42 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 novembre 1789.] ce qui concerne l’affaire de Rouen. On y dit que la discussion a été ouverte sur la motion principale à laquelle la lettre du Roi a donné naissance. Le fait est qu’il n’y a pas eu de discussion sur la motion, malgré les plus vives réclamations ; mais il y a eu discussion sur l’ajournement. L’Assemblée délibère et décide que le procès-verbal est exactement et convenablement rédigé sur ce point. On fait lecture ainsi qu’il suit de plusieurs adresses relatives aux décrets de l’Assemblée nationale : Adresse de la ville d’Arzacq, où elle adhère avec dévouement à tous les décrets de l’Assemblée nationale et renonce en conséquence à tous ses privilèges particuliers. Adresse de félicitations, remercîments et adhésion du comité général et permanent de la ville de Vire. 11 supplie l'Assemblée nationale de ne pas se séparer qu’elle n’ait fait jouir la nation de ces lois sages et nécessaires que sollicite son honneur, et de croire qu’il adoptera toujours avec zèle tout sacrifice auquel il n’aura été qu’invité. Délibération du comité permanent de la ville de Lectoure, sur les moyens de maintenir l’ordre et la tranquillité publique, en exécution des décrets de l’Assemblée nationale. Adresse du comité permanent de la ville de Goutances, où il adhère de nouveau aux décrets de l’Assemblée nationale, et la supplie de s’occuper sans cesse de l’organisation des assemblées provinciales et des municipalités. Procès-verbal de prestation de serment de la milice nationale de Montpellier, auquel est jointe une lettre des représentants de la commune de la même ville, pm laquelle ils expriment leur respect pour l’Assemblée nationale, et leur empressement à se conformer à ses décrets Délibération de la ville de Sain t-Hippoly te en Languedoc, par laquelle les habitants déclarent qu’ils adhèrent de cœur et d’esprit au décret de l’Assemblée relatif à la contribution patriotique, dans l’espoir que les arrêtés du 4 août auront, le plus tôt possible, leur plein et entier effet. Adresse de félicitations, remercîmenl s et adhésion du comité municipal de la ville d’Argentan en Normandie. Arrêté des officiers du bailliage de Saiut-Paul-Trois-Châteaux en Dauphiné, de rendre la justice gratuitement; ils présentent à l’Assemblée l’hommage de leur respect et de leur dévouement. Délibération de la ville et communauté de Malestroit en Bretagne, par laquelle elle dénonce à l’Assemblée nationale les excès et violences commis envers plusieurs citoyens, et notamment les officiers municipaux, au mépris des décrets de l’Assemblée nationale, et notamment de la loi martiale, pour lesquels la communauté est pénétrée de respect et de vénération ; elle supplie l’Assemblée de faire punir les auteurs de ces délits. Adresse du comité permanent et des habitants de la ville de Confolens, où ils adoptent avec transport la contribution patriotique du quart des revenus, quoique la disette des grains et la chute de leur commerce les aient plongés dans l’inlor-tune. Réclamations du clergé du bailliage de Douay et Orchies, contre la vente des biens ecclésiastiques. Il déclare qu’il a toujours concouru, comme les autres citoyens, au payement de tous les impôts réels; renonce à toutes exemptions, et offre de venir, de tout son pouvoir, au secours des finances et de la chose publique. Deux membres du comité de vérification ayant successivement annoncé que M. Henryot, député du bailliage de Langres, et M Rabin, député du clergé d’Anjou/avaient donné leur démission, et que les pouvoirs de M. Devron, en qualité de suppléant du premier, et ceux de M. Pilastre, nommé premier suppléant des communes d’Anjou, et présenté pour remplacer le second, avaient paru en règle ; ils ont été admis l’un et l’autre. Les soldats de la milice parisienne du district des Jacobins Saint-Honoré se sont présentés pour offrir un don patriotique tant en argent comptant qu’en argenterie et la députation ayant été admise à la barre, M. le président leur a dit que l’Assemblée voyait avec satisfaction cette marque de leur patriotisme. — Une députation des commis des fermes aux entrées de Paris est également admise. Son orateur représente qu’il se prélève annuellement sur les appointements des commis une somme qui est versée dans une caisse destinée à payer les pensions des employés qui ont vingt ans de service. Il se fait aussi, dans beaucoup de circonstances, telles que les cas d’absence et de maladie, des prélèvements qui sont encore destinés à la caisse des pensions. Depuis vingt-huit ans, la compagnie des fermes, qui administre cette caisse, a touché pour ces objets une somme qui s’élève au-dessus de 4,600,000 livres, et elle n’a payé en pensions qu’environ 1 million. Les commis des fermes n’ont jamais pu obtenir qu’il leur fût rendu compte de l’état de cette caisse. Us supplient l’Assemblée de les autoriser à l’exiger, et ils font hommage à la nation du tiers de la somme dont les fermiers généraux se sont reconnus leurs débiteurs. (L’Assemblée accorde la séance à ces deux députations.) M. le Président. Le premier objet qui se trouve à l’ordre du jour est la suite de la motion de M. Treilhard relative aux biens ecclésiastiques. L’article par lequel la discussion doit commencer est ainsi conçu : « Ceux qui seront pourvus à l’avenir de quelque bénéfice, de quelque nature qu’il puisse être, ne pourront jouir des revenus qui y sont actuellement attachés, que jusqu’à concurrence des sommes qui seront incessamment déterminées par l’Assemblée nationale. » M. Germain. Je demande que l’exception s’étende à tous les hôpitaux en général. M. Bigot de dernière. Il n’est pas besoin d’un long discours pour faire apprécier à l’Assemblée nationale les motifs de justice qui doivent faire respecter la jouissance des titulaires vivants qui, étant mis en possession de leurs revenus au nom de la toi, sont des possesseurs respectables. Je demande que la motion soit ajournée, jusqu’à ce que vous ayez statué sur le plan général à suivre pour les biens du clergé. M. Legrand. Je pourrais vous annoncer que dans ma province plusieurs corps ecclésiastiques déprèdent non-seulement leurs mobiliers, mais encore leurs fonds. On sait qu’en Berry les cheptels sont une propriété très-fort en usage. Les ecclésiastiques vendent à présent ces cheptels; mais mon observation principale porte sur les bois. Les bénéficiers possèdent une très-grande [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]13 novembre 1789.] partie des forêts du royaume, et la rareté des Jbois de marine doit fixer principalement votre attention sur cette nature de biens; cependant on coupe à présent en Berry des bois qui ont à peine douze ou quinze ans, tandis que l’aménagement ordinaire est de vingt-deux ans. Les ordonnances des eaux et forêts ont ordonné ces quarts de réserve qui n’ont presque jamais été faits. Je demande qu’il soit décrété provisoirement qu’aucuns bois, même taillis, ne seront coupés jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné. M. Barnave. Ces diverses observations ne doivent rien changer aux articles proposés par M. Treilhard Nous avons mis les biens ecclésiastiques à la disposition de la nation; il faut les conserver à la nation, ou bien nous n’aurions fait qu’un arrêté illusoire, nous n’aurions établi qu’une maxime sans conséquence. Des lettres et des délibérations des communautés mises sur le bureau prouvent combien nos précautions sont nécessaires et tardives. La motion de M. Treilhard concilie tout et ne fait tort à personne. Je demande qu’on aille aux voix sur-le-champ. M. l’abbé de llontesqulou. Est-il juste, est-il utile de mettre le scellé sur les titres des bénéfices ? Est-il juste ? Il est donc, en fait de propriétés ecclésiastiques, des titres qui, nécessaires à la propriété, ne le sont pas à la jouissance. M. Treilhard propose d’excepter du scellé les baux, les cueilleraies, etc., etc. Tous nos procès, soit sur la propriété, soit sur la jouissance, exigent une représentation de titres, sinon primordiaux, du moins très-anciens : il faut donc apposer partout le scellé sur tous les titres, ou sur aucun. Ce qu’il y aurait de plus raisonnable serait de faire un inventaire sans frais, et de laisser la jouissance des titres. Est-il utile? Le seul mot de scellé emporte avec lui quelque chose d’humiliant, et nous ne pouvons changer les préjugés. Je demande si, quand vous ferez une descente dans un monastère de religieuses, vous n’y porterez pas l’effroi, en leur inspirant la crainte de leur destruction? Je demande si, lorsque vous apposerez Je scellé dans une maison de religieux, cet acte ne leur paraîtra pas une véritable interdiction, et ne sera pas la cause de la dilapidation que vous voulez éviter? Persuadés de leur suppression, et voyant que vous rx’avez encore rien fait pour eux, ils s’occuperont à assurer leur sort. Pourquoi, pendant un grand nombre de séances, s’est-on sans cesse occupé à détruire sans songer à remplacer ? C’est un heureux don que de voir partout de l’or, comme les alchimistes; mais faut-il, comme eux, le chercher dans les cendres ? Imitons la marche de la nature, qui ne détruit que pour créer. M. le marquis Lezay de Marnesla. On a oublié de s’occuper des chapelains qui tiennent leurs bénéfices de la piété, de la reconnaissance ou de l’estime; permettez que j’appelle votre attention sur eux et sur les droits des patrons laïcs. Nos pères ont consacré à la fondation de ces bénéfices une partie de leur fortune , pour préparer à leurs héritiers le plaisir de secourir un malheureux, ou de faire accepter un bienfait à l’homme délicat et infortuné. Je laisse aux jurisconsultes à discuter les droits des patrons, 43 et je me borne à demander que cet objet soit mis en délibération. M. Cochon de Lapparent. J’approuve les principes de l’article proposé par M. Treilhard, mais je pense qu’il est inutile et dangereux de s'en occuper dans ce moment. On pourrait tirer du décret que vous rendriez à cet égard des inductions sur la question de savoir si l’on touchera à la jouissance des titulaires actuels. Je demande en conséquence l’ajournement, ou que, si l’article est admis, il y soit ajouté par amendement, que c’est sans rien préjuger sur la conservation ou réduction du revenu des titulaires. M. le marquis de Lacoste propose à l’Assemblée un plan général de travail sur la disposition des biens du clergé. On le rappelle à l’ordre du jour ci-devant établi. M. le comte de Mirabeau. Il me paraît que la question étant provisoire de sa nature, une décision provisoire n’est point une chose pressée, et que vous pourriez attendre les plans et les observations générales qui vous sont proposés. J’ai une suite de questions à vous présenter sur le décret du 2 de ce mois, et il me semble impossible de délibérer sur des vues particulières avant d’avoir arrêté un plan général. M. Treilhard. Je reconnais l’avantage de la proposition qui vous est faite; mais je pense que, même en y adhérant, il est indispensable de statuer sans délai sur le troisième article que j’ai à vous proposer. Il a pour objet le scellé à mettre sur les chartriers de tous les bénéfices, excepté des curés. Cette mesure est purement conservatoire, et, sans contredit, avant de s’occuper de la disposition d’un bien, il faut assurer sa conservation. M. deBonnal, évêque de Clermont. Je prends la parole pour servir la justice de l’Assemblée et soulager mon âme d’un poids que le devoir m’impose. L’exception des curés pour le scellé proposé pourrait donner au peuple des idées défavorables aux évêques, et nuire au respect c]ue l’intérêt de la religion exige qu’ils inspirent. Le peuple n’a vu mettre le sctdlé que sur les effets des morts, des banqueroutiers et des personnes suspectes... Ce scellé est absolument inutile. Ou vous nous laisserez l’administration de nos biens, ou vous nous Coterez. Si vous nous la laissez, l’intérêt réel des titulaires vous assurera la conservation des titres. Si vous nous Cotez, notre destinée et celle de nos successeurs étant attachée à la situation pécuniaire de la France, notre intérêt nous prescrira encore de conserver avec soin toutes nos propriétés. Mais l’intérêt seul doit-il être votre garant , et ne pouvez-vous compter sur notre foi et sur notre honneur? Je propose, en amendement, que le scellé ne soit mis que sur les établissements qui, d’après les circonstances et les intentions de l’Assemblée, seront dévoués à la suppression. Je demande que l’Assemblée, sévère sur les choses, jette des regards favorables sur les individus, et que la question présente soit ajournée jusqu’à ce que le comité ecclésiastique ait présenté les moyens de rassurer les religieux sur le sort qui leur est réservé. M. Dupont. Vous avez entendu qu’il serait ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 novembre 1789.) 44 [Assemblée nationale.] pourvu au sort des individus dont la position sera changée. Vous avez voulu que la nation eût la propriété des biens ecclésiastiques, vous ne pouvez administrer ces biens et en disposer qu’en. les connaissant; et vous ne pouvez les connaître que par les litres. Votre premier soin surtout doit être de conserver ces biens. Des supérieurs très:recommandables de plusieurs maisons religieuses m’ont écrit et m’ont dit que, malgré leur respect pour les décrets de l’Assemblée nationale, ils craignaient de ne pouvoir empêcher leurs religieux de dilapider des effets précieux. M. de Montesquiou demande que le sort des ecclésiastiques réguliers soit assuré. Je propose un décret qui remplira ses vues, celles de M. l’évêque d’Autun, celles de M. Treilhard et les vôtres. Il consiste à supprimer tous les ordres religieux en France, excepté celui de Malte, sur lequel l’Assemblée se réservera de statuer. Chaque individu pourra choisir s’il veut suivre sa règle, ou être sécularisé. Dans le premier cas, des maisons seront réservées ; dans le second, s’ils veulent vivre en commun ils s’adresseront au Roi et à l’Assemblée nationale pour connaître le lieu où il pourront se réunir. Il me paraît indispensable de statuer sur ces objels avant d’ordonner l’apposition des scellés. M. le comte de Mirabeau. L’un des préopinants a surtout été effrayé de l’aspect d’humiliation et de l’idée de séquestre et d’interdiction que l’apposition des scellés peut enlraîner. Cette objection n’est sans doute pas sérieuse; il a dit que la nature ne délruit que pour créer ; il aurait dû dire que la nature détruit aussi pour conserver. Les scellés sont incontestablement conservatoires, et ce préopinant, à raison de ses talents, nous a le mieux fait sentir la nécessité de cette précaution. Il faut auxiliariser à la chose publique les intérêts bien entendus des ecclésiastiques. Tel est l’esprit des mesures que j’ai à proposer ; mais la conservation des biens que la nation a mis à sa disposition doit précéder ces mesures, et j’opine pour ie scellé. M. dortols de Balore, évêque de Nîmes. Je Terai remarquer qu’en tout état de cause, les scellés ne peuvent être apposés que sur les bibliothèques des corps et non sur celles des particuliers. M. Regnaud de Saint-Jean-d’Angely. Comme l’on pourrait craindre des arrangements frauduleux à raison de certaines possessions litigieuses du clergé, je propose d’interdire aux titulaires des bénéfices et administrateurs actuels des biens ecclésiastiques , de consentir aucun arrêt d’expédients ou de transactions, sous aucun prétexte que ce soit, jusqu’à ce que l’Assemblée ait statué sur la disposition de ces biens. Je propose également de défendre aux notaires de passer des transactions et aux tribunaux de prononcer de pareils arrêts d’expédient. M. Bouchotte. Un inventaire sommaire des titres serait suffisant sans recourir aux scellés. M. de Coulmiers, abbé d'Abbecourt. Il est des égards auxquels les ministres d’une religion sainte ont droit de prétendre ; ce qui tend à les avilir, tend à détruire le respect des peuples. Pourquoi recourir à des moyens flétrissants, les déclarations ne seraient-elles pas suffisantes? Je propose que les titulaires des bénéfices et chefs des communautés ecclésiastiques soient tenus de faire leur déclaration des effets, titres et papiers dont ils seront personnellement res-responsables envers la nation. M. le Chapelier. Je ne cherche point à ap-puver la motion de M. Treilhard; elle me paraît n’en avoir pas besoin, d’anrés la manière dont elle a été attaquée et défendue. Je me borne à exposer, d'après un fait, qu’il est aussi utile au clergé qu’à fa nation que la proposition du scellé soit adoptée. On a prétendu à Nantes que des ecclésiastiques dissipaient leur mobilier, et sur-le-champ on a voulu mettre le scellé partout, ce qui aurait alors été réellement désagréable pour le clergé; mais, dans l’espoir d'un décret prochain de l’Àssemblé nationale, on a différé cette opération. Il est aisé de prévoir, dans de telles circonstances, ce qui résulterait d’un ajournement. Le scellé qui serait ordonné par nous ne causerait pas le plus léger préjudice aux titulaires. Dans les cas très-rares de procès, la levée de ce scellé pourrait être faite avec très-peu de frais our leur remettre les pièces dont ils auraient esoin. M. Gossin. Je demande que les chapitres possesseurs des cures soient exceptés de la formalité des scellés et inventaires. M. Démeunier. La motion de M. Treilhard est d’une nécessité pressante; mais je crois que nulle autre motion de détail ne doit être désormais discutée avant que le comité ecclésiastique ait présenté un plan général. Je crois aussi qu’il est nécessaire de prévenir les alarmes que l’apposition du scellé pourrait donner aux religieux. Je propose, dans cette vue, que l’Assemblée nationale décrète que, si elle supprime les monastères, elle laissera subsister un assez grand nombre de maisons des deux sexes, pour que les religieux et religieuses qui sont attachés à la vie monastique puissent y vivre continuellement. On propose plusieurs autres amendements de détails. M. Hutteau réclame la priorité pour la motion de M. l’abbé d’Abbecourt sur celle de M. Treilhard. Cette demande donne lieu à beaucoup de débats. M. l’abbé llaary. Quel est l’objet que nous nous proposons? Nous voulons garantir à la nation Indisposition des bien ecclésiastiques, et en assurer la conservation. Deux moyens sont indiqués: M. Treilhard propose le scellé, M. d’Abbecourt les déclarations des titulaires. Si vous voulez éloigner les diverses dispositions et simplifier les délibérations, vous pouvez poser ainsi la question: Adoptera-t-on les déclarations des titulaires, ou procédera-t-on par le scellé? La question ainsi posée, on délibère. La première épreuve est douteuse; la seconde donne la majorité à la motion deM. l’abbé d’Abbecourt. M. Target. Quelques membres ont proposé une exception en faveur des curés, lorsqu’il était question de l’appositioD des scellés; cette propo- [13 novembre 1789.] 45 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. sition ne convient plus pour les déclarations. Il ne peut y avoir d’exception quand il ne s’agit que de dire la vérité. M. Defermond. La même raison doit déterminer à comprendre dans le décret les ordres de Saint-Michel, de Malte, de Saint-Lazare, etc. M. le comte Des Roys, député du Limousin , propose cette motion : Que tous les titulaires et supérieurs des établissements ecclésiastiques, sans exception, seront tenus de faire des déclarations, etc., et que tous ceux qui auront fait des déclarations frauduleuses seront déchus de tous droits à leur bénéfice, ainsi qu’à toutes pensions ecclésiastiques. M. le marquis de Toulougeon présente cet amendement : que les déclarations soient faites par-devant les juges des lieux, et sous procès-verbaux d’inventaire, dont copie sera envoyée à l’Assemblée nationale. M. l’abbé de Alontesquiou. Vous ne pouvez pas vouloir nous soumettre à des peines avant d’avoir fixé exactement la forme des déclarations. Beaucoup d’abbés commandataires ne sont jamais allés dans leurs abbayes; voulez-vous les dépouiller pour des erreurs involontaires ? Vous ne devez punir que la mauvaise foi. indiquez-nous donc les moyens qu’il faut prendre pour faire des déclarations complètes. M. Treïlhard. Ce que vient de dire le préopinant nous prouve peut-être la sagesse de la mesure que vous venez de rejeter. Depuis trois cents ans, on a fait une multitude de déclarations, et pas une peut-être ne s’est trouvée exacte J’appuie d’autant plus volontiers la proposition de M. Des Roys, qu’il sera infiniment aisé de se conformer au vœu de l’Assemblée. Je m étonne qu’on ait cherché à excuser d’avance l’inexactitude et l’infidélité des déclarations. M. Ilébrard. Beaucoup d’ecclésiastiques ont fait au fisc des déclarations inexactes; il serait à propos d’insérer dans le decret une clause qui les mit à l’abri des poursuites des traitants. MM. delà Cfalissonnière et llilscent proposent d’ordonner que les déclarations seront affichées aux portes des églises et des paroisses. M. de Cazalès observe que beaucoup de membres ont quitté la séance dans la persuasion qu’elle était levée. Il demande l’ajournement à demain. Cet ajournement est rejeté. On délibère sur la proposition de l’affiche; elle est adoptée, ainsi que divers amendements, Le décret est conçu en ces termes : « L’Assemblée nationale a décrété ce qui suit : « Que tous titulaires de bénéfices, de quelque nature qu’ils soient, et supérieurs de maisons et établissements ecclésiastiques, sans aucune exception seront tenus de faire sur papier libre et sans frais, dans deux mois pour tout délai, à compter de la publication du_ présent décret, par devant les juges royauxou ofliciersmunicipaux, une déclaration détaillée de tous les biens mobiliers et Lumo-biliers dépendants des dits bénéfices, maisons et établissements, ainsi que de leurs revenus, et de fournir dans le même délai un état détaillé des charges dont lesdits biens peuvent être grevés ; lesquels déclarations et états seront par eux affirmés véritables devant lesdits juges ou officiers, et seront publiés et affichés à la porte principale de chaque paroisse où les biens sont situés, et envoyés à l’Assemblée nationale par lesdits juges et officiers. Décrèle pareillement que les titulaires et supérieurs d’établissements ecclésiastiques seront tenus d’affirmer qu’ils n’ont aucune connaissance qu’b ait été fait directement ou indirectement quelque soustraction des titres, papiers et mobilier desdits bénéfices et établissements, comme aussi que ceux qui auraient fait des déclarations frauduleuses seront poursuivis devant les tribunaux, et déclarés déchus de tout droit à tous bénéfices et pensions ecclésiastiques ; pourra néanmoins le susdit délai de deux mois, être prorogé, s’il y a lieu, pour les ecclésiastiques membres de l’Assemblée seulement, et sur leur réquisition, sans que des déclarations qui seront faites, il puisse résulter aucune action de la part des agents du fisc. » M. le Président a levé la séance, et l’a indiquée pour demain neuf heures et demie du matin. ANNEXES A la séance du 13 novembre 1789. lre ANNEXE. Observations et motions de M. le comte de Cler-mont-d’Esclaibes, député de Chaumont-en-Bassigny, relatives au port d’armes. (Distribuées le 13 novembre 1789.) Député du bailliage de Chauinont-en-Bassigny, j’ai l’honneur d’observer à l’Assemblée nationale : 1° Que cette partie de la Champagne est couverte de forêts qui servent d’aliment à quantité de forges, fourneaux, clouteries et autres usines à feu ; 2° Que les nombreux ouvriers occupés à l’exploitation des bois et à la fabrication des fers, sont, les uns venus de provinces éloignées, la plupart sans domicile fixe, et presque tous sans aucune propriété foncière; 3° Que d’une part on les voit, depuis la suppression du droit de chasse, empressés à se pourvoir d’armes à feu, et de l’autre, à la veille de tomber dans le désœuvrement, puisque Paris a fermé le principal débouché où se portaient les produits de leur industrie; 4° Que les réflexions à faire sur le danger de laisser armés une multitude de bras oisifs et qui portent tout avec eux sont applicables, sans doute, à plusieurs autres parties du royaume; 5° Qu’entin le prétendu droit de tout homme libre à porter des armes, disparaît devant celui de la société, qui pour sa propre conservation, peut exiger une garantie de ceux à qui elle confie cette force artificielle. En conséquence, je propose à l’Assemblée de décréter qu’aucun habitant des campagnes ne pourra porter ou garder chez lui une arme à feu, s’il n’est propriétaire ou fermier d’une étendue de sol suffisante à l’occupation d’une charrue. Nota. Il y a plus de six semaines que cette motion a été mise sur le bureau : M. le président m’a observé qu’elle n’était point dans l'ordre du jour, et je n’ai pas cru devoir insister.