34 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE public (97)], détruire la Convention nationale. C’est là le but de Pitt et de Cobourg, et il faut avouer que leurs projets sont suivis ici de la manière la plus directe. Chacun de nous réprouve comme lui les propositions astucieuses qui avaient été faites dans le club électoral : sans doute les hommes qui les ont mises en avant sont des émissaires de l’étranger qui veulent saper le gouvernement révolutionnaire, qui veulent faire demander au peuple à élire ses magistrats, afin de donner aux malveillants les moyens d’allumer la guerre civile en France; mais ce ne sont pas les seuls agitateurs sur lesquels la sévérité de la loi et de la Convention doit peser; il ne faut ni deux poids, ni deux mesures. Tous ceux qui dans ce moment veulent s’élever contre l’autorité centrale, contre la Convention, doivent être punis d’une manière exemplaire. On vous a dénoncé Giot, mais on ne vous a pas dit dans quelle Société il a osé nier à la Convention le droit d’épurer les Sociétés populaires. Quoi ! la Convention n’aurait pas le droit de dire à une Société : Voyons si vous n’avez pas parmi vous des complices de Robespierre? Nous savons que vous avez rendu des services à la patrie, mais nous ne souffrirons pas qu’à côté de nous vous vous éleviez en autorité rivale de celle que le peuple nous a confiée ! Quels sont ces hommes qui, n’ayant jamais pris la parole dans la Convention nationale, vont aux Jacobins faire des discours qui sont colportés dans les sections, et dont on exige la lecture préférablement aux rapports des comités de la Convention. Il ne faut pas que la représentation nationale laisse flotter les rênes du gouvernement dans un moment où les fripons et les intrigants veulent s’en saisir ; elle ne doit pas souffrir que des hommes qui furent longtemps aux genoux de l’idole du jour, que des hommes qui ont fui au milieu du danger, et qui n’ont reparu ici que quand les jours de périls ont été passés, insultent les patriotes; ils veulent en usurper le titre. Jetez vos regards sur le club des Jacobins et sur le club électoral; voyez tout, et que, partout où il y a des ennemis de la liberté publique, ils sont punis. Je n’ai jamais partagé l’opinion de ceux qui ont cru qu’on devait anéantir les Sociétés populaires ; mais je pense qu’il faut les utiliser en les épurant, qu’il ne faut plus qu’elles servent de marche-pied à des hommes coupables pour parvenir à leur but audacieux. Il faut que les trois comités pèsent sagement les mesures qui ont été proposées par Bourdon, afin de calmer toutes les agitations, afin d’embrasser la totalité de la République, et pour que nous puissions ensuite nous occuper du bonheur du peuple; car, ne vous y trompez pas, tous les citoyens attendent avec impatience la réunion des hommes de bien contre ceux qui veulent le désordre, contre ceux qui veulent perpétuer l’agitation pour perpétuer leur domination. Nous voulons tous le règne de la liberté et de l’égalité, et je trouve que dans l’Adresse on n’a pas assez appuyé sur ce dernier mot, afin (97) Débats, n 748, 291. de répondre à ceux qui osent mettre en question si nous soutiendrons l’égalité, qui osent dire que nous voulons anéantir le gouvernement démocratique. La Convention n’admet aucune distinction entre les patriotes, et tous les bons citoyens sont des frères ; il n’y a que les fripons, les intrigants, les ambitieux et les agitateurs qui forment une classe à part : c’est celle du crime. (On applaudit.) (98) [Il est temps, dit Tallien, que tous les gens de bien se regardent comme des frères ; que tous ceux qui veulent sincèrement la liberté et l’égalité se réunissent comme ces hommes qui ne veulent que trouble et désordre pour perpétuer leur domination : on a osé parler de classes de distinction; les fripons, les méchans, les ambitieux ne sont d’aucune classe ( Vifs applaudissement). Il faut poursuivre le crime partout (On applaudit). Il faut que partout la vertu triomphe ( Nouveaux applaudissements )] (99). Les bons citoyens sont les hommes utiles, les laborieux agriculteurs, les artisans robustes, les zélés défenseurs de la patrie; mais ceux qui veulent vivre sans rien faire, qui veulent subsister de rapines, qui veulent se mettre à la tête du gouvernement pour en dilapider les finances, ces hommes-là sont les mauvais citoyens, ils doivent être abattus. Elevons sur leurs ruines la colonne de l’Égalité, et montrons au peuple cette divinité chérie, embrassant et soutenant la Liberté (100). [Que la loi soit égale pour tous, reprend Tallien, qu’elle pèse, qu’elle frappe également sur tous, et les fripons, et les intrigans, et les dila-pidateurs, et les ambitieux disparoîtront ( Applaudissemens )] (101) Je demande que les trois comités soient chargés de vous faire un rapport détaillé sur les mesures vigoureuses à prendre contre les agitateurs de toutes les espèces, afin qu’après les avoir anéantis nous puissions nous occuper paisiblement des grands travaux qui nous restent à faire pour le bonheur du peuple. Cette proposition est adoptée (102). 54 La Convention renvoie à son comité de Sûreté générale l’adresse de la société populaire de Clermont-Ferrand [Puy-de-Dôme], qui prétend que la masse du peuple a été outragée dans ses droits les plus inviolables, parce qu’on a mis en question, parce qu’on a demandé la destruction des Jacobins, de tous les Jacobins, parce qu’on (98 ) Moniteur, XXII, 202 ; Ann. R.F., n° 18, 19; Ann. Patr., n° 647; C. Eg., n' 782; J. Mont., n“ 163; J. Paris, n 19; J. Perlet, n° 746; Mess. Soir, n° 782; M.U., XLIV, 285; Rép., n 19. (99) Débats, n° 748, 292. (100) Moniteur, XXII, 202. (101) Débats, n 748, 292. (102) Moniteur, XXII, 202. C* II 21, p. 8, pour le décret de renvoi, rapporteur Tallien. SÉANCE DU 18 VENDÉMIAIRE AN III (9 OCTOBRE 1794) - Nos 55-56 35 a osé comparer le peuple réuni en société populaire aux corporations de l’ancien régime (103). 55 Les représentans du peuple dans les départemens du Gard, l’Aveyron, l’Hérault et Vaucluse, écrivent à la Convention que les troubles de Marseille n’ont point influé sur les départemens confiés à leur surveillance; la masse du peuple y est excellente ; quelques meneurs de sociétés populaires avoient cependant voulu égarer l’opinion publique à Beaucaire : comme ces meneurs étoient des fonctionnaires publics abusant de leur autorité pour enchaîner l’opinion publique, ils les ont destitués et leur ont fait appliquer la loi du 17 septembre. Insertion au bulletin, renvoi au comité de Sûreté générale (104). Les représentans du peuple délégués dans les départemens du Gard, de l’Aveyron, l’Hérault et Vaucluse, à la Convention nationale (105). Nous nous empressons de vous annoncer que les troubles de Marseille n’ont influé en rien sur les départemens dont vous nous avez confié la surveillance. La masse du peuple est partout excellente, et rend justice à la Convention nationale, à qui elle est uniquement attachée. Nous ne devons cependant pas vous laisser ignorer que quelques meneurs de société populaire avoient voulu égarer l’opinion publique à Beaucaire; vous avez dû vous en appercevoir par le style des adresses qui vous sont parvenues de la part de cette société : comme ces meneurs étoient fonctionnaires publics, et qu’ils nous ont été présentés comme des administrateurs abusant de leur autorité pour enchaîner l’opinion publique, nous les avons destitués, et leur avons fait appliquer la loi du 17 septembre. Nous ne négligerons aucun des moyens propres à maintenir la paix et la tranquillité dans ces belles contrées. En vain vous dira-t-on que l’aristocratie lève la tête (style ordinaire des agitateurs). Nous jurons sur l’autorité que vous nous avez confiée, que nous saurons comprimer les aristocrates et les modérés, et faire jouir les bons citoyens de cette sécurité qui seule peut consolider la paix intérieure de la République. Nous ferons notre possible pour raviver l’agriculture, le commerce et les arts. Nous avons vu avec douleur que des hommes, sous le masque d’un ardent patriotisme, avoient persécuté avec acharnement les cultivateurs, les commerçants et les artistes auxquels nous (103) P.-V., XLVII, 78. (104) P.-V., XLVII, 78. J. Fr., n° 744 ; J. Paris, n° 19 ; Mess. Soir, n° 782; M.U., XLIV, 282. (105) Bull., 18 vend. avons déjà rendu justice, car nous nous sommes empressés de mettre en pratique la belle théorie développée de Robert Lindet. Les vrais principes étant immuables comme l’astre du jour, tous les hommes qui s’y attachent sont toujours d’accord. Salut et fraternité. Signé, Perrin, Ph. Ch. Goupilleau. 56 La société populaire, le conseil-général, le tribunal de paix, la gendarmerie et la garde nationale de la commune de La Loupe, département d’Eure-et-Loir, écrit à la Convention : Les assassinats sont donc encore la ressource des factieux : Tallien, votre collègue, n’a manqué de perdre la vie que parce que la providence, qui rend aussi des décrets, n’a pas voulu donner à nos plus cruels ennemis la jouissance d’un aussi grand forfait. Nous vous déclarons, citoyens-repré-sentans, que nous voulons la République une et indivisible; que nous ne reconnois-sons d’autre point de ralliement que la Convention nationale; que nous ne voulons suivre que ses décrets, et que nous avons en horreur toutes discussions faites hors de votre sein en matière de législation. Mention honorable, insertion au bulletin (106). [La société populaire, le conseil-général, le tribunal de paix, la gendarmerie et la garde nationale de la commune de La Loupe à la Convention, le 10 vendémiaire an lit] (107) Citoyens représentans, Les assassinats sont donc encore la ressource des factieux : Tallien votre collègue, n’a manqué de perdre la vie que parce que la Providence, qui rend aussi des décrets, n’a pas voulu donner à nos plus cruels ennemis la jouissance d’un aussi grand forfait. Le salut du peuple exige tous vos soins et toute votre énergie ; ses droits, sa Liberté! et votre autorité ont été outragés. Les menaces du crime ont retenti jusque dans nos foyers, et jusqu’à la mort du dernier tirant de la République elles ont comprimé, étouffé la voix de nos meilleurs patriotes et des plus chauds amis de la Liberté. Nous vous déclarons, citoyens représentans, que nous voulons la République une et indivisible; que nous ne reconnoissons d’autre point de ralliement que la Convention nationale ; que nous ne voulons suivre que ses décrets, et que (106) P.-V., XLVII, 78-79. (107) C 322, pl. 1352, p. 37.