[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 décembre 1789.] m lois un pouvoir sans abus, des droits sans privilèges, et la liberté sans trouble et sans excès. Je remets à mon successeur, honoré par deux fois de vos suffrages, une place qui semble devenir la sienne par ses talents, comme par votre choix; il semble qu’il ne lui reste plus qu'à surmonter la prospérités avec le même courage qui l’a rendu supérieur à toutes les disgrâces. Ses premiers succès sont le gage de ceux qui lui sont encore réservés, et cette batteuse épreuve de ses propres forces doit lui donner, an milieu de ses travaux, l’activité, la confiance et le repos. M.Fréteau de Saint-Just, nouveau président, a pris place au siège, et après avoir annoncé que le port de Toulon était en danger et qu’il fallait se hâter d’y envoyer une force nationale il a dit: Messieurs, je voudrais vous entretenir de ma vive reconnaissance ; mais comment vous faire connaître par des paroles des émotions aussi vives et aussi profondes que celles que j’éprouve? Il est des sentiments qu’aucune expression ne sautait dépeindre, comme il est des témoignages de bienveillance, de confiance et d’estime, qu’une vie entière de travaux, de services et de zèle ne saurait payer. Telle fut, Messieurs, cette scène touchante du 24 octobre, qui sera, dans tous les instants de mon existence, présente à ma mémoire, ou plutôt à mon cœur, où vous daignâtes, avec un empressement si unanime, m’offrir la prorogation de ma séance dans le poste honorable auquel vos bontés m’élèvent une seconde fois. Tel est encore le choix inattendu qui m’autorise à vous présenter en ce moment mes remer-cîments et mes vœux. Ceux-ci seront comblés, Messieurs, si fidèles, comme vous voulez toujours l’être, à ces règles si sages que votre prudence a tracées, vous en respectez l’utile sévérité dans tous les instants de vo« délibérations. Il en est, je le sais, où l’aridité inévitable des matières, la longueur pénible des discussions, l’embarras et la. délicatesse des avis proposés, conduisent l’Assemblée à des positions difficiles, et semblent placer sa prudence entre des écueils à travers lesquels elle poursuit longtemps des résultats qui semblent la fuir. Daignez, Messieurs, daignez alors vous laisser uniquement guider par l’amour de la paix, par l’esprit d’union et de concorde, par le respect pour la liberté si désirable des opinions, par le souvenir enfin de ce que vous vous devez à vous-mêmes au milieu du grand et honorable spectacle que vous donnez au monde. Daignez penser qu’il est impossible d’obtenir tous les jours ces séances touchantes et consolantes, où les fruits du travail et du zèle, du talent et de l’étude vous sont offerts avec des développements qui saisissent l’admiration, et qui surprendraient en un moment l’unanimité de vos suffrages, si la multitude et la variété même des vues que le génie vous présente ne suspendaient votre choix. Vous retracerai -je, entre autres, le souvenir de l’une de ces séances, de celle de samedi où vos opinions semblèrent autant d’oracles destinés à revivifier dans le cœur des assistants tous les sentiments honnêtes et à épurer la morale de l’empire lui-même ; où leurs résultats préparèrent d’une manière spéciale le triomphe de la vertu de cette première vertu nationale, la droiture, la loyauté, le respect pour la foi publique. Poursuivez, Messieurs, au milieu de tels succès vos brillantes destinées, et préparez pour le plus juste des hommes et le plus respectable des rois le jour mémorable où, secondé de vos efforts, recueillant le fruit de vos communs travaux, il fera entrer, après tant d’orages, le vabseau de l’Etat au port de la justice, delà paix et d’une liberté durable, et où la plus belle et la plus légitime des couronnes, celie de ses vertus, en ornera la poupe , après une si périlleuse navigation. (Puis s’adressant à M. l’archevêque d’Aix, M. Fré-teau ajouta :) Après avoir exprimé ma reconnaissance à l’Assemblée, vous me permettrez, Monsieur, de vous témoigner ma sensibilité pour les choses trop flatteuses dont il vous a plu m’honorer; vos rares talents, exercés sur tant d’objets, et qui sont devenus sip'écieux pour nous, le zèle qui a doublé vos forces, cet amour inaltérable de ce qui est juste, et ce tact sûr et délicat, qui vous le fait discerner d’une manière si prompte à tous ces dons Imureux, ajoutés par le travail ; une extrême facilité; tels sont les avantages que vous venez de consacrer au bien de la patrie et à la gloire de l'Assemblée, qu’il paraît bien difficile de servir dignement après vous. Ces deux discours reçoivent de fréquents applaudissements. L’Assemblée vote des remercîmpnts à M. l’archevêque d’Aix pour la manière dont il a géré la présidence. Un membre a ensuite proposé d'envoyer une députation à la reine, pour faire à Sa Majesté des compliments de condoléance, à l’occasion de la mort de sa sœur ; à quoi l’on a procédé sur-le-champ. La lecture du procès-verbal a suivi; et sur ce qu’il s’est élevé une difficulté, pour savoir s’il contiendrait le précis de chacun des plans de finances, '.qui avaient occupé la précédente séance, l’Assemblée a décrété que l’extrait seul du plan qu’elle avait soumis à l’examen des 10 commissaires y serait inséré. L’on a lu les adresses de diverses villes et communautés dont suit la teneur : Adresse du comité électif de la ville de Bernay en Normandie, qui demande pour sa ville un corps administratif et un siège de justice royale; il présente à l’Assemblée, nationale sa soumission à ses décrets. Délibération du comité municipal de la ville de Lagnieu en Bugey, contenant une nouvelle adhésion à tons les décrets rendus et à rendre par l’Assemblé nationale ,et notamment à celui portant contribution du quart des revenus. Four présenter cette délibération, et demander que la ville de Lagnieu soit érigée en chef-lieu de district, la communauté générale adéputé M. Dupuy, maire de la ville. Adresse de félicitations, remercîmens et adhésion du corps municipal et de la garde nationale de Bar-le-Duc. Ils promettent solennellement d’employer tous les moyens qui sont en leur pouvoir pour assurer l’exécution des décrets de l’Assemblée. Délibération du même genre de la communauté de Lahacourt en Barrois. Elle offre pour sa contribution un don pairiotique d’une somme de 1,000 écus à prendre sur les deniers provenant de la vente de ses bois communaux, qui sont actuellement dans la caisse du receveur des bois de la province. Ils se soumettent en outre à fournir gratuitement et annuellement le service en bois présenté à Sa Majesté le jour du jeudi-saint, pour le repas de la Gène. [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Adresse d’adhésion et de félicitations de la paroisse de Saint-Malo; elle demande une munici-cipalité, une juridiction royale, un bureau de poste aux lettres, la division de la paroisse en deux parties, et une école gratuite. Adresse du même genre des officiers de la sénéchaussée et des principaux habitants de la ville de Lesneven ; ils réclamentavee instance la conservation de cette sénéchaussée. Délibération des officiers du bailliage de Mont-richard, par laquelle ils déclarent qu’ils rendront à l'avenir la justice gratuitement, ainsi qu’ils l’on t fait depuis le 4 août dernier. Adresse des citoyens de la ville d’Ainay-le-Château en Bourbonnais, portant respect, reconnaissance et adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale ; elle demande la conservation et l'extension rie sa justice, et manifeste son désir de rester unie à la capitale de sa province. Adressedes citoyens de Saintes, qui représentent à l’Assemblée nationale que cette capitale de la Saintonge, doit par toutes les convenances locales, et d’après les principes de l’Assemblée, être chef-lieu de département. Adresse des citoyens de la ville de Pont-l’É-vêque en Normandie, contenant leur soumission, leur attachement et leur dévouement absolu aux décrets de l’Assemblée, ainsi que leur amour constant, inviolable et immuable pour la personne sacrée du Boi. Acte d’adhésion des religieux Augustins de Lille à l’adresse de MM. les curés des villes et châtellenie composant le bailliage de Lille en Flandre, à L’Assemblée nationale. Adresse de la ville de Saint-Quentin, qui offre son hommage, son admiration à l’Assemblée, et une entière "adhésion à ses décrets Adresse de la viguerie de Sisteron, composée de soixante-quatre communautés, par laquelle elle adhère à tous les décrets de l’Assemblée, et elle ratifie expressément la renonciation, faite par les députés de Provence à tous les privilèges, exemptions et usages de sa province. Adresse de la ville de Soissons, qui applaudit aux décrets de L’Assemblée nationale concernant la nouvelle division du royaume, et présente les raisons qu’elle croit avoir "pour être chef-lieu de déparlement. Mémoire de la ville de Thouars en Poitou, pour obtenir une justice royale dans son sein. Adresse dé la ville de Bourbonne-les-Bains, portant adhesion aux decrets de l’Àssemplée, et en particulier à ceux du 4 août et jours suivants ; elle offre à la nation une partie du produit du recepage du quart en réserve de la commune, destinant l’autre à l’achat des grains nécessaires pour le soulagement des pauvres, et demande à l’Assemblée nationale la permission de faire rece-per le dit quart en réserve; elle représente que la ville n’a reçu qu’une partie des décrets de l’Assemblée nationale, demande lechangementdu régime de la maîtrise des eaux et forêts, et d’être nommée chef-lieu dans la nouvelle division du royaume. Adresse de la ville de Mesle en Poitou, portant acle de soumission aux décrets de l’Assemblée nationale, et la demande d’une justice royale à Mesle et d’une cour souveraine à Poitiers. Extrait des délibérations de la municipalité, du conseil permanent, des électeurs et de plusieurs citoyens réunis de la ville deNîmes en Languedoc, qui applaudissent à la nouvelle division du royaume, décrétée par l’Assemblée nationale, et [7 déeembre 1789. J demandent que leur ville soit le siège d’un tribunal, et chef-lieu de département. MM. les directeurs et professeurs du lycée annoncent à MM. les députés que le cours de droit public est ouvert pour eux sans aucune souscription, et ils les invitent à y venir quand cela leur sera agréable. L’on a aussi lu le projet de réponse dont l’Assemblée avait chargé M. L’archevêque d’Aix pour lord Stanbope, president de la Société de la révolution en Angleterre ; ce projet est conçu eu termes : « 11 est digne, Milord, d’une Société célèbre, et d'un peuple libre, de s’intéressera tous ies progrès du bonheur et de la liberté publique. Depuis longtemps la nation française exerçait l’empire de ses connaissances et do ses arts. Elle dirigeait son gouvernement par ses opinions, quand elle ne se gouvernait pas encore elle-même par ses lois; elle poursuivait avec ardeur des vérités utiles; et, chaque jour étendant la lumière sur toutes les parties de son administration, elle semblait entraînée, comme par un mouvement universel, aux changements qui lui donnent sa consistance et sa forceïî Un roi que nous pouvons appeler le meilleur des hommes et le premier des citoyens, encouragait par ses vertus les espérances de sa nation ; et maintenant un concours unanime établit une Constitution durable sur les droits imprescriptibles des hommes et des citoyens. « L’Assemblée nationale a reçu, Milord, avec la plus vive et profonde sensibilité, l’adresse de la Société de la révolution d’Auglr terre, elle a consigné dans une délibération solennelle, qu’elle me charge de vous communiquer, l’impression que lui a fait éprouver une déclaration qui respire les sentiments d’humanité et de bienveillance universelle qui doivent lier dans tous les pays du monde les vrais amis de la liberté et du bonheur des nations. » M. Martineau observe qu’il manque à cette lettre l’idée importante du désir qu’a l’Assemblée de voir s’éteindre toute fâcheuse rivalité entre les deux nations, pour faire place à des sentiments de concorde et de fraternité, si véritablement convenables à leur gloire et à leurs intérêts réciproques. L’Assemblée prie M. l’archevêque d’Aix de l’y ajouter. M. de flaram bure, élève en pharmacie à l’Hôtel-Dieu, olfre à titre de don patriotique, deux médailles d’or qu’il a reçues pour prix de pharmacie, et l’Assemblée lui accorde séance à la barre. M. de la Luzerne, évêque de Langres, donne sa démission de député et est remplacé par M. Guyardin, sou suppléant, dont les pouvoirs ont été vérifiés. Un de MM. les secrétaires fait l’annonce d’une adresse de remercîments à l'occasion du décret de l’Assemblée nationale qui déclare l'île de Corse province française. Voici le texte de celte adresse (1) : « Messeigneurs, vous venez de décréter que l’ile de Corse fait partie de l’empire français, et que dès ce moment le Roi sera supplié d’y faire parvenir et publier tous les décrets de l’Assemblée nationale. « Ce décret, sanctionné par le Roi, désiré depuis longtemps, l’objet des vœux les plus ardents (1) Celte adresse n’a pas été insérée au Moniteur.