, ni gêné dans celui de sa liberté, qu’en vertu de la loi, avec les formes qu’elle a prescrites, et dans les cas qu’elle a prévus. Art. 15. Quand la loi punit, la peine doit toujours être proportionnée au délit, sans aucune acception de rang, d’état ou de fortune. Art. 16. La loi ne pouvant atteindre les délits secrets, c’est à la religion et à la morale à la suppléer. Il est donc essentiel, pour le bon ordre même de la société, que l’une et l’autre soient respectées. Art. 17. Le maintien de la religion exige un culte public. Le respect pour le culte public est donc indispensable. Art. 18. Tout citoyen qui ne trouble pas le culte établi, ne doit point être inquiété. Art. 19. La libre communication des pensées étant un droit du citoyen, elle ne doit être restreinte qu’autant qu’elle nuit aux droits d’autrui. Art. 20. La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée. Art. 21. Pour l’entretien de la force publique, et les autres frais du gouvernement, une contribution commune est indispensable; et sa répartition doit être rigoureusement proportionnelle entre tous les citoyens. Art. 22. La contribution publique étant une portion retranchée de la propriété de chaque citoyen, il a le droit d’en constater la nécessité, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. Art. 23. La société a le droit de demander Compte à tout agent public de son administration. Art. 24. Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, et la séparation des pouvoirs déterminée, n’a pas une véritable constitution. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M-CHAPELIER. Séance du jeudi 13 août 1789 (1). A l’ouverture de la séance, il a été rendu compte des adresses de la ville d’Oloron en Béarn, de Montmorillon en Poitou, de Château-du-Loir, de la municipalité dePaulhaguet,de la ville de Saint-Geniez en Uzadois, de la municipalité de Gavrus, de l’isle Bouchard, avec un arrêté; de Saint-Pol-de-Léon, de la ville de Sarlat, de la ville d’Etam-pes, de Clermont en Beauvoisis, de Bourbon-Lancy, de la noblesse de Baugô en Anjou, de Bellesme, de la noblesse de Bourmont en Bassi-gny, de Cueurs en Provence, de la noblesse de Ghàteau-Gontier, de Bercquemont, de Ghubly, de Nérac en Albret, de la ville de Dorât en Basse-Marche; de l’extension des pouvoirs de M. de fti-chier, député de Saintonge; des adresses des villes d’Hyères, de Cremieu, de Condom, et du procès-verbal des événements de la même ville; des villes de Bayonne, de Saintes, de Cardillat-sur-Garonne, des électeurs de Bordeaux, de Saint-Andêol, de Mezuy en Condomois, de Vezenobre, de la noblesse de Vire en Normandie, de Wailly-sur-Aine ; de l’extension de pouvoirs pour le clergé de Clermont en Beauvoisis; de la déclaration du député de Nérac, par laquelle, d’après l’augmentation de ses pouvoirs non encore vérifiés, il offre le rachat de ses droits personnels, bac, péage, pêche; de la déclaration du député de Sarreîouis par laquelle il renonce à ses privilèges personnels comme seigneur et juge; d’une lettre d’un M. Allemand, pourtant offre de ses ouvrages sur la navigation intérieure ; de la ville de Bar-sur-Seine, d’une représentation et réclamation de la ville de Lorient; des officiers municipaux de la ville d’Avranches; des trois ordres de Pézenas, de Minde-sur-Loire, de Semur en Brionnais, des trois ordres de Montpellier, de Lunas, de Poussan au diocèse de Montpellier, de Beaune, de Lavans, de Suze-la-Rousse, deSoissons, de Rieux,de Mezières, de Saint-Etienne en Forez, d’ivry, du bourg de Livron, de Villeneuve de Berg, de la ville d’Ai-gueperse, de Douai, de Saint-Pol-Trois-Châteaux, de Thionville, et de Saint-Pierre-le-Moutier. Un membre du comité de vérification a rendu compte de la vérification des pouvoirs des députés des communes du pays de Soulle, et de leur régularité; il a ensuite annoncé que les pouvoirs de M. le marquis de Rochefort, députéde la sénéchaussée du Mont-de-Marsan, avaient été vérifiés dès le 30 juin dernier. (l) Celte séance est incomplète au Moniteur ,