400 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.] abolis, ou du moins que s’ils sont conservés ils ne le soient que pour crime d’Etat et les meurtres. Art. 13. Que les lois établies pour la sanctification des fêtes et dimanches soient sévèrement observées, les curés n’étant pas écoutés lorsqu’ils se plaignent de la transgression de ces lois si sagement, portées. Art. 14. Qu’il soit établi un collège dans la ville de Gien, ainsi que des écoles de charité pour les garçons, les filles étant pourvues de cette ressource. Art. 15. Que la liberté de la presse, excepté pour les ouvrages contraires à la religion, au gouvernement et aux bonnes mœurs, sera établie. Art. 16. Que la plus étroite union avec le saint-siège soit conservée pour le bien de la religion. Art. 17. Que la loi pour la construction et les reconstructions des presbytères soit observée, et qu’il en soit donné à ceux qui n’en ont pas. Art. 18. Qu’il donne acte au sieur curé de Dam-pierre, membre du clergé du bailliage de Gien, néanmoins du diocèse d’Orléans, de la demande qu’il fait d’adhérer aux curés de son diocèse pour la suppression du déport. Art. 19. Que tous les bénéfices, de quelque nature qu’il soient, puissent être possédés par tous les ecclésiastiques, sans avoir égard à la naissance. Tous lesquels articles, après avoir été lus et relus dans rassemblée de l’ordre par les susdits commissaires en présentant le travail delà rédaction finie, ont été définitivement arrêtés et consentis dans ladite assemblée commencée hier et prorogée cejourd’hui 18 du présent mois, dont acte signé des membres dudit clergé. Signé Fer-naut, trésorier. Et le même jour, ledit clergé continuant ses opérations, a procédé au scrutin de trois membres de l’assemblée pour être scrutateurs. Les billets déposés successivement par les députés dans un vase placé sur la table au-devant du secrétaire de l’assemblée, et la vérification faite par ledit secrétaire assisté des trois plus anciens d’âge, les trois qui ont eu le plus de voix ont été les sieurs Glerjaut, Hollier et Mauduisson, qui en conséquence ont été les trois scrutateurs, lesquels ayant pris place au milieu de l’assemblée devant le bureau, ils ont déposé d’abord leurs billets dans le vase à ce préparé, après quoi tous les électeurs sont venus l’un après l’autre déposer ostensiblement leurs billets dans ledits vase ; les électeurs ayant repris leurs places, les scrutateurs ont procédé d’abord au compte et au recensement des billets, et le compte s’étant trouvé, ils les ont ouverts et ont trouvé que le plus grand nombre de voix a été pour le sieur Claude-Benjamin Vallet, curé de Saint-Louis de Gien, qui en conséquence a été élu député aux Etats généraux qui se feront le 27 avril prochain à Versailles, et comme tel on lui a remis les procès-verbaux et le cahier ci-dessus, en lui recommandant pour instructions de s’y renfermer, et lui donnant en outre pouvoirs suffisants pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peujt concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable pour la prospérité générale du royaume et le bien de tous et chacun des sujets du Roi, lequel procès-verbal restera déposé entre les mains de notre greffier et une copie authentique d’icelui sera remise au député avec le cahier dudit clergé pour lui servir à Versailles ce que de raison. Fait sous nos seings et celui du greffier, les jour et an que dessus. Signé Fernaut, trésorier, et Guérin, greffier. Nous Joseph-Augustin-Marie de Montmerceyi conseiller du Roi, juge magistrat au bailliage royal de Gien-sur-Loire, faisant en l’absence de MM. les lieutenants général et particulier audit siège, certifions à tous qu’il appartiendra que maître Guérin, qui a collationné le cahier des autres parts, est greffier du bailliage royal de Gien-sur-Loire et que sa signature apposée en fin est véritable. Fait à Gien, en notre hôtel, le 22 avril 1789, Signé Marie de Montmercey. CAHIER Des pouvoirs et instructions de l'ordre de la noblesse du bailliage de Gien , remis à M. de Vil-liers , élu député pour les Etats généraux (1). L’an 1789, le vingt-deuxième jour de mars, les membres composant la noblesse du bailliage de Gien, soussignés, réunis dans la salle désignée pour l’assemblée de l’ordre, en conséquence du règlement du Roi, en date du 24 janvier 1789, présidée par M. le bailli, pour Sa Majesté ; Ont arrêté que leur député portera au pied du trône les assurances de leur soumission et de leur fidélité à la personne sacrée de Sa Majesté *, leurs respectueuses actions de grâces pour la convocation des Etats généraux, dont la formation légale et le retour successif peuvent seuls établir et conserver les droits de la nation. Manière d’opiner. — Représentera que la possession d’opiner par ordre en a fait un point de droit public; les lettres du 24 janvier dernier l’ont confirmée. Chaque ordre a choisi ses députés ; c’est une conséquence qu’ils opinent de même. Cette prérogative, du plus grand intérêt pour le clergé et la noblesse, établit une constitution politique avantageuse. La constitution des Etats doit être combinée de manière qu’une portion modère l’autre ; que les trois ordres forment leurs opinions séparément, afin de n’être pas emportés par une même fermentation ; qu’une question ait le temps d’être discutée par des gens sages, avant de recevoir une décision : alors l’effet d’une intrigue sera retardé dans un ordre par l’incertitude de la façon de penser de l’autre. Dans l’état actuelles Etats généraux sont composés de trois ordres ; et le veto , ou opposition d’un seul des trois ordres, arrête toute décision. L’ordre de la noblesse demande que l’ordre du tiers-état ne soit plus à l’avenir composé que des habitants des villes, et que par ville on entende toutes celles où il y a quelques tribunaux ou juridiction royales, ou enfin plus de deux clochers de paroisse. Création d'un quatrième ordre. — Qu’il soit créé et établi un quatrième ordre, qui sera composé de tous les habitants des paroisses de campagne, de quelque profession qu’ils soient, à l’exception seulement de ceux déjà compris dans les trois autres ordres, savoir : nobles, ecclésiastiques, et notamment les huissiers et praticiens, lesquels seront appelés à l’ordre proprement dit du tiers-état, en suivant le tribunal auquel ils sont ou ont été attachés ou immatriculés ; lequel quatrième ordre, sous le nom d’ordre des paysans, députera et sera représenté, ainsi que l’ancien ordre du tiers-état, par un seul député par cha-1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.J 4(U que députation, et pourra choisir ses députés et représentants dans tous les ordres, pourvu qu'ils ne soient ni notaires, ni avocats, procureurs, gens de pràtique, médecins ni chirurgiens : alors le corps des Etats ayant quatre voix au lieu de trois, les décisions passeront à la pluralité, et, en cas de partage, il n’y aura point de décision. Prérogative royale. Le premier devoir des sujets étant de reconnaître et confirmer l’autorité du Roi, le député requerra qu’on pose cette première base des délibérations qu’il est seul législateur dans l’ordre civil et de police, centre de réunion, magistral suprême en qui réside le point de décision; absolu dans les différentes demandes et remontrances de ses peuples, et des corps qu’il a créés pour l’ordre politique de son royaume ; indivisible entre les mains du Roi, l’autorité lui est confiée pour conserver et garantir à chaque individu les droits et propriétés, sans aucune atteinte inaliénable de sa nature, et n’est pas plus maître de s’en départir pour lui et ses successeurs, que de nommer un héritier au trône. Toute espèce de pouvoir qu’il a confié à des particuliers ou à des corps doit être regardé comme portion du sien ; et nul ne peut prétendre, par un long usage, se l’arroger et se le regarder propre. Autorité des Etats généraux. Pour effectuer la garantie des propriétés que le Roi doit à ses sujets, le député requerra qu’il soit proclamé, comme loi constitutionnelle, irrévocable, qu’aucun impôt ne sera mis ni prorogé que par la nation, et pour un temps limité au moins à l’intervalle des Etats généraux ; en sorte que cette prochaine tenue venant à ne pas avoir lieu, tout impôt cessera; que la nation ne sera responsable d’aucun emprunt à l’avenir, à moins qu’il n’ait été fait par les Etats généraux ou particuliers ; et afin de veiller h l’exécution d’une loi fondée sur tous les principes moraux et politiques, les Etats, composés de députés librement élus dans tous les cantons des terres soumises à la domination française, sans aucune exception, et chargés de leurs pouvoirs, s’assembleront tous les cinq ans ; Examineront si les lois, déjà promulguées, n’ont pas été enfreintes ; s’il ne leur a pas été donné d’extension, si les sommes provenantes des impôts ont été employées à leur destination. Chambre intermédiaire. Le député insistera expressément à ce qu’il soit arrêté qu’aucune Chambre intermédiaire, aucun corps ne puisse remplacer les Etats généraux pendant l’intervalle desdit Etats. Cet établissement dépouillerait insensiblement la nation et le Roi lui-même de son autorité, tendrait à une aristocratie anticonstitutionnelle, destructive de la monarchie : point d’intermédiaire entre la nation française et son Roi. La liberté de chaque individu étant aussi sacrée que celle de la nation, aucun citoyen ne peut être enlevé à ses juges naturels ; il est sous la protection de la loi. La noblesse voterait pour l’abolition totale des lettres de cachet ; mais des circonstances graves exigent que la grande police ait un provisoire. Les lettres de cachet pour causes particulières continueront d’avoir lieu ; elles ne pourront être accordées que sur la décision d’un tribunal que Sa Majesté sera suppliée d’établir, composé de dix-huit juges au moins, dont six seront dans les premiers rangs de la magistrature, six dans la noblesse et six du clergé, devant lequel l’instruction sera faite, sur simples mémoires, et la défense de l’accusé 4M Série, T. IIL sera entendue incessamment après sa détention. Lettres de cachet. Les lettres de cachet, pour raison d’Etat, ne pourront être expédiées qu’après le rapport fait au conseil des dépêches; elles seront signées de la main du Roi, et ceux contre lesquels elles seront expédiées seront remis dans les prisons soumises à la visite des tribunaux ordinaires, pour leur police seulement et la sûreté des détenus. Tous autres ordres donnés à titre de police, ou autre titre que ce soit, ne pourront avoir d’effet pendant plus de huit jours. Etats provinciaux. Le députe votera pour qu’il soit établi des Etats particuliers dans les provinces qui n’en possèdent pas encore, afin d’en régler �organisation, et statuer sur" l’assiette et répartition des subsides, où seront convoqués les députés des trois ordres, pour y assister et délibérer dans la formation adoptée aux Etats généraux. La noblesse recommande à son député d’insister à ce qu’il soit fait un examen du déficit avant d’accorder aucun impôt, cette connaissance étant absolument nécessaire pour déterminer les sacrifices que la nation doit faire. Il annoncera que les Etats généraux pourront annuler tous les emprunts faits par le gouvernement, qui leur paraîtront onéreux, en faisant Je remboursement des emprunts, pour être faits dans le cours de six années, par un emprunt que les Etats généraux feraient, et, en attendant leur remboursement, les créanciers de ces emprunts recevraient leurs intérêts comme les autres créanciers des rentes perpétuelles. Impôts. Que les impositions connues sous le nom de taille, capitation, accessoire de la taille et autres, comprises dans le second brevet ; celles relatives auxroutes et ouvrages d’art.elles vingtièmes, désormais réunies sous la dénomination de subsides, soient supportées par tous les citoyens, sans distinction d’ordre et de privilèges, en raison de leurs propriétés et fortunes. La noblesse ne doute pas que le clergé n’annonce les mêmes sentiments patriotiques : elle a voulu donner une marque de son dévouement à son souverain et de son zèle pour le bien public, en concourant à remédier aux maux de l’Etat, quoiqu’elle n’y ait eu aucune part : elle sacrifie volontiers ses privilèges, qui ont pour objet des avantages pécuniaires ; mais elle croit devoir en faire une réserve expresse en faveur de cette classe intéressante de gentilshommes que l’indigence réduit à cultiver la terre de leurs propres mains. Peu considérable dans son effet, cette réserve est précieuse pour les citoyens qui la méritent à tous égards ; elle sera un monument subsistant du sacrifice généreux et volontaire que tout le corps fait dans ce moment. La noblesse continuera d’être exempte des charges personnelles dont son service actif et continuel dans les armées lui assure le privilège ; telles sont les collectes de deniers, les logements des gens de guerre, milice, etc. Déterminée par les malheurs des temps au sacrifice qu’elle fait de ses droits, elle se réserve d’y rentrer quand l’administration sage et économique, que les Etats généraux peuvent établir, aura guéri les plaies de l’Etat. Dettes nationales. Les parlements ont annoncé qu’ils n’avaient pas eu le droit d’hypothéquer la France aux emprunts immenses qui absorbent ses revenus : il paraît cependant de la justice de les sanctionner. Le député établira, avant tout ,1e principe incontestable que les dettes contractées par le gouvernement ne peuvent être avouées 26 .403 > [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES dettes de l’Etat qu’au tant que les créanciers de l’Etat en portent les charges comme les autres citoyens. Leur revenu doit en être chargé, en raison de l'impôt qui pèsera sur les propriétés réelles et non-valeurs, casualités des réparations. La noblesse désire qu’on prenne les moyens les plus sages pour faire une répartition exacte de l’impôt : ce sera par un arpentage et une évaluation des terres des différentes paroisses, contradictoires avec les paroisses voisines. Ces procédés sont d’une exécution lente et éloignée. Le gouvernement ayant besoin d’une rentrée prompte de deniers, il faut offrir un moyen provisoire d’y parvenir. Impôt territorial. La noblesse propose qu’il soit présenté un tableau général des impositions connues sous le nom de tailles, accessoires d’icelles et autres destinées aux travaux des routes et ouvrages publics, et vingtièmes ; que la masse en soit distribuée par province, répartie par élection et paroisse; avec cette seule différence, que sur les paroisses nouvellement vérifiées il soit attribué une diminution proportionnelle, qui sera répartie en augmentation sur les paroisses qui l’ont été anciennement; lequel total, ainsi arrêté, formera le brevet de l’imposition territoriale; et si les besoins de l’Etat exigeaient quelque augmentation actuelle et passagère, elle serait répartie selon la même base. Quant à l’égalité delà répartition entre les particuliers, elle serait assurée par la contradiction que la solidarité établit ; le rôle en serait fait par quatre particuliers propriétaires, dont l’un serait pris dans la noblesse, un dans le clergé et deux dans le tiers , lesquels deux derniers seraient en même temps collecteurs. Capitation. La capitation a donné lieu aux réclamations que l’arbitraire excite nécessairement. Il paraît difficile de faire acquitter leurs quote-parts des charges publiques à ceux dont le revenu, ignoré, consiste en contrats et billets, sous promesse de passer titre. Ces capitalistes touchent leur revenu sans courir de risque d’aucunes impositions, avantage qu’on ne pent regarder comme compensé par la privation de l’accroissement naturel et progressif de la valeur des héritages : il n’est que la peine de l’oisiveté dans laquelle ils végètent. La noblesse demande qu’on fixe le rapport du total de rimpôtterritorialavec l’un des vingtièmes; et que s’il résulte de ce calcul qu’il est égal à l’un ou l’autre des vingtièmes, il soit fait une loi qui autorise les débiteurs des rentes à la retenue : le Roi fera la même retenue sur les rentes dues par l’Etat, soit perpétuelles, soit viagères, imputant néanmoins sur ladite retenue celles qui ont déjà eu lieu : d’où il résulte une diminution de l’intérêt annuel de la dette publique. Indépendamment des propriétaires de fonds ou de contrats, il existe dans les villes diverses classes nombreuses, et dont sont plusieurs opulentes, qui trouvent dans leur industrie, ou dans l’emploi de leurs fonds, ou spéculations de commerce, ou entreprises de toutes natures , des sources de richesses. Il est juste que ces classes de citoyens concourent à supporter les charges de l’Etat. On voudrait indiquer des bases qui puissent établir de l’égalité dans la répartition de la capitation, à laquelle il est juste de les soumettre, et en bannir l’arbitraire. L’administration s’en occupera sans doute : mais, en attendant, il faut bien la répartir d’après les apparences des facultés de chacun et les no n PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.] tions que la commune renommée peut donner sur leurs aisances. Gabelle. La gabelle n’est un impôt que par l’excessive cherté du sel; il serait dangereux d’abandonner tout à fait à un commerce incertain l’approvisionnement d’une denrée de première nécessité. Le député, en votant pour qu’il soit marchand, demandera que le Roi soit supplié d’en avoir des dépôts ouverts, qui, entrant en concurrence avec ceux des négociants, en balanceront la valeur, et seront une ressource intarissable. Alors il n’y aura plus de frais de régie, et le consommateur sera soustrait aux gênes et vexations auxquelles il est exposé. La variété des privilèges de différentes provinces surcetobjet, la nécessité de les en faire jouir pour conserver l’harmonie et le bon accord entre elles, la considération de j ustice, d’autant plus évidente, qu’elles sont grevées en conséquence de plus forts impôts, élevant de grandes difficultés à l’exécution d’un projet si désirable , la noblesse soumet le sien à la décision des Etats généraux. On ne doit chercher à remplacer par une imposition que la partie du produit net de la gabelie, déduction faite des frais' de régie, garde, procédures, contraintes, juges; lesquels n’ayant plus d’objet seraient une économie claire. Il convient de déduire aussi les frais de fabrication, transport, emmagasinement : supposons donc que la gabelle porte 50 millions au trésor royal, cette somme sera comparée avec le montant total de l’impôt territorial des retenues sur les rentes, et de la capitation des villes ; la proportion étant 4 Sous par livre, on ajouterait 4 sous par livre à ces sortes d’impositions, dans les provinces des grandes gabelles, 2 sous par livre, dans les petites gabelles, où le sel est moitié moins cher, et ainsi des autres en suivant le même ordre de réduction : bien entendu qu’on déterminera les proportions avec plus d’équité, quand un calcul plus exact le permettra. Ferme du tabac. C’est avec regret qu’on s’occupe de supprimer une imposition qui paraît la plus heureusement conçue, puisqu’elle est entièrement libre, et ne porte que sur un objet de luxe : mais en la laissant subsister, la suppression des employés et commis, que nous avons regardée comme le plus grand avantage de la gabelle, devient impossible. On propose donc d’opérer la suppression de la ferme du tabac, en adoptant les mêmes moyens qui ont été admis pour la gabelle, mais en faisant porter l’imposition au marc la livre de la capitation des villes. Des aides. Les Etats provinciaux seront chargés de faire bon, au trésor royal, des sommes provenantes des aides, fermes des cuirs, droits réunis, par le moyen qu’ils jugeront convenable : telles que pourraient être des entrées aux portes des capitales et villes du premier rang, impôt assis sur les maisons où l’on vendrait et ferait débit ; et d’une imposition particulière sur les terres et vignes : les livres comptables des régisseurs serviraient à les éclairer, et seraient la base de leurs opérations. Contrôle. Quelque utile que soit à la sûreté publique l’établissement du contrôle, l’iucertitude que présente le tarif, dont l’explication est laissée aux percepteurs , entraîne trop d’inconvénients pour qu’on n’en sollicite pas la réduction. Le député représentera qu’au lieu de soudoyer des directeurs et autres, notant question que de constater la date d’un acte, non d’en contrôler l’esprit, et be sugérer un sens étranger, le greffier du dailliagegpourrait tenir registres, où se [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES ferait l’inscription des actes, pour un droit modique. La noblesse, en demandant l’inscription absolue du droit de contrôle, entend aussi ceux de l’insinuation au tarif. i Les objets de recouvrement des tailles aux différents articles unis aux fermes des postes, messageries, à celles des cartes, aux droits de marc Id’or sur les pensions, grâces, lettres d’honneur, revenu casuel, etc. présentent une masse immense de revenus dans l’Etat. Il s’offre encore une res-; source précieuse dans l’aliénabilité des domaines du Roi. Aliénabilité des domaines de la couronne. Tant que les rois n’ont été que chefs d’une confédération de souverains; qu’ils ne percevaient d'autres tributs que les approvisionnements en nature, pour fournitures de leurs maisons, des présents, qu’ils restituaient avec plus de magnificence encore, ils exerçaient un droit de gîte dans les abbayes : il était essentiel qu’une substitution indéfinie leur assurât des domaines et des revenus, pour soutenir la splendeur du trône, et qu’ils fussent transmissibles à leurs successeurs. La couronne était héréditaire dans la maison régnante, mais la nation était libre d’y choisir son souverain. Aujourd’hui que la succession au trône a été irrévocablement déterminée en faveur de l’aîné ; que tous les seigneurs du sang en sont éventuellement héritiers, solidairement propriétaires ; que la loi des apanages a été déterminée ; que les services militaires des tenanciers de fief ont été changés en subsides ; que les peuples entretiennent les flottes et soudoient les armées du souverain, fournissent à toutes les dépenses de sa maison et à celles qu’entraîne l’administration, n’a-t-il pas été fait, pour ainsi dire, confusion du monarque avec l’Etat ? Leur existence est une, leurs biens sont communs, les seigneurs du sang, enfants de l’Etat, sont apanagés par lui : alors pourquoi le Roi aurait-il des domaines propres à lui, inaliénables, dont il ne pourrait disposer pour le bien de ses peuples ? Pourquoi une possession de dix années leur imprimerait - elle un caractère ineffaçable ! Deux princes économes, dans la durée d’un règne, envahiraient des provinces entières, et les rendraient domaines inaliénables. Le principe constitutionnel, dans le droit public d’un duc des Français, ne l’est plus dans celui d’un Roi de France. Le Roi pourra, par un traité, céder à l’étranger des pays immenses, et il ne serait pas maître de se dépouiller de droits à charge, aliéner à ses sujets eux-mêmes des domaines d’un médiocre rapport entre ses mains, faire bénéficier l’Etat des dépenses excessives qu’ils occasionnent, tarir la source des surprises qui sont faites à sa générosité, assurer la tranquillité des familles troublées par le peu de sûreté des engagements et la cessation des emphytéoses. La noblesse demande que les domaines du Roi soient aliénables ; que l’ancienne loi soit révoquée; et qu’en vertu de nouvelles conventions et de vente publique, les biens domaniaux soient assurés par la nation même aux acquéreurs. Ils prendront une nouvelle forme dans la main des ' particuliers ; et niouvants de la couronne, les profits de mutation seront dévolus au trésor royal. Economies. Tant de ressources seraient inutiles, sans l’économie. Sa Majesté s’est dépouillée volontairement de l’appareil de grandeur qui l’entourait. Elle a bien voulu promettre des réductions dans les dépenses qui lui sont personnelles. Le député demandera que la quotité des pen-PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.] sions et récompenses, accordées à chaque état, .oit définitivement fixée et jamais excédée. De la justice. La nation annonce depuis longtemps le vœu de voir les tribunaux rapprochés des justiciables. Erection des grands bailliages. Le député demandera l’érection d’un ou de plusieurs tribunaux, dans chaque province, à raison de son étendue, pour juger sans appel toute espèce d’affaires dont la valeur n’excéderait pas 6,000 livres ; de réunir à ces tribunaux les différentes juridictions qui ont relation aux impôts et autres, telles que les eaux et forêts, et les bureaux des finances, pour diminuer le nombre des juridictions multipliées à la charge des peuples. Il demandera que ces tribunaux soient constitués de façon à remplir sans obstacle l’objet de leur établi ssement. La moindre dépendance des parlements serait pour ces nouveaux tribunaux un principe destructeur de leur souveraineté ; pour cet effet ils ne doivent juger aucune ma-? tière sujette à l’appel. La compétence de leurs pouvoirs ne doit avoir d’autres juges que les conseils du Roi. Abolition de la vénalité. Il demandera que les charges de ces tribunaux ne soient point vénales; que les juges y rendent gratuitement la justice; que dans la composition il y ait au moins deux charges remplies par des gentilshommes, et deux par des ecclésiastiques, et que les juges soient gagés. Il sera facile de le faire, sans nouvelles charges pour les peuples , en y réunissant de petits bénéfices, dont fourmillent les provinces, sans nulle espèce d’utilité , comme chapelles , prieurés, biens de couvents supprimés. Tous ces revenus passent le plus souvent à des étrangers aux provinces : cet emploi ne serait point contraire à l’intention des fondateurs, puisqu’il serait destiné à rendre la justice gratuite au peuple. Ces biens ecclésiastiques seraient réunis au tribunal de la province, pour être régis par lui, à l’effet d’en partager les revenus entre les magistrats, selon le règlement qui en serait fait; et il serait distrait, sur la masse du revenu, une portion pour les gages des juges de paix, dont il va être question ci-après. Les affaires des gens de la campagne, l’ordre des paysans, ne peuvent supporter aucune espèce de frais : il est bien malheureux pour cette classe de citoyens, la plus nombreuse et la plus utile, qu’on n’ait jamais songé à lui rendre seulement possible la justice ; qu’on n’ait jamais calculé la perte de temps en faveur d’une classe qui n’a que ses bras et son travail journalier pour se nourrir et vêtir,, ainsi que sa famille. Tribunal de juges de paix. Le député requerra l’érection d’un tribunal arbitral dans les petites villes, auxquelles il sera formé un arrondissement : il sera composé d’un juge de paix, choisi par les communes dans les juges des environs, et de deux arbitres présentés par les parties : ils jugeront gratuitement les affaires des gens de la campagne, depuis 200 livres et au-dessus, excepté les questions d’Etat et droits seigneuriaux. Seront libres les parties d’y porter leurs contestations directement, sans avoir été en première instance à la justice seigneuriale : on y décidera sur le vu des pièces, dire des parties, et d’après un transport sur les lieux. Le juge de paix préviendra ses juges sur les objets désignés ci-dessus. On observe encore un abus dans l’administration de la justice. Le mot seul de justice emporte avec lui l’égalité de l’obtenir e&tre tous les ci,- ♦ toyens : jusqu’à ce jour, cette égalité n’a pas eù 404 [États gén, 1Î89. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.j lieu entre les juges des parlements et les autres citoyens. Les parlements, en jugeant les affaires civiles de leurs membres, ont une supériorité qui fait redouter à tous les voisins de leurs propriétés de leur contester le moindre droit et la moindre prétention. On demande la réforme de cet abus, de le prévoir dans l’érection des nouveaux tribunaux, et que les juges des cours souveraines ne puissent point porter leurs affaires civiles au tribunal dont ils sont membres. En général le député demandera la suppression de tous droits de cofnmittimus , lettres de garde gardienne et autres privilèges de ce genre. Lois criminelles. La noblesse supplie Sa Majesté de ne plus à l’avenir accorder aucun arrêt de surséance, sauf-conduit, ou autres actes d’autorité, qui puissent arrêter le cours ordinaire de la justice.* Life ne réclame pas avec moins d’instance la réforme des lois criminelles : ces lois prononcent la peine de mort pour des délits qui n’ont aucune proportion avec cette peine atroce : leur sévérité tient de la barbarie ; la cruauté dans les lois et peines ne rendit jamais les hommes meilleurs; elle les habitue à bannir la pitié de leur cœur, elle les rend plus méchants. L’afiVeuse prétention où sont les cours de faire exééüier les condamnés à mort aussitôt après leurs jugements est effrayante pour la sûreté des citoyens : il est de la justice et de l’humanité de leur laisser le temps de pouvoir obtenir leur grâce du Roi, ou de démontrer leur innocence, si les juges s’étaient trompés, ou si la faiblesse ou les circonstances avaient plutôt entraîné un malheureux dans le crime que la perversité de son cœur. Le député demandera que la peine de mort ne soit prononcée, en aucun cas, que contre celui qui a mis à mort son semblable; que la confisca-tion des biens des condamnés n’ait jamais lieu que jusqu’à la concurrencé des frais de la procédure et la restitution des vols, sans préjudice des dommages et intérêts de la partie civile, s’il y a lieü. Que l’édit de Henri II, concernant les déclarations à faire pour les filles enceintes, Soit abrogé: qu’elles ne soient plus condamnées à mort, à moins qu’il ne soit démontré qu’elles ont, de dessein prémédité, détruit leurs enfants. Que les hôpitaux seront tenus d’avoir des salles secrètes, destinées à recevoir les filles ehceintes, avec la liberté d’y rester inconnues, et de les traiter sans reproches. Cette Manière de prévenir le criMe évitera jusqu’à l’embarras de trouver des coupables. Que la déclaration du Roi, datée du 10 mai 1788, qui suspend l’exécution des arrêts dê Mort d’un mois, soit exécutée dans toutes ses dispositions et dans tous les tribunaux, en attendant que la nouvelle ordonnance criminelle qui est annoncée sbit faite. Le député demandera que la noblesse puisse exercer toute espèce de commerce ou trafic, tant en gros qu’en détail, sans déroger. Que tout militaire ne puisse paraître à la cour et chez les ministres du Roi qu’en uniforme. Hans les temps où les fondations des monastères ont été faites, le grand nombre des religieux établissait uhé proportion raisonnable entre la 'Magnificence et l’étendue des dotations et les besoins des individus qui devaient être entretenus sûr lés fonds dont ces dotations étaient formées : de Même le grand nombre de sujets, réunis dans Chaque maison, établissait une vie vraiment commune et régulière. Du fdit de VEglise et des biens ecclésiastiques . Aujourd’hui le défaut de sujets, en rendant les monastères déserts et inhabités, a rompu toute proportion raisonnable entre les dotations des maisons et le nombre des religieux dont elles sont composées : on en trouverait plusieurs riches de 3 à 4,000 livres par chaque tête de religieux. Le même défaut de sujets a rendu là vie commune de l’observation de la règle impossible dans la plupart des maisons. L’intention des fondateurs ù’a pas été de destiner leurs dons à doter des maisons, pour y recevoir des ecclésiastiques plutôt séculiers que réguliers : c’est donc le remplir et non l’éluder, que d’employer à des objets de piété et d’utilité publique les fonds des monastères où la règle ne peut plus être observée. En conséquence, le député demandera que la conventualité soit fixée à quinze, pour les maisons de religieux, et à neuf pour les maisons de moniales ; que tous les sujets composant les maisons qui n’ont que cette conventualité soient transférés dans les grandes maisons, où elle pourra être complétée, et dans lesquelles ils porteront une pension de 600 livres pour chaque religieux, et de 500 livres pour chaque moniale, lesquelles pensions seront prises et prélevées sur les biens des maisons abandonnées ; et elles cesseront d’avoir lieu au moment du décès des sujets auxquels elles seront affectées : bien entendu que ces pensions ne seront accordées que dans le cas où les revenus des maisons, dans lesquelles les conven-tualités seront complétées, ne présenteraient un revenu suffisant pour entretenir le nombre de sujets dont elles seront composées : bien entendu encore que les religieux ou moniales desdites maisons supprimées seront libres de demander d’être relevés de leurs vœux de clôture, pour ensuite aller jouir desdites pensions dans l’intérieur de leur famille. Le surplus des revenus des maisons Supprimées sera affecté aux objets de piété et de bienfaisance ci-après indiqués. On ne peut voir sans étonnement la faculté laissée aux citoyens de disposer de leur liberté, avant l’àge où celle de disposée de leurs biens leur est accordée. Le député demandera que l’âge pour Rémission des vœux, dans quelque ordre régulier que ce soit, soit fixé à trente ans pour les hommes et à vingt-huit ans pour les femmes, et que cette émission soit précédée de cinq années de noviciat. Les dîmes ne sont autre chose qu’une prestation pieuse et volontaire, accordée par les fidèles pour subvenir à toutes les dépenses nécessaires au culte divin. La plus forte partie des dîmes est aujourd’hui perçue par des curés primitifs, qui ne Remploient aucunement à procurer au peuple les secours spirituels; ils sont remplacés par des vicaires perpétuels, qui seuls exercent le ministère et desservent les paroisses ; tellement qu’il faut que les propriétaires qui payent déjà la dîme subviennent une seconde fois à l’entretien dé leurs pasteürs, par des rétributions connues sous le nom de Casuel, et à une partie des dépensés qu'exigent les lieüx et bâtiments sacrés : c’est un double emploi évident, qu’il est nécessaire, défaire cesser au Moment où les propriétaires font les plus grands efforts pour supporter la dette nationale. Le député demandera donc que les dispositions de Pédit de 1695, qui rejettent sur les propriétaires et habitants la dépense des constructions et réparations des nefs et cimetières des paroisses et [États gên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gicn.j IQ.'j le logement des vicaires perpétuels, soient révoquées : que les dîmes ecclésiastiques des paroisses soient spécialement affectées à ces objets, tellement que les propriétaires et habitants ne puissent y contribuer qu’en cas de dîmes : quoi faisant, il sera juste que les curés primitifs, ne jouissant plus de la dîme, soient déchargés de l’entretien des chœurs et caucels, qui sera pareillement affecté sur le produit des dîmes de la paroisse. La plupart des vicaires perpétuels, ou curés desservant les paroisses, loin d’être en état de soulager les pauvres, dont les besoins pressants excitent infructueusement leur charité, ont à peine eux-mêmes de quoi s’entretenir convenablement, avec la décence qu’exige un état aussi respectable. Il est contre cette même décence que ces pasteurs soient dans la nécessité de suppléer à l’insuffisance de leurs revenus en percevant des rétributions, connues sous le nom de casuel, qui leur répugnent à recevoir. Le député demandera doue que le traitement des curés desservant les paroisses soit complété à 1,000 livres, pour les paroisses de cent communiants, à 1,200 livres, pour celle depuis cent jusqu’à deux cents, à 1,500 livres, pour celles depuis deux cents jusqu’à quatre cents communiants, et ensuite toujours en augmentant de 100 livres pour chaque cent communiants, Que les rétributions connues sous le nom de casuel soient annulées. Que le supplément de traitement à accorder aux curés, selon les proportions ci-dessus, soit affecté sur le produit des dîmes de chaque paroisse, et en cas d’insuffisance, sur les revenus d’une partie des monastères supprimés, ainsi qulil a été dit ci-dessus, qui seront réservés pour cet objet, jusqu’à due concurrence, et qui seront administrés par une chambre établie dans chaque diocèse, composée d’anciens curés. Qu’enfin, s’il arrive que la dotation de quelques évêchés se trouve trop réduite par la privation des dîmes, il y soit pourvu par l’union de quelque bénéfice ; de manière que les sièges soient toujours convenablement dotés. La bienfaisance et la piété de nos rois les a portés à former différents établissements qui ont Four objet ou le culte divin, ou le soulagement de humanité ; tels sont les secours fournis pour l’entretien des enfants trouvés, pour les hôpitaux militaires, pour les hôpitaux de mendicité, pour les remèdes que le gouvernement fait distribuer dans les généralités et dans les diocèses, pour l’entretien de plusieurs maisons de Nouvelles-Catholiques, pour l’entretien des pensions des ci-devant jésuites, sur le produit des bénéfices séquestrés pour cet objet. Pour la construction de différents bâtiments censés affectés sur les loteries. Pour l’exercice du service divin dans les chapelles et abbayes, dans les palais. Enfin, pour plusieurs œuvres pies et aumônes qui s’exercent dans différents départements. Tous ces objets grèvent le trésor royal et peuvent sans doute être convenablement affectés sur des fonds ecclésiastiques. Le député demandera qu’il y soit affecté une portion suffisante des revenus de monastères dont on a demandé ci-devant la suppression. Dans le cahier présenté au Roi le 21 février 1615, il a été demandé « que les abbayes et prieurés conventuels ne soient dorénavant tenus en com-mende par les séculiers, ainsi accordés en titre aux religieux profès de l’ordre. » Il a été demandé encore « que le tiers du revenu desb énéfices et églises soit, par chacun an4 employé japx réparations d’icelles, maisons et fermes .qui en dépendent ; et à ce faire les bénéficiers contraints par saisie de leur temporel, à la diligence des procureurs généraux. » On a pu considérer, sans doute, en faisant ces demandes, d’une part, que la commende n’a nullement rempli l’objet de son institution, qui était de rétablir l’ordre et l’observation de la règle dans les monastères; de l’autre, que le tiers lot n’ayant d’objet que de subvenir aux charges et réparations des bénéfices, il ne pourrait être uni aux abbatiales ou prieurales qu’autant que les titulaires en emploiraient le produit réellement à cet objet, et deviendraient comptables de cet emploi. Mais la noblesse est loin de faire des demandes qui tendraient à atténuer l’importance des grâces qui sont dans la main du Roi, et dont une juste dispensation concourt à soutenir l’éclat du trône et la prospérité de l’administration; elle sait d’ailleurs que la plus forte partie de ces mêmes grâces tournent à son avantage; elle est donc intéressée à leur accroissement; elle croit pouvoir s’en occuper au moment où elle fait d’ailleurs le sacrifice de ses privilèges les plus précieux : mais cet intérêt particulier ne doit pas lui faire perdre de vue que le Roi a un droit essentiel à exiger que les biens dépendants des bénéfices soient entretenus, pour que les objets de ses grâces ne soient pas détériorés ; que la nation a aussi un intérêt direct à ce que lés fonds qui dépendent des bénéfices ne soient pas dégradés ; elle doit convenir que les mesures prises à ce sujet sont loin d’être suivies, puisqu’au lieu d’exiger des titulaires l’emploi de la totalité du tiers lot eu réparations, on se borne à exiger qu’elles soient seulement faites ou parachevées sur les deniers des successions des titulaires, qui, le plus souvent, ne proviennent que des revenus des bénéfices. Mais ces mesures , quelque modérées qu’elles soient dans leur objet, sont cependant, par les formes qu’elles entraînent, souvent très à charge aux familles des bénéficiers. Il serait à désirer d’indiquer un procédé, qui, en assurait t également, ou même mieux encore, l’entretien des fonds dépendants des bénéfices, pût soustraire les familles aux gênes et aux frais qu’entraînent les formes présentement suivies. Le député demandera donc qu’arrivant le décès des bénéficiers, la succession soit entièrement déchargée des réparations du bénéfice, et qu’il soit aussitôt procédé, en présence du procureur de Sa Majesté au baillage dans lequel est situé lp chef-lieu du bénéfice, et du syndic du diocèse, ou tout autre commissaire ecclésiastique, au devis et à l’adjudication de toutes les réparations et irais faits pour y parvenir ; lequel devis ne comprendra aucuns bâtiments inutiles ou de pur agrément, mais seulement ceux destinés au service divin, à la résidence du tribunal dans le chef-lieu, et à l’exploitation des fonds ou exercice de la justice et des droits seigneuriaux, et , qu’il soit sursis à la nomination au bénéfice, pendant le temps nécessaire pour que les revenus puissent acquitter le montant de l’adjudica tion. L’ordre du clergé, ayant intérêt à ce que ce sursis dure le moins longtemps possible, doit désirer que les bénéfices se trouvent le moins dégradés qu’on pourrait au décès du titulaire, et par conséquent qu’il soit pris des mesures sages et suffisantes pour que les titulaires soient obligés de bien entretenir les bénéfices pendant leur jouissance. C’est donc au clergé d’indiquer ces mesures, et de supplier Sa Majesté de sanctionner [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Gien.] de son autorité les règlements qu’il proposera à cet effet, et dont l’exécution lui sera confiée. Le clergé peut même, s’il le juge à propos, éviter le séquestre des bénéfices pendant le temps nécessaire pour pourvoir à la dépense des réparations, en demandant qu’il soit établi sur tous les titulaires une retenue qu’on pourrait évaluer au dixième du bénéfice; laquelle retenue serait perçue et versée dans une caisse établie dans chaque diocèse, sous l’administration du clergé, et son produit employé à pourvoir annuellement aux réparations. Le député rappellera les demandes portées au cahier du 21 février 1615, afin « que les fruits des « prélatures, abbayes et bénéfices vacants soient « employés à la nourriture des pauvres, et répa-« rations nécessaires des églises. » Il demandera que les fonds destinés à secourir les nouveaux convertis, continuent d’être employés à leur objet, atiendu que c’est au moment où les non catholiqués viennent d’obtenir une existence civile, qu’il est plus à désirer que le nombre en diminue, et que la seule vraie religion soit plus dominante. Le même cahier du 21 février 1615 contient cette demande :que nul ecclésiastique ne puisse te plus d'un bénéfice. On ne croit pas devoir trop insister sur cet objet, puisque c’est à Sa Majesté qru’il appartient de déterminer dans sa sagesse la disposition de ses grâces. La noblesse se permet seulement de marquer son vœu pour qu’elles soient réparties de manière qu’un plus grand nombre d’individus puisse y participer. L’ordre de la noblesse, en remettant ses cahiers par elle arrêtés, donne à son député tous pouvoirs généraux et suffisants, à l’effet de proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume, et le bien de tous-et chacun des sujets de Sa Majesté, pour le bonheur de laquelle chacun des membres de l’ordre de la noblesse du bailliage de Gien forme les vœux les plus ardents ; et ont signé. Fait et arrêté les jour et an que dessus. Signé Feideau de Brou, président et grand bailli d’épée; de Villers, député de Rancourt; La Barre; de Ghasal ; Lenoir ; le chevalier du Verne; Refinance; chevalier Dufaurd; de Ghasseval; de Falaiseau ; le chevalier de la Fage. Nota. Il s’était élevé quelques difficultés dans l’assemblée de Gien, sur l’admission de M. de Villers ; mais il prouva que son père lui avait acquis ce droit par sa charge de secrétaire du Roi du petit collège, dans l’exercice de laquelle il était mort, et qu’ayant des droits au concours pour la nomination des députés aux Etats généraux, il avait volontairement fait le sacrifice de la place de subdélégué de l’intendance d’Orléans qu’il oc-, cupait depuis longtemps d’une manière distinguée; son frère, receveur du grenier à sel, son neveu, receveur des tailles, et son beau-frère ont eu la satisfaction de voir confirmer leurs vœux, M. de Chasal, conseiller au grand conseil, a bien voulu joindre ses vastes lumières à celles ■ de M. de Villers pour la rédaction des cahiers; cette r; élection fait d’autant plus honneur àM. de Villers qu’il , f a eu la majorité sur un gentilhomme respectable par ses actions éclatantes à la guerre. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances du tiers-état du bailliage de Gien au Roi et aux Etats généraux (1). Plaise à Sa Majesté et aux Etats généraux ordonner l’exécution des articles ci-après : CONSTITUTION. PREMIÈRE DIVISION. Etats généraux. Art. 1er. Les délibérations se prendront en commun, et les suffrages seront comptés par tête, non par ordre, par provinces ni par bailliages. Art. 2. Chaque bureau sera composé d’un nombre de représentants du tiers-état égal à celui des deux autres ordres réunis. Art. 3. Les Etats généraux seront convoqués périodiquement de trois en trois ans, et à cet effet les subsides et droits ne seront accordés que pour ce terme. Art. 4. Ils continueront d’être convoqués par bailliage. Art. 5. Les députés ne pourront élire ni être élus que dans leurs ordres respectifs. Art. 6. Dans l’intervalle de la tenue des Etats généraux, il ne pourra y avoir aucune commission intermédiaire, et les cours souveraines, sous aucun prétexte, ne pourront prétendre le droit de représenter les Etats généraux. Art. 7. Auxdits Etats généraux, seuls, appartiendra le droit d’accorder les subsides, consentir les emprunts, déférer la régence et donner la sanction à toute espèce de lois. Art. 8. Chaque ordre réglera et payera la dépense de ses députés aux Etats généraux et provinciaux. DEUXIÈME DIVISION. Art. 1er. La liberté individuelle du citoyen sera respectée, en sorte qu’aucun ne pourra en être privé, non plus que de sa propriété, par lettres de cachet ni ordre ministériel, dont seront responsables ceux qui les auront délivrés et sollicités. Art. 2. Tous héritages pris pour l’utilité publique seront évalués et payés aux propriétaires avant de pouvoir s’en emparer. Art. 3. La liberté de la presse sera accordée sous les modifications jugées nécessaires par les Etats généraux. TROISIÈME DIVISION. Etats provinciaux. Art. 1er. Il sera établi dans chaque province, et particulièrement pour celle d’Orléans, des Etats rovinciaux dont les députés seront élus par ailliage comme pour les Etats généraux. Art. 2. Auxdits Etats provinciaux les députés du tiers-état seront en nombre égal à celui des deux autres ordres réunis et pris chacun dans leur ordre respectif. Art. 3. Ils seront présidés par un membre élu à la pluralité absolue des suffrages pris alternativement dans chacun des trois ordres. Art. 4. Les députés aux Etats provinciaux ne (1) Nous publions ce cahier d’après ua manuscrit des Archives de l'Empire.