États gén. 1789. Gabiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 303 Art. 8. La communauté sè plaint qu’ancienne ment elle avait des aires ; que le seigneur s’eü est emparé d’une grande partie , et qu’il a donné à nouveau bail pour y construire des maisons. Et après plusieurs plaintes, il a désemparé un petit coin d’aire attenante à celle de la communauté. De sorte qu’aujourd’hui les habitants se trouvent dans l’extrémité d’y placer et fouler ses gerbes, et se sont obligés de se soumettre à une amende contre ceux qui n’arrangeront pas assez bien leurs gerbes. Art. 9. La communauté demande de se pouvoir affranchir des cens dus au seigneur, et de les Souvoir payer en argent au prix qu’il plaira à Sa ajesté de fixer pour éviter toutes contestations sur la qualité des grains. Art. 10. La communauté se plaint que le seigneur a donné à nouveau bail au nommé Laurent Fabre un coin de terre ; et celui-ci l’ayant abandonné pour être trop cher; et ledit seigneur en fait supporter les tailles à la communauté. Art. 11. Se plaint encore que le grand froid a fait périr tous les oliviers et beaucoup des arbres fruitiers, et quantité de vignes : ce qui leur cause un grand dommage. Art. 12. La communauté est bien aise de délibérer, de faire ôter les pigeons que le prêtre nourrit dans la maison curiale, attendu qu il occasionne un grand préjudice au plancher de l’ap-partement où ils sont logés ; et de môme, mettre la fenêtre en place, comme de boucher les trous qui ont été faits dans la muraille pour nicher lesdits pigeons ; et mettre le tout comme la communauté avait fait construire. Les habitants se plaignent encore que le prêtre desservant cette paroisse se fait payer 12 sous des messes, tandis qu’ancien nernent on les payait 6. Et de suite, lesdits habitants, après avoir mûrement délibéré sur le choix des députés qu’ils sont tenus de nommer en conformité des lettres du Roi et règlement y annexé; et les voix ayant été par nous recueillies en la manière accoutumée, la pluralité des suffrages s’est réunie eu laveur des sieurs Jean Long et Jean-Baptiste Reimonet, qui ont accepté ladite commission et promis de s’en acquitter fidèlement. Ladite nomination desdits députés ainsi faite, lesdits habitants ont, en notre présence, remis auxdits sieurs Jean Long et Jean-Baptiste Reimonet, leurs députés, le cahier afin de le porter à l’assemblée le 2 avril prochain devant M. le lieutenant général, et leur ont donné tout pouvoir requis et nécessaire, à l’effet de le présenter à ladite assemblée pour toutes les opérations prescrites par l’ordonnance susdite de M. le lieutenant, comme aussi de donner pouvoirs généraux et suffisants de proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner le besoin de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d'un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume, et le bien de tous et chacun des sujets de Sa Majesté. Et, de leur part, lesdits députés se sont présentement chargés du cahier des doléances de cette dite communauté, et ont promis de le porter en ladite assemblée, et de se conformer à tout ce qui est prescrit et ordonné par lesdiles lettres du Roi, règlement y annexé, et l’ordonnance susdatée. Desquelles nominations des députés, remise de cahier, pouvoir et déclaration, nous avons, à tous les susdits comparants, donné acte; et avons signé, avec ceux des habitants qui savent signer, avec lesdits députés, notre présent procès-verbal, ainsi qüe le duplicata que nous avons présentement remis auxdits députés pour constater leur pouvoir. Et le présent sera déposé aux archives de cette communauté. Ledit jour et an que dessus. Signé de Lucil, lieutenant déjugé; Louis Long; Louis Maunier; François Long: Antoine Moustier; J. -J Moustier; J. -J. Moustîer; J. Long, député, et Car, greffier. CAHIER Des représentations , plaintes et doléances de là ville et communauté d’îstres, sénéchaussée d’Aix, déterminé et arrêté par tous les chefs de famille présents à l’assemblée générale tenue audit Is-três, le 25 mars 1789 (1). Le Roi, ayant manifesté le désir de connaître le vœu de ses fidèles sujets pour lui aider à surmonter toutes les difficultés relatives à l’état de ses finances, et établir un ordre constant et invariable dans toutes les parties du gouvernement, qui intéressent le bonheur de ses sujets et la prospérité du royaume; ces grands motifs Payant déterminé de convoquer l’assemblée des Etats de toutes les provinces, précédée d une assemblée de tous chefs de famille de chaque ville et communauté, dans laquelle il aurait à dresser un cahier de représentations, plaintes ou doléances pour être mis sous ses yeux, et lui faire connaître les souhaits de ses peuples; la ville et communauté d’istres, assemblée en conseil de tous chefs de famille, a déterminé les articles suivants : Art. 1er. Le pays et comté de Provence, étant pays d’Etats uni à la couronne de France, doit jouir de tous ses droits, privilèges, statuts et coutumes que les trois ordres du pays on t expressément réservés lorsqu’ils ont librement et volontairement consenti à cette union, et que tous les rois de France, comtes de Provence, ont compris de soutenir et maintenir. Art. 2. Que les abus qui se sont introduits dans la constitution de Provence seront réformés ; qu’en conséquence, les trois ordres du pays seront incessamment convoqués, les deux premiers ordres individuellement, et le tiers-état par députés de chaque ville et communauté de pays, élus dans un conseil de tous chefs de famille dans un nombre proportionné à la population, importance et affouagement de chacune desdites villes, pour former les assemblées des vigneries, dans lesquelles il sera également nommé un nombre de députés proportionné à l’étendue, population, importance et affouagement desdites vigueries, à l’effet de former Tordre du tiers-état. Art. 3. Que lesdits trois ordres réunis formeront les Etats généraux du pays de tel nombre de députés des trois ordres qui sera jugé convenable, de manière cependant que le nombre de députés des deux premiers ordres n’excède pas le nombre des députés du tiers-état. Les inconvénients, résultant dé la formation des prétendus Etats actuels, sont trop connus pour qu’il soit besoin de les déduire. Art. 4. La présidence des Etats et F exercice des fonctions des officiers du pays, ne pourront plus être permanents ; et l’élection en sera faite annuellement dans les premières séances des Etats, après la légitimation des pouvoirs des députéspet la prestation du serment. Art. 5. La procuration du pays sera séparée du (1) Nous publions ce cahier d'après un manuscrit des Archives âè l’Empire. 304 [Élatsgén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] consulat d’Aix. Les procureurs du pays étant les procureurs des gens des trois Etats, il est contre toutes les règles et les premières notions des principes du droit public, que ceux qui exercent les actions de la nation entière soient élus par le conseil municipal d’une seule communauté. Art. 6. Que les procureurs du pays soient élus par les Etats au nombre de six, savoir : un de l’ordre du clergé, deux de celui de la noblesse, et trois du tiers-état. Qu’il soit également élu par les Etats six adjoints auxdits procureurs du pays, pris dans les trois ordres et dans la même proportion, qui serviront de renforcement auxdits procureurs du pays. Art. 7. Que les procureurs du pays resteront trois ans en exercice ; et que, néanmoins, chaque année, il en sortira deux qui seront remplacés par deux des adjoints du meme ordre, à moins que, par des considérations particulières, et des motifs très-essentiels, les Etats jugeassent à propos de nommer directement au remplacement des procureurs du pays. Par ce moyen, l’administration des affaires serait exercée d’une manière plus conforme à l’intérêt des trois ordres. L’esprit d’une sage administration serait toujours permanent dans le corps des administrateurs ; les projets déterminés pour l’avantage et le bien du pays seraient constamment suivis, et les adjoints destinés à devenir procureurs du pays auraient le temps de s’instruire des véritables principes d’une bonne administration. Art. 8. Qu’il sera permis aux communes de s’assembler toutes les fois que leur intérêt l’exigera, et notamment avant et après la tenue des Etats, et de se nommer un syndic avec entrée aux Etats. Art. 9. La commission intermédiaire sera composée, ainsi que les Etats, d’un nombre de membres du tiers, au moins égal à celui des membres des deux premiers ordres. Art. iü. Que les comptes de la province seront imprimés et envoyés dans chaque communauté. Art. 11. Les ingénieurs du pays seront nommés par les Etats et au concours ; le nombre en sera diminué et réduit au besoin du pays ; leurs traitements fixés de manière que les communautés ne se trouvent pas dans l’impuissance de pouvoir les employer. Art. 12. Que les vigueries du pays étant inégales entre elles, il sera fait une nouvelle répartition desdites vigueries, à l’effet qu’elles puissent être égales entre elles, autant que faire se pourra ; et que l’arrondissement de chaque vi-guerie n’excède pas le nombre de vingt-cinq communautés. Art. 13. Que la députation aux Etats du pays pour l’ordre du tiers soit faite par les seules vigueries ; et qu’aucune ville ne jouisse plus du droit d’y députer directement : ce droit étant un véritable abus, puisqu’il n’est pas juste que certaines communautés jouissent du privilège de députer directement aux Etats, à l’exclusion du plus grand nombre : ou il faut que toutes les communautés députent directement aux Etats, ou il est de toute justice qu’aucune n’y députe. Art. 14. Que les Etats généraux du royaume seront formés par un nombre de députés du tiers au moins égal à celui des députés des deux premiers ordres. Art. 15. Que les voix y seront recueillies par tête et non par ordre, attendu que si elles étaient recueillies par ordre, l’esprit et l’intérêt de corps, décidant les opinions, il serait impossible de pouvoir former une délibération , parce qu’il serait impossible de réunir les suffrages des trois ordres ; au lieu qu’en opinant par tête, si l’on ne peut parvenir à obtenir les suffrages les plus conformes à l’intérêt de tout ce que l’on ne pourrait connaître que par l’unanimité des suffrages, on parviendra toujours par la pluralité absolue au suffrage le plus avantageux à l’intérêt général, auquel doit céder l’intérêt particulier. Art. 16. Que les Etats généraux du royaume seront fixés, par une loi authentique, à dés époques périodiques les plus rapprochées que faire se pourra , et que les impôts ne seront votés dans l’assemblée des Etats généraux que jusqu’à la tenue des Etats subséquents. Art. 17. Que les nobles possédant fiefs ou non possédant fiefs ne pourront jamais être représentants du tiers-état, ainsi que les membres du clergé. Art. 18. Que les magistrats des cours souveraines ne pourront point avoir entrée aux Etats. Art. 19. Que le Roi sera très-humblement supplié de convoquer les Etats généraux aux époques fixées, et qu’à défaut de ladite convocation, la nation pourra faire les dispositions qui seront déterminées pour parvenir à ladite convocation. Art. 20. Que dans l’intervalle de la tenue desdits Etats généraux, il sera établi une commission intermédiaire d’après le régime des Etats généraux eux-mêmes, composée des représentants du tiers en nombre égal des représentants des deux premiers ordres ; laquelle commission intermédiaire sera nommée par les Etats généraux, de manière qu’il y ait un représentant de chaque province. Art. 21. Qu’il sera accordé à toutes les provinces des Etats particuliers, afin que la marche de l’administration soit uniforme dans tout le royaume. Art. 22. Qu’il sera réglé, d’une manière fixe et déterminée, comment il sera procédé à l’avenir à 1 élection des députés de chaque province pour assister à l’assemblée des Etats généraux. Art. 23. Que le Roi sera très-humblement supplié de faire connaître à l’assemblée des Etats généraux l’état de ses finances, le déficit qui s’y trouve et les causes qui l’ont produit, afin que les Etats généraux soient à portée d’aviser aux moyens de le réparer et de prévenir les causes qui l’ont produit. Art. 24. Que lesdits Etats généraux ne délibéreront et ne voteront les impôts qu’après avoir délibéré sur tout ce qui regarde l’ordre public, l’intérêt générai du royaume et la réforme des abus. Art. zt>. uue l'impôt sera également réparti sur tous les sujets de Sa Majesté exempts et non exempts; que tous les privilèges d’exemption seront et demeureront abolis, et que toutes les classes de citoyens contribueront aux charges publiques tant royales que locales, à proportion de leurs propriétés, de leur faculté et de leur industrie, parce que tout citoyen recevant protection de l’Etat, il est juste que chaque citoyen contribue, suivant ses moyens, aux charges de l’Etat. Art. 26. Que les impositions de chaque province seront directement employées par le trésorier de la province à payer la dépense que le gouvernement y fait, et qu’il ne sera versé au trésor royal que l’excédant desdites dépenses; en épargnant, par ce moyen, les droits de recette qu’il en coûte en faisant passer inutilement le produit des impositions par différentes mains. Art. 27. Que les ministres seront tenus de rendre 305 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENT AIRES. [Sénéchaussée d’Aix.) compte aux Etats généraux de l’emploi des impositions consenties par les Etats généraux antécédents. Art. 28. Que l’impôt, une fois déterminé, dans les Etats généraux relativement aux moyens et faculté de chaque citoyen, ainsi qu’il a ôté dit, il sera libre à chaque province d’en faire la levée de la manière qu’elle jugera la plus convenable, et le moins à charge aux contribuables; et que le privilège du pays, concernant la liberté qu’ont les communautés de s’imposer comme il leur plaît, sera maintenu à moins que le plus grand nombre des communautés de Provence consentît à adopter une forme d’impositions uniforme pour toutes les communautés de Provence. Art. 29. L’ordre du clergé possède des biens immenses, dont la distribution n’est nullement proportionnée aux fonctions ecclésiastiques. Les évêques, les abbés, certains chapitres, et certains ordres religieux et militaires jouissent d’un revenu très-considérable, tandis que les curés et les vicaires, qui supportent tout le fardeau du ministère, ne sont pas même rétribués ou ont à peine de quoi vivre. 11 doit donc être procédé à une répartition des revenus du clergé qui, en donnant à chaque membre de la hiérarchie ecclésiastique de quoi soutenir, d’une manière convenable, le rang qu’il y occupe, puisse fournir aux curés et aux vicaires de quoi les entretenir et les encourager dans les fonctions pénibles de leur ministère. Art. 30. Qu’en conséquence, il sera formé, dans chaque province, une caisse ecclésiastique de tous les revenus du clergé, qui sera administrée par une commission formée à l’instar des commissions intermédiaires pour l’administration des affaires publiques; que sur le produit des revenus ecclésiastiques ainsi administres, il sera payé ce qu’il sera nécessaire pour l’entretien des archevêques, évêques, chanoines des églises métropolitaines et cathédrales, curés et vicaires, les seuls ecclésiastiques véritablement nécessaires au ministère de la religion. Art. 31. Que tous les chapitres des collégiales et tous les ordres religieux seront supprimés. Art. 32. Que les propriétés du clergé, consistant en biens-fonds, redevances et dîmes, il sera examiné sur lequel de ces revenus il importe le plus à l’intérêt général de la nation d’adresser les revenus nécessaires à l’entretien des ecclésiastiques ; s’il est plus avantageux à la nation de mettre lesbiens-fonds du clergé dans le commerce, et de soumettre les fidèles à contribuer à l’entretien des ecclésiastiques ou de les affermer à longues années sous une redevance en fruits, pour établir sur lesdits biens-fonds l’entretien des ecclésiastiques ; et en cas que la masse des biens-fonds et des redevances suffit au moyen de la suppression proposée ci-dessus à l’entretien des ecclésiastiques employés au sacré ministère, les dîmes seraient supprimées. Art. 33. Que, dans le cas de la suppression proposée, les fondations seraient réunies aux paroisses pour être exécutées par les prêtres desservant lesdites paroisses, de la manière la plus conforme et que faire se pourrait, à l’entretien du fondateur, et la plus analogue au nouvel ordre des choses, sauf d’augmenter le nombre des desservants dans chaque paroisse, à proportion des fondations qu’il y aurait à acquitter, et du revenu attaché auxdites fondations. Art. 34. Que, dans le cas où le nombre des ecclésiastiques ne consumerait pas le produit des biens-fonds et redevances du clergé, le surplus lr* Série, T. VI. serait appliqué à l’entretien et construction des églises, maisons curiales et autres batiments de pareille nature, et à la fourniture de tout, ce qui peut fournir à la célébration de l’office divin, et à des œuvres pies. Art. 35. Qu’au moyen de ce qui sera adjugé pour l’entretien des ecclésiastiques, ils ne pourront plus exiger aucune rétribution casuelle de quelle espèce que ce soit, et à quel titre que ce soit, et que toutes les confréries particulières , sous quelle dénomination que ce soit, seront et demeureront supprimées. Art. 36. Que, dans toutes les paroisses où le nombre des desservants sera jugé suffisant, ils seront obligés de chanter les offices et heures canoniales à des heures fixes, ainsi que dans les chapitres. Art. 37. Qu’aucun ecclésiastique ne pourra être promu à la dignité d’évêque qu’il n’ait été au moins cinq ans chanoine; qu’on ne pourra être nommé à un canouicat qu’après avoir été au moins cinq ans curé; et qu’on ne pourra posséder de cure qu’après avoir été au moins cinq ans vicaire. Art. 38. Que toutes les fêtes seront supprimées, ou renvoyées au dimanche le plus prochain. Si la population du royaume est de vingt-quatre millions d’individus, il y en a au moins quinze millions voués au travail dans différentes professions. En supposant que chaque individu ne gagne que vingt sous par jour, chaque fête fait perdre aux individus travaillant quinze millions de revenu, et à la nation quinze millions en ouvrage. Art. 39. Que les droits d’annates, d’expédition de bulle pour les bénéfices, dispenses et autres seront supprimés comme un abus des plus intolérables : les droits coûtant annuellement dix millions à la France qui peuvent être employés plus utilement au soulagement du peuple. Art. 40. Que les dates et impétrations des bénéfices en cour de Rome ou en la vice-légation d’Avignon seront supprimées. Art. 41. Que toutes les terres de l’ancien domaine de nos souverains, qui servaient à l’entretien de leurs maisons, seront réunies au domaine de la couronne comme inaliénables, et dont l’aliénation est imprescriptible, parmi lesquels domaines doivent être compris la ville d’Avignon et le comtat Venaissin. Art. 42. Que toute la banalité, tant féodale qu’acquise à prix d’argent, sera rachetable parles communautés. Art. 43. Que tous les cens et autres redevances seigneuriales pourront être également rachetées au taux qui sera fixé, eu égard à la nature des cens. Art. 44. Que le travail féodal ou de prélation ne pourra être exercé que jusqu’à l’acquittement du lods ; et qu’une fois que le lods aura été payé, soit au seigneur, soit à son procureur fondé, soit à son fermier, la quittance du lods vaudra ; et le seigneur ne pourra plus exercer ni céder le droit de prélation. Art. 45. Que les seigneurs ne pourront exercer le droit de prélation ou de retrait féodal dans les échanges de propriété. Art. 46. Qu’ils ne pourront exercer le droit de prélation dans les acquisitions faites pour l’utilité publique, ni exiger le droit d’indemnité. Art. 47. Qu'attendu le dommage que le gibier porte aux productions de la terre ; attendu les procès et quelquefois les vexations que le droit ae chasse attribué exclusivement aux seigneurs occasionne dans toutes les terres seigneuriales» 20 * 300 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] et qui tendent souvent, sur les plus légères infractions, à détruire la fortune des citoyens, et à leur faire encourir des peines afflictives, tous les propriétaires aient le droit et la faculté de chasser dans leurs domaines. Art. 48. Que la justice soit exercée dans toute l’étendue du royaume au nom du Roi, parce que toute justice émane du Roi; qu’en conséquence, toutes Jes justices seigneuriales seront abolies. Art. 49. Que tous les ecclésiastiques étant sujets du Roi, ainsi que les membres des deux autres ordres, seront soumis à la justice ordinaire ; et qu’en conséquence, les tribunaux et juridictions des officialités seront supprimés dans toute l’étendue du royaume. Art. 50. Que l’exercice de la juridiction de la police sera attribué aux officiers municipaux des villes et communautés. Art. 51. Que toutes les charges de magistrature, tant des cours souveraines que des juridictions subalternes, ne seront plus vénales ; et qu’il sera pourvu parle Roi aux offices des cours souveraines sur la présentation de trois sujets nommés par les Etats provinciaux ; aux offices de sénéchaussée sur la présentation de trois sujets nommés par Rassemblée des trois ordres de la sénéchaussée , et aux offices des premiers juges des villes et communautés sur la présentation de trois sujets nommés par le conseil général de tous chefs de famille desdites communautés. Art. 52. Que toutes les cours et tribunaux d’attribution seront supprimés. Art. 53. Que les cours souveraines seront composées, en nombre égal, de magistrats nobles et du tiers-état ; et lorsqu’il s’agira de juger un procès entre un noble et un membre du tiers-état, ou entre un noble et un seigneur ou une communauté, la Chambre devra être formée par un nombre égal de magistrats de chaque ordre. Art. 54. Qu’aucun impôt, qu’aucune loi, aucun règlement, aucun arrêt ou arrêté portant des dispositions générales ne pourront être mis à exécution, sans, au préalable, avoir été enregistrés par les Etats généraux, si leurs dispositions regardent toute l’étendue du royaume , et dans les Etats provinciaux si la disposition ne regarde que certaine province. Art. 55. Que les premiers juges naturels jugeront souverainement tous les procès non excédant 50 livres, de même que tous les procès en injures verbales , pour lesquels on ne pourra plus employer la voie rigoureuse de l’information, et qui seront jugés souverainement à l’audience, excepté les injures atroces et infa-matoires qui tendent à incriminer quelqu’un, pour lesquelles compétera toujours la voie de l’information et de l’appel, attendu que la calomnie est alors assez grave pour mériter à son auteur une peine afflictive, et que tous les juges d’appel pourront juger en dernier ressort tous les procès qui n’excéderont pas 300 livres. Art. 56. Que tous les juges indistinctement seront tenus et obligés d’exprimer, au bas de leur jugement, le motif de leur décision. Art. 57. Que les conseils des communautés seront autorisés par les officiers municipaux qui auront l’exercice de la police , et que l’exercice de la municipalité sera indépendant dans tous les degrés de la hiérarchie municipale de toute autorisation d’officiers de justice. Art. 58. 11 serait encore bien essentiel de supprimer les intendances de province, que Rétablissement universel des Etats particuliers rendrait inutiles. Les fonctions de cette magistrature ; à l’exception du contentieux qui serait attribuée aux juges ordinaires, pourraient être toutes exercées par les commissions intermédiaires des Etats provinciaux. Art. 59. Que l’ordonnance civile pour l’instruction des procès sera simplifiée à l’effet de procurer plus promptement et occasionner moins de frais aux parties. Art. 60. Que l’ordonnance criminelle sera réformée ; que l’instruction sera publique, le juge assisté d’un officier municipal et d’un autre assesseur; que toutes les pièces du procès après le récolement et la confrontation seront communiquées aux accusés qui pourront se choisir un conseil. Art. 61. Que les peines seront modérées et proportionnées au délit ; qu’à cet effet, l’ordonnance qui interviendra sera rédigée de manière que chaque délit porte et détermine sa peine sans qu’il dépende du juge de l’interpréter arbitrairement; et dans les cas douteux, le juge sera tenu de prononcer la peine la moins rigoureuse. Art. 62. Que les procès criminels ne pourront être jugés en dernier ressort que par douze juges au moins, et la condamnation ne pourra être prononcée qu’au tant qu’elle aura été jugée par les deux tiers des juges. . Art. 63. Que les voix ne se combineront point, quand elles seront en faveur de l’accusé, mais seulement quand elles seront pour sa condamnation. Art. 64. La contumace ne sera plus une demi-preuve du délit. Il doit être permis de redouter l’erreur et même la prévention des juges, et de chercher à s’y soustraire par la fuite. Art. 65. L’innocence de l’accusé sera présumée jusqu’à son entière conviction ; et jusqu’alors il sera traité avec les ménagements que l’on doit à la probité malheureuse. Art. 66. L’absolution de l’innocence sera toujours accompagnée de dédommagements proportionnés à la nature de l’accusation. Art. 67. Que les traites et les douanes seront reculées aux frontières du royaume, afin que les marchandises et denrées puissent circuler dans tout le royaume, et que le commerce ne soit point obstrué par les droits à payer d’une province à l’autre. Art. 68. Que le sel sera fixé à un prix raisonnable ; l’étang delà Valduc érigé en saline, et la communauté d’Istres rétablie dans la jouissance du franc-salé audit étang, conformément aux titres des anciennes reconnaissances de cette communauté, passées en faveur des communautés de Provence. Il est étonnant qu’on préfère des salines, où il est besoin du fait de l’homme et de beaucoup de dépenses pour faire du sel, et qu’on emploie, en même temps, beaucoup d’argent et beaucoup d’hommes pour garder ou pour détruire une quantité immense de sel, que la nature seule fournit dans l’étang de la Valduc, sans aucun secours de l’art. Art. 69. Que les employés dans les fermes, régie et domaine du Roi seront réduits au nombre absolument suffisant pour son service, et que leur traitement sera fixé à ce qu’il faut pour un honnête entretien. Art. 70. Que toutes les jurandes, maîtrises et communautés d’arts et métiers seront supprimées. Art. 71. Que toutes lois, ordonnancés, règlements et arrêtés qui excluent les membres du tiers-état des places ecclésiastiques, emplois mil'i- ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 307 [États gén. 1789. Cahiers.] taires, et offices de magistrature seront révoqués. Le Roi est, sans doute, te maître de préférer, pour remplir les différentes places, ceux de ses sujets qu’il juge à propos, mais il est avilissant pour le tiers-état que des lois positives en rendent ses membres incapables. Art. 72. Que tous les péages seront abolis, en déchargeant les propriétaires de l’entretien des chemins et en les indemnisant, s’il y échoit. Art. 73. Que les drailles, caraires ou chemins, au passage des troupeaux pour aller et revenir de la Basse-Provence aux montagnes, seront rétablis, de manière que les troupeaux puissent y passer sans causer du dommage aux propriétaires riverains; et qu’il sera fait un nouveau règlement relatif auxdites drailles et caraires, après avoir pris toutes les informations convenables, et reçu les mémoires, instructions, tant des propriétaires des troupeaux que des propriétaires des terres traversées par lesdites drailles et caraires. Art. 74. Qu’en vertu du droit de pulvérage, que les seigneurs exigent en indemnité du passage des troupeaux qui vont dans les montagnes et qui retournent dans la Basse-Provence, et pour la nourriture que ces troupeaux prennent à leurs dépens, que les drailles ou caraires soient rétablies suivant les bornes qui y ont été placées dans leurs terres à cet effet, suivant qu’il est porté par les lettes patentes du 16 janvier 1764, vérifiées et enregistrées au parlement d’Aix, le 14 février suivant; autrement le droit de pulvérage supprimé. Art. 75. Qu’il sera établi, dans toute l’étendue du royaume, uniformité de poids et mesures. Art. 76. Que l’état des pensions accordées par le gouvernement sera examiné, à l’effet qu elles puissent être réduites ou supprimées suivant les circonstances. Art. 77. Que le port de Brue et les canaux de Martigues seront recurés pour faciliter le commerce maritime de l’étang de Berre, procurer l’entrée du poisson, exciter les habitants des bords de l’étang de Berre et à augmenter, par ce moyen, le nombre des matelots, classe de citoyens si utile à l’Etat. Art. 78. Que tous les sujets du Roi pourront dériver des canaux des rivières qui passent dans le territoire des communautés, soit pour l’arrosement de leurs propriétés, soit pour construire des moulins et usines, se servir du sable et des pierres du lit des rivières : l’intérêt de l’agriculture et des manufactures exige la concession d’une faculté qui dérive du droit naturel.. Art. 79. Qu’on s’appliquera sérieusement à la réformation des mœurs, en abolissant tous les lieux de débauche, et en formant un plan d’éducation pour la jeunesse des deux sexes. Art. 80. Que les célibataires, qui auront atteint l’âge de trente ans, et qui ne seront point soumis à la puissance paternelle, payeront le double de toutes leurs impositions. Art. 81. Que le secret des lettres remises aux bureaux des postes sera respecté, et qu’il ne sera permis d’en ouvrir aucune, ni l’intercepter pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce soit. Art. 82. Que le commissaire préposé au tirage des soldats provinciaux, canonniers, gardes-côtes et matelots, soit tenu de se transporter dans chaque communauté, sans qu’il lui soit permis de déplacer la jeunesse. Art. 83. Qu’il sera pris, à l’égard des lettres de cachet, tel arrangement qui sera jugé convenable pour prévenir l’abus qui en est souvent résulté. Art. 84. Que le contrôle des actes ne subsistera plus que pour établir l’hypothèque; et que si l’on juge à propos d’y établir quelques droits, ils seront modérés et fixés de manière qu’ils ne soient pas pour ainsi dire arbitraires. Art. 85. Que les droits de latte et un quart de centième denier, et autres de pareille nature, seront supprimés. Signé Goppau, viguier; Arnauld, maire; Félix, consul; Peine, ex-consul; Emeric, ex-consul ; Arnauld; Christine; Félix; R. Icard; Leydet; Monier; Chauvet; Bérard; Martin; E. Jauffre; L. Lusnaut; Gay; Girard; Emeric; Aymès; Jani-bour; L. -Etienne Jauffret; Colla; Emeric; Ge-rault; Tirât; Leydet; Dalma; Antoine Aime; Emeric; Garaut; Teissier;Clarel; Michel; Coloma ; Félix; Marillié ; Aymès; Paul Thissir ; Félix; Audier; Tabustau; Imbert; David; Joseph Roche; Aymès; Girard; Jean-Baptiste Giraud; Emery; Jouffrié; Aymès; Février; Maurel; Gastaud; Goiraud ; Be'doc; Aymé; Vuchier; Martin; Suva-raud; Arnoux; Laugier; Auttemant; Félix; Bérard; David; Reboul; Aymès; Félix; Gapelle; Guinamaud; Boujat; Gautier; Preux; Félix; Chauvet; Féraud;' Vigne; Jean Aymès; Audibert; Gouin; Chaud; Chauniey; Brunei; Chaud; Félix; Théissié , et Aymé. CAHIER De doléances , plaintes et remontrances de la paroisse de Jouques, sénéchaussée d'Aix (1). Aujourd’hui 25 mars 1789, les habitants du lieu de Jouques, convoqués dans l’église paroissiale pour obéir aux ordres de Sa Majesté, portés par ses lettres données à Versailles le 2 du courant, et satisfaire aux dispositions des règlements y annexés, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant général, en la sénéchaussée de Provence, par-devant M. Pierre-Antoine Gautier, avocat en la cour, juge de ce lieu ; procédant à leur cahier de doléances, plaintes et remontrances, conformément aux lettres, règlement et ordonnance ci-dessus, ont unanimement délibéré, d’abord, relativement aux objets qui intéressent la généralité du royaume, que les sieurs députés qu’aura élus l’ordre du tiers-état pour assister et voter aux Etats généraux de France, seront expressément chargés d’y solliciter : Art. 1er. La réformation des abus relatifs aux tribunaux de la justice civile et criminelle; la suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux. Art. 2. Que la voie de la requête civile soit ouverte sans consignation d’amende : ce qui met souvent le pauvre hors d’état de recourir à cette voie. Art. 3. Admission du tiers-état aux charges, aux honneurs, aux établissements publics, dans les cours de justice, dans les emplois militaires de terre et de mer, et dans le clergé ; de s’opposer à toute distinction qui pourrait avilir les communes. Art. 4. De réclamer contre la vénalité des offices et hérédité. Art. 5. De demander l’instruction publique et justificative, reçue et admise en tout état de cause. Art. 6. De concourir à établir une constitution (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscri �es Archives de l’Empire.