SÉANCE DU 14 FLORÉAL AN II (3 MAI 1794) - Nos 44 ET 45 23 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son Comité des finances, sur le mode d’exécuter les restitutions arrêtées par les corps administratifs envers les citoyens qui ont été trop taxés à la contribution patriotique, ou pour raison de double emploi, qui s’effec-tuoient d’abord par la caisse de l’extraordinaire, et depuis par celle des domaines nationaux; «Décrète que ces restitutions seront faites par la trésorerie nationale sur l’ordonnance des commissaires des revenus nationaux, en suite de l’arrêté des corps administratifs » (1). 44 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BEFFROY, au nom] du Comité des finances, sur la question faite par les corps administratifs, relativement à l’application de l’article V de la loi du 21 mars 1793, portant suppression du droit de patente; » Considérant que le prix d’habitation des boutiques, échoppes ou étaux de marchands, ateliers, hangards, chantiers, magasins, greniers et caves servant de magasins, n’avoit été affranchi de la contribution mobiliaire que parce qu’il étoit représenté par le droit de patente, et que la valeur de ces objets est la seule indicative des revenus d’industrie dont il est question dans l’article V de la loi du 21 mars 1793, portant suppression du droit de patente; » Décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer. » Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance » (2) . 45 MERLIN (de Douai) organe du Comité de législation, fait un rapport sur la pétition du Cn PASQUIER : Jean -Baptiste Pasquier, cultivateur à Vente-lay, actuellement détenu en la maison de justice de Châlons, demande [la] cassation d’un jugement du tribunal criminel du département de la Marne. Un innocent condamné à la peine des fers, quoiqu’il n’ait jamais eu l’intention de nuire à autrui, et que dans le fait il n’ait nui à personne, réclame l’appui de la loi et des magistrats. Pourrait-il les invoquer en vain, lorsque le jugement qui le flétrit est rendu sur une procédure irrégulière et qu’il a fait une fausse application de la loi. Faits : Les corps administratifs du département ont fait différentes réquisitions à l’exposant pour conduire des grains tantôt au magasin militaire (1) P.-V., XXXVI, 299. Minute de la main de Befïroy, (C 301, pl. 1069, p. 27). Décret n° 9008. Reproduit dans Mon., XX, 475; C. Eg., n° 624; M.U., XXXIX, 248; Débats, n° 591, p. 173; Feuille Rép., n° 305; J. Matin, n° 682; J. Sablier, n° 1295; J. Mont., n° 172; J. Paris, n° 489; J. Perlet, n° 590. (2) P.-V., XXXVI, 300. Minute de la main de Beffroy (C 301, pl. 1069, p. 28). Décret n° 9017. Reproduit dans Bin, 14 flor. (1er suppl‘) ; Mon., XX, 475; Débats, n° 591, p. 172; M.U., XXXIX, 250; J. Matin, n° 682; Ann. patr., n° 488; J. Paris, n° 489; Feuille Rép., n° 305; J. Sablier, n° 1295; C. Eg., n° 624; Audit, nat., n° 589; J. Perlet, n° 590. de Reims, tantôt au lieu de la ci-devant vicomté. L’exposant a fait tout ce qui dépendait de lui pour remplir les désirs de l’administration et le zèle qu’il y a mis, loin de lui être utile, n’a servi qu’à l’engloutir dans l’abîme où il est plongé. C’est le 6 oct. dernier (vieux style) qu’il lui fut fait une 3e réquisition de fournir du froment le 8 de ce même mois, au lieu de la vicomté. Il fut exact à s’y rendre et à y conduire 3 sacs de froment pesant 77,910 livres. Ce froment fut reçu,, on lui en fournit le bordereau, et quoiqu’il n’ait jamais eu l’intention d’exiger au-delà de ce qui lui était légitimement dû, quoiqu’il ait déclaré à cet égard ses intentions dans l’instant où il ne croyait pas avoir à justifier, le désir mal fondé sans doute d’encourager les autres citoyens à ouvrir leurs greniers et d’obtenir la bienveillance de sa municipalité, le portèrent à faire sur le bordereau un changement peu important en lui-même (1) puisqu’il ne nuisait à personne. Cependant, la malveillance l’a supposé coupable d’une intention criminelle qu’il n’avait pas et qu’il ne pouvait pas avoir. Il a été dénoncé à la municipalité, arrêté arbitrairement, conduit devant le juge de paix, traduit devant le tribunal de police correctionnelle et renvoyé par lui au directeur du juré, accusé, décrété et condamné à la peine de 4 années de fers. Heureusement pour lui, la providence qui prend soin de sa destinée, semble avoir égaré à dessein les officiers publics qui ont voulu le faire trouver coupable, par là même, elle a ménagé à l’exposant les moyens de se justifier. Il n’examinera point dans ce moment s’il existe un délit dans les faits qu’on lui impute, ce sera au nouveau tribunal devant lequel il espère être renvoyé, à juger ce point important; mais il proteste d’avance sur ce qu’il y a de plus sacré qu’il n’eut jamais l’intention de nuire à autrui, qu’il l’a déclaré avant et après l’accusation portée contre lui et qu’il le déclarera tant qu’il aura un souffle de vie. En attendant de pouvoir en convaincre tous les êtres raisonnables qui ne croient au crime que lorsqu’il est constant et qui ne supposent jamais des mauvaises intentions à celui qui n’a point manifesté le dessein, il va démontrer au tribunal de cassation que la procédure instruite contre lui est frappée de plusieurs nullités viscérales qui impriment au jugement dont il s’agit un caractère de réprobation. La lre résulte de la contravention formelle et littérale aux articles 3, 4 et 5 du titre 12 de la loi sur les jurés. L’article 3 porte : l’accusation (en matière de faux) ainsi que l’examen de l’affaire, seront présentés à des jurés spéciaux d’accusation et de jugement. Pour former le juré spécial d’accusation (porte l’art. 4), le procureur syndic, parmi les citoyens elligibles, en choisira 16 ayant les connaissances relatives au genre de délit, sur lesquels il en sera tiré au sort 8 qui composeront le tableau de juré. L’article 5 ajoute : le juré spécial de jugement sera formé par le procureur général syndic lequel à cet effet choisira 26 citoyens ayant les qualités ci-dessus désignées. Ainsi, l’exposant, accusé de faux, devait être entendu et jugé par un juré spécialement com-(1) En marge : changement de trois en quatre. SÉANCE DU 14 FLORÉAL AN II (3 MAI 1794) - Nos 44 ET 45 23 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son Comité des finances, sur le mode d’exécuter les restitutions arrêtées par les corps administratifs envers les citoyens qui ont été trop taxés à la contribution patriotique, ou pour raison de double emploi, qui s’effec-tuoient d’abord par la caisse de l’extraordinaire, et depuis par celle des domaines nationaux; «Décrète que ces restitutions seront faites par la trésorerie nationale sur l’ordonnance des commissaires des revenus nationaux, en suite de l’arrêté des corps administratifs » (1). 44 « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BEFFROY, au nom] du Comité des finances, sur la question faite par les corps administratifs, relativement à l’application de l’article V de la loi du 21 mars 1793, portant suppression du droit de patente; » Considérant que le prix d’habitation des boutiques, échoppes ou étaux de marchands, ateliers, hangards, chantiers, magasins, greniers et caves servant de magasins, n’avoit été affranchi de la contribution mobiliaire que parce qu’il étoit représenté par le droit de patente, et que la valeur de ces objets est la seule indicative des revenus d’industrie dont il est question dans l’article V de la loi du 21 mars 1793, portant suppression du droit de patente; » Décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer. » Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance » (2) . 45 MERLIN (de Douai) organe du Comité de législation, fait un rapport sur la pétition du Cn PASQUIER : Jean -Baptiste Pasquier, cultivateur à Vente-lay, actuellement détenu en la maison de justice de Châlons, demande [la] cassation d’un jugement du tribunal criminel du département de la Marne. Un innocent condamné à la peine des fers, quoiqu’il n’ait jamais eu l’intention de nuire à autrui, et que dans le fait il n’ait nui à personne, réclame l’appui de la loi et des magistrats. Pourrait-il les invoquer en vain, lorsque le jugement qui le flétrit est rendu sur une procédure irrégulière et qu’il a fait une fausse application de la loi. Faits : Les corps administratifs du département ont fait différentes réquisitions à l’exposant pour conduire des grains tantôt au magasin militaire (1) P.-V., XXXVI, 299. Minute de la main de Befïroy, (C 301, pl. 1069, p. 27). Décret n° 9008. Reproduit dans Mon., XX, 475; C. Eg., n° 624; M.U., XXXIX, 248; Débats, n° 591, p. 173; Feuille Rép., n° 305; J. Matin, n° 682; J. Sablier, n° 1295; J. Mont., n° 172; J. Paris, n° 489; J. Perlet, n° 590. (2) P.-V., XXXVI, 300. Minute de la main de Beffroy (C 301, pl. 1069, p. 28). Décret n° 9017. Reproduit dans Bin, 14 flor. (1er suppl‘) ; Mon., XX, 475; Débats, n° 591, p. 172; M.U., XXXIX, 250; J. Matin, n° 682; Ann. patr., n° 488; J. Paris, n° 489; Feuille Rép., n° 305; J. Sablier, n° 1295; C. Eg., n° 624; Audit, nat., n° 589; J. Perlet, n° 590. de Reims, tantôt au lieu de la ci-devant vicomté. L’exposant a fait tout ce qui dépendait de lui pour remplir les désirs de l’administration et le zèle qu’il y a mis, loin de lui être utile, n’a servi qu’à l’engloutir dans l’abîme où il est plongé. C’est le 6 oct. dernier (vieux style) qu’il lui fut fait une 3e réquisition de fournir du froment le 8 de ce même mois, au lieu de la vicomté. Il fut exact à s’y rendre et à y conduire 3 sacs de froment pesant 77,910 livres. Ce froment fut reçu,, on lui en fournit le bordereau, et quoiqu’il n’ait jamais eu l’intention d’exiger au-delà de ce qui lui était légitimement dû, quoiqu’il ait déclaré à cet égard ses intentions dans l’instant où il ne croyait pas avoir à justifier, le désir mal fondé sans doute d’encourager les autres citoyens à ouvrir leurs greniers et d’obtenir la bienveillance de sa municipalité, le portèrent à faire sur le bordereau un changement peu important en lui-même (1) puisqu’il ne nuisait à personne. Cependant, la malveillance l’a supposé coupable d’une intention criminelle qu’il n’avait pas et qu’il ne pouvait pas avoir. Il a été dénoncé à la municipalité, arrêté arbitrairement, conduit devant le juge de paix, traduit devant le tribunal de police correctionnelle et renvoyé par lui au directeur du juré, accusé, décrété et condamné à la peine de 4 années de fers. Heureusement pour lui, la providence qui prend soin de sa destinée, semble avoir égaré à dessein les officiers publics qui ont voulu le faire trouver coupable, par là même, elle a ménagé à l’exposant les moyens de se justifier. Il n’examinera point dans ce moment s’il existe un délit dans les faits qu’on lui impute, ce sera au nouveau tribunal devant lequel il espère être renvoyé, à juger ce point important; mais il proteste d’avance sur ce qu’il y a de plus sacré qu’il n’eut jamais l’intention de nuire à autrui, qu’il l’a déclaré avant et après l’accusation portée contre lui et qu’il le déclarera tant qu’il aura un souffle de vie. En attendant de pouvoir en convaincre tous les êtres raisonnables qui ne croient au crime que lorsqu’il est constant et qui ne supposent jamais des mauvaises intentions à celui qui n’a point manifesté le dessein, il va démontrer au tribunal de cassation que la procédure instruite contre lui est frappée de plusieurs nullités viscérales qui impriment au jugement dont il s’agit un caractère de réprobation. La lre résulte de la contravention formelle et littérale aux articles 3, 4 et 5 du titre 12 de la loi sur les jurés. L’article 3 porte : l’accusation (en matière de faux) ainsi que l’examen de l’affaire, seront présentés à des jurés spéciaux d’accusation et de jugement. Pour former le juré spécial d’accusation (porte l’art. 4), le procureur syndic, parmi les citoyens elligibles, en choisira 16 ayant les connaissances relatives au genre de délit, sur lesquels il en sera tiré au sort 8 qui composeront le tableau de juré. L’article 5 ajoute : le juré spécial de jugement sera formé par le procureur général syndic lequel à cet effet choisira 26 citoyens ayant les qualités ci-dessus désignées. Ainsi, l’exposant, accusé de faux, devait être entendu et jugé par un juré spécialement com-(1) En marge : changement de trois en quatre.