[États gén. 4789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Saintes.] 069 chaque province n’apportent de grandes lumières sur ces objets, qui auront sans doute mérité leur attention ; mais nous ne pouvons nous dispenser de leur ordonner de dénoncer aux Etats généraux les abus qui pèsent le plus sur la nôtre. Ils se plaindront surtout du droit connu sous le nom de traites de Charente et de Mortagne, des péages établis sur les différentes rivières de Sain-tonge et d’Angoumois, des entraves mises au commerce de nos sels par les droits dont ceux des salines de Saintonge sont surchargés ; de la gêne u’éprouve encore le commerce des vins et eaux-e-vie. Mais c’est surtout contre ceux qui ont régné dans la confection des travaux publics, que nos députés devront fixer l’attention des Etats généraux. Le gouvernement a fait de grandes dépenses pour cette province. Il avait droit d’attendre que les canaux qu’il avait ordonnés, en contribuant à la salubrité de l’air, rendraient à l’agriculture un terrain précieux et fertile. Nos députés diront que de ces ouvrages, mal entrepris dans le principe, presque aucun n’est encore parachevé ; que ce qui reste à faire rend les dépenses précédentes presque inutiles. Ils diront que l’on a ouvert tout à la fois des chemins dans toutes les parties de la province , que leur largeur démesurée ne ferait que rendre plus dispendieux; que presque aucun n’est praticable dans son entier ; que les propriétaires riverains n’ont point encore été dédommagés des terrains qui leur ont été enlevés, soit par les chemins, soit par les canaux. Et si les Etats généraux, frappés d’un aussi grand désordre, jugent à propos d’en découvrir la cause, nos députés indiqueront l’administrateur qui les a ordonnés, et les sous-ordres qui les ont dirigés, comme les seuls en état de donner sur cet objet les éclaircissements nécessaires. Le clergé n’aura sans doute pas négligé le sort intéressant de ces pasteurs utiles qui, placés près du pauvre, sont souvent hors d’état de le secourir et même de pourvoir à leur propre subsistance. Le tiers-état aura sûrement aussi plaidé leur cause ; ainsi nous nous contenterons de joindre notre vœu à celui des deux autres ordres, pour attirer les regards des Etats généraux sur ces hommes dont les soins et les exemples importent tant aux mœurs et à l’ordre public. La distribution bien entendue du revenue des bénéfices simples paraîtrait le meilleur moyen ; mais rassemblée nationale sera seule en état de déterminer celui qui remplira le mieux cet objet important. Elle portera sûrement aussi son attention sur les établissements d’éducation publique qui, manquant absolument dans plusieurs parties du royaume, sont presque partout imparfaits. Ces fondations, presque toutes anciennes, ont conservé la routine des siècles reculés qui les ont vu naître. Il serait temps de les faire participer aux lumières acquises, de leur donner un régime plus propre à former des citoyens de tous états, et surtout de propager, jusque dans les campagnes, les moyens' d’une instruction suffisante à ceux qui les habitent, et qui pût s’étendre même jusqu’aux pauvres. Nous recommandons à nos députés de représenter aux Etats généraux notre vœu pour l’établissement d’une commission spécialement chargée de s’occuper de l’instruction publique, et qui, composée d’hommes aussi vertueux qu’éclairés, de diverses classes, sache combien les lumières influent sur les mœurs des citoyens et sur le bonheur public. Nous recommandons à nos députés d’être toujours unis de cœur, d’esprit et d’opérations avec tous ceux qui vont former l’auguste assemblée qui va s’ouvrir ; de se concilier surtout avec ceux des bailliages d’Aunis, d’Angoumois et de Saint-Jean-d’Angély, dont les intérêts pourront un jour être confondus avec ceux de la Saintonge, dans les mêmes Etats provinciaux ; d’appuyer auprès des Etats généraux le vœu que le bas Angoumois a déjà formé sur cette réunion, afin qu’ils sollicitent de la bonté du Roi l’obtention de cette demande. L’intention de la noblesse de Saintonge est que l’on opine par ordre aux Etats généraux, soit en matière d’impôts, soit en matière de législation. Nos députés soutiendront notre opinion de tout leur pouvoir, et nous leur ordonnons de ne l’abandonner que dans le cas où la pluralité des suffrages, pris dans l’ordre de la noblesse, présenterait un avis contraire. C’est par ce dernier article que nous finissons les instructions que nous donnons à nos députés, afin qu’ils ne le perdent pas de vue, et qu’ils n’oublient pas que de la manière dont ils répondront à notre confiance, dépend le jugement que portera d’eux la postérité. CAHIER Des doléances du tiers-état de la sénéchaussée de Saintes (1). AU ROI ET AUX ÉTATS GÉNÉRAUX. Sire, le meilleur des rois, touché de l’état fâcheux de ses finances et des abus en tous genres qui désolent son royaume, convoque dans ce moment ses fidèles sujets, pour les consulter sur le moyen de remédier à tant de maux. Ce n’est pas le chef de la nation la plus florissante, qui, hasardant tout, ordonne à son peuple de lui fournir des secours, et lui commande d’obéir et se taire. C’est le plus modéré, le plus juste, le plus tendre des pères, qui, affligé du malheur de son peuple et du désordre de ses affaires, rassemble ses enfants, dont il connaît l’attachement, la soumission et le respect, pour épancher sa douleur, les entretenir de ses sollicitudes, les interroger sur les leurs, et prendre enfin avec eux des mesures promptes et sages pour procurer à la famille entière un sort plus digne d’elle. Une démarche aussi attendrissante, aussi précieuse pour les Français, de la part de leur souverain, doit, s’il est possible, redoubler leur amour pour sa personne sacrée, et comme il ne met aucune borne à sa tendresse pour eux, ils ne doivent en mettre aucune à leur reconnaissance, leur vénération et leur zèle pour lui. Tels sont, Sire, les sentiments des habitants de la Saintonge, sentiments qu’ils publient hautement et qu’ils s’efforcent de transmettre à leur postérité. Pour première preuve de leur attachement au Roi et à la patrie, ils exposent ici avec franchise leurs observations et leurs doléances sur les principaux abus dont ils ont à se plaindre, et, pour mettre plus d’ordre dans le détail qu’ils en font, ils les divisent en chapitres d’abus généraux et I d’abus particuliers à leur province. M) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : Archives de l’Ouest, par M. A. Proust. 670 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARI ABUS GÉNÉRAUX, Administration des finances . La plus alarmante des plaies de l’Etat, et celle qui exige conséquemment les plus prompts remèdes, est sans doute la situation de nos finances. Si l’on en croit une opinion assez accréditée, quatre milliards provenant de la gêne, des sacrifices et des sueurs du peuple, ont été dissipés dans l’espace de quatre ans, sans qu’il paraisse en être résulté aucun avantage pour la France. On ne peut accuser de dilapidations aussi énormes que ceux qui étaient préposés par état pour s’y opposer et les prévenir. L’Europe entière est révoltée de pareils forfaits; ils devraient être réprimés par des peines exemplaires, et on en trouverait sans doute difficilement qui pussent les expier. Mais il ne suffit pas, Sire, de sévir contre les coupables ; il convient aussi d’obvier au retour du crime, et pour y parvenir, nous réclamons premièrement, et avant d’entrer dans aucun autre détail, l’accomplissement des promesses solennelles que Votre Majesté nous a faites, et l’exécution entière des intentions qu’elle nous a manifestées par l’organe du ministre intègre de ses finances. Que, sous le bon plaisir de Votre Majesté, Sire, la parole qu’elle a donnée de n’établir ou proroger aucun impôt, ni former aucun emprunt sans le consentement des Etats généraux, soit ratifiée dans Rassemblée qu’elle vient de convoquer. Qu’il lui plaise aussi s’engager : 1° A consentir le retour périodique des Etats généraux, dont l’époque sera fixée et déterminée dans la prochaine assemblée ; 2° A ordonner que vos ministres soient responsables de leur administration, et tenus de la rendre publique chaque année, ainsi que tous administrateurs publics, au mois de décembre, par la voie de l’impression, en joignant à leur compte un état des pièces justificatives, pour que les Etats provinciaux, auxquels il en sera envoyé des exemplaires, puissent les débattre s’il y a lieu; 3° À statuer qu’il ne sortira aucuns fonds du trésor royal, que Votre Majesté n’en ait approuvé la destination par sa signature, et que le conseil n’en ait préalablement sanctionné l’emploi, ce qui sera justifié par le contre-seing du ministre clés finances ; 4° k assurer enfin la fixité de vos dépenses. Tous ces points préliminaires arrêtés par Votre Majesté, permettez, Sire, que nous vous suppliions d’y ajouter : Qu’aux Etats généraux, les députés qui y seront envoyés, y opinent par individu et non par ordre. Nous osons aussi vous supplier de consentir : Que la dette nationale soit vérifiée. Que la somme destinée à l’acquit de vos dépenses personnelles, de la dette nationale et des frais d’administration, soit fixée d’une manière irrévocable par les Etats généraux. Que le montant de ces trois objets justement réglé, il soit divisé en autant de portions qu’il existera d’Etats provinciaux, pour que chacun, suivant leurs forces, supportent leur part de la contribution. Que la répartition de cette contribution soit faite le plus exactement possible, par les susdits Etats provinciaux, de la manière qu’ils jugeront la plus convenable, et sans égard aux rang, ordre et qualité des contribuables, attendu la cessation absolue des privilèges pécuniaires. EMENTAIRES. [Sénéchaussée de Saintes.] Qu’il soit convenu d’une époque fixe pour le versement direct de la quotité des impôts de chaque province, de sa caisse particulière au trésor royal. Qu’au moyen des dispositions précédentes, tous frais de perception, toutes dépenses extraordinaires, les douanes, les traites intérieures, la taille, les droits réservés et tous autres droits de ce genre, soient supprimés, même ceux des aides. Que les intendants soient supprimés. Qu’il soit fait aussi un code clair et précis, pour les gouverneurs et les commandants des provinces, même pour les gouverneurs particuliers, de sorte que leurs pouvoirs soient connus et fixés d’une manière incontestable. Qu’il soit présenté à la nation assemblée un tableau des pensionnaires de l’Etat, ainsi que du montant et des causes de leurs pensions pour être réduites ou supprimées s’il y a lieu. Qu’il plaise à Votre Majesté de réclamer du digne chef de l’Eglise, qui s’est montré l’ami des Français, l’abrogation des taxes exigées en cour de Rome, pour l’expédition des bulles, brefs-, dispenses, signatures et autres droits de ce genre. La liberté de la presse, à la charge par l’auteur et l’imprimeur d’établir leurs noms. Que la noblesse ne soit plus vendue à prix d’argent, mais devienne la récompense de ceux qui en seront jugés dignes, et présentés comme tels à Votre Majesté par les Etats provinciaux. Que les portions congrues soient fixées à 1 ,500 livres pour toutes les cures, soit de ville, soit de campagne ; que le traitement de tous les vicaires soit de 600 livres, et tous droits de casuel et de novales supprimés. Que le Concordat soit supprimé, et la Pragnia-tique-Sanction rétablie. Que ceux des employés qui seraient prouvés souffrir le plus du nouveau régime, reçoivent pendant leur vie un dédommagement fixe par la nation. Que toutes les lois exclusives du tiers-état, des grâces et emplois militaires, soient retirées, sauf, à service et mérite égal, le droit de préférence pour la noblesse. Que les biens des religieux supprimés, et de ceux qui pourront l’être, soient vendus, pour le prix en provenant être employé à l’acquit de la dette nationale. Que les bénéfices simples soient supprimés à mesure qu’ils vaqueront, pour leurs revenus appartenir aux provinces, être administrés par les Etats provinciaux qui les emploieront, premièrement à l’acquit des charges dont les bénéfices sont grevés; puis, au soulagement des contribuables. Administration de la justice civile. L’état des finances réparé, notre vœu le plus empressé, Sire, est que la distribution de la justice soit moins compliquée, moins dispendieuse, et conséquemment plus prompte, plus facile, plus simple et plus avantageuse pour le peuple, Pour y parvenir, Sire, nous estimerions qu’on . pourrait commencer de détruire l’abus dangereux de vendre pour un vil métal à l’homme sans mœurs, sans talents, sans expérience et sans principes, le droit sacré de prononcer sur la fortune, l’honneur, la liberté et la vie de ses concitoyens. Nous insisterons avec chaleur pour qu’il ne soit plus question de la vénalité des offices de la magistrature du second ordre, et qu’il soit ordonné que les chefs et dignitaires seront pris 671 [Étals gén. 1189. Cahiers.} parmi les plus anciens ou plus capables des sièges, et qu’ils soient remplacés par ceux qui, à la pluralité des suffrages, d’abord de leurs futurs confrères, puis des Etats provinciaux, en seront jugés les plus dignes par leurs lumières, leur expérience, leur sagesse et la pratique la plus constante des vertus morales. La création des grands bailliages a révolté les cours dont elle anéantissait la juridiction, les tribunaux du second ordre qu’elle avilissait, et le peuple auquel elle n’offrait qu’une ombre d’avantage. Leur suppression est nécessaire, et nous demandons comme un bienfait l’ampliation des présidiaux jusqu’à la somme de 6,000 livres, savoir, 3,000 livres au premier chef, et le surplus au second chef, à la charge de caution. * Que les matières soumises à leur compétence oient déterminées de manière qu’elles soient fa-silement connues par les parties. Que ces tribu-eaux jouissent en outre des prérogatives dues à la dignité et à l’importance de ces fonctions. Qu’ils soient affranchis de la capitation, telle qu’elle est établie pour les rôles arrêtés au conseil. Qu’ils soient soumis seulement à celle qui leur deviendra commune avec les autres citoyens, et que ces officiers fassent toujours partie du tiers-état. Que la justice soit rendue gratuitement par les mêmes officiers, et qu’en dédommagement il leur soit attribué des gages et appointements honnêtes, lesquels seront taxés et payés par les Etats provinciaux, à raison de leur présence, à la vue d’un registre tenu par le siège pour énoncer la présence ou absence des magistrats aux audiences et bureaux, qui seront exactement tenus depuis la Saint-Martin jusqu’au 1er septembre. Que les matières jugées par les consuls se portent par appel au présidial, dans le cas de la présidia-lité, et qu’il soit à cet effet établi une audience par semaine pour ces matières seulement, et qu’elles y soient jugées sans autres formalités que celles qui s’observent devant les consuls. Que les tribunaux d’exception soient supprimés et leur juridiction réunie aux sièges royaux ordinaires. Que tous droits de committimus soient abolis. Que l’ordonnance des eaux et forêts soit réformée. Que les contrats soient exposés pendant trois mois, au lieu de deux, sur le tableau dont est mention dans l’édit de 1791, concernant les hypothèques. Que, dans les lettres de ratification, les dates des oppositions et les noms des opposants soient énoncés. Que, de plus, les oppositions durent six ans au lieu de trois ans, et qu’il soit procédé à un tarif plus clair et de droits plus modiques. Que les communes soient autorisées à plaider sans autorisation, mais seulement sur l’avis de deux avocats qui auront suivi le barreau pendant dix ans. Qu’il ne sera accordé désormais de provisions d’offices de notaire qu’à des gradués, ou à des sujets qui auront cinq ans de pratique et qui. auront subi trois examens devant les notaires royaux des villes où ils prêteront serment de réception. Qu’à l’égard des immeubles dont le prix n’excédera pas 10,000 livres, la vente s’en puisse faire par simples affiches et soit affranchie des formalités des décrets. Que dans les villes et bourgs où il y a différentes justices seigneuriales, la police soit exercée alternativement par les différents juges dans [Sénéchaussée de Saintes.] toute l’étendue du lieu. Et que, dans le cas où il n’y aurait qu’un seul desdits juges résidant dans les villes ou bourgs, la police lui appartienne, exclusivement aux procureurs fiscaux et autres officiers des autres juridictions. Pour second moyen de débarrasser l’expédition de la justice civile des lenteurs préjudiciables aux plaideurs, il conviendrait être ordonné : 1° Qu’il soit permis à tous demandeurs ou défendeurs de porter en première instance leurs contestations aux sénéchaux comme juges ordinaires, à moins que les juridictions inférieures ne fussent pourvues de gradués ou revêtus d’offices de notaires royaux, domiciliés dans l’étendue de ladite juridiction. 2° Que dans le ressort du parlement de Bordeaux, ainsi qu’il se pratique dans ceux des autres parlements, il soit tenu, par les lieutenants généraux, des audiences, pour y juger les causes n’excédant pas la somme de 10Ô livres, et qu’il soit ajouté que dans tous jugements rendus clans les matières sommaires, les dépenses soient liquidées. 3° Que pour toutes les affaires d’audience, qui ne seront ni provisoires ni sommaires, il y ait un registre paraphé en toutes pages par le. lieutenant général, ou autres officiers en son absence, sur lequel les parties ou leurs procureurs feront enregistrer les causes pour être jugées suivant leur rang en date d’enregistrement; que l’extrait dudit enregistrement soit signifié à la première poursuite, et que si, lors du tour de juger l’affaire, l’une des parties n’est pas prête à plaider, la cause soit appointée de droit. 4° Que les appointements qui ne portent point utilité soient supprimés, et que lorsqu’il aura été fait une déclaration d’audience, il n’en puisse être fait d’autre que lorsque quelque nouvelle partie interviendra dans l’instance, ou qu’il aura été rendu quelques appointements portant coup en définitive. 5° Qu’il ne puisse être rendu plus de deux appointements comminatoires dans la même cause, sauf aux juges, suivant leur prudence, à accorder à la partie qui est tenue de satisfaire, le délai qu’ils jugeront convenable, après lequel il sera pris contre elle tous avantages. 6° Que les offices de jurés-priseurs et encan-teurs soient supprimés comme vexatoires, et néanmoins remboursés. 7° L’attribution aux juges suzerains d’une juridiction en dernier ressort jusqu’à la somme de 50 livres, et jusqu’à celle de 100 livres en donnant caution. 8° La faculté à quiconque de ramener à exécution un titre public, sans être obligé d’obtenir des lettres en chancellerie. Administration de la justice criminelle. Nous réclamons également, Sire, non la subversion totale de votre ordonnance criminelle, on remplacerait difficilement pour cet immense travail les grands hommes qui s’en occupèrent en 1670, mais la suppression des abus qu’on ne prévoyait point alors, et dont l’expérience, la raison et l’équité exigent aujourd’hui le redressement. Nous nous bornons donc, quant à présent, Sire, à solliciter : La faculté aux accusés de proposer et établir leur justification par titres, ou par enquêtes, aussitôt leur premier interrogatoire. Un conseil aux accusés nommé chaque année dans l’ordre des avocats. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 672 [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Saintes. La liberté aux témoins de se rétracter à la confrontation, sans danger d’encourir la peine du faux, à moins que la rétractation ne soit frauduleuse. La suppression du serment de l’accusé dans tous les actes de l’instruction. La permission à quiconque de publier des mémoires en faveur des accusés avant leur jugement, pouvu qu’ils soient signés par l’auteur. La connaissance en dernier ressort à la chambre criminelle des présidiaux, de toutes les procédures de petit criminel, lorsque les dommages-intérêts demandés par les parties contre chacun des accusés n’excéderont pas 1,000 livres, et qui pourront être accordés sans règlement à l’extraordinaire, lequel ne pourra avoir lieu que lorsque le délit méritera peine afflictive ou infamante. L’option aux habitants des campagnes de se pourvoir devant les juges des lieux, ou en la juridiction royale supérieure, sans qu’au dernier cas il puisse être proposé de revendication. L’abolition de l’instruction conjointe des officiers et des lieutenants criminels, comme usage dangereux, propre à doubler les frais et multiplier les ouvertures de cassation. En conséquence, l’attribution aux juges royaux ordinaires de la connaissance des cas privilégiés, dont les ecclésiastiques pourraient être accusés, sans préjudice des poursuites séparées que pourront faire les promoteurs pour Je maintien de la discipline de l’Eglise. L’obligation à tous juges de se faire assister par deux officiers pour ordonner des décrets de prise de corps, excepté le cas de flagant délit, en cas royaux. Un nouveau règlement pour la taxe des témoins, des huissiers, des greffiers et autres droits dans les procès poursuivis à la requête des gens du Roi. Le remplacement des interrogatoires sur la sellette, par des interrogatoires derrière le barreau. La suppression de la torture préalable. L’établissement d’une proportion juste et raisonnable entre les délits et les peines. L’injonction aux procureurs du Roi de tenir la main à l’exécution des lois concernant les faillites et banqueroutes, et qu’il soit pris des mesures pour que les lettres de surséance ne soient accordées que très-rarement et avec toutes les précautions qu’exigent le bien et la sûreté du commerce. Les reconstructions ou réparations des prisons, de sorte qu’elles soient sûres, décentes, saines et distribuées de manière à ce que les sexes et les prisonniers, détenus pour différentes causes, n’y soient plus confondus et que les évasions soient moins fréquentes. Enfin, un moyen sûr et facile de procurer des dédommagements suffisants aux individus qui, ayant été impliqués dans des procédures criminelles poursuivies à la requête des gens du Roi, seules parties, seront déchargés ou renvoyés de l’accusation par le dernier jugement. Contrôle. Nous sollicitons, Sire, une règle fixe et constante pour la formalité du contrôle des actes, et, qu’en conséquence, il soit formé un tarif clair et précis dans lequel les droits à payer pour la qualité des parties, la nature des actes, ou tous autres objets soumis au contrôle, soient déterminés, de manière qu’ils puissent être facilement saisis et connus par tous ceux qui y seront assujettis, et qu’il soit défendu aux contrôleurs d’en exiger de plus forts, à peine de concussion. Qu’on ne soit jamais forcé de présenter au contrôle des actes dont on ne sera pas dans le cas de faire usage en justice. Qu’on n’ait point à craindre d’être assujetti à aucun double ou triple droit ou amende lors du rapport des traités, pactes, testaments ou conventions faits sous signature privée. Qu’en un mot l’usage du contrôle soit ramené à l’esprit et aux termes de son institution. Que le droit de présentation dans les juridictions consulaires soit supprimé. Que toutes contestations relatives au contrôle soient portées devant le plus prochain juge royal, Lettres de cachet. Que d’injustices révoltantes n’ont pas occasionné de nos jours les captures illégales et les détentions arbitraires ! Que d’époux arrachés à leur femmes, de pères à leurs familles, de citoyens à leurs amis, d’innocents à leurs foyers ! On a commencé par violer nos propriétés... On' a bientôt forcé nos asiles pour mettre nos personnes à la merci des ministres vindicatifs, ou, le plus souvent, de leurs subalternes... Le cri, contre un abus aussi pernicieux, est universel, et nous en sollicitons vivement l’entière abolition. Nous demandons, Sire, que tout individu ' constitué prisonnier soit dès lors sous la sauvegarde de la loi, et soumis, pour les causes de sa capture, à la juridiction royale et ordinaire du lieu. Que s’il existait des cas extraordinaires où, pour des causes graves, comme pour sauver l’honneur des familles, il fût important de reléa guer un citoyen dans un lieu sûr et éloigné, sans observer les formes juridiques, cette relégation ne pût être ordonnée que par la même juridiction, d’après une délibération unanime et assermentée des huit plus proches parents, ou, à défaut, des huit plus proches voisins ; et à la charge encore d’interroger le prisonnier, pour l’élargir s’il y avait lieu. Mais, Sire, comme le seul prétexte qui a pu justifier jusqu’à ce jour l’usage des lettres de cachet, est le moyen' de prévenir un crime, ou de sauver à une famille le malheur de se voir flétrie par les excès d’un de ses membres, nous supplions Votre Majesté de suprimer,parlaloilaplus authentique, l’inique et exécrable préjugé qui entache des parents vertueux, par le châtiment infligé à un parent criminel. Que, pour cet effet, des peines sévères soient prononcées contre l’homme téméraire qui reprocherait à un citoyen la peine subie par un proche ; et que toutes les corporations de l’Etat regardant désormais les fautes personnelles, soient exhortées à favoriser, à encourager, pardes distinctions et des emplois honorables parmi elles, ceux dont les sentiments, les mœurs et le patriotisme contrasteront le plus avec la conduite d’un parent noté d’infamie. Qu’en outre il soit arrêté que les peines seront infligées sans distinction de condition, de manière que tous les hommes soient égaux aux yeux de la loi. Abolition des commissions. Qu’il vous plaise, Sire, renoncer à l’établissement d’aucune commission pour juger vos sujets, qui ne doivent l’être que par les juges ordinaires, et ordonner qu’il ne sera établi aucune loi générale et permanente, qu’elle ne soit sanctionnée par le consentement des Etats généraux. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Saintes.] A73 Abus particuliers à la province de Saintonge . Cette province est une de celles qui seraient le plus dans le cas de fixer l’attention du gouvernement. Ses habitants vivent en général dans un état de gêne ; leur naturel paisible nuit sans doute à leur prospérité ; mais il est évident que la principale cause de leur détresse tient plus, particulièrement aux subsides multipliés et excessifs dont ils sont surchargés. Pour se convaincre de cette vérité, il suffit de jeter les yeux sur un mémoire du ministre chéri qui prend soin de nos finances et que nous conjurons Votre Majesté de conserver pour la gloire et le bonheur de la France. On y voit que quoique la généralité de la Rochelle (dont la Saintonge forme la plus grande partie) ait environ les trois quarts moins d’étendue que celles de Bordeaux et Bayonne et que leur population soit plus considérable déplus des deux tiers, sa contribution est néanmoins plus forte, puisqu’elle s’élève à 9,100,000 livres, et que celle de la Guyenne et du pays de Bayonne ne sont que de 27 millions, de sorte que nous payons 2 livres 19 sous de plus par tête d’habitant. 11 est notoire, d’ailleurs, que la Saintonge est une des provinces les plus chargées en vingtièmes. On serait tenté de croire que cette portion si intéressante du royaume est devenue, à raison des différentes ressources qu’elle présente, un objet de spéculation et d’appât pour l’avidité des traitants. Et, en effet, tous les fléaux du fisc semblent conjurés contre nous. La taille et les oppressions qu’elle entraîne ; les vingtièmes etleur arbitraire; la capitation et ses inégalités ; la corvée et ses injustices ; les adjudications pourles chemins ; les ponts et les presbytères ; les droits d’aides perçus sous mille formes ; les droits domaniaux exigés avec le ton et les procédés de la plus dure inquisition ; les logements des troupes ordonnés et exécutés avec l’appareil de la presse la plus rigoureuse, et, ce qui est hors d’exemple, sans indemnité pour les propriétaires; les impôts sur le papier, les cuirs, les fourrages, les combustibles, sur tous les articles de commodité, de consommation et de nécessité... Tous ces objets tiennent sur pied une armée formidable de gens qui déclarent, par devoir, à leurs frères, une guerre journalière et ruineuse. Bien plus, comme si ce n’était pas assez de tant de maux, la traite de Charente obstrue le débouché de nos principales productions (les eaux-de-vie et les sels), nous fait des provinces voisines un pays étranger et presque ennemi, énerve notre commerce, abat nos forces déjà trop affaiblies, discrédite enfin et perd nos salines, une des propriétés les plus précieuses de l’Europe. Il serait donc du plus grand intérêt que les sels de cette province fussent affranchis des différentes entraves qui gênent cette partie intéressante de son commerce, et que pour la sortir de sa stagnation dans laquelle elle languit, toutes les infractions faites aux anciens privilèges, droits et immunités accordés aux salines de Brouages, îles adjacentes et à leurs habitants, relativement à leurs droits respectifs, fusent .abolies. Que le contrat authentique passé avec Henri 11 au mois de décembre 1553, qui affranchit les sels de toutes sortes d’impôts, pour une somme exorbitante de 1,194,000 livres répondant à celle d’environ 5 millions de notre monnaie, fût exécuté; l’injustice desdites infractions et des droits perçus sur les sels, sous prétexte d’offices inutiles et 4re Série, T. Y. non remplis, étant exposée dans des mémoires qui seront remis aux députés. 11 serait aussi très-important que les barrières de la ferme fussent portées sur les frontières ; qu’il fût établi un droit uniforme à toutes les sorties et entrées, et que la circulation intérieure fût libre. Que pour cet effet, le port de Charente et autres convenables pour le commerce de la province, tel que celui de Mortagne, fussent conservés. Et dans le cas que la demande ne pût avoir lieu à cet égard, elle demande la suppression de l’arrêt du conseil, du 21 février 1788, qui assujettit à un droit de 6 livres par muid d’eau-de-vie, à l’entrée des provinces du royaume, la marchandise répondant suffisamment de ce droit. Que ceux, en quelque sorte prohibitifs, de 36 livres par tonneau pour l’étranger, de 36 livres pour les provinces d’aides, et de 49 livres 17 sous pour celles où les aides n’ont pas cours, soient également abolis, le vin ne valant communément que 80 à 90 livres le tonneau de vin blanc, et 100 à 120 livres le vin rouge. L’étranger, rebuté par ces droits excessifs, n’en fait aucun objet d’exportation ; tandis que ceux de Bordeaux, d’une qualité supérieure, ne payent que 28 livres 10 sous pour tous droits. Que l’ordonnance du mois de janvier 1779, concernant le tirage des canonniers auxiliaires delà marine, soit retirée, la population des côtes de Saintonge et son agriculture, qui dans certaines parties ne peut s’y faire qu’à bras, en étant considérablement diminuées. CAHIER Des habitants de l’île d’Oleron (1). Les habitants de l’île d’Oleron demandent la suppression de l’arrêt du conseil, du 31 mars 1767, pour l’ameublement des pavillons de la citadelle de ladite île, comme ayant été établi sous un faux exposé. Que le droit de balisage gênant pour le commerce, et qui a été doublé depuis que Sa Majesté en a fait acquisition des seigneurs particuliers, soit réduit à la fixation primitive. Que le gouvernement vienne au secours des îles et côte de Saintonge pourles dépenses de réparation de leurs ports et canaux, vu leur épuisement occasionné par l’interruption de leur commerce et la contribution à laquelle elles ont été assujetties pour les autres canaux du royaume, notamment celui de la Picardie. Que la juridiction des salines et les matières consulaires soient attribuées aux juges des lieux, ui, pourles objets de commerce, se feront assister e deux négociants, vu les inconvénients fâcheux de l’interruption fréquente des communications avec le continent, les dépenses et périls auxquels ils se trouvent exposés. Toute la province réclame ensuite de Votre Majesté : L’abolition du droit de franc-fief, aussi onéreux qu’humiliant pour le tiers-état, à qui il rappelle les malheurs de la féodalité. L’extinction des corvées seigneuriales et des droits de guet et de garde, comme reste de la servitude. L’incessibilité du droit de prélation. (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : Archives de l’Ouest, par M. A. Proust. 43