146 - [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES I â3 brumaire an il î 13 novembre 1793 pour nos frères des frontières. Ils y ont joint l’ échantillon d’un drap fabriqué avec deux tiers de cheveux. Le citoyen Poullant prie la Con¬ vention de presser le rapport du comité de com¬ merce sur l’établissement de la manufacture de drap qu’il veut élever à ses frais. « Tous les jours, ajoutent ces citoyens, nous voyons affluer à Paris les victimes de la guerre qui ne peuvent être admises dans les hôpitaux, faute de place. Le ministre pourvoit à leur sub¬ sistance; mais leurs blessures sont négligées. t « Eh bien, législateurs, nous vous offrons deux lits garnis pour nos braves camarades bles¬ sés. Nous ne doutons pas que ce faible exemple ne trouve beaucoup d’imitateurs; vous serez en peu de temps à même de garnir un nouvel hos¬ pice. Il vous suffira de désigner une maison na¬ tionale capable de contenir au moins trois à quatre cents lits, et nos frères seront soulagés. Cette mesure pourrait s’étendre à toutes les sec¬ tions en particulier. Cet établissement, qui peut se faire avec beaucoup d’économie, ressemble¬ rait plutôt à une caserne qu’à un hôpital, par la manière simple de l’administrer. Le soldat y vivrait du prix de sa journée. Il ne faudrait qu’un chirurgien, une petite pharmacie et quel¬ ques linges à pansement. » Mention honorable. Le citoyen Baron, chef du 2e bataillon de la Charente-Inférieure, vient déposer les titres qui constatent l’ancienneté de ses services (1). Suit la lettre du citoyen Baron (2). « Représentants du peuple, « Parti de l’armée du Rhin le 24 août der¬ nier, par ordre des représentants du peuple; ar¬ rivé à Paris le 11 septembre, je n’ai pu avoir connaissance des lois et décrets concernant les décorations militaires. J’ai satisfait à celle du mois d’octobre 1792, en envoyant ma décora¬ tion le 27 du même mois, je n’ai été instruit de votre dernier décret que depuis peu de jours, ni être admis à la barre par la multiplicité des pétitionnaires. « Je viens, citoyens législateurs, satisfaire à cette loi qui doit être sacrée à tous vrais ré¬ publicains, en déposant sur le bureau de la Convention le procès-verbal de la • remise de ma décoration que mes services m’avaient ac¬ quise sous le règne du tyran (qui a subi la peine due à ses forfaits), ainsi que du brevet qui cons¬ tate l’ancienneté de mes services. jg-« Ne croyez pas, législateurs, que ce soit un sacrifice, c’est un devoir qu’un vrai républicain doit remplir dès que c’est la volonté souveraine du peuple, ce serait un crime de n’y pas sous¬ crire, tous ceux qui veulent s’en soustraire ne sont pas dans les principes de notre nouvelle régénération. « Frappez, législateurs, du glaive de la loi le plus rigoureux tous ceux qui voudraient se prévaloir de ces titres fastidieux que l’hypocri¬ sie et le fanatisme ont inventés, qui déshonorent l’homme libre; il en est qui, sous le voile du patriotisme, sont encore attachés à ces futilités orgueilleuses du despotisme, affectent sous un (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 198. (2) Archives nationales, carton G 280, dossier 770. masque imposteur, un civisme exalté pour mieux trahir la patrie. Un vrai républicain n’a point de détours, est franc et sincère. Qu’il est doux à mon cœur de pouvoir convaincre tous mes frè¬ res que tout ce qui vient du tyran est odieux à mes yeux. Mon seul désir est de prouver à ma patrie la pureté de mes sentiments et du vif intérêt que je prends à la prospérité et à raffer¬ missement de la République, n’ayant d’autre divinité que la liberté et l’égalité que l’Etre de la nature a données aux hommes en naissant. Toutes les autres sont contraires aux principes de la raison, en répandant mon sang pour la défendre, je jure d’exterminer tous les tyrans et leurs indignes satellites. « Le chef du 2 e bataillon de la Charente-Inférieure , « Baron. « Ce 22 brumaire, l’an II de la République française, une et indivisible. » Brevet (1). Mons Jean-Jacques Fabien de Rochebaron, la satisfaction que j’ay de vos services m’ayant convié à vous associer à l’ordre militaire de Saint-Louis, je vous écris cette lettre pour vous dire que j’ay commis le Sr de Vaudreuil, lieu¬ tenant général en mes armées et grand-croix dudit ordre, pour, en mon nom, vous recevoir et admettre à la dignité de chevalier de Saint-Louis, et mon intention est que vous vous adressiez à lui pour prêter en ses mains le ser¬ ment que vous êtes tenu de faire en ladite qua¬ lité de chevalier dudit ordre et recevoir de lui l’accolade et la croix que vous devez doréna¬ vant porter sur l’estomac, attachée d’un petit ruban couleur de feu, voulant qu’après cette réception faite, vous teniez rang entre les au¬ tres chevaliers dudit ordre, et jouissiez des hon¬ neurs qui y sont attachés. Et la présente n’étant pour autre fin, je prie Dieu qu’il vous ait, Mons Jean-Jacques Fabien de Rochebaron, en sa sainte garde. Écrit à Versailles, le vingt-sept avril 1788. 1 ] Louis. Le M. de Vaudreuil. Le citoyen Bernard (Besnard), habitant de Reims, écrit qu’en bon républicain, il mange tout aussi bien avec des cuillères d’étain qu’avec des cuillères d’argent : il fait don à la patrie de 3 cou-vêts de ce dernier métal, marqués D. B. (2). Suit la lettre du citoyen Besnard (3). Besnard, citoyen de la ville de JReims , à la Convention nationale. « A Paris, le 23 brumaire, ou tridi de la 3e décade de l’an II de la République une et indivisible. « Citoyen Président, « Le citoyen de la ville de Reims soussigné et présent à votre séance, qui, en bon républi-(1) Archives nationales, carton G 280, dossier 770. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 198. (3) Archives nationales, carton C 278, dossier 741. [Convention nationale.] oain, mange tout aussi Tbien avec des cuillers d'étain qu’avec des cuillers d’argent, fait don à sa patrie de trois cuillers et de trois fourchettes d’argent marquées D. B. qui est toute son ar¬ genterie. « Il demande à être autorisé à en faire le dé¬ pôt sous quinzaine au greffe de la commune de Reims pour, ensuite, être versés au Trésor na¬ tional. « Il invite ses concitoyens à suivre son exem¬ ple pour augmenter le gage de la nation et assurer ainsi le bonheur de la République. « Besnard, rue du Grenier -à-Sel. » La commune de Créteil, considérant que les métaux précieux furent toujours le principe de tous les crimes, fait hommage à la patrie de 32 mares d’argenterie, pour être employés à la destruction des tyrans (1). Suit la lettre du maire de la commune de Cré¬ teil (2). « Créteil, ce 23 brumaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « Citoyens législateurs, « La commune de Créteil, considérant que les métaux précieux furent toujours le principe de tous les crimes; « Considérant que le culte de l’Etre suprême n’a pas besoin de ces ustensiles, moins faits pour le créateur que pour flatter l’orgueil de la créa¬ ture; ; « Considérant qu’une république n’a besoin que d’avoir du fer et des bras; « A délibéré unanimement que ce sac con¬ tenant environ trente-deux marcs de cette vile matière serait déposé sur l’autel de la patrie. Puissent les tyrans coalisés voir dans notre mé¬ pris pour l’objet de leur adoration une opposi¬ tion constante dans leurs principes et la certi¬ tude qu’ils ne parviendront jamais à détruire une république fondée sur la raison et la jus¬ tice. « Nous reconnaissons, chers législateurs, que c’est à vos travaux que nous devons cette li¬ berté et cette égalité que nous avons tous juré de soutenir au péril de notre vie comme de vrais frères républicains. « Mali verné, maire de la commune de Cré¬ teil. » Un ci-devant chartreux dépose sur l’autel de la patrie 24 livres en argent, une médaille por¬ tant l’effigie de Capet et un gros sou (3). Suit un extrait de ce don patriotique d’après le Bulletin de la Convention (4). Le citoyen Courtial, soldat de la section des Gardes-Françaises et ci-devant chartreux, fait don de 24 livres en numéraire et d’un gros sou. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 198. (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 741. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 198. (4) Supplément au Bulletin de la Convention du 24 brumaire an II (jeudi 14 novembre 1793). ( 23 brumaire an II 147 ( 13 novembre 1793 Un citoyen qui garde l’anonyme, quoique de¬ meurant rue des Grands-Augustins, section de Marat, écrit en ces termes : « Après avoir examiné les lois relatives à l’em¬ prunt volontaire et à l’emprunt forcé, je me trouve dans la classe des citoyens qui sont exempts d’y concourir, n’ayant que 200 livres de rente de patrimoine, et un traitement parti¬ culier, fruit de mon travail; mais si la loi m’en dispense, mon patriotisme m’ordonne d’acquit¬ ter une aussi belle dette. Je prie donc la Conven¬ tion d’accepter 500 livres que je lui fais passer. Je ne calcule pas si, en me réunissant à d’autres citoyens, je pourrai me faire inscrire sur le grand-livre et tirer parti de cette somme; je laisse ce calcul à ceux qui, composant encore avec le bonheur publie, ne parlent souvent de patrie que dans la vue de flatter leur ambition ou servir leurs intérêts. « Autre chose, citoyen Président. Je désire venir au secours d’une malheureuse victime de la cruauté de nos ennemis. Indique-moi, par la voie du Journal de Paris, une veuve indigente d’un de nos frères d’armes péri à l’armée; j’irai la trouver et la prier d’accepter une pension via¬ gère de 150 livres. Mais dépêche-toi, citoyen Pré¬ sident; j’ai besoin de soulager mon cœur et de connaître la veuve infortunée que le hasard doit associer, en quelque sorte, à mon existence. » La Convention applaudit vivement à ces offrandes généreuses; elle en décrète la mention honorable et l’insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre de ce citoyen d’après le document des Archives (2) : « Paris, le 23 brumaire, l’an II de la Répur blique une et indivisible. « Citoyen Président. « Après avoir examiné les lois relatives à l’emprunt volontaire et à l’emprunt forcé, je me trouve dans la classe des citoyens qui sont exempts d’y concourir, n’ayant que deux cents livres de rente de patrimoine et un traitement particulier, fruit de mon travail. Mais si la loi m’en dispense, mon patriotisme m’ordonne d’ac¬ quitter une aussi belle dette. « Je prie donc la Convention d’accepter cinq cents livres que je lui fais passer; je ne calcule point si en me réunissant à d’autres citoyens je pourrais me faire inscrire sur le grand livre et tirer parti de cette somme. Je laisse ce calcul à ceux qui, composant encore avec le bonheur public, ne parlent souvent de la patrie que dans la vue de flatter leur ambition ou servir leur intérêt. « Autre chose, citoyen Président, je désire venir au secours d’une malheureuse victime de la cruauté de nos ennemis. Indique-moi, par la voie du Journal de Paris une veuve indigente d’un de nos frères d’armes péri à la Vendée, j’irai la trouver et la prier d’accepter une pen¬ sion viagère de cent cinquante livres, mais dépêche-toi, citoyen Président, j’ai besoin de soulager mon cœur et de connaître la veuve in* (1) Procès-verbaux de la Convention, t, 25, p. 198. (2) Archives nationales, carton G 278, dossier 741. ARCHIVES PARLEMENTAIRES.