[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 juillet 1789.] 2?>3 nargue, y trouvent chacun ce qui doit lui appartenir et que ce soit, pour ainsi dire, un pacte social, un contrat universel, qui, en distribuant la justice à toutes-les parties, force toutes les arties d’être justes, et qui, en leur procurant le onheur, les amène à l’union. Je ne doute pas que mes idées ne concourent avec celles de l’auteur de la motion, et j’espère que l’Assemblée me pardonnera de n’avoir pu me refuser à l’expression d’une crainte que je ressens vivement, sur un danger qui est incalculable. Pour me résumer, je rends à la motion tous les hommages qu’elle mérite. Je demande qu’elle soit envoyée à tous les bureaux; mais je demande en même temps qu’il soit bien arrêté par l’Assemblée de n’y délibérer que provisoirement, et de ne rien statuer en définitif sur cet objet, qu’en statuant sur tous les autres objets de la constitution. A la (in de ce discours, les applaudissements recommencent dans toutes les parties de la salle, et ils sont, longtemps prolongés. .L’opinion de M. Laily-Tollendal prévaut; l’Assemblée ne juge pas à propos de délibérer encore sur cet objet. La motion de M. de Lafayette est en conséquence renvoyée aux bureaux. . On a fait le' rapport de l’élection deM. Maujean, député direct de la ville de Metz. Cette députation est discutée contradictoirement. On va aux voix. L’appel fait, elle est unanimement déclarée nulle, sauf à la ville de Metz à recommencer une élection plus régulière. La séance est levée. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE FRANC DE POMP1GNAN, ARCHEVÊQUE DE VIENNE. Séance du lundi 13 juillet 1789. On fait lecture d’une lettre écrite à l’Assemblée par un grand nombre de citoyens de la ville de Montpellier ; d’une autre écrite par les officiers municipaux de la ville de Saint-Marcellin en Dauphiné, et d’une délibération de la ville de Ta-rascon, qui toutes expriment leur satisfaction au sujet de la réunion de tous les députés, et leur adhésion aux arrêtés de l’Assemblée nationale. Un membre se lève pour annoncer à l’Assemblée le changement survenu dans le ministère, le renvoi de M. Necker, son exil hors du royaume, la disgrâce des autres ministres qui avaient mérité la confiance publique. 11 peint les troubles qui ont agité la ville de Paris, le désordre qui y règne encore. Il finit par inviter l’Assemblée à prendre à ce sujet une résolution telle que sa sa-sagesse la lui prescrira. M. Mounier. Messieurs, le Roi a convoqué les Etats généraux pour la régénération du royaume. On a prononcé les mots liberté, félicité publique. Ils ont réveillé le courage de ceux qui sont intéressés à maintenir le peuple Français dans la servitude. Ils se sont ligués pour protéger les abus. Us ont entouré le trône ; et nous avons déjà plusieurs fois éprouvé les funestes effets de leurs intrigues. Us sont parvenus à priver de la confiance du Roi de vertueux ministres, dignes de la vénération publique et de la faveur du prince, par leur zèle pour ses intérêts et pour le bonheur de la France. Afin de tromper le monarque avec plus de facilité, ils ont voulu éloigner de lui ceux qu’ils ne pouvaient espérer d’associer à leurs projets. Ils redoutaient leur amour pour le Roi, pour la justice et pour la vérité. Certainement le Roi a le droit de changer ses ministres ; mais dans ce moment de crise, les représentants de la nation ne trahiraient-ils pas tous leurs devoirs, s’ils n’avertissaient le monarque des dangers auxquels des conseillers imprudents ne craignent pas de livrer la France entière? Pourraient-ils être animés d’un désir ardent pour le bien de la patrie, et garder aujourd’hui le silence? Ignorent-ils combien les ministres qu’on vient d’éloigner sont chéris par le peuple ; que dans les circonstances actuelles le crédit public ne peut subsister sans eux; que nous sommes menacés de la plus affreuse banqueroute, dont le moindre inconvénient serait la honte éternelle du nom Français, et que le sang est près de couler ou coule peut-être en cet instant dans la capitale ? Ainsi, les ennemis du bien public ne craignent pas de flétrir le caractère national. Ils veulent braver le désespoir du peuple. Ils le provoquent par un appareil menaçant; ils l’environnent de troupes ; ils interceptent le passage sur les grandes routes ; ils attentent à la liberté publique et individuelle. Ils ont appris au Roi à redouter un peuple dont il est chéri, à prendre contre lui les mêmes précautions qu’exigent les approches de l’ennemi de l’Etat. L’Assemblée nationale doit éclairer le monarque; elle doit solliciter le rappel des ministres, victimes de leur dévouement aux intérêts du trône et à ceux de la patrie. Par reconnaissance, par amour de la justice, elle doit représenter au Roi les dangers auxquels on expose la France, et lui déclarer que l’Assemblée nationale ne peut accorder aucune confiance aux ministres qui, en restant en place, ou à ceux qui, en acceptant les fonctions de MM. Necker, de Montmorin, de la Luzerne et de Saint-Priest, ont manifesté des principes contraires au bien public. Par cette démarche vous prouverez que l’appareil militaire ne saurait vous en imposer, et qu’aucun obstacle ne peut enchaîner votre zèle. Mais permettez-moi de vous rappeler, Messieurs, que malgré l’importance que vous devez mettre à éclairer le Roi sur les desseins de ceux qui l’entourent, vous ne devez pas oublier un seul moment la constitution du royaume. Encore une fois, aucun malheur ne peut-être comparé à celui de ne pas établir une constitution heureuse et durable : aucun avantage ne saurait en tenir lieu. Les ennemis du bien public croiraient avoir atteint leur but, s’ils pouvaient vous détourner de cet. objet important, et vous exposer à perdre ainsi l’instant favorable. C’est la constitution qu’ils veulent empêcher; c’est elle qu’ils craignent, qu’ils attaquent indirectement, pour pouvoir l’attaquer bientôt à force ouverte ; mais tous leurs efforts seront vains. Les députés de tous les ordres resteront constamment réunis pour le soutien de la liberté : l’énergie et le pa-