(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mars 1791. J 282 leur succès; mais ce droit, les acteurs ne peuvent pas s’empêcher eux-mêmes d’en convenir, n’éiait fondé que sur la propriété des pièces qu’ils avaieat concouru à acquérir à la Comédie française, et que la Comédie françise vient de perdre par le décret qui a été rendu à l’occasion de ces pièces. Leurs pensions tombent donc avec les propriétés qui en étaient le g ge; elles cessent d’être à la charge de la Comédie française qui tombe elle-même sous le poids de ses charges. Ce n’est cependant pas sans une profonde douleur que la Comédie se voit dans l’impuissance de continuer des récompenses qui excèdent sa force. Le plus honorabl ■ de ses devoirs, c mine la plus douce de ses jouissances, éiait de conserver sans cesse le lien qui l’unissnit à des artistes qui avaient tant ajouté à son influence, et t omme étendu son emi ire. Elle gémit de se voir condamnée à la nécessilé de rompre le lien, pour ainsi dire, de ses propres mains; mais ce que la Comédie ne i eut plus faire, parce que tous les moyens lui en sont malheureusement ravis, la nation ne se croira-t-elle pas intéressée à te faire elle-même? Ne voudra-t-ede pas venir au secours Longtemps victimes des plus absurdes préjugés, à l'or< e de talents, \ous étiez parvenus à les vaincre, lorsque l’Assemblée nationale a achevé de vous en affram h r. La ra son avant elle s’indignait de voir avilir une profession où plus eurs hommes estimés pendant leur vie avaient transmis des noms célèbres à la postérité. « L’Assemblée nationale n’a été que juste à votre égard, comme envers tous les citoyens; elle n’a distribué ni droits ni privilèges; elle a reconnu et proclamé les droits de la nature et ceux de la raison. La justice, son impartialité ont die ié de même les lois qu’elD a r nducs pour affranchir, de toute tyrannie put tique et privée, les fruits du genie. Des ho créés, qui, comme vous, se sont montrés, dans notre Révolution, d'gnes du nom de citoyens, alors même qu’en leur en contestait les dreits, ne peuvent qu applaudir à des dispositions aussi sages, quand même elles leur commande raient des >acrific s. «_La reconnaissance vous recommande d’autres intérêts qui sont l’objet de votre pétition. L’Assemblée nationale s’en fera rendre compte. » Une députation de la société des artistes peintres et sculpteurs est admise à la barre. L'orateur de la députation : Messieurs, les artistes qui sentent si vivement les bienfaits de la liberté dont ils jouissent comme citoyens, se rappellent avec douleur que, comme artistes, ils sont encore victimes du pouvoir ministériel et resserrés de toute part dans le cercle étroit du régime académique, régime absurde et tyrannique, qui, réunissant tous les pouvoirs dans les mains d’un petit nombre d’artistes, les a rendus les arbitres du sort et de la réputation de leurs concitoyens qui, comme eux, courent la carrière épineuse des arts. La société des artistes demande que les représentants de la nation prennent en considération et qu’ils examinent le mémoire et le plan ci-joints. M. le Président répond : « L’Assemblée nationale se fera rendre compte du mémoire que vous venez de lui remettre. Tous les genres d’étude lui sont chers; ainsi vos intérêts ne lui peuvent être indifférents; elle vous permet d’assister à la séance. » (L’Assemblée décrète le renvoi du mémoire et du plan au comité de Constitution.) M. de Montesquiou , président , quitte le fauteuil et se retire pour porter des décrets à la sanction du roi. M. Merlin, ex-président, le remplace au fauteuil. L’ordre du jour est un rapport du comité central de liquidation sur les moyens d'accélérer la liquidation de la dette de l'Etat, notamment à l'égard des personnes attachées au service du roi , entrepreneurs, fournisseurs et ouvriers. M. Camus, au nom du comité central de liquidation. Messieurs, le comiié central de liquidation, constamment animé des mêmes vues que l’Assemblée nationale, pour accélérer le payement des dettes de l’Etat, surtout en faveur de ceux de ses créanciers qni souffrent le plus, s’est occupé, sans délai, rie l’exécution du décret du 13 mars, qu’il avait lui-même provoqué. Pour remplir la mission qui lui a été donnée, il s’est attaché à rechercher d’abord les causes du retard qu’une partie de la liquidation des créances de l’Etat a éprouvées jusqu’ici, a rassemblé tout ce qui avait été décrété jusqu’à présent sur cette matière, et il en mettra sous les yeux de l’Assemblée l’analyse sommaire, afin qu’ayant présentes à l’esprit toutes les mesures qu’elle a ci-devant prises, elle distingue celles qui désormais seraient inutiles, celles dont les dispositions peuvent exiger quelques développements, et qu’elle connaisse ce qu’elle doit prononcer pour suppléer à l’insuffisance de ses premiers décrets. Dès le mois de novembre 1789, l’Assemblée ordonna, par un décret du 21, que le ministre des finances lui présenterait un état de tous les arriérés et reliquats dus par les départements, ainsi que des effets dont le remboursement avait été suspendu. Un second décret du 22 janvier 1790 ordonna, d’une manière plus impérative (art. 7) que, dans un mois, au plus tard, les a iministrateurs de chaque département et les ordonnateurs de toute espece de dépense, remettraient au comité de liquida- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mars 1791.] 283 tion, établi par le même décret, un état certifié véritable, de toutes les dépenses arriérées dans leur département. Les fournisseurs et entrepreneurs (art. 8) furent avertis de représenter leurs titres de créance. Le comité fut chargé (art. 9) de rendre compte à l’Assemblée, de chaque partie de la dette, à mesure qu’elle serait vérifiée; et de lui soumettre le jugement des parties qui pourraient être contestées. Le payement de toute créance arriérée fut suspendu (art. 5) jusqu’à la liquidation. La sanction de ce décret n’a été donnée que le 28 mars. Le 7 avril 1790, nouveau décret qui enjoint aux ministres et ordonnateurs d’exécuter l’article 7 du décret du 22 janvier, sur la remise à faire, au plus tard dans un mois, d’un état certifié véritable de toutes les dépenses arriérées de leur département. Le 17 juillet 1790, le comité de liquidation, établi le 22 janvier, fit régler, par l’Assemblée, ses fonctions et l’objet de son travail. Dans les mois de septembre et d’octobre, l’Assemblée ordonna quelques dispositions particulières relatives à la liquidation des offices de judi-cature, dont le comité de judicature fut chargé. Le 7 novembre 1790, la suspension du payement des créances arriérées fut levée ; et l’Assemblée nationale décréta que le payement en serait fait à bureau ouvert au premier janvier lors prochain. Le 22 du même mois de novembre, le comité de liquidation présenta un rapport sur le plan et l’ordre de son travail. Ce fut peu de temps après que l’Assemblée nationale, considérant que les opérations de finance, dont plusieurs de ses comités étaient chargés, exigeaient un temps beaucoup plus considérable que celui dont les travaux de l’Assemblée leur laissaient la disposition ; et que d’ailleurs le résultat des avis des comités ne lui offrait point la responsabilité, toujours si essentielle en matière de finance, décréta le 16 décembre 1790, qu’il serait nommé, par le roi, un commissaire général de la liquidation, chargé de vérifier tous les faits relatifs aux demandes des créanciers; responsable de ces faits, et tenu de faire son rapport aux comités qui en rendraient compte ensuite à l’Assemblée. Ce décret général a été maintenu par plusieurs décrets particuliers, qui ont renvoyé à la direction de liquidation des rapports présentés sans vérification préalable du commissaire liquidateur. Les bureaux de la liquidation ayant été organisés, et étant en activité, un décret du 6 février 1791 a posé les premiers principes et les bases générales sur la liquidation. On avait proposé, le 21 février, une disposition particulière pour la liquidation des ouvriers; mais le projet de décret fut renvoyé à la rédaction, et peu de temps après il intervint, le 3 mars, le décret qui attribue au comité central de liquidation l’audition des rapports du commissaire du roi, afin de reconnaître ce qui, n’étant pas susceptible de difficulté, doit être mis sur-le-champ sous les yeux de l'Assemblée; et ce qui, exigeant un examen plus détaillé, doit être renvoyé à la discussion particulière des divers comités, dont les commissaires se trouvent réunis au comité central. En exécution de ce décret, plusieurs membres du comité central ont fait successivement à l’Assemblée, le rapport de demandes formées par les créanciers de l’Etat, pour le remboursement d’offices, le payement d’indemnités, l’acquit de dépenses et de fournitures; ils n’ont pas fait de choix entre les objets qui leur ont été présentés ; ils ont fait le rapport de tout ce qui était liquidé; ils ont rendu compte de demandes à rejeter, comme de demandes à accueillir. Quelques entrepreneurs et fournisseurs ont été liquidés aussi. Le petit nombre de ceux dont on rapportait les demandes, n’a pas moins surpris le comité central qu’il a surpris le public ; son attention s’est fixée sur les causes qui pourraient arrêter cette partie de la liquidation ; les éclaircissements qu’il a pris à cet égard, lui ont fait connaître trois causes du retard qui l’afüigeeit. La première était la négligence des ordonnateurs. Les décrets des 21 novembre 1789, 22 janvier et 7 avril 1790, sur la remise des états de l’arriéré des départements, paraissent n’avoir pas encore reçu une exécution complète ; et parmi beaucoup d’états qui ont été remis, on ne trouve pas encore le total de l’arriéré des départements. Le second obstacle, à la célérité de cette partie des liquidations, paraît avoir été la terreur inspirée à plusieurs entrepreneurs et ouvriers, sur leur sort à venir, s’ils adressaient leurs demandes à l’Assemblée nationale. On n’ignore pas combiea les dépositaires de l’autorité, lorsqu’ils ont contracté l’habitude d’en abuser, ont de peine à s’en voir dépouiller. Il paraît que plusieurs entrepreneurs et fournisseurs ont craint de n’être plus employés, s’ils se permettaient de porter leurs mémoires à l’Assemblée nationale. Le troisième obstacle aux liquidations résultait de l’incertitude et de l’hésitation où l’on se trouvait sur les véritables principes de la liquidation; sur les conditions requises, et en même temps seules nécessaires pour qu’une créance fût reconnue légitime et payable. Tels sont les trois obstacles qu’il faut écarter pour assurer à la liquidation la rapidité dont elle est susceptible, et qui sera avantageuse tant aux créanciers de l’Etat personnellement qu’à la nation entière. La négligence des ordonnateurs à remettre les états de l’arriéré de leur département, conformément aux décrets qui le leur ont enjoint, annonce que l’on doit peu compter sur l’exécution du plan que l’on s’était proposé d’abord, de connaître en ruasse tout l’arriéré qui compose une grande partie de la dette de l’Etat, et de liquider pareillement en masse cet arriéré pour en faire distribuer ensuite les fonds aux créanciers individuels. L’expérience ayant démontré l’inutilité des premières tentatives, il faut recourir à d’autres moyens. Il faut livrer les ordonnateurs à la vigilance active et aux poursuites, dussent-elles être importunes, des parties intéressées. 11 faut autoriser les créanciers à faire aux ordonnateurs toutes les réquisitions utiles; et déclarer ceux-ci responsables, envers les créanciers, de tous les retards qu’une négligence coupable leur ferait éprouver. Le second obstacle est malheureusemeut une suite de ce caractère bas et rampant, qui énervait toutes les personnes habituées à fréquenter la cour et les bureaux de ses agents. L’intérêt personnel achèvera sans doute de vaincre la vaine terreur d’être vexé pour avoir osé demander justice : et quelque parti que prennent ces créanciers servilement timides, la nation saurait au moins, que s’ils ne sont pas payés, c’est à eux seuls qu’on doit l’imputer; mais que les représentants de la nation sont exempts de reproche après la déclaration tant de fois et si solennelle- 284 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mars 1791. J meDt réitérée, que toute créance réclamée et justifiée est payable à bureau ouvert. Le troisième obstacle, résultant de l’incertitude sur les principes de la liquidation, a paru au comité central, le plus considérable; il a jugé que c’était celui qui exigeait l’examen le plus sérieux. Pour vaincre cet obs acle, il a paru nécessaire au comité de remonter aux principes, de les exposer à l’Assemblée et de lui proposer d’en décréter les conséquences. La liquidation de la dette, en prenant ce mot dans l’acception la plus générale, comprend l’examen de l’objet de la dépense, de ses motifs, de sa nécessité ou de son utilité; des précautions que l’on a prises avant d’ordonner les dépenses ; des formes que l’on devait suivre pour l’ordonner valablement. Il faut voir si la dépense a été faite avec toute l’économie dont il était susceptible, si les ouvrages ont été reçus par ceux qui avaient mission à cet effet; enfin si la dépense a été payée, soit en tout, soit en partie. Quiconque voudra mettre ses affaires parfaitement en règle, ne négligera aucune de ces opérations : la nation doit donc s’y livrer : mais est-il possible de faire toutes les parties de ce travail avec les créanciers? est-il possible d’exiger d’eux, et d’eux seuls qu’ils satisfassent à toutes ces demandes? Peut-on retarder leur payement jusqu’à ce qu’il y ait été répondu? Non, sans doute; et il y a ici une distinction essentielle entre les obligations du créancier et les obligations des ordonnateurs. Comment se font les travaux pour le compte du roi ou de la nation? L’entrepreneur ou l’ouvrier sont mandés par un ordonnateur public ; on leur remet des plans, on leur donne des ordres, on leur indique le lieu du travail. Us y envoient leurs ouvriers, ils y font transporter leur3 matériaux, personne n’interrompt le cours de leurs travaux. Ces travaux achevés, les entrepreneurs ont-ils ou n’ont-ils pas acquis un titre pour être payés par l’Etat? Voilà le point auquel se réduit la question à l’égard des entrepreneurs, ouvriers et fournisseurs. Il serait absurde de prétendre que le maçon qui est mandé par le directeur des bâtiments, que le marchand qui est mandé par l’ordonnateur, exigera, d’abord, qu’on lui représente le litre par lequel l’ordonnateur a été établi en cette qualité : qu’on lui donnera ensuite la lecture des lois qui règlent ladirection des travaux et des fournitures, afin qu’il puisse s’assurer si toutes les formes qui doivent précéder soit la fourniture, soit la construction qu’on lui commande ont été suivies. Non : ce n’est làni le devoir, ni les fonctions d’un ouvrier; on lui commande, il faut qu’il exécute : et quand il a exécuté, il faut qu’on le paye. Aura-t-il donc été libre à des ordonnateurs, ou imprudents, ou intéressés, négligents ou déprédateurs, de dissiper l’argent de l’Etat par des ordres donnés sans précaution, sans examen, pour des dépenses inutiles et arbitraires? Non, certes; mais ce n’est point contre l’ouvrier qu’il faut diriger les plaintes et les reproches. Il a été commis des abus; il faut punir le coupable, et le coupable est l’ordonnateur. C’est lui qui doit rendre compte de sa conduite, lui qui devra répondre lorsque lui oppo ant, d’une part, la quittance de l’ouvrier qu’il a mis dans la nécessité de payer; et d’autre part, la loi qui lui marquait quanu et comment il devait mettre un ouvrier en action, on lui demandera qu’il justifie la légitimité des motifs de la dépense, sa nécessité ou son utilité, sa conformité aux règles. Quant au créancier, il ne doit la preuve que des trois faits que voici : Un ordre de la part d’une personne qui était en possession publique de faire faire des travaux ou des fournitures au compte de l’Etat; le fait qu’il a travaillé ou fourni; et le fait qu’il n’a pas été payé. Ces réflexions sont d’une vérité sensible, surtout à l’égard des dettes du genre de celles dont il s’agit dans ce moment. Si l’on parlait de créances anciennes qui remontassent à une époque éloignée, le laps de temps qui se serait écoulé, formant déjà un préjugé contre le créancier ; et, d’un autre côté, les ordonnateurs dont il prétendrait avoir reçu sa mission n’existant plus pour répondre aux demandes qu’on leur adresserait, il pourrait être juste d’exiger du créancier des éclaircissements que nul autre que lui ne pourrait fournir; mais les dettes dont nous traitons ici sont des dettes récentes, dont tout le monde connaît l’existence, et sur lesquelles il n’y a, pour ainsi dire, autre chose à désirer que le nom du créancier et la somme précise qui lui est due. Personne n’ignore, par exemple, qu’en 1788 et 1789, la maison du roi a été servie, ses bâtiments entretenus, et qu’une grande partie de ceux qui ont donné leur temps ou leurs marchandises pour cet objet n’ont pas été payés. Ce n’est pas sur l’existence de la dette qu’on peut avoir des doutes, il n’y a qu’à en constater la quotité, connaître le nom des personnes à qui il est dû, et savoir combien il est dû à chacune d’elles. Ces opérations simples sont les seules que la justice autorise et que le devoir prescrive. C’est en s’y renfermant que la nation pourra rendre promptement à des pères de familles honnêtes, ce qu’ils ont avancé de bonne foi ; mettre des entrepreneurs, précieux à 1 Etat par le grand nombre d’ouvriers qu’il emploient, à portée de faire continuer leurs travaux; et prévenir enfin, s’il est temps encore, après 13 mois d’une suspension totale de payements, la ruine d’une multitude de citoyens. Voilà donc ce qu’il faut que, par un décret solennel, l’Assemblée fasse connaître aux créanciers de l’Etat. Elle doitspécifier les conditions que la loi exige d’eux pour établir leurs droits, afin que, de leur part, ils satisfassent à ce que la loi leur prescrit; et que, d’une autre part, on ne puisse les assujettir à aucune autre condition qu’à celles qui seront écrites dans la loi. En remplissant ce devoir à l’égard des créanciers de l’Etat, les représentants de la nation n’oublieront pas un autre devoir, non moins sacré, que la confiance des peuples leur impose: celui d'examiner la gestion des ordonnateurs. Le roi avait, depuis son avènement au trône, établi, pour la p’uparl des départements de la dépense publique, des lois sages, des règles de prudence et d’économie qui eussent prévenu les abus si elles avaient été fidèlement exécutées. Chaque ordonnateur doit justifier qu’il ne s’en est pas écarté, ou bien il doit payer les sommes dont il aura mal à propos accru la dépense publique en s’en écartant. Plusieurs ordonnateurs, les commissaires de la maison du roi, par exemple, ont donné en entrant dans leur charge, soit des cautionnements, soit des finances, qui répondront de leur conduite; on leur représentera les payements faits d’après leurs ordres : et alors, ou bien ils justifieront ces payements par leur conformité avec les lois existantes, ou Lien ils rembourseront ce qui aura été indûment dépensé. Mais, pour exercer cette surveillance ou plutôt (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mars 1791 285 celte espèce d’action à l’égard des administrateurs et ordonnateurs, il est nécessaire que l’Assemblée forme un établissement dont un grand nombre de circonstances rend chaque jour la création plus urgente: c’est un bureau de comptabilité. Les chambres des comptes expirent; il leur a été défendu d’entreprendre l’examen d’aucun nouveau compte. Une foule d’anciennes administrations, de compagnies et de personnes qui touchaient les deniers publics sont supprimées: hâtons-nous deconnaîtrela situationdans laquelle elles laissent les finances de la nation. Ceux d’entre les administrateurs qui se trouveront reliquatai-res, ne seront peut-être pas longtemps solvables ; ceux dont la gestion a été pure et fidèle sont intéressés à le faire constaterpromptement, afin de recevoir ce qui leur revient et de dégager leur fortune privée de la fortune publique, avec laquelle ils l’avaient confondue. Il est donc essentiel, et c’est un des objets que le comité central présentera à l’Assemblée, d’établir promptement un bureau de comptabilité. Son devoir sera d’être aussi sévère à l’égard des ordonnateurs, que la nation doit être facile et bienfaisante à l’égard de ceux qui ont fourni à l’Etat leurs fonds ou leur travail sur la demande de ces ordonnateurs. Les principes de l’établissement du bureau de comptabilité, ceux de son organisation ne paraissent pas difficiles à saisir, et saus doute il e t permis d’augurer que cette surveillance, qui doit assurer l’emploi fidèle des contributions du peuple, ne sera jamais confiée à d’autres quaux représentants du peuple. Une autre opération, nécessaire pour faciliter et compléter le travail de la liquidation actuelle, consiste à donner au public le tableau général des objets dont le remboursement est exigible, et de ceux pour lesquels on se présenterait inutilement à la liquidation; mais ceci n’est qu’un objet de détail; on s’en occupe dans les bureaux du directeur de la liquidation, et bientôt on mettra sous les yeux de l’Assemblée trois états : celui des dettes dont elle a expressément ordonné le payement actuel; celui des dettes qui n’ont pas encore été comprises littéralement dans ses décrets, mais qui paraissent être payables, soit d’après l’esprit des décrets, soit d’après des événements postérieurs aux premiers décrets prononcés; enfin, celui des dettes qui ne paraissent pas être susceptibles de remboursement actuel ; mais à l’égard desquelles les parties intéressées forment des demandes qu’il faut pouvoir écarter par des décisions formelles. A la vue de ces trois étals, l’Assemblée statuera sur les objets encore indécis, et elle achèvera de prévenir les incertitudes sur les objets de remboursements, comme elle va fixer aujourd’hui les incertitudes sur les titres et les preuves à rapporter pour obtenir le payement des objets exigibles. Le projet de décret rédigé par le comité central, d’après les réflexions qui viennent d’être présentées à l’Assemblée, a donc, pour objets {irincipaux, premièrement, de rassembler dans a main du directeur de la liquidation toutes les pièces nécessaires à son travail; secondement, de donner aux parties intéressées les moyens suffisants pour contraindre les administrateurs, par les ordres desquels ils ont donné leur argent, leurs marchandises ou leur travail, à leur remettre les pièces que ces ordonnateurs doivent fournir pour établir la réalité des dépenses qu’ils ont ordonnées ; troisièmement, de déterminer quelles sont les preuves dont les créanciers de l’Etat doivent appuyer leurs demandes et les seules qu’on peut exiger d’eux pour ordonner le payement. Les précautions à prendre pour s’assurer de la fidélité de la gestion des ordonnateurs feront le sujet d’une demande particulière, que le comité présentera après qu’il aura été prononcé sur le projet de décret dont voici les articles : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité central de liquidation, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les ministres, ordonnateurs, administrateurs et toutes autres personnes sur les ordres desquelles les dépenses se font dans les divers départements, qui n’auraient pas encore remis les états et ordonnances des dépenses, soit ordinaires, soit variables, soit extraordinaires, de leur département, le remettront, dans la huitaine de la sanction du présent décret, entre les mains du directeur général de la liquidation, savoir : les ordonnanc s non entamées, en originaux; les états et ordonnances entamées, soit en originaux, soit en copies signées d’eux, avec mention de ce qui aura été payé, tant sur lesdits états, que sur lesdiies ordonnances entamées. Le directeur gé » éral de la liquidation leur en donnera son récépissé. « Ceux desdits états et ordonnances qui auraient été précédemment remis aux différents comités de l’Assemblée, seront portés sans délai entre les mains du directeur général de la liquidation qui en donnera pareillement son récépissé. Art. 2. « Toute personne qui se prétendra créancière de l’Etat pour des objets faisant partie de l’arriéré de quelque département que ce soit, et qui n’aura pas encore remis de mémoire contenant sa demande, remettra au directeur général de la liquidation un mémoire contenant la déclaration de la somme qu’elle prétend lui être due, et dont elle entend être payée, et l’énonciation des causes de la créance; elle joindra à l’appui de son mémoire les titres justificatifs de la créance dont elle se trouvera en possession et indiquera un domicile où l’on puisse s’adresser pour lui faire passer les avis relatifs à sa demande. Il sera joint de plus au mémoire un certificat tant de l’ordonna eur du Trésor public, que du trésorier ou caissier particulier du département, portant que la somme demandée n’a été payée ni en tout ni en partie. Art. 3. « Les qualités individuelles des créanciers pour établir le droit qu’ils ont à la propriété des créances qu’ils réclament seront justifiées dans la forme ordinaire par les marchés, les actes de société et autr-s qu’ils ont pu souscrire, ainsi que par les inventaires, actes de notoriété, partages et autres titres translatifs de propriété, lorsqu’ils exerceront les droits de personnes auxquelles ils auront succédé. Art. 4. « A l’instant de la remise qui sera faite dans le bureau du directeur général de la liquidation, des mémoires et des pièces mentionnées aux articles précédents, le nom du créancier qui aura